Un homme averti en vaut deux

Ce livre est l'histoire des actes et des paroles d'Edward Albert Tewler, de son point de vue et de son univers tout entier dont il n'est qu'une des nombreuses silhouettes.
Ce récit est raconté par Herbert Georges Wells. Il n'est pas un ouvrage merveilleux, ni d'anticipation. Il n'est pas constitué de cette science-fiction moderne dont Wells a posé les bases avec quelques titres formidables.
"Un homme averti en vaut deux" n'est pas un essai, ni un ouvrage scientifique, ni un recueil de nouvelles.
C'est un ouvrage de littérature, l'histoire d'un homme.
Edward Albert Tewler naquit à une date de si bon augure que quand la guerre mondiale de 1914/1918 éclata, il était encore de quatre ans trop jeune pour y prendre une part active.
Un petit frère ou une petite soeur furent totalement éliminés du monde des possibilités par la mort inattendue de son père, écrasé par un omnibus, lorsqu'il avait quatre ans.
Il fut choyé et protégé excessivement par sa mère qui le prévint du contact des chiens, enragés ou non, des chats dont les griffes se révèlent être des épingles empoisonnées et surtout des gens qui se seraient placés entre elle et son précieux trésor.
Elle mourut quand il avait treize ans et Mr Myame, directeur d'un externat privé, devint son tuteur et unique exécuteur testamentaire jusqu'à ses 21 ans.
A cet âge, le jeune homme entra au Collège Impérial des Sciences Commerciales et prit pension à la maison Dobber avec sous le bras une malle en fer-blanc, une batte de cricket et un pardessus.
Devenu un étudiant éternel, il lui arriva une chose merveilleuse. Il hérita d'un capital évalué aux environs de 9 à 10000 livres.....
En flânant, tout au long de l'existence de son personnage, H.G. Wells veut illustrer de manière magistrale la citation de Shakespeare extraite de "Comme il vous plaira" :
- "Le monde entier est une scène
et tous les hommes et femmes simplement des acteurs.
Ils ont leurs sorties et leurs entrées ;
et un seul homme en son temps joue de nombreux rôles,
et ses actes sont les sept âges".
Wells en profite pour nous parler, entre autres, du monde à réinventer, de Dickens, de la langue française et de sa littérature, du cinéma muet. Il cite Orwell qu'il présente comme un écrivain Trotskiste anglais. Il évoque la science, les contradictions de la Bible et déclare, péremptoirement, que vouloir gagner sa vie est peut-être une tendance féodale.
Il nous charme encore de bien d'autres digressions.
Le talent de l'auteur opère sa magie habituelle. le livre est passionnant.