Pourquoi suis-je ici et pourquoi...pas là ?
Quand commença le temps et où finit l'espace ?
La vie sous le soleil n'est-elle pas...qu'un rêve ?
Ce que je vois, entends et sens, n'est-ce pas... simplement l'apparence d'un monde devant le monde ?
Le mal existe-t-il vraiment et des gens qui sont vraiment les mauvais ?
Comment se fait-il que moi qui suis mois, avant de devenir, je n'étais pas, et qu'un jour moi...qui suis moi, je ne serai plus ce moi que je suis ?
Je ne pourrais pas dire qui je suis. Je n'en ai pas la moindre idée. Je suis quelqu'un sans origine, sans histoire, sans pays et j'y tiens. Je suis là, je suis libre, je peux tout m'imaginer. Tous est possible. Je n'ai qu'à lever les yeux et je redeviens le monde.
Voix d'Homer: Raconte, Muse, le conteur, l'enfantin, l'antique, dérivé au bord du monde et fais qu'en lui se reconnaisse chaque homme. Avec le temps ceux qui m'écoutaient sont devenus mes lecteurs, ils ne sont plus assis en cercle, mais à part soi, et l'un ne sait rien de l'autre. Je suis un vieillard à la voix cassée, mais le récit s'élève encore des profondeurs et la bouche entr'ouverte
répète, avec force et évidence, une liturgie où personne n'a besoin d'être initié au sens des mots et des phrases...
Cette approche du film rappelle ce que Wim Wenders disait en 1982 : « Je rejette complètement les histoires, parce que pour moi elles n’apportent que des mensonges, rien que des mensonges et le plus grand mensonge est de mettre de la cohérence là où il n’y en a pas. Pourtant, le besoin que nous éprouvons pour ces mensonges est tellement fort qu’il est inutile de les combattre et de mettre ensemble une séquence d’images sans une histoire – sans le mensonge d’une histoire. Les histoires sont impossibles, mais il est impossible de vivre sans elles. » Thomson et Bordwell identifient cette opposition comme reposant sur une lutte entre le besoin narratif et cette recherche d’une révélation visuelle instantanée et immédiate. Ce n’est d’ailleurs pas surprenant que le film s’achève sur une dédicace à « Yasujiro, François et Andreï » : Ozu, Truffaut et Tarkovski ayant su, selon Wenders, réconcilier le narratif avec une beauté pictoriale.
Pourquoi tous ne voient-ils pas dès l'enfance les passages, portes et interstices, en bas sur terre et en haut au ciel ?
Si chacun les voyait... il y aurait une histoire sans meurtre ni guerre.
Découvrez l'entretien de Peter Handke, prix Nobel de littérature 2019, consacré au volume Quarto, "Les Cabanes du narrateur. Oeuvres choisies".
Depuis cinquante ans, Peter Handke bâtit une « oeuvre influente qui explore les périphéries et la spécificité de l'expérience humaine ». Embrassant toutes les formes de la littérature, elle présente comme constante une fidélité à ce qu'il est, c'est-à-dire un homme de lettres, un promeneur dont la création ne peut prendre forme que grâce à la distance propice, paradoxalement, à une plongée dans l'intériorité des personnages, à la description imagée et vivante de la nature, à l'attention au quotidien.
Pierre angulaire du patrimoine littéraire d'Europe centrale, servie par un style tranchant et unique, cette écriture se définit par le besoin de raconter — faux départs, difficiles retours, voyages, etc. — la recherche d'une propre histoire, de la propre biographie de l'auteur qui se fond dans ses livres : « Longtemps, la littérature a été pour moi le moyen, si ce n'est d'y voir clair en moi, d'y voir tout de même plus clair. Elle m'a aidé à reconnaître que j'étais là, que j'étais au monde. »
Cette édition Quarto propose au lecteur de suivre le cheminement de l'écrivain à travers un choix qui comprend des récits qui l'ont porté sur le devant de la scène littéraire dans les années 1970-1980 comme d'autres textes, plus contemporains, imprégnés des paysages d'Île-de-France, et reflets de son écriture aujourd'hui. Et, le temps d'une lecture, de trouver refuge dans l'une de ses cabanes.
En savoir plus sur l'ouvrage : http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Quarto/Les-Cabanes-du-narrateur
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