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Valérie Dariot (Traducteur)
EAN : 9782882502506
571 pages
Noir sur blanc (07/04/2011)
3.6/5   5 notes
Résumé :
Une Indienne toquée de la Chine, un moine chinois obsédé par l'Inde. Lui et moi souffrions de la même schizophrénie. Il me semblait donc logique que nous suivions la même voie. À la faveur de cette quête, je fouillerais les vestiges du passé, je remonterais mille quatre cents ans en arrière et j'exhumerais les débris de son périple. Sur sa route entre la Chine et l'Inde, peut-être trouverais-je une histoire, un passé et un présent, que je pourrais m'approprier. Où é... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je viens d'accomplir un long voyage dont je remercie Babelio et Masse critique et les éditions Noir sur Blanc. J'ai pris mon temps et en ai interrompu la lecture en cours de route par celle de textes plus courts car, si ce récit est passionnant, il est aussi très dense et s'étire sur 550 pages. 

A la recherche d'elle-même, Mishi Saran se trouve conduite vers un moine bouddhiste du VIIe siècle Xuanzang qui vivait à l'époque de la dynastie chinoise des Tang sous l'empereur T'ai Tsung. Ce moine va entreprendre, par goût de l'aventure et pour étudier et ramener des textes bouddhiques, un périple de 6000 kilomètres qui va lui faire quitter son pays natal, traverser des déserts et de multiples petits royaumes rivaux, se joindre à des caravanes de marchands, gravir «les montagnes célestes» du Tian Shan, risquer plusieurs fois sa vie, se faire dévaliser par des brigands et enfin passer dix années en Inde à rechercher les traces du bouddha et recueillir des textes sacrés, avant de rentrer, au bout de dix huit ans, dans son pays. 

Mishi Saran, tout au long de sa quête, alterne les extraits des carnets de voyage de XuanZang et de la biographie écrite par son disciple Hui li avec le récit de ses propres aventures et réflexions. Cela offre un récit plein d'érudition où elle fait des retours sur l'histoire mouvementée de toutes les régions traversées, les différents peuples qui s'y sont implantés au cours du temps, leurs croyances ancestrales sur lesquelles sont venues se greffer celles des marchands qui hantent la route de la soie et des peuples envahisseurs (le zoroastrisme, le chamanisme réapparaissent souvent sous le bouddhisme).
Mais c'est aussi un récit plein de vie car, à l'image de Xuanzang, elle nous fait part de toutes les anecdotes tragico-comiques qui jalonnent sa route.
J'ai une préférence pour toute la partie qui suit la route de la soie. Qui n'a pas rêver à l'évocation et la magie que font naître les mots de caravansérails, de la Sogdiane («Le mot sogdien pour le marché était souk. J'avais toujours pensé qu'il venait de l'arabe, alors que les arabes l'avaient probablement importé d'Asie centrale»), de Boukhara, de Tachkent, Samarcande. La vallée du Ferghana Kirghize où, près du lac Issy Kul, les nomades chassent à l'aigle, les bazars où se pressent les étals de fruits, les brochettes de viande de mouton grillée, les galettes de pain frais etc.. 



Pourtant la guerre est proche et les frontières ne se laissent pas franchir aisément. Sans aide diplomatique ou amicale Mishi Saran n'aurait pu suivre les traces de son moine pélerin. 

Elle devra d'ailleurs laisser provisoirement de côté le passage en Afghanistan.
"L'Amou-Daria, le «fleuve tumultueux». J'avais tant désiré me plonger dans ses eaux, regarder le soleil aplanir ses bords, mais il coulait derrière la barrière électrifiée marquant la frontière avec l'Afghanistan. "
Au temps de Xuanzang il y avait une multitude de petits royaumes rivaux mais leur traversée semblait plus aisée. On pouvait se dissimuler plus aisément que de nos jours où les moyens de contrôle sont plus élaborés et la suspicion vis à vis de l'étranger exacerbée par les guerres entre états. 

Au Cachemire autre zone à risques, dans la partie indienne, et ensuite au Pakistan Mishi Saran est plus touchante car elle semble renouer avec ses racines, se réapproprier son identité et retrouve une sérénité qu'elle avait perdue (une femme lui avait dit un jour : «Tu vas d'homme en homme comme on cherche un pays»). Par contre, en Inde, les traces de Xuanzang sont plus diluées et lui-même dans ses carnets se dit déçu d'aboutir parfois à des ruines là où il croyait arriver dans des monastères bouddhistes florissants.
Elle parviendra grâce à sa ténacité à pénétrer en Afghanistan par la passe de Khyber en se servant de son ancienne carte de journaliste mais l'état dans lequel est ce pays la bouleverse et elle s'y perd et perd de vue Xuanzang. 

«Quelque part dans les hauteurs d'Afghanistan, dans mes escapades à travers Kaboul, j'avais perdu ma foi en l'humanité. Je n'étais plus que cynisme, je soupçonnais des intentions cachées partout, je doutais de toute parole imprimée, de toute déclaration officielle. J'avais été dépossédée de tout sentiment de sécurité et mon esprit s'était comme ramolli.»

