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EAN : 9782283026137
424 pages
Buchet-Chastel (14/03/2013)
4.33/5   3 notes
Résumé :
Le 10 octobre 1975, Laurence Picq, accompagnée de ses deux filles, rejoint son mari, cadre khmer rouge, à Phnom Penh. À sa descente d'avion, sur un aéroport en ruine et dans une ville évacuée de ses habitants, de nombreuses questions l'assaillent. Le piège vient de se refermer sur elle, mais elle ne le sait pas encore.
Avec courage, dès le départ, elle fait face aux privations, à l'inconfort, à la méfiance et à l'hostilité de ses camarades et des cadres du Pa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Il s'agit dans cet ouvrage de l'unique témoignage d'une survivante Occidentale (en l'occurrence une Française), du Génocide Cambodgien perpétré par les Communistes Khmers Rouges de Pol Pot et de sa clique de Terroristes. de plus, l'auteure est la seule Occidentale survivante à avoir côtoyé les dirigeants Khmers Rouges ; et est donc particulièrement à même de pouvoir analyser ce régime Totalitaire.
Ce Génocide engendra la mort d'environ 1 700 000 Cambodgiens sur une population totale de 7 000 000 d'habitants ; soit l'extermination de 25 % du Peuple Cambodgien, en seulement quatre années entre le 17 avril 1975 et le 6 janvier 1979 !

Les Hauts Responsables du Parti Totalitaire Communiste du « Kampuchéa Démocratique (K.D.) » se sont inspirés (comme tous les Dictateurs Communistes de la planète) de la Révolution Française et plus particulièrement de la période de la Terreur Jacobine entre 1792 et 1794, sous Robespierre.
De même certains dirigeants Khmers Rouges, comme : Pol Pot, Ieng Sary, Ieng Thirith, Hou Yuon, Khieu Samphan, Mey Mann, Thiounn Mumm et Son Sen ont été formés dans la décennie 1950 par le Parti Communiste Français (P.C.F.).
Avant la prise du Pouvoir par un coup d'État, le 17 avril 1975, à Phnom Penh par les Khmers Rouges, Laurence Picq s'était mariée avec un Cambodgien : Sikoeun. Ils eurent deux filles : Narén et Sokha.
Sikoeun travaillait alors avec Ieng Sary, l'un des futurs principaux dirigeants Khmers Rouges.
Les Khmers Rouges étaient bien déterminés, dès leur prise du Pouvoir, à pousser le plus loin possible la délirante et Terroriste Idéologie Totalitaire Communiste de : Marx, Lénine, Trotski, Staline, Mao Zedong, etc.. En effet, tout fut supprimé : l'État, l'argent, la propriété privée, les villes…, et tout ce qui pouvait structurer une Nation et un Peuple. Puis ils décidèrent de rééduquer toute la population et/ou d'exterminer leur propre Peuple. Voici comment ce Génocide commença… (page 28) :
« La prise de Phnom Penh ce 17 avril 1975 était la victoire de toutes les forces d'union nationale : les forces armées, le Front et la population de toutes les classes. C'était autant la victoire des ruraux que des citadins, celle des paysans, des intellectuels et des bourgeois capitalistes, la victoire du clergé, celle de Sihanouk, de ses fidèles et de l'aristocratie. C'était la victoire des rouges, des bleus, des safrans et des blancs. Compte tenu du nombre, elle était davantage la victoire des non-communistes que celle des communistes. Mais dans les minutes qui suivirent la chute de Phnom Penh, les Khmers rouges entrèrent en scène et usurpèrent la victoire. Ils perpétrèrent ni plus ni moins un coup d'État qui n'a jamais dit son nom. Ils fermèrent les aéroports, les ports, les voies fluviales et ferroviaires ainsi que les frontières. Ils coupèrent tous les moyens de communication : téléphone, poste, télévision, radio, presse. Ils mirent en place un état d'urgence. Immédiatement, ils donnèrent l'ordre d'évacuer Phnom Penh et les autres villes. L'opération ne devait durer que quelques jours, disaient-ils. Ils voulaient, disaient-ils encore, protéger la population des bombardements américains : cela était plausible. Mais ce qui était présenté comme une évacuation était, en réalité, une déportation massive. Les citadins n'ont jamais eu le droit ni la possibilité de revenir à Phnom Penh.
La poignée de Khmers rouges qui prenaient le pouvoir ce 17 avril était composée d'illustres inconnus pour la population. Ils proclamèrent la création d' »une société sans riche ni pauvre, sans exploiteur ni exploité ». Ils annoncèrent l'abolition de toute propriété privée et du système monétaire. Ils lancèrent de grands travaux d'aménagement hydraulique en mémoire des temps glorieux d'Angkor. le Cambodge, disaient les Khmers rouges, serait un paradis sur terre. »
Auparavant, Ieng Sary et Sikoeun avaient donc travaillé ensemble en Chine depuis 1971. le 10 octobre 1975, Laurence Picq et ses filles quittèrent Pékin pour regagner Phnom Penh, afin de rejoindre Sikoeun qui, lui, été revenu quelques temps plus tôt. Lorsqu'elle atterrit à Phnom Penh, il n'y avait plus personne. Elle eut l'impression d'arriver sur une planète déserte. Seul un ami de son mari, Sirin, était là pour les accueillir, mais d'une manière extrêmement froide et distante. Laurence Picq fut alors envahie par une bouffée d'angoisse et un très mauvais pressentiment. Dès l'aéroport, c'était l'apocalypse, tout était détruit. le ton de Sirin était martial et directif, énonçant de manière intransigeante et menaçante, une longue liste d'interdits. Son discours était d'une teneur Idéologique invraisemblable.
Il paraissait désormais évident qu'ils étaient devenus les prisonniers de l'Angkar (l' »Organisation » représentant le Pouvoir Totalitaire Khmer Rouge), comme l'était devenu tout le Peuple Cambodgien depuis le 17 avril 1975.

