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EAN : 978B0CLYZLMRK
72 pages
Leméac (Editeur) (16/11/2023)
3.5/5   3 notes
Résumé :
Delphine et Octave ne sont pas destinés à devenir amis : l’une vient d’une famille nombreuse et livre du poisson, l’autre est fils unique et joue divinement du piano dans sa somptueuse maison. Elle aime l’aventure – mais craint la lecture –, il a une terreur folle de l’inconnu. Comment arriver à s’apprivoiser, et, pour Octave, à franchir les cent soixante-seize pas qui le séparent du courage?
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Incontournable Théâtre jeunesse Novembre 2023




Après avoir lu le sympathique "Furioso", d'Olivier Kemeid, de la collection Théâtre de la maison Léméac lui aussi, je me suis lancée dans "176 pas", de la québécoise Fanny Britt. J'ai toujours un petit baume au coeur quand un livre sur le théâtre nous parvient en librairie, non que je m'y connaisse, mais nous en recevons généralement peu. Si on exclut les maison étrangères "École des Loisirs" et "Lansman", qui en produisent beaucoup, du côté québécois, Léméac est une des rares à couvrir ce pan de la littérature jeunesse.




Alors, qu'avons-nous? Un duo en contraste, qui semblent dissemblables au début, mais qui ont un enjeu commun: affronter leurs craintes, et surtout, qui doivent apprendre à écouter.
Octave, jusque dans son prénom, gravite dans un univers strictement musical, où sa passion pour le piano reste cependant cantonnée à un répertoire "classique" , en ce sens où il est encouragé à rester dans les oeuvres des grands compositeurs ayant fait leurs preuves. Il n'y a pas de place pour la créativité ou l'expression spontanée. Dans son cadre familial, il est conservé dans un cocon sous une mains maternelle sévère, un brin austère, qui a aussi une certaine tendance à la manipulation avec ses encouragements teintée de dépréciation ( Elle me rappelle un peu la Mère Gothel de Disney cette femme). On comprendra que cette maternité suffocante et auto-centrée cache un enjeu du côté de cette maman. J'y reviendra dans ma partie divulgâchante.




Dans sa famille nombreuse, dont les frères portent des noms à saveur océanique ( Notez Pacifique, comme l'Océan, Ariel, comme la Petite Sirène, Ulysse, comme le Héro grec ayant voyagé en mer 10 ans de temps, Titouan, comme le navigateur français), Delphine ( comme le bleu de Delph) est fille de pêcheur et son habileté physique lui permet de grimper aux arbres, courir les plages et parcourir le monde, au contraire d'Octave, confiné chez lui. Delphine aime chanter et aime pêcher, mais elle ne va plus à l'école. Il y a quelque chose de libre chez elle, mais en fait, tout comme Octave, il y a quelque chose qu'elle redoute.




Deux enfants, donc, qui a priori, ne se ressemble pas. Octave manque d'imagination, prend tout au premier degré et respecte de manière scrupuleuse les règles établies par sa mère. Au contraire, Delphine est fantasque, audacieuse et évolue de manière plus indépendante. Ils se rencontre alors que Delphine fait une livraison de poisson chez lui. Il est à son piano, elle est debout avec sa chaudière pleine de poissons. Un peu maladroitement, Octave tente de faire la conversation et devant son interrogation, à savoir si son piano est triste de ne pas avoir de nom, se rétracte aussitôt en soulignant que ce genre de réflexion explique pourquoi il n'a pas d'amis. Delphine le surprend alors en demandant directement au piano si ça la rend triste de ne pas avoir de nom. La franchise de Delphine lui fait dire qu'elle trouve Octave étrange, ce qu'il admet volontiers. Mais il trouve tout aussi étrange cette fille qui parle de s'asseoir sur des nuages et qui grimpe aux arbres.
C'est une rencontre qui aurait ou n'aboutir sur rien, mais qui va malgré tout avoir une suite, grâce à la tante d'Octave, qui aime se faire passer pour la chauffeuse d'Octave et qui décide de reconduire Delphine dans sa "bagnole".




Les deux enfants vont vivre quelques péripéties marqué par des débats, des monologues, parfois un dialogue de sourds, tantôt intrigués l'un par l'autre, tantôt éludant fréquemment les propos qui ne les intéressent pas. C'est pas facile quand on veut que l'autre s'accorde à nos intérêts, c'est pas facile quand on a des visions opposés ou qu'on a des réalités familiales différentes. C'est l'histoire d'une amitié balbutiante, où les deux personnages apprennent à s'ouvrir à l'autre, entre défense et attaque, entre pétillant et amertume. S'ouvrir à l'autre implique de se montrer vulnérable et s'ouvrir à l'autre implique de la confiance. Progressivement, ils déteignent l'un sur l'autre et peu à peu, questionne leur a priori et baisse pue à peu leur garde face à l'autre. Octave se détache un peu du cocon de sa mère. Delphine tente de lui faire partager son univers, mais Octave se rétracte une fois encore. C'est donc lui qui tente de reprendre contact avec Delphine.
Attention, à partir d'ici, il y aura des divulgâches.




