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EAN : 9782221109717
1216 pages
Robert Laffont (17/01/2013)
4.29/5   7 notes
Résumé :
Un corpus exceptionnel : la première anthologie de textes autobiographiques de femmes du XVIIIe siècle.

Ce volume embrasse tout le siècle des Lumières, du journal de voyage de Rosalba Carriera, jeune peintre à Paris pendant la Régence, aux souvenirs de Victoire Monnard, petite employée sous la Révolution, en passant par le journal de Germaine de Staël ou les Mémoires particuliers de Manon (ou Jeanne-Marie) Roland. Une artiste italienne en France, une ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ce recueil réunit des écrits personnels de femmes qu'elles soient très connus, comme Germaine de Staël ou bien inconnu du grand public. Peu importe les classes sociales dont ces femmes sont issues ou leur rôle dans l'histoire , elles ont su faire parvenir jusqu'à nous leurs témoignages à propos de leur temps. Dans une première partie d'une cinquantaine de pages, Catriona Seth nous explique qui écrit, dans quel contexte et pourquoi. Ces questions sont bien souvent liées à la condition sociale ou à la place de la femme dans la société. Qu'elles soient laïques ou religieuses, aristocratiques ou du peuple, elles nous donnent à voir leur époque.

« En grande partie, l'écriture au féminin est un phénomène parisien, aristocrate ou bourgeois. »

La seconde partie du livre est consacrée aux textes. Un par femme, ils sont plus ou moins longs. Chacun d'entre eux est introduit par l'auteure. Je n'ai pas lu ce livre de bout en bout. J'ai préféré faire une sélection de textes qui m'intéressaient et qui m'apporteraient différents point de vue sur l'époque. Je vais vous en présenter deux :

- Victoire Monnard est une jeune fille, assez impertinente et effrontée, du peuple née dans une famille de fermier. A l'âge de six ans, elle est tout de même envoyé à l'école puis en pension. Elle nous expose la vie dure que mène ses parents, les nombreux accidents domestiques, la mortalité infantile très élevée, la religion, les travaux agricoles, les moments de loisirs (la fête du village avec notamment une loterie), la description très détaillée des us et coutumes de cette catégorie sociale, la révolution française. Elle couche également sur le papier ses sentiments et son souhait de partir pour la capitale où elle travaille et devient une femme très indépendante. Elle nous raconte son enfance, son établissement à Paris puis son mariage et la naissance des ses enfants. Elle aura vécu sous Louis XVI, la révolution française et Napoléon Ier.

- Germaine de Staël fait parti de l'aristocratie. Elle est fille d'un banquier. En 1786, elle devient baronne De Staël en épousant un ambassadeur de Suède. Mais en parallèle de sa vie maritale, elle possède une vie sentimentale agitée. Elle se séparera de son époux en 1800. Favorable à la révolution française, elle doit régulièrement se réfugier chez son père en Suisse. Napoléon Ier va d'ailleurs l'interdire de séjour en France. Elle a énormément écrit au long de vie. le texte sélectionné est rédigé en 1785. Nous sommes juste avant son mariage et son principal prétendant lui est présenté pour organiser un mariage arrangé. Elle le rencontre une première fois à Paris. Puis, c'est lui que se déplace pour passer du temps avec sa future belle-famille. L'écriture est recherchée. Nous avons clairement affaire à une femme de lettres. Les sentiments sont exposés avec beaucoup de pudeur.

Un livre très enrichissant et innovant. Ici la parole est donnée aux femmes avant tout. Celle qu'elles n'ont pas pu exprimer à leur époque. Ce recueil est un trésor pour celles et ceux qui souhaite en apprendre sur le siècle des Lumières du point de vue des femmes de différentes catégories sociales. Quel regard portent-elles sur leur société? Quels sont leurs préoccupations?Mais attention il s'agit d'un pavé de plus de 1200 pages et d'une lecture exigeante. Les tournures de phrases sont bien différentes de ce que nous avons l'habitude de lire.

