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3,85

sur 1068 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
J'ai plutôt apprécié l'A Rebours de Huysmans, pas tant pour l'érudition dont fait preuve l'auteur, au travers de son personnage de Des Esseintes, féru d'art, mais plutôt pour l'ambiance qui se dégage de cette écriture à la "désespérance teintée d'humour et volontiers provocatrice". Brandi dès sa parution comme l'expression même du mouvement décadent fin de siècle, cet ouvrage s'inspire clairement de la noirceur morbide de Poe ou Badelaire, m'a beaucoup rappelé La Confession d'un enfant du siècle de musset, et surtout Oscar Wilde. On y retrouve aussi sans doute le cynisme d'un Céline et les chants glauques de Lautréamont..
Les réflexions philosophiques pascaliennes se mêlent au pessimisme de Schopenhauer au travers de l'anti-héros Des Esseintes, dont l'expérience sans lendemain est à peu près le seul ressort du roman, qui reste immobile, immanent... et c'est aussi ce qui en fait la force.
Bref, un roman à ne pas lire durant les longues nuits mornes d'automne -déprime garantie-, mais remarquable. Bien que n'ayant rien lu de Houellebecq, je peux comprendre qu'il rende hommage à Huysmans. Loin d'être dépourvu de passion, l'anti-héros Des Esseintes la vit au contraire pleinement, dans un sens christique, développant une recherche éffrenée, désespéré, du beau et du plaisir artificiel, qui ne peut prendre fin que dans la mort... ou dans le refuge religieux... choix que fera plus tard Huysmans.
Qu'on ne s'y trompe pas, donc, cette lecture -alors qu'il ne se passe à peu près rien- n'a rien d'ennuyeuse : l'esprit torturé et la grande culture -les deux sont-ils liés ?- de Huysmans interpellent et attachent le lecteur. Pour autant, j'avoue avoir poursuivi l'observation de la tortue couverte de joyaux et s'effondrant sous son poids de Des Esseintes par celle, nettement plus légère, de la valse lente des tortues de Katherine Pancol...


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Le mouvement naturel conduisant de la virginité culturelle à sa plus grande imprégnation par le biais des oeuvres littéraires, musicales et picturales –en passant par la découverte des cercles mondains, des voyages et de la pluralité religieuse- devrait normalement être celui d'un gain de plaisir et d'ouverture spirituelle. Mais, se conduisant loin de toutes les normes, Des Esseintes chemine A rebours et cette culture, qu'il choisit d'augmenter en lui tous les jours, ne lui procure qu'un gain de sophistication dégénérée, qu'un mépris sans cesse plus grand pour ses semblables, qu'un ennui désespéré et une langueur suicidaire.


Une tentative d'explication psychanalytique est parfois ébauchée par J. K. Huysmans. le passé du personnage est évoqué comme élément déclencheur de tous ses maux futurs. Enfance morne et triste, sans amour ; alors que la dislocation des couples modernes est aujourd'hui souvent critiquée, ici leur union par-delà les haines et le mépris est plus farouchement dénoncée. Evidemment, cette prédisposition n'explique pas tout. Que serait-elle devenue si elle n'avait pas trouvé, à l'extérieur de la cellule familiale, le soutien de la culture ? Des Esseintes interagit avec elle comme un goujat avec les femmes : il choisit un de ses aspects –littérature, peinture, musique…-, s'emballe pour les délices qu'il imagine pouvoir se procurer par son biais, consomme tout en peu de temps, jusqu'au dégoût qui l'amène enfin à rejeter en bloc et avec mépris ce qu'il venait de porter aux nues. Cependant, ces histoires d'amours culturels ne laissent pas Des Esseintes indemnes. Qui est finalement triomphant ? La culture, qui n'a pas besoin de cet homme pour vivre et continuer d'avoir ses adeptes ? Ou Des Esseintes, qui perd à la fois l'espoir, la curiosité et se rapproche à chaque fois davantage du moment où il n'aura plus rien à rejeter ?