La présence de tante Simone est majeure pour le personnage d'Octave, parce qu'elle a un rapport au réel différent de la mère de ce dernier. Elle "pousse" Octave a oser, mais c'est aussi elle qui va livrer le mystère derrière sa mère. Plus jeune, tante Simone et la maman d'Octave étaient des jeunes filles intrépides et espiègles qui avaient fait les 400 coups. Comment expliquer alors que cette maman est devenue si couvante envers son enfant? Octave apprend que son père est décédé dans des circonstances tragiques, dans un accident d'auto où il serait resté prit dans le véhicule projeté sous l'eau , après avoir détaché et confié son fils à son épouse. Il s'y serait noyé. C'est de cet évènement traumatique que la maman serait restée marqué et serait devenue méfiante et insécure.




La tante amène un aspect que j'ai beaucoup aimé, à savoir la fonction de la peur. La peur est une émotion, elle a donc un rôle à remplir, une fonction, mais comme toutes les émotions, elle peut être envahissante. Néanmoins, comme toutes les émotions, elle s'apprivoise, on peut apprendre à la gérer. L'idée n'est pas de ne pas en avoir ou pire de la cacher, elle sera toujours là et tant mieux, car elle assure notre survie et calibre nos comportements, surtout ceux qui nous mettent à risque. Surtout, sans peur, il ne saurait être question de courage. Comme le dit Simone, on peut apprendre à la faire rétrécir et la loger dans une poche. Elle prend ainsi moins de place, mais elle nous accompagne toujours. Ainsi, Octave comprend que c'est sa peur qui lui fait sans cesse reculer devant la nouveauté et donc, face à Delphine, ses idées et ses propositions. C'est aussi la peur qui lui cause l'inconfort qui le prend en voulant quitter l'enceinte de sa maison.




Arrivent enfin les fameux 176 pas. 176 pas de peur qui se mute en courage. On assiste pas à pas au changement psychologique et physique ( signes somatiques) d'Octave, qui quitte l'enceinte de sa maison pour aller rejoindre Delphine sur la plage. Il lui confie qu'il se sent comme une patate qu'on a oublié de cueillir à côté d'elle qui ne craint rien. C'est alors qu'elle lui confie sa propre crainte. Durant la pièce, on entend une histoire sur une jeune fille aux cheveux rouges, qui sans ses jambes fonctionnelles, a cependant une agilité à la natation. Dans l'eau, son handicap disparait. Cette histoire est le fruit de l'imagination de Delphine, qu'elle a récité en classe. Néanmoins, Delphine a fait appel à sa mémoire, car sur le papier, les lettres sont pêle-mêle et inadéquates. On comprend que la jeune fille a probablement un trouble d'apprentissage, qui lui a valut des moqueries et ultimement, elle fut déscolarisée. Depuis, elle craint de lire, ce qui explique pourquoi elle a refusé de lire une partition, au début de la pièce.




Pour reprendre les mots d'octave: "Donc, ce que tu me dis, c,est qu'on est deux patates?"
Oui, deux "patates", deux enfants différents, à leur façon, deux enfants qui ont eu peur et qui ont vécu la solitude pour cette raison, Octave confiné chez lui, sans amis, Delphine sur sa plage sans amis. Deux patates qui parviennent à s'ouvrir l'une à l'autre et même rêver d'un même coeur. Deux enfants qui s'excusent et qui vont de l'avant. La peur n'a pas disparu, elle a simplement rétrécie.




La pièce est une pièce de marionnettes dont voici le lien au Théâtre de l'Oeil: https://www.theatredeloeil.qc.ca/production/176-pas/


La présentation visuelle doit mieux le mettre en relief, mais il y a présence d'origami dans cette histoire. On le sent dans la descriptions dynamique et très "pliée" de certaines figures parallèles ou non à l'histoire, comme le bonzaï de tante Simone ou le passage sur les animaux dangereux. le papier et les changement de formes constituent des éléments artistiques très intéressants car ils ajoutent un aspect visuel à des concepts abstraits, ce qui, pour un auditoire plus jeune, est toujours pertinent à ajouter. Reste qu'à l'écrit, on peut se le figurer, mais je pense que c'est moins évident à faire que sur la scène.




C'est une belle histoire, très porteuse, curieusement atemporelle, mais universelle, où l'émotion de le peur est explorée dans un sens très positif et où l'amitié est célébrée dans sa diversité. C'est un univers en chansons, en poissons, en papier et en espoirs.




La pièce est destinée à un auditoire de 6 à 10 ans, mais pour sa version écrite, je le place en deuxième cycle primaire, 8-9 ans, parce qu'il faut savoir la lire.
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Vidéo de Fanny Britt
'Faire les sucres' (Flammarion) de Fanny Britt nous parle de quête d'authenticité à travers le personnage d'Adam Dumont, un chef cuisinier vedette qui va changer de vie suite à un accident. Il décide alors de racheter une érablière, et de "faire les sucres" pour gagner sa vie : récolter de l'eau d'érable. Un métier dur, qui va le confronter à une culture bien particulière dans la nature québécoise. Fanny Britt nous en dit plus dans cette vidéo.
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