« Décidées à écrire sans se faire éditer, de nombreuses femmes ont concilié ambitions littéraires et respect des conventions sociales, une résolution de la tension entre les élans vers l'écriture et le refus de s'exhiber sur la scène littéraire. »
Lien : https://netherfieldpark.word..
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Si les femmes du XVII étaient sensées ne pas faire parler d'elles, rester dans l'ombre et privilégier l'intime, ce livre les remets enfin à l'honneur. Cette anthologie de textes autobiographiques parcourt le siècle des Lumières et raconte des récits de voyage, la vie de la cour à Versailles, la religion, les douleurs morales ou familiales. C'est juste passionnant

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Une vision inattendue du XVIIIème siècle.
J'ai particulièrement apprécié le récit de Victoire, 15 ans en 1792 et vendeuse en lingerie. Sa patronne l'envoie aux nouvelles. Et Victoire trotte dans Paris des exécutions au club des Jacobins. La Révolution vue d'en bas et au féminin, c'est exceptionnel.
Autre récit étonnant : Rose Delaunay est embastillée. 1 an à la Bastille, entre un repos bienvenu et la crainte de la torture, amours malheureuses et soupers avec le gouverneur...
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Catriona Seth a réalisé un puissant travail de recherche historique sur les écrits des femmes au XVIIIème siècle. Femmes connues ou femmes obscures, cet ouvrage est passionnant. Je n'ai lu, pour l'heure, que les 251 premières pages dont les mémoires de Madame de Staal-Delaunay au style incomparable. Je poursuivrai, car j'aime, et sans doute préféré-je la plume des femmes ; mais cela prendra du temps. Très bel ouvrage de presque 1200 pages de la collection Bouquin. Pat
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Ce livre permet de manière merveilleuse de nouer un dialogue avec des femmes d'un autre temps, qui avaient toutes pour elles de la vivacité, de l'intelligence et du coeur. Rien n'est mieux écrit, ni plus fin. Rien n'est plus sensé, ni plus juste. On est aux antipodes des stéréotypes commerciaux contemporains. Ici, la féminité est supérieure, et l'intimité n'est jamais vulgaire : elle est souveraine.
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critiques presse (3)
Telerama
26 juin 2013
On revit l'histoire de la cour à Versailles et celle de religieuses limousines. Chacun peut y lire les douleurs familiales, la rage devant les préjugés sexistes, l'inquiétude maternelle. Passionnante histoire des mentalités.
Lire la critique sur le site : Telerama
Bibliobs
11 mars 2013
Elles étaient marquise, femme de chambre, révolutionnaire, religieuse, amoureuse, «penseuse»... et elles écrivaient. Première du genre, une anthologie rassemble les textes des femmes du XVIIIe siècle.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeMonde
28 janvier 2013
Ces textes, inédits ou parutions posthumes, étaient inaccessibles. On les découvre passionnants.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Parmi les journaux présentés dans La fabrique de l'intime figurent ceux de dames nobles ou bourgeoises, et un seul qui a été écrit par une femme du peuple, Victoire Monnard, Mme Huet. Peu alphabétisée, elle réussit pourtant à nous faire partager sa vie quotidienne et celle de sa famille. L'éditeur s'est vu contraint de remanier un peu le style, et de corriger l'orthographe.
Voici un passage qui raconte comment on allait de Paris à Nantes au XVIIIe siècle en empruntant les fleuves, et qui nous informe aussi de certaines atrocités commises par la Terreur dans la région de Nantes. Après plusieurs jours de grandes difficultés - un vent qui les fait chavirer, une grande promiscuité ("Vingt-deux personnes, dont quinze soldats s'en allant en semestre, deux domestiques... et nous quatre, étaient ce que contenant cette barque ; on y était serré comme des harengs dans une caque."), épuisés, n'ayant plus la force de ramer, ils décident de demander main-forte à un membre de l'équipage d'un gros bateau ayant croisé le leur :