Avec cette destruction de l'édifice culturel qui semble réjouir le personnage, le lecteur pourra aussi trouver son plaisir. La littérature de boulevard, la déchéance du latin jusqu'au français médiéval, les oeuvres populaires…sont laminées par les descriptions implacables d'un personnage qui semble trouver son raffinement suprême dans le contraste qu'il définit entre l'usage d'une prose sophistiquée et les desseins d'annihilation qu'il lui impose.


« Les jardiniers apportèrent encore de nouvelles variétés ; elles affectaient, cette fois, une apparence de peau factice sillonnée de fausses veines ; et, la plupart, comme rongées par des syphilis et des lèpres, tendaient des chairs livides, marbrées de roséoles, damassées de dartres ; d'autres avaient le ton rose vif des cicatrices qui se ferment ou la teinte brune des croûtes qui se forment ; d'autres étaient bouillonnées par des cautères ; soulevées par des brûlures ; d'autres encore, montraient des épidermes poilus, creusés par des ulcères et repoussés par des chancres ; quelques-unes, enfin, paraissaient couvertes de pansements, plaquées d'axonge noire mercurielle, d'onguents verts de belladone, piquées de grains de poussière, par les micas jaunes de la poudre d'iodoforme. »


Le plaisir d'une telle lecture provient essentiellement de la dose de dérision qu'il est possible d'insuffler au roman ; cependant, si on essaie de vivre au même niveau d'observation que Des Esseintes, aucune ironie n'est permise. de drôle et amusant, A rebours devient alors désespéré et revanchard. le personnage lasse, ses cris d'orfraie deviennent insignifiants. On aurait envie d'un personnage plus consistant, qui cesserait de s'illusionner en prenant la culture comme prétexte, et en ne revendiquant rien d'autre comme source de ses malheurs et de son incapacité à vivre.


Culture = barbarie ? Oui, quand elle est utilisée à mauvais escient, comme n'importe quoi d'autre d'ailleurs. Mais quelles prédispositions dans l'individu le forcent contre son gré à la pervertir et à en faire l'objet de sa propre destruction ? J. K. Huysmans préfère ne pas répondre directement à cette question, ce qui permettra au lecteur désirant de se faire sa propre opinion sur le sujet. de quoi est donc constitué l'essentiel d'A rebours ? de petites rancoeurs d'abord amusantes, mais qui deviennent très rapidement lassantes et qu'on se surprend à survoler dans la dernière partie du livre, s'arrêtant seulement sur quelques beaux passages écrits dans une prose somptueuse. On finit par devenir semblable à Des Esseintes, ou presque : l'indifférence ne risque pas de se transformer en mépris virulent, et l'oeuvre d'annihilation cessera sitôt le livre refermé. Plus précisément, J. K. Huysmans nous permet de comprendre son personnage en nous plongeant dans une expérience d'ennui culturel local, qui se conclut en même temps que la lecture d'A rebours.

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Si je n'ai pas vraiment ressenti de l'ennui en lisant "A rebours", il est vrai que je n'ai pas ressenti pour autant du plaisir en lisant ce texte.
J'ai plutôt eu l'impression d'avoir affaire à un texte incolore, indolore, malgré la beauté certaine du style, malgré la critique de la société, malgré quelques passages fort beaux, aussi.
L'émotion a manqué. Je n'ai rien ressenti en lisant cette histoire ; tout au plus, ai-je senti une petite nuance de plaisir ou d'ennui ci et là. J'ai lu ce texte à froid, comme j'aurais lu un essai. le problème, c'est que dans un essai, l'intérêt réside dans les idées ; ici, l'intérêt est avant tout artistique, esthétique. Et c'est cette dimension qui manqua à ma lecture, cette dimension esthétique, artistique, émotionnelle, ce je ne sais quoi qui fait qu'on aime un livre, ce caractère magique de la lecture, ce quelque chose qui m'a secoué tant de fois. J'ai eu l'impression d'avoir affaire à un livre théoriquement bon : l'histoire est intéressante, le style est très beau, quoiqu'un peu vieilli, la psychologie est pleine de finesse, mais point de vue plaisir et point de vue émotion, il ne me reste pas grand-chose.
Pourtant, je n'ai pas détesté "A rebours". le sentiment dominant de ma lecture, si tant est que c'est un sentiment, fut l'indifférence.
Les pages se sont tournés et rien ne s'est passé ; ni ennui, ni plaisir, ce livre est resté hermétique et il n'y eut aucun autre événement.
Tant pis…
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Où l'on découvre que Boris Vian n'a pas inventé le Pianocktail, que les magazines de décoration d'aujourd'hui sont vraiment minables, et qu'on ne peut pas exiger tout et n'importe quoi d'une tortue. Certains passages m'ont fait penser aux Impressions d'Afrique de Roussel, par la démesure et la précision extrême dans la description des passe-temps de Des Esseintes. Ce roman c'est l'anti-Proust : Des Esseintes ne porte absolument aucun intérêt aux gens qui l'entourent, et se faisant il ne peut que les haïr et s'ennuyer. Tous les procédés de distraction échoueront, quand on est seul et sans amour on dépérit. le lecteur suit les moments d'enthousiasme de Des Esseintes, à chaque nouvelle occupation on est emporté par la débauche de luxe et de détails, tout comme il le suit progressivement dans un ennui et un mépris de plus en plus profonds.
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J'ai découvert, lu et étudié ce livre il y a quelques années déjà ; j'en garde le souvenir d'un auteur et d'une lecture difficiles.
Pourtant, je me replonge dans mes notes pour vous parler d'À rebours de Huysmans, un roman du XIXème siècle qui nous parle de mélancolie, car son approche est intéressante.