Le régime Totalitaire Khmer Rouge imposa même à tous les citoyens, devenus de fait des prisonniers, de changer de nom. Par exemple Laurence Picq devait désormais s'appeler : Phâl. Et tous les Cambodgiens étaient dorénavant nommés « combattants et combattantes révolutionnaires ».
Même si les conditions de survie de la famille de Laurence Picq étaient extrêmement dures, le fait de travailler pour le Politburo (bureau politique) du Parti Communiste du Kampuchéa des Khmers Rouges, cela rendait leur existence un peu moins insupportable que celle de l'ensemble du Peuple Cambodgien. En effet, Sikoeun travaillait pour le Parti et Laurence Picq faisait partie de l'équipe des membres traducteurs des Khmers Rouges.
Alors qu'avant 1975, Laurence Picq fréquentait les nouveaux Terroristes du régime Communiste Khmer Rouge, comme Ieng Sary ; désormais, ce dernier la méprisait. Elle comprit alors que la seule façon de pouvoir survivre était de feindre d'adhérer à l'Idéologie et de faire, comme les autres, son auto-critique (pages 66 et 67) :
« La seule issue était l'autocritique :
– J'ai dit ces mots sur Angkar (Ieng Sary) respectée sans penser à ce que je disais. L'éducation française que j'ai reçue est très mauvaise. du plus profond de mon coeur, je pense qu'Angkar est héroïque et lumineuse, clairvoyante et prodigieuse, bonne et généreuse. Etc.
L'affaire semblait close, mais nous nous gardions bien de crier victoire : les Khmers rouges ont la rancune tenace. Nous avions appris quelque chose de très important : il fallait plus que jamais tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. »
Dans l'Idéologie Khmère Rouge, le Peuple était scindé en deux : le « Peuple Ancien » et le « Peuple Nouveau » (pages 71, 72, 133 et 134) :
« Table rase, les Khmers rouges la firent au sein de la société et de ses multiples rangs et couches. En lieu et place de l'ancien monde, fut proclamée une société scindée en deux : une société nouvelle et une société ancienne. La société nouvelle était celle qu'ils créaient, et la société ancienne celle d'avant. Jusque-là, les choses tenaient debout. Dans la foulée, le peuple était également scindé en deux : un peuple nouveau et un peuple ancien. À ce niveau, les choses se compliquaient car le peuple nouveau n'allait pas dans la société nouvelle : le peuple nouveau désignait les personnes qui n'avaient pas fait la guerre ni la révolution. le peuple ancien était celui des zones dites « libérées », celui qui était sous le régime d'Angkar. Donc, les personnes qui venaient de la société ancienne étaient le peuple nouveau et les personnes formées à la révolution étaient le peuple ancien et constituaient la société nouvelle.
(…) Pour les Khmers rouges, il y avait l' »ancienne société », celle des villes, d'avant le 17 avril, et la « nouvelle », celle qu'ils créaient avec un régime collectiviste. le peuple était divisé en deux catégories : les « anciens », et les « nouveaux ». le régime, pour ces derniers, était plus dur, car ils devaient endurer l'équivalent de difficultés et de sacrifices que les « anciens » avaient endurés pendant la guerre.
Pour les Khmers rouges, le peuple devenait une grande famille. le Parti s'appropriait tous les enfants. Ieng Sary et sa femme étaient considérés comme les parents de tous. Et cela dura longtemps puisqu'une douzaine d'années après la chute du régime, ils « officièrent comme père et mère », pour reprendre l'expression de l'intéressé, d'un homme âgé de plus de cinquante ans qui se remariait (note n°3 : voir le manuscrit non encore publié de Suong Sikoeun (Itinéraire d'un intellectuel khmer rouge, Paris, Cerf, 2013, à paraître). »
(…) La société khmère rouge était hautement collectivisée, centralisée et militarisée. le mode de restauration illustrait cette disposition. Tous les ustensiles de cuisine étaient réquisitionnés et les repas servis de manière collective. Au nom du centralisme démocratique, le produit du travail était pris par Angkar pour être redistribué ensuite. La collectivisation comprenait non seulement le réfectoire et le travail, mais aussi l'habitat et tous les temps de la vie. La collectivisation induisait l'uniformisation. Tout le monde était, de manière identique, nourri, habillé, logé, éduqué et conditionné, soigné ou non soigné, non rétribué. »
La notion de propriété privée avait été totalement interdite. Qui plus est, non seulement le système monétaire fut détruit, mais le troc fut également interdit. Tout était collectivisé et codifié jusqu'au délire, jusqu'au moindre détail et jusque dans l'intimité même de l'individu, du couple et de la sexualité (pages 73 à 75) :
« La langue khmère rouge rendait compte de la deuxième grande décision, à savoir l'abolition de la propriété privée. Les adjectifs possessifs étaient supprimés radicalement. Plus question de dire « mes affaires » car personne n'avait plus rien à soi. Chacun avait pour soi seulement un vêtement et un change, une petite couverture et une moustiquaire, ce qui n'était pas un luxe. le tout ne dépassant pas le volume d'un sac appelé « ballot » (sorte de petit sac à dos). On travaillait avec la houe d'Angkar. On mangeait dans les assiettes d'Angkar (qui avait confisqué tout le matériel de cuisine et interdisait toute cuisine individuelle), la soupe d'Angkar et rien d'autre, au réfectoire d'Angkar et pas ailleurs, au moment où elle le décidait et pas à un autre moment. On buvait l'eau qu'Angkar faisait bouillir et mettait à disposition, si elle le pouvait.
Tout comme les biens matériels, l'individualité était abolie et dans la foulée, le « je » supprimé et la formule « nous-je » généralisée.

