Il y a cent ans, le 26 mars, disparaissait
Sarah Bernhardt à l'âge de 78 ans. Ses funérailles furent dignes d'un homme d'état, un million de personnes formèrent le cortège funéraire, une véritable démonstration d'union nationale comme avant elle
Victor Hugo.
C'est à cette date que commence le récit de la vie hors norme de la Divine, qu'
Elizabeth Gouslan a choisi de raconter par l'intermédiaire de Julia Bartet, elle aussi sociétaire de la comédie française, rivale puis amie de Sarah. Ce livre est celui qu'elle aurait pu écrire pour raconter « sa » Sarah, pas la version enjolivée par les uns ou salie par les autres.
Quand Sarah n'est que tyrannie, croqueuse d'hommes, excès dans tout, Julia incarne la délicatesse, la sensualité classique. Ce qui les rapproche et les lie c'est leur statut de jeunes mères célibataires, Sarah jouant pour sa cadette le rôle protecteur de grande soeur.
Sarah Bernhardt c'est la fille d'une courtisane, qui s'émancipe à dix-huit ans pour s'éloigner de sa mère malfaisante et gravit toutes les marches jusqu'en haut de l'affiche. À
Paris d'abord, où elle acquiert le Théâtre de la Ville, place du Châtelet, à l'époque Théâtre
Sarah Bernhardt. Et au-delà des frontières, du haut de son mètre soixante-cinq, c'est la première star internationale qui réalise des tournées à travers le monde, États Unis, Chili, Pérou, Mexique, Russie... Pour façonner sa gloire et afficher son triomphe certes, mais aussi pour maintenir son train de vie lui extravagant et démesuré : il en faut des billets pour entretenir son hôtel particulier rempli d'animaux exotiques, d'oeuvres d'art, et aussi pour entretenir toute sa famille, son fils, sa femme et leurs enfants. Pas si égoïste que ça la grande Sarah !
Ce récit, outre l'aspect biographique, nous montre celle qu'Hugo appelait « La voix d'or » sous un autre jour : sa fidélité en amitié, on pense à
Oscar Wilde et
Sacha Guitry, sa dévotion envers sa famille. Elle était aussi narcissique qu'altruiste, défendit Dreyfus, affichait ouvertement son goût pour les hommes, et les femmes, son attirance pour le mysticisme, entre gothique et morbide. Elle est d'ailleurs enterrée dans le cercueil en bois de rose matelassé de soie blanche dans lequel elle apprenait ses textes.