Par une nuit d'orage dans l'arrière-pays niçois, deux jumelles naquirent difficilement, laissant exsangue une maman qui avait déjà connu onze mois de grossesse éprouvante, malmenée par les cris et le coups que les bébés se portaient déjà. Félicité et Agonie, on ne peut pas donner de prénoms plus antagonistes à deux enfants, et cette différence perdurera toute leur enfance dans la bergerie de Bégomas, dans la vallée des Merveilles : Félicité fut choyée par leur mère Carmine, malgré sa capacité à voir et à parler aux fantômes, tandis qu'Agonie, avec ses dons de sorcière, et ses phalènes noirs qui lui sortaient de la bouche à chaque mot, faisant dépérir tout ce qu'ils touchaient, ou ses plantes carnivores à chaque crachat, était muselée et reléguée dans l'étable, pour ne pas provoquer la colère de Carmine. Une colère capable de déclencher la foudre et la pluie… Drôle de famille…
Et quand Carmine vint à mourir brutalement, sans avoir pu prononcer son dernier message, c'est une montagne de secrets qui se dessine : Qui était Carmine ? Que voulait-elle dire ? Pourquoi ces talents dans la famille ?
Félicité partira en quête de ces réponses, aidée de sa soeur et de ses étrange-thés capable de faire parler les fantômes. Cela sera-t-il l'occasion de se réconcilier avec Agonie, ou bien de creuser encore plus la différence qui les oppose ?
Chris Vuklisevic nous propose un roman aux allures de conte passionnant, qui met en scène une famille pas comme les autres, dans une atmosphère de salon de thé hanté. À l'exception de Nice et de l'arrière-pays niçois, décrits avec une tendresse infinie, rien de crédible — mais c'est sa qualité principale — dans cette histoire qui fait la part belle à l'occulte, à la sorcellerie, au mystère, mais qui promeut également de belles valeurs : l'important n'est-il pas d'assumer sa véritable identité, aussi dur cela soit-il, et encore plus quand on n'a pas l'amour d'une mère ?
J'ai beaucoup aimé ce roman très original, écrit dans une langue poétique magnifique, inventive, parfois drôle, qui met en scène deux soeurs passées à côté de leur enfance, marquées par une mère que j'ai trouvée toxique et étouffante, et qui rêvent en secret de pouvoir se retrouver, parties dans une quête qui leur fera traverser bien des frontières, géographiques, humaines, émotionnelles. J'ai été envoûtée par cette atmosphère de joyeux funèbre, qui m'a fait penser parfois aux dessins de
Tim Burton, et par ces deux soeurs pétries de leur certitudes, qui leur a fait plus de mal que de bien, surtout pour Félicité, et la remise en cause qu'elle fera, aidée en cela par son amie théilogue incroyable, Marine.
Enfin, j'ai aimé ce roman pour des raisons plus personnelles : il prend place dans la vallée des Merveilles, dans les hauteurs de Nice, la région de mon père, où j'ai passé un certain nombre de mes vacances, et il cite même le tout petit village familial ! J'ai donc été immédiatement transportée dans le décor du roman, auquel j'ai superposé mes propres souvenirs, dans une expérience virtuelle assez déroutante, et unique.
Mais ce roman parlera à tout le monde, même ceux qui n'ont aucun lien avec la Côte d'Azur. Si vous aimez les histoires envoûtantes, le thé et les fantômes, ce roman est pour vous !