En proclamant un nouveau monde, les Khmers rouges modifiaient les relations interindividuelles, et la langue khmère rouge radiait les formules de politesse fondamentales telles que bonjour, au revoir, merci, pardon et s'il vous plaît.
(…) Un homme et une femme, quel que soit leur âge, ne devaient pas se regarder, même pour se parler, et devaient se tenir à une distance plus qu'honnête. Pas question de se toucher. Même entre mari et femme… entre « famille », comme il était dit. Sinon tombait le verdict d'atteinte aux moeurs. »
De même que la Dictature Khmer Rouge était basée sur le principe du binôme : ami/ennemi, « Révolutionnaire/contre-Révolutionnaire », la vie du Peuple Cambodgien était régie par une liste infinie, aberrante d'interdictions et d'obligations conduisant à la dépersonnalisation de l'individu et finalement à sa déshumanisation !
La domination du Peuple Cambodgien par le Parti Communiste Khmer Rouge était donc totale (pages 98 et 99) :
« – Interdiction de pensée personnelle et obligation de s'en tenir à la pensée unique.
– Interdiction de s'exprimer et obligation de manifester les idées d'Angkar.
– Interdiction de s'abstenir de parler quand Angkar demande qu'on prenne la parole et obligation de s'exprimer avec des mots prouvant une totale adhésion à la pensée unique.
– Interdiction de l'information, avec suppression de toute presse, écrite ou parlée, et obligation de s'imprégner de l'information d'Angkar et de ne penser que par elle.
– Interdiction de circulation et obligation de rester enfermé dans son unité : les voies de communication étant vides et arpentées par l'armée, tout contrevenant était facile à voir et à prendre ; pas de train, pas de voiture, ni d'autre moyen de circulation et de communication.
– Interdiction de communication : pas de courrier, ni de téléphone.
– Interdiction d'avoir une vie personnelle, une vie familiale, une vie de couple et intime, et obligation d'intégrer la vie collectiviste.
– Interdiction d'avoir des besoins personnels et d'y subvenir et obligation de s'en remettre totalement à Angkar qui connaît mieux que l'intéressé ses besoins.
– Interdiction des sentiments personnels et obligation d'obéissance inconditionnelle à Angkar.
– Interdiction de réunion et d'association et obligation de suivi des réunions avec examens publics de conscience.
– Interdiction du passé personnel ou projet de vie personnelle et obligation de devenir prolétaire d'Angkar.
– Interdiction d'avoir une conscience personnelle et obligation de conscience vide.
La liste serait longue.