Après avoir repris le cours normal de sa vie elle nous dit :
«Mon voyage sur les traces de Xuanzang continuait de vivre en moi, tel un vol de lucioles projetant sa lumière évanescente à l'intérieur de ma tête....
Dans l'ombre du moine, j'avais appris une histoire nécessaire. Je me sentais ancrée dans des aventures qui se déroulaient sur de vastes territoires que j'avais parcourus et j'avais conscience d'en avoir à peine entamé la surface...
Quand je me remémorais les leçons de Xuanzang, j'en arrivais à me demander si je n'avais pas tout imaginé.»
Je la remercie de m'avoir fait connaître ce «sacré» moine et de m'avoir fait partager son rêve fou à sa recherche.
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Chen Yi, plus tard connu sous le nom de Xuanzang, naquit en 600 à Luoyang (province du Henan). Il est le 4e enfant d'une famille chinoise et, à sa naissance, apparut un phénix qui « fit pleuvoir une lumière d'or » (page 15). En 627, devenu moine bouddhiste et passionné par l'Inde, il partit en voyage puis passa 10 ans en Inde. Il revint en Chine 18 ans plus tard (en 645) avec 657 sûtras qu'il traduisit – pendant les 20 dernières années de sa vie – du sanscrit au chinois. « Les carnets de voyage de Xuanzang nous offrent un descriptif très complet de la Chine occidentale, de l'Asie centrale, de l'Afghanistan, du Gandhara et de l'Inde au VIIe siècle, dans la période qui précéda l'islamisation de ces régions. » (page 12).

« L'Inde l'avait imbibé, transformé. En la quittant, il avait cru qu'il perdait la faculté de respirer. Il était suspendu entre deux mondes, né d'un lieu, mais imprégné d'autres espaces. Il songea qu'il était un étranger pour le reste de ses jours. » (page 19).



Près de 1400 ans après, Mishi Saran, exilée de son Inde natale et qui se cherche en tant que femme de 30 ans, découvre l'histoire de Xuanzang (dont la biographie a été écrite par son disciple, le moine Huili). « Une Indienne toquée de la Chine, une moine chinois obsédé par l'Inde. Lui et moi souffrions de la même schizophrénie. Il me semblait donc logique que nous suivions la même voie. » (page 20). Elle décide de partir sur les traces du moine pèlerin et de redécouvrir son pays, l'Inde. Elle rencontre même un descendant de Xuanzang : un homme de la 48e génération de Chen ! (page 30).

Mais tout ne sera pas si facile : « Mes hôtes m'ont expliqué que les royaumes, à l'instar des rivières, avaient grossi, rapetissé ou changé de contour après que le moine fut parti vers l'ouest. Des cités s'étaient effondrées, ne laissant que des ruines. […] affronter les déserts […], d'anciennes républiques d'une Union soviétique disloquée, des nations musulmanes en guerre, un royaume himalayen […]. » (page 22).

Eh oui, au cours des siècles, des régions ont « changé de mains », des villes ont été vandalisées et détruites par des conquérants ou pendant la Révolution culturelle chinoise.

[...]
Lien : http://laculturesepartage.ov..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Les rues d'Islamabad regorgeaient de grosses Toyota blanches, décorées de l'emblème bleu des Nations Unies, avec antennes souples dépassant du capot. Les travailleurs humanitaires brassaient d'épais rapports sur papier glacé avec photos esthétisantes de la misère du monde. En bas de page figurait l'inévitable requête, glissée là incidemment, presque insidieusement, à des donateurs, exigeant d'eux toujours plus d'argent, à défaut de quoi les ventres creux mourraient et les blessés succomberaient. Ce discours sur la famine et la mort semblait déplacé, quand il était prononcé dans l'atmosphère d'aisance matérielle qui transpirait de ces bureaux occupés par des nantis.
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Les petites villes chinoises sont enveloppées d'un manteau de sommeil. Leurs rues sont calmes, car beaucoup de gens s'y déplacent à vélo. Assis sur de petits tabourets devant leurs échoppes ou à la terrasse des restaurants, les habitants de Luoyang savouraient le soir d'été. Leur curiosité grandissait comme un besoin physique.
"De quel pays viens-tu ," m'apostrophaient-ils.
C'est drôle, c'est exactement la question que je me pose sans cesse, aurais-je voulu leur répondre.
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Une Indienne toquée de la Chine, un moine chinois obsédé par l’Inde. Lui et moi souffrions de la même schizophrénie. Il me semblait donc logique que nous suivions la même voie. À la faveur de cette quête, je fouillerais les vestiges du passé, je remonterais mille quatre cents ans en arrière et j’exhumerais les débris de son périple. Sur sa route entre la Chine et l’Inde, peut-être trouverais-je une histoire, un passé et un présent, que je pourrais m’approprier. Où était le vrai ? Où était le faux ? Quel était le lien avec moi ? L’histoire d’une femme ne se résume-t-elle pas à sa vérité telle qu’elle choisit de la raconter ?
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Dans les rues (de Koutcha), les carrioles tirées par des ânes n'étaient pas destinées aux touristes, mais aux Ouîgours eux-mêmes. Comme l'étaient le vieux marché, les rues et les melons. Les Ouîgours occupaient cette terre depuis plusieurs centaines d'années, ils y étaient chez eux. Cet endroit était leur propriété de plein droit. C'était dans l'air, et chacun sentait instinctivement que les Hans étaient ici les étrangers.
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Mes hôtes m'ont expliqué que les royaumes, à l'instar des rivières, avaient grossi, rapetissé ou changé de contour après que le moine fut parti vers l'ouest. Des cités s'étaient effondrées, ne laissant que des ruines. […] affronter les déserts […], d'anciennes républiques d'une Union soviétique disloquée, des nations musulmanes en guerre, un royaume himalayen […].
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