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EAN : 9782213596372
244 pages
Fayard (06/03/1996)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Au séisme intellectuel et moral qui secoue l'Allemagne depuis le " tournant " de l'automne 1989, répond l'éclatement des textes de l'auteur de Cassandre réunis dans ce volume: articles, discours, conférences, essais, pièces de correspondance (avec Volker Braun, Efim Etkind, Günter Grass, Jürgen Habermas, etc.), extraits du journal intime, chacun témoigne à sa façon de la violence d'un déchirement social qui se lit ici comme une crise intérieure, tous ensemble dessin... >Voir plus
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Même si une légende veut que les Allemands de l’Est aient librement choisi leur sort – les citoyens de RDA pensaient en fait choisir le bien-être en optant pour l’unité et la démocratie parlementaire, ils pensaient choisir la liberté, légalité, voire, bien naïvement, la fraternité -, on peut néanmoins constater que ce choix fait de la RDA une exception parmi les pays du socialisme d’État, voués à l’effort lent, plein de sacrifices et en partie vain pour s’intégrer à l’économie de marché. À l’est de l’Allemagne aussi, le prix à payer est élevé si l’on ne veut pas descendre au niveau de ce qu’on appelle le tiers-monde, en particulier pour ceux qui ont dépassé la cinquantaine. Mais les rapports de force politiques dans l’Allemagne des années 1990 et la place accordée à la propriété dans l’économie capitaliste étaient tels que ces gens n’avaient pas la moindre chance (par exemple par un retournement de la loi donnant priorité à la restitution sur le dédommagement) de voir reconnaître leur modeste patrimoine et d’échapper à toute cette inquiétude et colère qui gagnent les nouveaux Länder, ainsi qu’à tant de conflits, de haine et de jalousie entre Allemands de l’Est et de l’Ouest (nombre de ces derniers étant conduits à jouer un rôle qui ne leur convient aucunement). On a privilégié la restauration des anciens rapports de propriété aux dépens de relations détendues, amicales entre Allemands. Et l’on explique que cette situation juridique, politique et sociale est un épiphénomène de l’unité; ou bien on lui confère une valeur plus élevée et l’on veille à ce que cette vue des choses dure le plus longtemps possible — car celui qui s’est mis dans son tort ne pro- teste pas facilement; à moins qu’un jour, aveuglé de colère, il ne finisse par cogner.
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ils étaient sagement assis les uns à côté des autres face aux caméras de télévision, quatre anciens généraux de la Stasi, ils pénétraient directement dans notre salle de séjour portant des vêtements civils bien coupés, semblaient à peine déguisés, portant des cravates assorties, conciliants et rusés à leur manière, proposant rien de moins que leur collaboration, en particulier leur silence sur certains événements, disons certaines complicités au niveau des services secrets, mais sans utiliser bien sûr des termes aussi grossiers : donc leur silence coopératif contre une amnistie et la prise en charge de leurs anciens collaborateurs qui commencent à se faire du souci et grâce auxquels ils pouvaient lancer quelques menaces voilées, tout en jurant que rien ne leur tenait plus à coeur que d’épargner des ennuis à notre Etat, et quand on leur demandait de quel Etat il s’agissait, ils répondaient d’une seule voie : la République fédérale d’Allemagne, bien sûr, à laquelle ils s’identifiaient tout à fait
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La désintégration accélérée de presque tous les liens qui existaient auparavant fait entrer en scène les partisans acharnés d’intérêts économiques et politiques particuliers avant que la société ait pu développer des mécanismes de protection sociale et d’intégration dans tous les domaines, ou qu’elle soit immunisée contre les slogans. Bien des gens sont désemparés et succombent à la dépression. D’autres pris d’une rage qui n’est que trop compréhensible sous le coup d’une peur, d’une humiliation, d’une honte inavouable et du mépris de soi-même, cherchent la fuite dans la haine et la vengeance. Quel sort guette ces gens qui s’expriment à grands cris et espèrent bien voir leur condition s’améliorer très vite grâce à un rattachement très rapide et inconditionnel au grand, riche et puissant Etat qui fonctionne si bien sur le sol allemand ? Vers quel horizon politique vont-ils dériver, s’ils voient à nouveau leurs espoirs floués ? (p 17).