Huysmans a écrit ce livre étrange et provocateur, publié en 1884, pour rompre avec le naturalisme et se démarquer de Zola qu'il a pourtant beaucoup fréquenté. C'est tout le sens du titre car ce livre est un tour de force, puisqu'il a fallu procéder « à rebours » de tout, prendre le contre-pied de tous les usages, des idées, des goûts, des pratiques romanesques alors dominants.
Il a défini ainsi le sujet de son roman dans une lettre à Mallarmé : « le dernier rejeton d'une grande race se réfugie, par dégoût de la vie américaine, par mépris de l'aristocratie d'argent qui nous envahit, dans une définitive solitude ».

Des Esseintes, le héros souffre ici d'une véritable maladie du système nerveux affectant la sensibilité, la mobilité et l'intelligence. Il est non seulement mélancolique, mais surtout complètement névrosé.
Il est difficile d'éprouver de l'empathie pour ce personnage, issu d'un milieu privilégié, celui des riches oisifs, délivrés de tout souci matériel, qui ont les moyens de se consacrer à leur vie intérieure, au risque de s'y perdre et nous avec. Des Esseintes est un aristocrate en total décalage avec son temps mais assez riche cependant pour pouvoir cultiver sa différence et se construire un refuge dédié à l'art et à la culture, où il s'enferme pour se nourrir de son propre fond, s'abandonnant au flux ininterrompu de ses souvenirs, de ses rêveries et de ses réflexions.
À rebours est un roman où il n'y a pas d'intrigue à proprement parler ; en fait, il ne se passe rien de vraiment concret. Huysmans décrit la façon de vivre de Des Esseintes dans une existence esthétisée à l'extrême : un personnage unique, un huis clos, une longue introspection… de nombreuses digressions très intellectualisées perdent le lecteur dans une quête esthétique et métaphysique à laquelle je n'ai jamais vraiment réussi à m'intéresser, même en faisant preuve de persévérance.
Huysmans donne la priorité à l'analyse psychologique d'un état de malaise et de mal-être, à l'assouvissement de pulsions perverses et transgressives et à l'évasion dans des espaces imaginaires. Hors de toute temporalité humaine, Des Esseintes règle sa vie comme une oeuvre d'art et se lance dans une série d'expériences inédites et originales, dont il espère un plaisir raffiné, susceptible de le sortir de sa léthargie et de lui procurer des émotions nouvelles, singulières et fortes ; mais toutes se révèleront vaines et ratées.
On trouve une dimension métaphysique dans les expériences sensorielles et esthétiques de Des Esseintes ; l'art dépasse la notion de décoration pour ce faire nourriture spirituelle, mais la crise existentielle aboutira aussi dans une impasse.

