AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,85

sur 441 notes
Très beau voyage, avec peut-être - comme dans tout voyage - des passages à vide. Malgré la richesse du style (des styles ?) et des thèmes, je me suis surpris à retrouver avec lassitude certains personnages. Sans doute parce que ce que vivaient les autres avait une telle intensité que la comparaison jouait en leur défaveur et m'ont fait friser l'impatience.
Mais quand même, quel beau voyage !
Commenter  J’apprécie          70
Juste une petite explication concernant le titre original de ce roman. Il s'agit d'une allusion à cette citation de Goethe, tirée de "Les Affinités Électives" : "Ce n'est pas impunément que l'on erre sous les palmiers, et les idées changent nécessairement dans un pays où les éléphants et les tigres sont chez eux."
Commenter  J’apprécie          70
Là où les tigres sont chez eux peut être qualifié de pavé, de beau pavé je dirais même. Près de 900 pages très enrichissantes qui nous proposent des réflexions et nous font prendre conscience de la réalité qui nous entoure, des personnages haut en couleur et une fin qui me laisse perplexe malgré le recul pris pour écrire cette chronique. Ce livre réserve son lot de surprise.

Les chapitres sont relativement nombreux et de bonne taille ; entre 20 et 30 pages en moyenne, ce qui facilite et rythme la lecture mais permet également de faire des pauses. Chaque chapitre est introduit par des extraits de la biographie de Kircher, éminent savant du XVII, racontés par Caspar Schott. La vie d'Athanase Kircher est palpitante, l'auteur n'a de cesse de nous le présenter sous un jour différent, variant ainsi les plaisirs de la lecture. Nous admirions Kircher, nous le détestons, nous doutons de la paternité qu'il s'octroie parfois, nous sommes avides d'en apprendre davantage sur lui.

Kircher est loin d'être le seul personnage de ce récit, sinon quoi je pense que ma lecture aurait été un peu ennuyeuse. J'ai donc pris plaisir à suivre le parcours des autres personnages, à notre époque, chacun évoluant dans un lieu différent. Tous les changements de personnages et de lieux sont indiqués, le lecteur angoissé n'a pas à s'inquiéter : il ne peut se perdre. Les liens qui unissaient les multiples protagonistes n'étaient pas toujours identifiables de prime abord, ce fut donc une sorte de jeu que de mettre le doigt dessus, puzzle géant dans lequel les pièces ne coïncidaient pas forcément avec l'estampe à reproduire.

Eléazard, Elaine, Moéma, Nelson, Mauro, Loredana, Soledade, Kircher et bien d'autres sont autant de personnages emblématiques du livre, chacun jouant son rôle avec plus ou moins d'efficacité. Indépendamment des autres, la vie de chacun d'entre eux est très riche, elle nous ouvre les yeux sur un pan de la société, sur les contrastes saisissants qui fissurent le Brésil de part en part. Mises bout à bout, toutes ces existences façonnent une gigantesque toile qui semble représenter une certaine réalité, celle d'un monde dans lequel nous déambulons, aveuglés par des sentiments néfastes, à la recherche de la sérénité. À ce titre, un passage m'a particulièrement marqué ; Roetgen ( le professeur de Moéma ) et les pêcheurs d'un petit village à la marge. Roetgen constate avec effroi que la vie que nous menons n'est que faste et poussière, existences décousues dont nous ne sommes même plus les véritables maîtres, dont les rênes nous ont depuis longtemps glissées entre les mains.

L'auteur nous offre donc un large éventail de personnage, des sauts dans le passé avec Kircher et un retour à la réalité avec les autres. Chaque point de vue nous apporte quelques choses, réflexion et prise de conscience, découvertes et révélations, je ne me suis pas ennuyée même si l'action n'est pas vraiment présente. Je dirai qu'il s'agit d'une histoire progressive dans laquelle chaque engrenage avance doucement, laissant aux autres le temps de s'installer afin que la machine fonctionne correctement. Il me semble nécessaire de prendre son temps pour savourer cette oeuvre, pour tenter de comprendre les mécanismes du récit.