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Dans votre dernière interview, quelques semaines avant votre mort, en juillet 1985, vous dressiez, cher Heinrich Böll, ce constat historique : en période de crise, l’Allemagne dérive toujours vers la droite. Jamais vers la gauche. Et cela est d’autant plus vrai lorsqu’il n’existe plus aucun repère à gauche ; quand beaucoup de ceux qui se disaient de gauche ont perdu la mémoire et détournent l’attention d’eux-mêmes en désignant les autres, car il n’est guère confortable d’être assis sur le banc des perdants ; quand le nombre de ceux qui approuvaient votre mise en garde de naguère : ce sont les vaincus qui ont quelque chose à nous apprendre ! tend vers zéro. Que cela provoque la satisfaction des gens de droite, on le comprend aisément. J’imagine que vous joueriez à nouveau les trouble-fête, énumérant les périls que fait l’absence d’alternative. (pp 166-167)
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Où veux-je en venir? Je crois que le temps est venu, tant à l'est qu'à l'ouest de l'Allemagne, de prendre congé du fantôme qui fut longtemps pour chacun l'autre pays, et donc également le sien propre. Nous savons bien ce qu'il advient de la réalité quand elle est niée et refoulée: disparaissant dans les zones obscures de la conscience, elle y dévoie activité et créativité tout en faisant surgir mythes, agressivité et délire. Ce sentiment de vide et de déception qui se répand est un terrain propice aux maladies sociales et aux anomalies qui voient les gens franchir " soudainement " les bornes de la civilisation, rejeter des conventions supposées bien établies _ jeunes zombies sans pitié ni pour les autres ni pour eux-mêmes.
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Videos de Christa Wolf (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Christa Wolf
Christa Wolf (1929-2011), dans le puits du temps : Une vie, une œuvre (2013 / France Culture). Production : Matthieu Garrigou-Lagrange. Par Christine Lecerf. Réalisation : Charlotte Roux. Diffusion sur France Culture le 9 novembre 2013. Photographie : Christa Wolf im Jahr 1971. (dpa / picture alliance). Née en 1929, en Prusse orientale, aujourd’hui territoire polonais, Christa Wolf est précipitée dès l’origine dans le paysage tourmenté de l’histoire allemande. Comme beaucoup d’enfants, elle s’enthousiasme pour le Führer. Comme beaucoup d’adolescents, elle participe avec fierté à la naissance de la nouvelle Allemagne de l’Est. Et comme bon nombre d’intellectuels antifascistes qui croient à l’idéal socialiste, elle s’engage au parti communiste dès 1949. Mais Christa Wolf n’est pas tout à fait comme tout le monde. Elle écrit : sur la déchirure de l’Allemagne dans “Le ciel partagé” (1963), sur ses propres dénis dans “Trame d’enfance” (1976). Elle creuse l’oubli, rumine un passé qui ne passe pas. À partir de 1976, à la suite de son soutien au chanteur Wolf Biermann, Christa Wolf n’est plus une femme libre. La Stasi l’espionne. On refuse qu’elle quitte le parti. Plus on cherche à la museler et plus l’écrivaine s’échappe par l’écriture dans les strates du temps. Elle trouve refuge auprès des premiers romantiques allemands qui, comme elle, n’avaient “Aucun lieu. Nulle part” (1979). Dans “Cassandre” (1983) ou “Médée” (1996), elle s’inspire de ces « femmes sauvages » de la mythologie grecque qui avancent comme elle, tête haute, la parole vibrante. On se presse à ses lectures. On rêve l’esprit éveillé. Peu après la chute du mur, l’icône de la littérature est-allemande est injustement accusée d’avoir travaillé pour la Stasi. Dans “Ce qui reste”, elle écrit : « N’aie pas peur, dans cette langue, que j’ai dans l’oreille, pas encore sur les lèvres, j’en parlerai aussi un jour. » Brisée mais non vaincue, Christa Wolf entreprend alors dans “Ville des anges” (2011) une lente et ultime descente au « fond du puits ». Le corps perpétuellement en alerte, Christa Wolf luttait depuis des années contre la maladie. Elle est morte à l’âge de 82 ans.
Avec : Jana Simon, journaliste, petite-fille de Christa Wolf Nicole Bary, traductrice et éditrice de la revue “LITERALL” Pierre Bergounioux, écrivain Günter Grass, écrivain (Archives) Marie Goudot, auteur de “Cassandre” Alain et Renate Lance, traducteurs de l’œuvre de Christa Wolf Erika Tunner, germaniste, spécialiste du romantisme Irving Wohlfarth, germaniste
Et la voix de Christa Wolf
Textes lus par Blandine Molinier et Aurélia Petit. Avec la voix de Jean-François Néollier.
Extraits de films : “Le ciel divisé”, de Konrad Wolf, adaptation de Christa et Gerhard Wolf, DEFA, 1964 “Le tambour”, de Volker Schlöndorff, 1979 “Christa Wolf. Ein Tag, ein Jahr, ein Leben”, de Gabriele Denecke et Gabriele Conrad, ARTE, 2004
Source : France Culture
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