Après
La fée de Westerbork (L'enfance des arbres, 2020), où il évoquait sous la forme d'une narration contée, la vie « solidaire » d'
Etty Hillesum au camp de transit de Westerbork,
Olivier Risser aborde ici la jeune Juive sous un angle plus philosophique ou – disons-le – plus métaphysique autour de la question lancinante du mal (et nous revient ici en tête la fameuse question d'
Adorno sur « comment penser le monde après Auschwitz ».)
Voici donc sous la plume de l'enseignant breton un essai structuré sur le sujet. S'appuyant essentiellement sur
Le Journal et la Correspondance d'
Etty Hillesum, il constate d'abord « le formidable élan vital » de la jeune femme et le démontre au fil des pages. Puis il entend démontrer comment Etty a « agi et pensé en conformité avec sa foi et son amour du prochain ». Olivier en tire des leçons pour lui-même et pour l'humanité entière, truffant son essai d'exhortations à faire le bien, à enraciner sa foi dans l'humanité.
Pour « questionner la présence du mal dans ce monde », l'auteur trouve une « âme-soeur » à Etty. Elle s'appelle
Simone Weil (1909-1943), « peut-être un peu moins chaleureuse, certainement plus impressionnante de prime abord, plus cérébrale sans doute, mais tellement inspirante » et qui se fit ouvrière de décembre 1934 à août 1935 pour partager
la condition ouvrière.
Comment penser le mal ?
Etty Hillesum apporte une possible réponse, « sans doute la meilleure, sans doute la plus courageuse : panser le mal », estime
Olivier Risser. Oui « Panser le mal », une volonté qu'exprimera aussi sans relâche
Simone Weil. le mal, par ailleurs, encline l'homme « à remettre en cause l'existence de Dieu ». Etty renverse le problème. Il s'agit de se tourner vers ce « Dieu fragile qui a besoin de nous » et qui pose la question à l'homme : « Que fais-tu de la liberté que je t'ai offerte ».
Cet essai d'Oliver Risser est riche de notations qui nous révèlent une
Etty Hillesum profondément incarnée. Cette jeune femme, qui se donne corps et âme aux autres, a de forts appétits sexuels. Elle prit même un jour la décision d'interrompre une grossesse et parlera de « l'enfant non-né » à qui elle veut « épargner d'entrer dans cette vallée de larmes ». C'est la même femme qui pouvait ailleurs écrire que « la vie est grande, bonne, passionnante, éternelle », révélant ainsi, comme tout un chacun, ses propres contradictions.
Olivier Risser en profite pour rappeler ces mots de
Simone Weil dans
La Pesanteur et la grâce : « La contradiction est l'épreuve de la réalité ».
Pierre TANGUY
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