À rebours a même été considéré comme un véritable manifeste décadent. Des Esseintes illustre à lui seul tous les symptômes de la décadence : la névrose, les complications sensuelles et cérébrales, la ferveur esthétisante, la fascination pour le monstrueux, la lassitude de vivre… L'écriture semble également corrompue : le récit est divisé en chapitres désordonnés et fragmentés, sans logique apparente, les phrases sont souvent bizarrement construites, avec des inversions, des antépositions… Et puis, on est vite noyé sous une abondance de détails, de nuances, de redondances… C'est comme si l'écriture aussi était atteinte de névrose, était malade et désorganisée…
L'auteur se met un peu en scène à travers son personnage et force le trait avec un humour très particulier, ironique… Les gouts artistiques de Des Esseintes reflètent sans doute ceux de l'auteur de même que son opinion sur ses contemporains ; il y a une grande part de lucidité parfois, une prise de conscience de la vacuité de son existence et de l'inutilité de ses efforts.
Certaines situations sont particulièrement comiques, cependant, mais à un tel niveau d'absurdité de de cocasserie que s'en est pitoyable. Huysmans pousse vraiment très loin et à outrance l'extravagance de son personnage.
Puis, la volonté de s'isoler devient de plus en plus angoissante dans une maison dont les pièces sont disposées en gigognes, dont la chambre devient cellule monacale et où Des Esseintes se replie complètement sur lui-même.
Le final apocalyptique fait coïncider la fin de la retraite de Des Esseintes avec la vision d'une destruction grandiose du monde. C'est plus ou moins convaincant, une attitude très pessimiste par laquelle la posture mélancolique de cette fin de XIXème siècle affirme que l'on s'éloigne d'un âge d'or irrémédiablement perdu et que l'on va vers un écroulement inéluctable.

Un roman sur l'art de tromper l'ennui où l'on s'ennuie justement beaucoup…
Des parallèles avec Baudelaire que je ne suis pas parvenue à approfondir.
Un livre difficile et fastidieux, pour un lectorat d'érudits et d'initiés.
Une curiosité littéraire à connaître mais à aborder en lisant d'abord les préfaces, notices et dossiers qui figurent dans toutes les bonnes éditions.

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Temps de confinement, on en revient aux classiques qu'on n'a jamais eu le temps de lire - ou l'envie ?

Ce livre figurait sur la liste des classiques qu'on nous recommandait d'étudier avant de passer le bac. Bien entendu, piètre lectrice à l'époque, je n'en ai rien fait, et cela ne m'a pas manqué. Tout au plus, j'éprouvais un léger pincement de remords au passage de la rue qui porte le nom de son auteur, située à moins de 50 m. de chez moi …

Et puis tout à coup, l'actualité se remit à évoquer ce talentueux critique d'art et romancier, naturaliste puis symboliste avant de se convertir au catholicisme. D'abord, je l'ai découvert au détour du roman de Michel Houellebecq « Soumission », puis il y eut une passionnante exposition au musée d'Orsay, enfin, il était clairement fait allusion au « modèle » de Jean des Esseintes dans le roman de Julian Barnes, « L'homme en rouge ».

Ce « modèle », c'est le comte Robert de Montesquiou, archétype du dandy à la française, merveilleusement portraituré par Boldini. C'est aussi le personnage de Palamède, baron de Charlus, dans La Recherche.

Trois motifs de me plonger dans ce roman de la décadence, où il ne se passe pratiquement rien. Car Jean des Esseintes est revenu de tout. Riche suffisamment pour ne pas avoir à travailler – ce serait déroger à sa caste – entouré de ses multiples collections, il éprouve la quintessence de l'ennui, il « s'embête à crever ». S'étant retiré dans une maison de banlieue où il vit en reclus mais avec ses domestiques, au milieu des livres qu'il a fait relier avec des prescriptions étonnantes, tout comme est baroquissime la décoration de ses appartements, les fleurs de son jardin, son « orgue à parfums » avant la lettre …

« Il vivait sur lui-même, se nourrissait de sa propre substance, pareil à ces bêtes engourdies, tapies dans un trou, pendant l'hiver ; la solitude avait agi sur son cerveau, de même qu'un narcotique. Après l'avoir tout d'abord énervé et tendu, elle amenait une torpeur hantée de songeries vagues ; elle annihilait ses desseins, brisait ses volontés, guidait un défilé de rêves qu'il subissait, passivement, sans même essayer de s'y soustraire. »