Certaines situations peuvent vous sembler communes voire stéréotypées, je vous l'accorde, elles n'en demeurent pas moins cohérentes et vivantes. Moéma a beau représenter l'image somme toute banale et caricaturale de la fille homosexuelle qui fume, qui boit, qui baise à droite à gauche, son personnage nous offre bien plus que cela, il nous livre la pensée d'une jeune femme qui vit en marge de la société, qui s'éveille et ouvre progressivement les yeux sur un autre moyen de vivre et de profiter, une prise de conscience progressive qui la rend presque attachante.

Une série de coïncidentes et d'imprévues vont contraindre les personnages à changer de parcours et/ou d'orientation, c'est dans un sens ce qui fait le charme de ce récit : son caractère imprévisible et la richesse de ses explications. On se demande quels enseignements doit-on retenir de tout cela. Morale et valeurs se fraient un chemin dans l'aveuglément dont sont victimes certaines personnes. Il n'est jamais trop tard pour ouvrir les yeux et son esprit. Il y a énormément de chose à dire sur un livre de cette envergure, pas seulement parce que ce livre est un pavé mais parce qu'il recèle de nombreux passages éclairants.

La lecture est addictive, je n'ai pas vu les 900 pages défiler même si j'avoue avoir mis du temps à lire ce livre. le style très vraiment très prenant. Tout au long de la lecture j'ai eu l'impression de cotoyer quelque chose d'indéfinissable, une impression qui tantôt se fracassait, tantôt se renforçait. Je pense que la lecture des Carnets d'Eléazard n'est pas étrangère à ce phénomène, j'ai trouvé ces carnets particulièrement intéressants voire croustillants – sorte de réflexion sur tout et n'importe quoi, moyen de laisser s'exprimer une facette de notre personnalité. le personnage d'Eléazard se permet de passer quelques coups de gueule qui m'ont bien fait rire, j'ai vraiment adoré cet homme.

Je n'aurai qu'un seul gros bémol pour ce livre, il s'agit de sa fin beaucoup trop ouverte pour moi. Tout au long de la lecture l'auteur nous propose un livre riche et complet, la fin est presque brutale, trop nette pour coller avec l'ambiance du livre, en ce sens je pense qu'un petit épilogue aurait permis aux lecteurs de ressortir de la lecture avec l'esprit un peu moins confus. Je me pose encore des questions avec cette fin, sans doute est-ce le but recherché mais je ne comprends pas la démarche. 900 pages très complètes pour une fin trop rapide et soudaine.

Je tiens toutefois à soulever ce qui me semble être un gros point positif, il s'agit des nombreuses annotations d'Eléazard sur la biographie de Kircher, annotations que vous retrouvez à la fin du livre. Elles ne sont pas indispensables pour comprendre le récit mais cela le rendra plus riche. Je n'ai pas toujours lu ces notes afin de ne pas casser mon rythme de lecture. La fin du livre est également doté d'un glossaire qui répertorie l'ensemble des termes brésiliens utilisés par l'auteur. Vous trouverez aussi une table des matières.

Je pourrai vous parler encore et encore de ce livre, aborder avec vous les autres personnages mais la chronique perdrait sans doute en intensité et votre attention diminuerait. Là où les tigres sont chez eux est un roman-fleuve, un roman-monde, un roman-monstre ( Prix médicis ), un roman-jungle ( Valérie Marin La Meslée ). Ce livre nous offre une plongée au coeur d'une réalité inaccessible, une jungle de sensations. J'ai apprécié ma lecture mais je déplore une fin trop brutale qui rompt avec l'harmonie qui s'était installée.
Lien : https://wolkaiw.blogspot.fr/..
Commenter  J’apprécie          60
Chacun des chapitres du roman de Roblès commence par la reproduction de plusieurs pages du manuscrit ; puis le romancier "se lâche" et nous conte plusieurs aventures en parallèle, sans relation apparente les unes avec les autres : l'épouse du journaliste, en instance de divorce, se lance dans une expédition archéologique dans le Mato Groso, leur fille adolescente expérimente drogue et sexe sans retenue, lui-même rencontre une jeune italienne mystérieuse. Le gouverneur de la Province, cruel et corrompu, est confronté à son épouse alcoolique ; on verra aussi les pérégrinations d'un jeune infirme misérable dans la jungle misérable des favellas. un panégyrie des désastres humains en quelque sorte
Les nombreux personnages sont attachants et bien "croqués" néanmoins trop moralisateur et une critique excessive et sans trop de nuance de l'Occident, de la religion et de la société de consommation qui sacrifient souvent à l'air du temps et au "politiquement correct". Il ne mériterait pas le Médicis...
Commenter  J’apprécie          60
Surtout, ne pas se décourager par les presque 800 pages de ces histoires enchevêtrées, poursuivre sa lecture comme Eléazard von Wogau poursuit son travail, avec ses doutes et ses interrogations. S'attacher jusqu'au bout à suivre les destins croisés des personnages de ce récit foisonnant. Et à travers eux ou parfois comme eux, s'interroger sur ce que nous sommes, individuellement et collectivement.
Commenter  J’apprécie          60
Nostalgie du baroque. Jean-Marie Blas de Roblès, Là où les tigres sont chez eux.