" Enfin le bateau attendu arrive ; les bateliers entrent en pourparlers, les parlementaires se rapprochent, ils conviennent de leur fait... Un homme pesant au moins deux cents (sic), et quoique étant dans un état d'ivresse, n'en fut pas moins mis en fonction de rameur. Notre patron nous raconta que cet homme, en 1793, était l'un des chefs des noyades de Nantes ordonnées par Carrier, agent de Robespierre, pour faire incarcérer les aristocrates de Nantes et de ses environs. En ayant un assez grand nombre d'arrêtés et voulant s'en défaire promptement pour les faire remplacer par d'autres qu'il avait en vue de faire arrêter, il inventa un nouveau mode d'exécution en faisant mettre vingt ou trente de ses prisonniers dans des nacelles au milieu desquelles étaient des trappes qu'on levait à volonté. Lorsqu'elles étaient à une certaine distance de Nantes en pleine eau, notre nouveau rameur en levait les trappes et les refermait sur ses victimes... La partie saine de la France désignait ces crimes par "les Noyades de Nantes". La narration de ces crimes m'avait transie d'épouvante, et d'horreur d'en avoir un des exécuteurs avec nous. Cet homme, ivre de vin et balancé par le mouvement réitéré des rames..., s'endormit assez profondément pour tomber dans la Loire. Il était placé à l'extrémité de la barque, de manière que nous ne pûmes le voir dormir ni culbuter à la renverse et ne nous aperçûmes qu'il nous manquait que parce que nous n'avancions presque plus ... Notre patron, plus expert que nous, s'étant aussitôt aperçu de sa disparition, s'était jeté dans la rivière et avait plongé pour l'en retirer ; c'était d'autant peu facile qu'il était nuit et... qu'il fallut qu'il le cherchât à tâtons. Cependant il parvint à ramener sur l'eau cette masse de chair, que nous eûmes peine à hisser dans la barque... Cet homme ne s'était pas même, je crois, réveillé au fond de l'eau, car lorsqu'il en fut retiré il ne dit pas un mot et dormit sur la planche trois heures profondément dans ses vêtements mouillés... Notre ivrogne après avoir dormi reprit ses rames... Et après avoir passé sept jours et six nuits sur la Loire, qui m'avaient paru un siècle, épuisés de fatigue et de misère, nous arrivâmes à Nantes."
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M. de Laître contait un jour l'histoire suivante : "Vous savez comme j'aime S*** : j'étais hier à la chasse avec lui, son cheval se cabra et se renversa sur lui. Je volai à son secours. J'avais un saisissement affreux. Je dégageai S*** de dessous son cheval ; il n'avait aucune blessure, mais il était d'une pâleur effrayante ; je vis qu'il allait s'évanouir. Heureusement que je porte toujours sur moi un flacon plein d'eau-de-vie ; je le tirai de ma poche et je l'avalai, car je sentis que j'allais moi-même me trouver mal."
Journal de la comtesse de Genlis.
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Qu'il est dur d'être continuellement séparé des objets avec lesquels on voudrait passer sa vie, et de rencontrer, de voir et de revoir sans cesse tant d'êtres ennuyeux ! Tout ce qui plaît est fugitif et s'échappe !... La vie, dans le grand monde, ressemble à ces assemblées nombreuses où l'on est coudoyé, ballotté, froissé par la foule importune, en cherchant ou désirant vainement un ami qui s'y perd !... Et l'absence !... et ces séparations de plusieurs années !... ces distances énormes qui peuvent se trouver entre vous et l'objet que vous aimez le mieux ! Tout est compensé, dit-on, par les charmes du retour et par le bonheur de la réunion : mais vivra-t-on assez pour en jouir, ou comment se retrouvera-t-on ? vieillis, changés, ayant d'autres opinions, d'autres goûts, d'autres sentiments ; n'éprouvant peut-être, en secret, que la surprise d'avoir pu se regretter et se désirer si longtemps. Pour se convenir toujours, il faut vivre et penser ensemble. La terre est trop grande et la vie trop courte pour les âmes sensibles, ou, pour mieux dire, tout fut ainsi sagement arrangé, pour nous empêcher de nous attacher passionnément durant ce voyage fatigant et rapide !...

Journal de la comtesse de Genlis
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La femme la plus humoriste et la plus dédaigneuse sera toujours chez elle, polie, obligeante [...] On ne se fâche point, on ne se formalise point, on ne se moque point chez soi. On n'y montre ni humeur, ni dédain, ni sécheresse.

Voici un joli mot de la comtesse Amélie. Quoiqu'elle ait une conduite irréprochable, elle se permet quelquefois des plaisanteries sur les ridicules de son mari. Un jour qu'elle s'en moquait en présence de sa belle-mère : "vous oubliez, lui dit cette dernière, que vous parlez de mon fils". -Il est vrai, maman, répondit la comtesse Amélie, je croyais ne parler que de votre gendre.
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Ce qu'il y a de plus difficile dans le grand monde, c'est de suivre une ligne droite ; tout s'y oppose. On a beau le vouloir avec fermeté, il faut bien s'arrêter quand on vous barre le chemin. Les routes tortueuses sont pleines de boue, mais elles n'ont point d'épines.

Journal de la comtesse de Genlis
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