"A rebours", le roman le plus connu de Huysmans, est paru en 1884. L'auteur y mêle les états d'âme d'un esthète velléitaire en pleine dépression - et sans doute atteint de la terrible maladie dont finira son ami Guy de Maupassant - à ses propres considérations sur les oeuvres littéraires et artistiques de son temps. Ainsi découvrons-nous son extraordinaire passion pour la littérature latine, Gustave Moreau et Odilon Redon, ses préférences pour Verlaine, Baudelaire, Corbière, Mallarmé, Goncourt, Poe, Flaubert, Villiers de l'Isle Adam, Barbey d'Aurevilly et, naturellement, Zola.

Trois grands moments : la description de la Salomé de Gustave Moreau, la pâmoison devant les assemblages de senteurs, le départ inopiné pour Londres qui se termine à la brasserie de la gare du nord.

Même pour un lecteur du XXIème siècle, la langue, les évocations et les descriptions sont éblouissantes. C'est effectivement un classique qu'il est bon d'avoir lu, même en sautant quelques pages d'accumulations un peu « barbantes ». Mais je doute qu'un lecteur de l'âge à devoir passer le bac puisse s'y atteler.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Je donnerai mon avis en deux nuances.
La première.
Si vous êtes dépressif, lisez A rebours: les caprices névrosés de Des Esseintes ont refait ma journée (et pourtant je suis de nature enjouée et gaie). Quelques exemples qui m'ont fait mourir de rire: l'épisode de la tortue, le dénouement du voyage avorté, le bar transformé en orgue à ventre ouvert et les alcools en une symphonie déjantée, j'en passe et des meilleures.
Le texte fourmille de références en arts et en littérature, la plume est juste exquise, les idées développées tellement pertinentes et parfaitement mises en couleur dans la prose de l'auteur (un exemple, l'allégorie de l'humanité incarnée dans le foisement de la flore)
La deuxième.
Malheureusement, à partir de la moitié de l'ouvrage, j'ai décroché. L'ennui de de Esseintes a fini par m'atteindre, m'empoisoner comme lui, et j'ai peiné à finir ma lecture.
Le fourmillement de références littéraires a fini par me donner à moi aussi la nausée, l'excès a agi sur mon estomac comme celui du protagoniste.
Dommage.
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À rebours, par Joris-Karl Huysmans. Roman curieusement revenu au goût du jour, cité comme un ”classique” à lire, mais aussi livre culte pour certains, À rebours est un livre difficile, écrit pour une élite qui attend du neuf, un renouvellement du genre littéraire, une oeuvre originale, marquée du sceau de la rareté et de la confidentialité.
Des Esseintes est un aristocrate fortuné, qui ne supporte plus la société parisienne dont il était membre, et qui s'isole dans une maison à l'écart de tout, à Fontenay-aux-Roses. Il se présente comme un névrosé (terme de l'époque et qu'il lie à son hérédité), et on le sent nerveux, instable, hypersensible, insatisfait… C'est un esthète, un dandy qui aimait à se donner en spectacle, un collectionneur d'objets rares, porté sur un raffinement sophistiqué, persuadé de vivre dans un monde décadent et qui s'imprègne de cette même décadence, en fait une valeur montante dans ses choix et ses attitudes. Pour lui, « la nature a fait son temps », il fait l'éloge de l'imagination, de l'excentricité et s'extasie devant tout ce qui relève de l'artifice.
Atteint d'une maladie digestive qu'il met sur le compte de sa ”névrose”, il se verra prescrit de retourner en société. C'est l'échec d'une vie repliée sur soi, retirée du monde, autarcique.
Entre-temps, Il aura longuement disserté sur les aménagements divers de sa nouvelle vie, sur ses goûts et ses couleurs, en commençant précisément par les couleurs, celles de ses murs et de ses rideaux. Des Esseintes se constitue dans son logis un refuge protecteur, dont il décide de chaque détail. Il fait l'acquisition d'une tortue dont il veut garnir la carapace de pierres précieuses, prétexte pour les passer toutes en revue. Puis c'est le tour des saveurs. le chapitre suivant traite des peintres et de la critique d'art, occasion pour Des Esseintes de distinguer la peinture onirique, symboliste de Gustave Moreau, d'Odilon Redon et d'autres, moins connus. Un chapitre floral permet l'illustration de fleurs et de plantes exotiques, étranges, suggestives, quasi sexuelles, aussi belles que si elles étaient artificielles, à l'origine cependant d'un cauchemar épouvantable où il doit subir l'assaut de femmes atroces et de plantes monstrueuses, tandis que les parfums et la musique seront abordés spécifiquement, et que trois chapitres seront consacrés aux auteurs latinisants de la longue décadence romaine, aux auteurs contemporains qualifiés de catholiques (Lammenais, Veuillot, Falloux, Barbey d'Aurevilly…) et à quelques monstres sacrés de son temps comme Baudelaire, Hugo, Leconte de Lisle, Zola, Poe, Villiers de l'Isle Adam, Mallarmé.
A rebours des usages romanesques caractérisés par une action, une progression dramatique, voilà un roman immobile, qui égrène des listes parfois interminables, de véritables catalogues de tout, personnes, plantes, objets, arômes, et qui, par moments, distille des souvenirs, des rêveries, des réflexions, toujours sur un mode esthétisant, explorant l'intériorité et le monde alentour.
Il évoque aussi des épisodes de sa vie antérieure, telle ce repas de deuil avec ses tentures et sa nappe noires, ses assiettes bordées de noir et un orchestre jouant des marches funèbres, ou sa rencontre avec un jeune ouvrier de 16 ans qu'il initie à la débauche dont il deviendra dépendant. La vocation du Mal est une tentation chez le héros.
En dépit de l'importance que le roman donne à des choix de vie, à des valeurs comme la peinture, la littérature, la rêverie, l'auteur fait le constat d'une impasse, d'une fin de civilisation, comme frappée de malédiction divine. Vraiment, c'était mieux avant ?