Extrait :
Là où les tigres sont chez eux est un bon roman et c'est déjà pas mal. Il s'agit pourtant du livre sans doute le plus décevant de cette rentrée littéraire parce qu'il n'est qu'un bon roman qui n'a pas tenu ses promesses, qui n'a pas réalisé ses ambitions.
L'ambition réside d'abord dans l'ampleur et la structure narrative de ce roman dont l'action se déroule au Brésil, une structure complexe qui va se mettre en place dès le premier chapitre. le prologue commence ainsi :

« – L'homme a la bite en pointe ! Haarrk ! L'homme a la bite en pointe ! fit la voix aiguë, nasillarde et comme avinée de Heidegger. Brusquement excédé, Eléazard von Wogau leva les yeux de sa lecture ; pivotant à demi sur sa chaise, il se saisit du premier livre qui lui tomba sous la main et le lança de toutes ses forces vers l'animal. A l'autre bout de la pièce, dans un puissant et multicolore ébouriffement, le perroquet se souleva au-dessus de son perchoir, juste assez pour éviter le projectile. Les Studia Kircheriana du père Reilly allèrent s'écraser un peu plus loin sur une table, renversant la bouteille de cachaça à demi pleine qui s'y trouvait. Elle se brisa sur place, inondant aussitôt le livre qui s'y trouvait. – Et merde !... grogna Eléazard. Il hésita un court instant à se lever pour tenter de sauver son livre du désastre, croisa le regard sartrien du grand ara qui feignait de chercher quelque chose dans son plumage, la tête absurdement renversée, l'oeil fou, puis choisit de revenir au texte de Caspar Schott. »

Eléazard dont le nom et le prénom sont eux-mêmes atypiques pour un Français est atopon à plus d'un titre. Géographiquement d'abord, puisqu'il vit à Alcântara dans le Nordeste, loin de tout ; professionnellement, puisqu'il est correspondant de presse dans une région où il ne se passe presque rien ; affectivement, puisqu'il vient de se séparer de sa femme Elaine, paléontologue en mission dans le Pantanal au sud-ouest du pays, qui ne supportait plus son cynisme et que sa fille, Moéma, vit à Fortaleza où elle est inscrite à l'Université et qu'il vit maintenant seul avec son perroquet imbécile qui répète sans cesse que « l'homme a la bite en pointe » au lieu du vers de Hölderlin « l'homme habite en poète » et Soledade, sa femme à tout faire qui ne fait d'ailleurs rien si ce n'est regarder la télévision, l'aimer en secret et lui servir à boire ; intellectuellement enfin puisque en plus d'être un spécialiste d'Athanase Kircher, un jésuite du XVIIème siècle qu'il a cessé d'étudier par désenchantement pour se consacrer à l'inactivité la plus totale, il a également renoncé à écrire, Bartleby moderne. Mais voilà qu'en cette matinée de juin 1982, Eléazard vient de recevoir d'Europe un manuscrit inédit, une biographie de Kircher par son disciple et ami Caspar Schott.

La suite ici : http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/2008/10/nostalgie-du-baroque-jean-marie-blas-de.html
Lien : http://bartlebylesyeuxouvert..
Commenter  J’apprécie          60
Difficile de résumer ce roman tant les formes qu'il prend sont multiples. Entre la biographie d'un jésuite du XVIIe siècle, le quotidien qu'un journaliste expatrié au Brésil qui travaille sur celle-ci, une expédition archéologique, un gouverneur véreux, un enfant des favelas, une adolescente à la recherche de repères, on a l'impression de tenir un roman tout en un !

