Séduit par la couverture d'
Alice Peronnet (superbe travail!), il en a été tout autre de la plume de
Rakel Haslund.
Par où commencer?
J'avais bien senti qu'il ne s'agissait pas d'un roman de SF conventionnel, aussi je m'étais ouvert à la possibilité d'une expérience un peu moins vertigineuse que ce vers quoi tend tout bon roman de SF… mais j'espérais surtout que ce ne serait pas un énième roman post-apo faussement science-fictif. Je voulais croire que cet «
Après nous les oiseaux » pouvait me faire oublier la blague qu'avait été «
Les Oiseaux du
temps » publié chez Mnémos il y a quelques années. Eh non, à croire que le mot oiseau n'est pas un bon marqueur pour la SF - contrairement à la littérature blanche où l'on peut trouver des oeuvres magnifiques comme «
Les Oiseaux » de
Tarjei Vesaas, «
Tous des oiseaux » de
Wajdi Mouawad ou récemment « Oiseaux de passage » de Fernando Arumburu, mais je divague. Donc, pas d'oiseaux !
Ici, je n'ai pas décelé la « poésie » de la prose ni la « voix enchanteresse » annoncées par l'éditeur. Peut être une certaine naïveté touchante au début, oui : la façon dont la jeune fem
me reconstitue les mots oubliés : « obscurité-du-matin », « regard-de-mer », « oiseau-couteau » ou le très évocateur « paupières-de-pluie » pour ne citer qu'eux ; ou bien quelques passages réussis sur l'attachement et le soin qu'elle porte aux peu de choses qu'elle possède (à voir dans les ‘citations' un extrait très beau lu page 65), mais c'est maigre. La prose devient rapidement ennuyante, car elle n'épouse rien de tangible, ni ne permet à ces premiers chapitres contemplatifs de réellement capter l'attention ou de prendre de l'ampleur, de s'envoler.
J'ai pataugé dans ce roman et me suis traîné comme le chariot de la jeune femme. J'ai failli l'abandonner, comme le chariot, j'aurais sans doute du… l'ennui est une émotion que je considère comme fiable, j'aurais du m'y fier.
Il ne suffit pas d'invoquer la nature et d'écrire de façon épuré pour être poétique. Ni même de parler ethnologie. Il y a un certain ton qui m'avait paru intéressant et réjouissant au début de l'histoire, avec ce vent qui n'en fait qu'à sa tête. Mais rapidement il y a eu un appel d'air et tout est retombé, et tout est resté plat.
Jusqu'ici, ce sont des sensations purement subjectives et d'autres ne seront pas d'accord. Et je leur souhaite d'y débusquer une beauté qui m'a totalement échappée. Mais! le rapprochement avec
La Route de
Cormac McCarthy m'a quant à lui passablement énervé. Au minimum c'est une maladresse, au pire de la fainéantise intellectuelle - en tout cas cette comparaison est à mes yeux injustifiée, quand bien même ce seraient tous deux des « romans post-apocalyptique », ça ne tient pas (
la route). Ils n'abordent ni les mêmes thèmes, et stylistiquement n'ont rien à voir! Aussi ce n'est pas rendre service à «
Après nous les oiseaux » de le comparer à un monument de la littérature contemporaine.
Autre aspect hors-contenu : le prix est absurde : 18€ pour moins de 180 pages - et il faut voir la taille de la police…
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Si ce post paraît injustement et négativement critique, c'est parce que je me sens vraiment trompé par ce que la maison d'édition dit de ce roman. le trope post-apo (« un grand incendie », CI-
MER!) est bancal comme un tabouret à deux pieds et pourtant on nous vend ça comme de la SF. Ce n'en est pas, et je trouve que chacun gagnerait à faire preuve d'une plus grande honnêteté envers les lecteur.rices.
Pour finir, je ne voudrais absolument pas laisser l'impression d'un lynchage. Ce livre n'est pas un mauvais roman. Il est je pense de bonne facture, mais il est présenté pour ce qu'il n'est pas, et fausse et trompe nos attentes. Et la surprise est amère.