AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782072790461
272 pages
Gallimard (10/10/2019)
3/5   6 notes
Résumé :
Ce saisissant recueil entremêle avec justesse l'intime, l'historique et le politique. John Edgar Wideman ravive les souvenirs de l'Amérique, ses plaies ouvertes, le feu dévorant du deuil, de la violence et de l'injustice. Il y parle d'amour, de mort, de lutte, de race, de vengeance et d'identité, questionne la relation inapaisée des Noirs et des Blancs et nous entraîne dans un voyage à travers le temps, l'espace et les arts, jusqu'à toucher le coeur même de l'âme am... >Voir plus
Que lire après Mémoires d'AmériqueVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Si la littérature permet de mettre en mots la seule question qui vaille, celle de l'existence humaine, alors les mots de John Edgar Wideman, incontestablement répondent à ce défi.
Avec des histoires courtes, dans un rythme effréné, sans respiration, sans reprendre souffle, pour dire la colère d'une vie déclinée dans l'écho d'autres vies, celles qui tissent la culture afro-américaine aux Etats Unis, mêlée à jamais à celle de l'Empire, dans le triomphe d'une autre couleur.
"Trous Noirs, Espaces Blancs.Trous Blancs, Espaces Noirs. Quelle différence"
John Edgar Wideman, dont le fils vit encore en prison, dont le frère a passé quarante ans derrière les barreaux, nous livre une écriture écorchée, hallucinée, dans un va et vient où se mêlent le récit de soi, le souvenir des autres, la fiction et l'histoire. Le traitement du temps se joue de notre bonne vieille temporalité, comment ne pas faire rappel plus cinglant, à des siècles d'esclavages, qui n'en finissent pas de durer sous d'autres formes.
Ainsi transforme t-il en siècles ces dernières instants avant de sauter du pont de Williamsburg, ainsi évoque t-il dans d'incroyables minutes, sa mère retenant le temps pour conjurer la malédiction du 13 et faire naître son fils après les coups de minuit. Ainsi se joue t-il aussi des formes, les petits morceaux des collages de Romare Bearden , ne prennent-ils pas plus de place que le tableau tout entier?C'est dire sans détours la place que peuvent occuper dans la saga américaine, tous ceux qui ont fracassé leurs vies de noirs américains dans le passé commun: Emmet Till, Nat Turner, John Brown devenu noir...
Je garde du livre, la musique de Sonny Rollins et le cri lancé par l'écrivain à son étudiante (enseigner l'écriture) :
"Prenez le risque de laisser cette jeune femme faire ce que vous ne feriez jamais...Libérez vous, sortez du droit chemin hors des limites de l'histoire" : Des lignes-manifeste, sur une leçon de littérature qui abolit les frontières entre la fiction, le réel, et L Histoire.
Bravo.
Commenter  J’apprécie          40
John Edgar Wideman, né en 1941 à Washington, est un écrivain Afro-américain. Il passe son enfance à Homewood, un des ghettos noirs de Pittsburgh, en Pennsylvanie, où sa famille est installée depuis plusieurs générations mais juste avant qu'il n'entre au lycée, ses parents déménagent dans un quartier blanc, dans l'espoir de garantir à leurs enfants une meilleure éducation scolaire. Il se révèlera un excellent élève et un très bon joueur de basket-ball ce qui lui ouvre les portes de l'université. En 1963, il est le deuxième Afro-Américain à obtenir la prestigieuse bourse Rhodes pour l'Université d'Oxford, grâce à laquelle il part étudier deux ans à Oxford en Angleterre. Depuis un premier roman en 1967, il est aujourd'hui considéré comme un des grands écrivains américains contemporains et son oeuvre a été couronnée de plusieurs prix prestigieux.
Mémoires d'Amérique, paru à l'automne, est un recueil de vingt et une nouvelles de tailles diverses, la plus courte ne fait que quelques lignes (Bunny & Clive), la plus longue plus de trente pages (Le Pont de Williamsburg).
Toutes ces nouvelles sont des variantes autour d'un même thème, le sort réservé aux Noirs dans son pays, d'hier à aujourd'hui en s'appuyant sur l'Histoire ou par le biais de faits divers. Personnages fictifs ou non, références autobiographiques, se mêlent en situations véridiques ou inventées, ici est évoqué Nat Turner, esclave afro-américain pendu en 1831 pour avoir mené une révolte en Virginie (Nat Turner se confesse) ; là, l'auteur imagine un dialogue entre John Brown, pendu en 1859, un abolitionniste qui en appela à l'insurrection armée pour abolir l'esclavage et Frederick Douglass, né esclave, qui réussit à s'instruire et s'enfuir, devenant un orateur abolitionniste, un éditeur et fonctionnaire américain (JB & FD).
S'il y a un fil rouge, les textes restent néanmoins très éclectiques et l'écriture se plait à marier les styles ; John Edgar Wideman enrichissant son texte de références musicales nommément citées (Jazz, blues, hip-hop) voire concrètement évoquées par son écriture même, scandant son propos en phrases courtes et sèches (Neige).
Un écrivain qui ne manque pas de talent, un livre de grande littérature par la forme comme pour le fond. Ca saute aux yeux du premier lecteur venu. Mais….. désolé, globalement, j'ai trouvé cela assez ennuyeux.
Commenter  J’apprécie          00
Ce livre est présenté comme un recueil de nouvelles et encensé par la critique littéraire parisienne. Je suis dubitative. Tout d'abord je ne considère pas cet ouvrage comme un recueil de nouvelles, il y a des réflexions sur la condition des noirs en Amérique à travers l'histoire et jusqu'à nos jours, il y a des réflexions sur les états-d 'âmes de l'auteur après le décès de certains de ses proches, il y a de la fiction à travers des chapitres très courts, mais jamais traité comme une nouvelle en fait. Ce sont principalement des réflexions basées sur sa vie, et celle de sa famille. Son père a tué un de ses voisins, son oncle et son fils croupissent en prison.
C'est en effet très bien écrit, pas toujours intéressant, chacun de ses courts récits/réflexions tournent autour de la condition des afro-américains, ils sont souvent autobiographiques. Les Etats-Unis ne sont pas vraiment sortis de la discrimination dont le bras armé est la police. Qu'il est particulièrement difficile de s'en sortir quand on est issu de cette communauté dans ce pays qu'il faut avaler pas mal de couleuvres pour être comme l'auteur, professeur d'Université.
J'ai décroché à la moitié du livre, pourtant j'ai lu en diagonale chacune des « nouvelles ». Ce que j'en ressors, c'est que l'auteur voit la vie uniquement sous le prisme de sa couleur de peau et des déterminismes dans lesquels les dominants l'ont cantonné.
Commenter  J’apprécie          10
L'extraordinaire diversité des nouvelles - vraiment des nouvelles ? - rassemblées dans ce recueil peut laisser perplexe à première lecture. Il croise les époques entre le XIXe et aujourd'hui. Il fait parler des personnages historiques, comme le dialogue imaginaire entre John Brown et Frederick Douglass ou les confessions de Nat Turner. D'autres textes reviennent sur son histoire familiale, son thème récurrent, et particulièrement celle de son père qui as tué un autre homme. A d'autres moment, il parle d'art avec la rencontre de Jean Michel Basquiat et Romare Bearden, deux artistes de génération différente mais morts tous les deux en 1988. Il écrit aussi un beau texte sur le film Precious. Un autre encore est adressé à une de ses étudiantes en littérature.
Un des plus beaux, selon moi, s'intitule ''le pont de Williamsburg"', les confessions à la première personne d'un homme qui s'apprête à sauter de ce pont marqué par le souvenir de Sonny Rollins