Le Kampuchéa démocratique était plus qu'une prison, plus qu'un camp de concentration, plus qu'un camp de travail ou un bagne. C'était plus qu'un immense hôpital psychiatrique où la personne enfermée doit être transformée psychologiquement. C'était tout cela et plus que cela. C'était toutes ces institutions à la fois à la taille d'un pays. »
Sikoeun était totalement idéologisé par le régime Khmer Rouge.
Tout était codifié, comme le plus grand Centre d'interrogatoire, de torture, et d'extermination à Phnom Penh, dans l'ancienne école de Tuol Sléng rebaptisée : S-21. B1 était le Ministère des Affaires Étrangères, etc.. Laurence Picq traduisait des textes pour B1.
Puis ce fut le déchirement lorsque Laurence Picq fut séparée de ses filles. En effet, sous le régime Totalitaire Communiste des Khmers Rouges les enfants n'appartenaient plus à leurs parents mais à…, l'Angkar.

L'auteure nous rappelle également que les Khmers Rouges ont siégé à l'O.N.U. (l'Organisation des Nations Unies), et ceci dès le coup d'État en 1975 et encore durant les dix années qui suivirent la fin du régime Khmer Rouge, jusqu'en 1991. Il est incroyable de constater qu'une Organisation mondiale comme l'O.N.U., dont l'impérieuse mission est de protéger les Peuples du monde entier contre la tyrannie, intègre en son sein des régimes et États Dictatoriaux (confer à ce sujet l'excellent ouvrage de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer : « La guerre au nom de l'humanité : Tuer ou laisser mourir »). Ceci relève d'un autre débat, mais on peut tout de même se poser la question de la légitimité de l'O.N.U. ?
De plus, pendant le Génocide Cambodgien, de nombreux pays dont la France, maintinrent des relations diplomatiques avec le régime Khmer Rouge.

Sous prétexte d'Idéologie soi-disant égalitariste, les Khmers Rouges vidèrent donc les villes de leurs habitants. Toute la population fut déportée en masse vers les campagnes (pages 131 et 132) :
« Les Khmers rouges ont proclamé une société sans riche ni pauvre, sans exploiteur ni exploité, une société égalitaire entre la ville et la campagne. La population citadine ayant été déportée, les villes étaient vides. Phnom Penh, la capitale, abritait les dirigeants dans les lieux secrets, quelques ambassades. Seuls une poignée d'administrations, quelques usines, l'hôpital, l'aéroport – avec un vol Phnom Penh-Pékin une fois tous les quinze jours au début puis une fois par semaine, auquel s'ajouta dans les derniers temps l'ouverture d'une ligne Bangkok-Siem Reap -, et l'ancien Institut technologique à la fin du régime étaient en activité. La grande salle philharmonique ouvrait une fois de loin en loin pour les délégations étrangères. le palais restait partiellement occupé par le prince. La cathédrale avait été rasée et la banque réduite à un amas de décombres. Boulevards, rues et places, habitations individuelles et immeubles, marchés et petits commerces, lieux de culte, écoles et lycées, gare, stade, tout était désert et s'imposait comme un spectacle de fin du monde. Les quelques centaines de personnes au début, quelques milliers à la fin, qui vivaient à Phnom Penh étaient enfermées dans leurs unités – ministère, usine ou autre. C'est à Tuol Sléng, plus connu sous le nom de S21, qu'il y eut le plus de monde : plus de douze mille personnes y sont passées pour subir des tortures effroyables et mourir. »
Toujours par « pureté » Idéologique, les médecins et les professionnels de la santé de l' »ancien régime » furent pourchassés et tous…, exterminés. Les Khmers Rouges les remplacèrent par des enfants-médecins âgés de seulement dix à quatorze ans, ne sachant ni lire ni écrire. Ce délirant et effroyable dogmatisme Idéologique contribua également à détériorer encore davantage, la déjà catastrophique situation sanitaire dans le pays, et engendra de nombreux morts…

P.S. : Vous pouvez consulter ce commentaire, dans son intégralité, sur mon blog :
Lien : https://communismetotalitari..
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