Et pourtant toutes ces histoires sont liées. On alterne subtilement de l'une à l'autre avec comme point commun à chaque partie ce jésuite allemand dont on suit l'évolution. J'ai beaucoup apprécié cette biographie très érudite, avec énormément de notes en fin d'ouvrage qui m'ont permis de découvrir de formidables personnages.

Cette grande érudition, c'est peut-être aussi le point faible de ce roman. J'en ressors avec l'impression d'être sûrement passé à côté de beaucoup de références... Mais relire un roman n'est pas dans mes habitudes donc je resterai sur cette impression.

Hormis le personnage d'Éléazard von Wogau, le journaliste, j'ai apprécié tous les personnages dont la personnalité est très bien développée. Alors oui, parfois ces personnalités sont un peu surprenantes, on ne comprend pas bien leurs réaction et leur comportement, mais rien ne m'a paru déplacé. Je me suis laissé entièrement porté par la plume de Jean-Marie Blas de Roblès.

Autre petit bémol : la fin de l'ouvrage m'a laissé sur ma faim. Tout n'est pas entièrement résolu, de nombreuses zones d'ombre restent. Mais s'il avait fallu toutes les éclaircir, je n'aurais peut-être pas pu tenir le livre à une main tant il serait devenu épais !

Je ressors toutefois satisfait de cette lecture suggérée par ma librairie qui m'a permise de découvrir cet excellent auteur. Ce fût un voyage original et très enrichissant à la croisée de différents mondes.
Commenter  J’apprécie          50
Captivant !
Un roman fleuve virtuose qui s'attache notamment à la personnalité fascinante d'Athanase Kircher, jésuite allemand du 17e siècle qui travailla sur les mathématiques, l'hébreu, la Chine, les hiéroglyphes et inventa la lanterne magique. Quelques siècles plus tard, au Brésil, le correspondant de presse Eléazard von Wogau enquête sur le jésuite. Une enquête qui aura des conséquences sur sa vie.
Jean-Marie Blas de Roblès est un conteur talentueux qui sait transmettre son immense érudition sans en étouffer le lecteur.
Lien : https://shot-de-culture.fr/r..
Commenter  J’apprécie          50
Un bonbon de 900 pages. Que dire sinon qu'on a l'impression de lire un Umberto Eco avec une teinte tout à fait différente. J'ai aimé la tendresse, la cruauté, l'humour et la vraisemblance des multiples situations où nous plonge l'auteur. On a l'impression de redécouvrir le monde derrière les yeux des personnages qui sont pour le moins fantasques.

Je n'ai rien lu d'autre de cet l'auteur pour l'instant mais je vais voir ce qu'il a en magasin.
Commenter  J’apprécie          50
Gros morceau, découvert au cours d'une discussion improbable dans un bar paumé. Mais bon, ça parlait du Brésil, alors j'ai tiqué. Ce gros pavé est longtemps resté sur mon étagère, et puis je me suis lancée. Il faut dire qu'en ce moment, entre Merle, Giebel, Delfino, et Jaworsky, je suis dans ma période auteurs français qui écrivent en bon français. Les traductions pourries amenuisent notre langage et en tant que traductrice, ça me blesse et ça me désole. Donc les tigres. En cette période d'élections, ils ne pouvaient pas mieux tomber. Même si la structure du livre m'a un peu déstabilisée au début, beaucoup de personnages, de lieux, et d'informations, mais au final, ça a fait passer la pilule. Tout plein de petites histoires dans l'immensité de l'oeuvre. Dans tous les sens du terme. Drogue, corruption, nature flamboyante, et religion. Chacun son style. Mais hey ! Quel joli portrait du Brésil ! Au moins, celui-là à l'honnêteté de ne pas se cacher derrière le foot et la samba. C'est un livre violent, par sa richesse et par les sentiments qu'il provoque, mais de cette rare violence qui fait du bien. Je n'en dirai pas plus. c'est une histoire d'émotions. Il y a des missionnaires, des indiens, des universitaires exaltés, des jeunes paumés, des politiciens pourris, mais ils ne jouent pas forcément le rôle qu'on leur attribuerait en Europe. le Brésil est là. Toutes griffes dehors.
Commenter  J’apprécie          50




Lecteurs (1022) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3680 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..