Un thriller intense à la plume sensible, élégante et étonnamment mature :
La Fille d'Encre et de Lumière va cartonner, c'est certain.
Son autrice, Claudie O.Wetterwald, est la gagnante du premier concours d'écriture des éditions du Gros Caillou. Pour un tout premier roman, c'est la grande classe!
Alise travaille à Londres où elle a réussi à se stabiliser après un parcours d'errance, de toxicomanie et de prostitution. Nous la trouvons donc en pleine forme : elle a trouvé sa voie (le tatouage) , l'amour (Mia, son associée) et un embryon de vie sociale. Patatras, tout ça est remis en question par un appel de sa mère l'informant de la disparition de ses neveux. Ce sont les enfants de sa soeur jumelle Anna, qui, elle, a disparu il y a trois ans. Alise a été abandonnée par sa mère, elle n'avait que 11 ans, son père venait de mourir...On l'a confiée à une tante à Birmingham, elle n'a plus jamais eu de nouvelles...Alise rapplique dare-dare en Normandie pour filer un coup de main à cette curieuse famille re-décomposée...Sa mère est horrible, son beau-frère attirant etc...Damned, mais que s'est-il passé ?
L'ambiance de ce vrai-faux thriller est un savant dosage des premiers Lévy (Marc), de Daphné du Maurier ( clair-obscur, fantômes, non-dits), d'
Emily Brontë avec une tonalité résolument moderne (genre
Claire Favan ou
Jérôme Loubry). C'est aussi un hommage à
Lewis Carroll, ici très référencé.
Le style est fluide, décomplexé, agréable.
L'intrigue joue la partition de la gémellité avec beaucoup d'audace : manipulation identitaire, schizophrénie paranoïde, Anna+Alise=Analyse, spécularité à tous les étages. C'est plutôt réussi même au milieu des zones de confusion qui réussissent parfaitement à piéger le lecteur. Car confusion il y a, c'est même le fin-fond de l'affaire.
Une première partie pour Alise, la supposée sournoise.
Une deuxième partie pour Anna, la supposée candide
Une troisième partie pour résoudre une énigme convaincante qui nous tourneboule juste comme il faut.
Juste un bémol: ce polar anglo-normand est parfois un peu bavard, un poil trop long ...
Ne boudons pas notre plaisir : la couverture est magnifique avec un profil féminin troublant en arrière plan et en premier plan la Dame d'un échiquier (
Alice, de l'autre coté du miroir) , noire et violet profond.
Un immense merci aux jeunes et très prometteuses éditions du Gros Caillou (et à Sigoléne en particulier)
Merci à Babelio pour cette Masse Critique privilégiée