Avouons-le !
Je suis entré dans ce livre avec des étoiles dans les yeux.
"L'apocalypse est pour demain" !
Pensez-donc !
Un livre de science-fiction écrit par Jean Yanne ...
Un feuilleton radiophonique lu d'octobre à décembre 1977 sur l'insolente station de France-Inter ...
Les aventures de Robin Cruso, dont l'ancêtre, il y a bien longtemps, recréant le monde dans une cabane, avait traîné sa solitude sur une île lointaine ...
Des illustrations, grises et audacieuses, de Cardon ...
Malheureusement, au fil de ma lecture, comme un gastronomique après un piteux repas, "L'apocalypse est pour demain" a vu fondre, une à une, ses étoiles.
Robin Cruso est le dernier homme.
Il est le dernier survivant d'une civilisation, d'un enfer mécanique où tout était pensé par et pour l'automobile.
L'homme y avait obtenu, enfin, la journée de travail d'une demi-heure, une fois par mois.
Mais le reste de son temps était utilisé pour ses transports.
Pour des millions d'êtres humains qui ne se voyaient plus qu'à travers la buée des pare-brise, l'horizon s'arrêtait au bouchon de radiateur.
Le grand-préfet était le maître du pays.
Il était un des serviteurs du grand maître du monde ... Et détruire les autos, abattre les conducteurs étaient sans doute les seuls moyens de sauvegarder l'espèce humaine ...
"L'apocalypse est pour demain" est une bouffonnerie.
Le récit, qui est pourtant loufoque, burlesque, parfois même ubuesque, n'arrive pas à être simplement drôle.
Ce livre est une tuerie !
C'est une longue énumération de meurtres, d'assassinats, de tortures et de sévices perpétrés à l'encontre de l'homme devenu automobiliste.
Dénoncer la toute puissance de l'automobile était une bonne idée.
Dommage que son développement est été manqué.
Car, de fait, il manque d'un peu de tout :
D'idées d'abord, de rythme ensuite ...
Mais aussi d'un véritable et attachant dernier homme dont on aurait suivi les aventures avec intérêt et délectation.
Pourtant Jean Yanne, ne pouvant s'en empêcher, et l'on aime ça, en profite, mais trop peu, pour régler quelques comptes, de ceux qui jamais ne se soldent, avec ...
- les anciens combattants
- les toréadors
- la religion
- les policiers
- et les lapons qui déchiquètent les bébés phoques sur la banquise ...
On ne sera tout de même pas venu pour rien ! ...
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Pollution asphyxiante des automobilistes qui ont pris le pouvoir contre le monde souterrain des Piétons. Il faudra que je retrouve un jour cette perle de roman d'anticipation lue vers l'âge de mes 14 ans !
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« Vous êtes fou ! Dis-je au Grand Maître – que je ne voyais toujours pas – vous ne songez qu'à détruire, vous ne rêvez que meurtre et extermination. Vous êtes complexé. N'y aura-t-il donc jamais dans votre cervelle malade, l'ombre d'une pensée pour l'avenir de l'Humanité ? »
[...]
« Mais, c'est pour l'avenir de l'Humanité que j’œuvre ! Vous ne l'avez pas encore compris ? Les hommes sont devenus fous à cause de l'automobile, quels que puissent être les pièges qu'on leur tend, quelles que puissent être les destructions massives, les broyages collectifs, les laminages gigantesques ; qu'on les écrase, qu'on les fasses brûler, qu'on les transperce par tous les moyens possibles, rien ne les fera jamais renoncer à leur voiture. C'est pour cela qu'il a fallu agir. Les obliger à vivre en voiture 24 heures sur 24 afin de pouvoir mieux les contrôler, et les éliminer. Sans quoi, le tentaculaire monstre d'acier automobile aurait étouffé la planète.
Mais vous pourriez les faire périr sans les faire souffrir, dis-je. Les cris, les hurlements de douleur ne vous effraient-ils donc jamais ?
Le moyen de faire autrement ? Il faut frapper les imaginations. Mais c'est décourageant. Même les plus horribles et les plus douloureuses techniques de destruction ne les effraient pas. L'automobile, lorsque les hécatombes n'avaient lieu que pendant le week-end – au cours des anciennes fêtes, (pour la Pentecôte , ou Pâques par exemple) lorsqu'une collision avait fait quatre ou cinq morts, a-t-on jamais vu un témoin pousser le cadavre d'un conducteur pour éviter d'écraser une fleur ?
En a-t-on déjà vu un prendre soin de nettoyer une borne sur laquelle s'était broyé une tête parce que la couleur du sang jurait avec une peinture d'un ton différent ? A-t-on déjà vu des gens se presser pour dégager de la route deux véhicules imbriqués l'un dans l'autre, avec les passagers morts, parce que ce tableau détruisait l'harmonie d'un paysage ? Non. Vous le voyez, les conducteurs n'ont aucune poésie. Ils sont insensible à tout. Il n'y a donc qu'un seul moyen de les dominer : avoir des engins plus solides que leurs voitures pour les écraser, avoir des policiers plus insensibles qu'eux pour les abattre, avoir, pour les gouverner, un cerveau génial comme le mien et les tenir, nuit et jour, à la merci de mon bon vouloir et de ma puissance.
Les propos que vous tenez sont bien banals, dis-je. Ce sont ceux de tous les chefs d'états ordinaires dans les pays anti-démocratiques ».
Singeries, vous l'avez dit Robin Cruzo. Ceux-là sont les présidents fantoches, les mannequins de son, les baudruches politiques, les poupées articulées, les polichinelles aux ficelles dociles, les joujoux mécaniques qui de tout temps ont figuré à la tête des fêtes, des remises de médailles, des inaugurations de chrysanthèmes, à la tête des parlements, des sénats, des assemblées, et qui depuis toujours ont été manipulés, téléguidés, programmés par les véritables chefs du monde. Les véritables étaient ceux qui avaient l'argent, les moyens de pression, ceux qui avaient la connaissance et qu'on a appelé souvent les multinationales, les multisectes, les multichapelles, les multi-ceci, les multi-cela.
Ceux qui semblaient diriger, qui croyaient diriger ont toujours été entre les mains des véritables forces. Je me suis emparé du système, Robin Cruzo, c'est-à-dire de ces forces. Je n'ai presque rien eu à faire. Le monde entier dépendait de l'automobile. Devenant le Maître de l'automobile, je devins le maître du monde. Mais je n'ai rien changé aux apparences. Il y a toujours des présidents, dans le monde, qui pérorent, ronronnent, annoncent, déclarent, proposent, refusent, selon ma volonté. Il y a toujours des polices qui obéissent, des agents qui frappent, des militaires qui tuent, sans savoir d'où viennent les ordres, qu'elles en sont les raisons. Sans savoir – permettez-moi cette plaisanterie – qui est le cerveau ?
Mon nom est Robin Cruso.
Je ne sais pas pourquoi j'écris ce récit.
Personne ne le lira jamais.
Ou alors quelque explorateur, venu d'une lointaine planète, puisqu'il n'y a plus personne sur cette terre ...
La jeunesse est une excuse, mais elle ne justifie pas les extravagances ...
Conscients du danger, les conducteurs tentèrent de se lever, de monter sur leur siège, mais furent empalés en quelques secondes.
Au plafond du tunnel, de puissants électro-aimants aspirèrent les voitures devenues cercueils.
Parlons cinéma. Jean Yanne.