Et d'autres encore, une infinité de figures qui sont les mémoires collectives et individuelles de l'Amérique qui n'a pas complètement aboli l'esclavage, comme il l'écrit dans sa note liminaire au président des États-Unis (Trump à ce moment là). " La couleur de peau continue à isoler certains d'entre nous dans une catégorie tout aussi implacable que l'étiquette "possession" infligée à un individu.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Si quelqu’un souhaite se suicider et recherche l’extase, pourquoi ne pas opter pour le pont de Williamsburg. Comme le jeune homme des photos du site web qui croyait sans doute que sa chute, son extase allaient commencer immergées dans les couleurs du saxo ténor de Sonny Rollins. Sa musique, la première et la dernière chose audible quand la surface de l’eau se fend puis se referme… badaboum. L’extase prenant de l’ampleur, minuscule étincelle d’immortel éblouissement grimpant vers les cieux, son sillage se déployant derrière, invisible ruban de lumière qui s’accroit lentement, sûrement, comme les sillages laiteux des bateaux-taxis passant sous le pont s’accroissent et frémissent jusqu’aux limites de l’univers.
Commenter  J’apprécie          30
Basquiat avait une encyclopédie illustrée des signes et symboles dans laquelle figuraient les signes que les vagabonds inscrivaient à la craie ou gravaient sur les murs des petites villes pour informer les autres vagabonds. Basquiat dessinait souvent dans ses tableaux celui qui signifiait "rien à gagner ici", ou celui qui disait "ici on risque de se faire tabasser".
Commenter  J’apprécie          62
Ma grand-mère choisissait ses maris aussi soigneusement parfaitement qu'elle traçait sa cursive de secrétaire paroissiale. Sauf que de temps à autre elle décidait qu'il était temps de changer de script. Après avoir abandonné son premier mari puis divorcé-un ouvrier à la peau très foncée, émigré timide originaire de Promised Land, en Caroline du Sud, père de mon père et de ma tante C, l'homme que j'appelais grand-père pendant mon enfance-, ma grand mère Martha décida d'épouser des pasteurs.
Commenter  J’apprécie          22
La peau de la tante May est légèrement plus claire que le brun clair de ma grand-mère Martha, et cette différence quoique mince, intimidait assez ma grand-mère pour qu'elle regarde ailleurs ou fasse mine d'être sourde quand May devenait vulgaire, paillarde ou ignorante dans les réunions de famille.
Commenter  J’apprécie          30
Monsieur le président,
Je vous adresse la présente note accompagnée de quelques nouvelles de ma composition, en espérant que vous trouverez, dans vos obligations quotidiennes, le temps de lire le tout. Les nouvelles devraient être assez parlantes en elles-mêmes. La note, monsieur le président, est un appel. Je vous en prie, éradiquez l'esclavage.
Je ne suis pas sans savoir, monsieur le président, que, selon l'histoire, l'esclavage fut aboli en 1865 aux États-Unis d'Amérique par le treizième amendement de notre constitution, et que des amendements ultérieurs étendirent aux anciens esclaves les précieux droits et protections que notre nation garantir à tous ses citoyens sans distinction de couleur. Mais vous devriez comprendre mieux que la plupart d'entre nous, monsieur le président, que l'histoire dit autant de mensonges que de vérités.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de John Edgar Wideman (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de John Edgar Wideman
Le livre de l'été recommandé par France Culture : John Edgar Wideman : "Écrire pour sauver une vie".
autres livres classés : littérature afro-américaineVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (23) Voir plus



Quiz Voir plus

Dead or Alive ?

Harlan Coben

Alive (vivant)
Dead (mort)

20 questions
1821 lecteurs ont répondu
Thèmes : auteur américain , littérature américaine , états-unisCréer un quiz sur ce livre

{* *}