Enfant mourant
Tu as vécu en une nuit
les années de toute une vie :
et l’aube lente t’en couronne
comme d’épines. Tu regardes alentour
de tes yeux sages les ombres
inachevées qui tâtonnent :
et tu connais la souffrance du blé renversé dans le tonnerre
et le vide du bétail meurtri.
En mille soirées
tu as rajusté tes longues tresses grises, l’humidité
des journées défleuries t’a oppressée;
ton front s’ouvre
à présent dans un rai de soleil, il s’ouvre
dans le regard d’un homme parfait :
et tu plains ta mère
/traduit de l’italien par Thierry Gillybœuf
Un destin
… Absorbé dans son feu
chaque être humain
s’abandonne à une vie unique.
Mais sur ton allure
lente de fleuve qui ne trouve pas d’embouchure,
la lumière argentée des vies
infinies – des étoiles libres
tremble à présent :
et si aucune porte
ne s’ouvre pour ta fatigue,
si chaque pas
ne te rend que le poids de ton visage,
si te revient
plus que douleur
cette joie de poursuivre seule
dans le clair désert de tes montagnes
tu acceptes à présent
d’être poète
/traduit de l’italien par Thierry Gillybœuf
Le ciel en moi
Toi,
tu étais le ciel en moi,
qui ne m’aimais pas pour ma personne
mais pour cette graine
du bien
qui dormait en moi. (…)
Toi,
tu étais le ciel en moi,
qui ne m’aimais pas
pour ma vie
mais pour l’autre vie qui pouvait se réveiller
en moi.
Toi,
tu étais le ciel en moi
le grand soleil qui transforme
en feuilles transparentes les mottes de terre (…)
Et quand dans les rues – avant
que le soir ne tombe – je me promène
je veux encore
être une fenêtre qui marche,
ouverte, avec son rebord
d’azur qui la comble.
Je veux encore qu’on entende sonner
le tocsin de mon cœur
/traduit de l’italien par Thierry Gillybœuf
Faubourg
Je ressens l’antique douleur
– c’est la terre
qui sous des couches de gel
soulève ses bras noirs –
et j’ai peur
de tes pas crottés, ma chère vie,
qui marches à mes côtés et me conduis
près de vieillards aux longs manteaux,
de garçons
rapides montés sur d’opaques vélos,
de femmes,
qui pressent leurs seins sous leur châle – …
/traduit de l’italien par Thierry Gillybœuf
Au seuil de l’automne
Au seuil de l’automne
dans un crépuscule
muet
tu découvres l’onde du temps
et ta reddition
secrète
comme un vol d’oiseaux
léger
chutant de branche en branche
que leurs ailes ne portent plus
/traduit de l’italien par Thierry Gillybœuf
Accompagnée de Dorothée Hannequin (The Rodeo), Anne Millioud-Gouverneur (violon), Robi & Emilie Dautricourt
1ère partie :
« Je suis un songe et tu me rêves »
(M. Tsvetaïeva)
« Les femmes parlent de nuit. Elles parlent d'infini, d'orage et d'empreinte du vent. Les femmes voyagent en territoire du rêve et parlent de pays où tout serait permis. Il n'y a pas de chronologie, pas de géographie , mais un parcours en liberté à la rencontre des poétesses. On convoque les voix de Tsvetaïeva, Sappho, ou d'Antonia Pozzi, autant d'écrivaines à (re)-découvrir dans un paysage atmosphérique fait de pianos réverbérés et de chorales spectrales.
Accompagnée d'un choeur de musiciennes et du piano, je tenterai de dessiner les contours de cette histoire de la poésie au féminin, dans une traversée des langages poétique, sonore et visuel placée sous le signe du rêve. Premier volet de cette proposition. »
Cleo T.
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