Lien : http://lireecrireediter.over..
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Je me demandais du haut de mes arrogant 20 ans, « amis pourquoi je lis ce roman ? » Cela me parle-t-il d'un temps, d'une époque ? D'une fin d'époque ? Cela me parle-t-il de l'ennui d'un type qui ne s'intéresse pas à ses frangines et frangins humain.e.s.
Bien écrit, appartient a notre histoire, OK, je me souviens que je l'ai finalement finis celui-là. Ce qui ne fut pas le cas de son descendant 99 Francs (14,99 Euro) de Frédéric Beigbeder, je l'avais finalement déjà lu 15 ans auparavant.
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Dans ce récit hors norme, Huysmans nous propose un repli sur soi.

Des Esseintes a choisi de se couper du monde. Pour cette retraite méditative, il a trouvé refuge dans sa maison de Fontenay. Durant son séjour, il se plonge dans une analyse des oeuvres littéraires et artistiques. Ainsi, il prend le temps d'étudier les tableaux de Gustave Moreau ou les esquisses d'Odilon Redon, de décrire la nature et les objets qui l'entourent. Il va également avec une grande minutie s'approprier des odeurs. Dans cette immobilité contemplative, Des Esseintes transmet au lecteur son amour de l'art.

Loin de l'effervescence d'une vie sociale débridée, Des Esseintes fait le choix du repli et de la solitude. Mais très vite, ses angoisses, ses névroses et son insatisfaction perpétuelle viennent le ronger au plus profond de lui-même.

Loin du roman, ce récit prend le temps de la contemplation. Cette étude des oeuvres littéraires et artistiques pose également la question de la religion. Au-delà Huysmans choisit de mettre en lumière les limites de ce siècle finissant et vient y porter un coup fatal.

Ce classique de la décadence provoque une rupture nette et brutale avec le naturalisme cher à Zola.

Dépourvu d'intrigue, ce livre si singulier prend le temps de l'introspection mais surtout s'avère être une vraie révolution de la fin du XIXème siècle.

Une oeuvre emprunte d'un grand esthétisme avec une certaine exigence littéraire qu'il conviendra à mon avis, pour ma part, de se réapproprier dans plusieurs années…
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