Anticipations ou De l'influence du progrès mécanique et scientifique, sur la vie et la pensée humaines.

L'année suivante, HG Wells commence, mois après mois, dans la "Fortnightly Review", une série de longs articles qu'il appelle "Anticipations".
Ce n'est plus de la fiction ; ce n'est plus de l'avenir romancé. L'auteur ne fait plus appel au merveilleux scientifique. Il renonce à ses vertigineuses prophéties.
Crânement, il s'en prend au présent pour en déduire le futur immédiat, avec quelques envols vers des temps moins prochains. Les questions les plus simples et les problèmes les plus complexes, les préoccupations d'ordre intellectuel et les réalisations pratiques, il aborde tout.
Avec un esprit critique singulièrement pénétrant, il examine les données que l'actualité lui fournit et il établit ses pronostics : ce à quoi on est parvenu la veille lui permet de discerner ce à quoi on parviendra le lendemain, ou dans dix, vingt ou cinquante ans.
D'après le bilan du siècle terminé, il suppute le budget du siècle qui commence. Aujourd'hui, trente ans se sont écoulés, et sa clairvoyance fut si lucide, si sagace, que ses prédictions ne cessent de se réaliser l'une après l'autre.
Chaque tranche mensuelle de ces "Anticipations" était attendue avec impatience par le public, tandis que la presse se livrait à des discussions passionnées sur la précédente.
Dès que les douze articles paraissent en volume, le débat s'étend et s'élève ; des polémiques surgissent, des controverses s'enchevêtrent dans la presse populaire comme dans les plus graves quotidiens...
((extrait de la préface de "Pages choisies de H.G. Wells" - signée Henry D Davray et inséré dans l'édition publiée chez "Albin Michel" en 1931)

En effet, si nous parcourons "Anticipations", nous constatons qu'en ce temps où l'automobile marchait péniblement à trente kilomètres à l'heure, sans aucune certitude de jamais atteindre son but, Wells annonçait le camion à moteur, la lutte de ce camion avec le chemin de fer, son triomphe probable. "En second lieu, dit-il, et parallèlement au camion automobile, la voiture automobile privée prendra un grand essor. Un jour, une automobile sera en état de fournir un trajet quotidien de cinq-cents kilomètres ; on n'aura à changer de rien, si ce n'est de chauffeur.
[...]
Il a prévu l'autorail, l'autostrade : " Les compagnies d'omnibus automobiles, en concurrence avec les lignes suburbaines de chemin de fer, se trouveront gênées sur les routes actuelles, trop étroites.
[...]
Enfin le chapitre sur la guerre est l'un des plus étonnants. Wells imaginait le rôle de l'avion qui à ce moment n'avait même pas volé....
(extrait de "Magiciens et logiciens" d'André Maurois, paru chez "Grasset" en 1935)

Enfin Wells reprend toutes ses idées sur l'avenir, sous une forme plus didactique, dans un livre qui a pour titre : "Anticipations" ou "De l'influence du progrès mécanique et scientifique sur la vie et la pensée humaine".
Livre remarquable, car il a été publié en 1901 et contient sur l'avenir du monde des prophéties dont beaucoup se sont réalisées.
Au moment ou il parut, un critique anglais déclara que le gouvernement britannique avait le devoir de subventionner Mr Wells pour qu'il pût continuer à prophétiser et qu'il devrait exister un prophète-lauréat comme il y a un poète-lauréat....
(extrait de "Magiciens et logiciens" d'André Maurois, publié chez "Grasset" en 1935)