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Louise Servicen (Traducteur)
EAN : 9782226053688
436 pages
Albin Michel (07/05/1991)
4.13/5   41 notes
Résumé :
Félix Krull, jeune homme d'origine assez douteuse, est doué de qualités séduisantes. C'est un joli garçon, un charmeur, un peu une nature d'artiste - et un fripon du point de vue bourgeois. Profondément sensible au côté chimérique de la vie, il s'applique à séduire et à illusionner. Epris du monde, il essaye de provoquer l'amour de ce monde et y réussit fort bien, grâce à ses talents. Mais si favorisée que soit son individualité, il ne s'en satisfait point et cherch... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Les confessions du chevalier d'industrie Félix Krull occupent une place à part dans l'oeuvre de Thomas Mann. Ce livre, sans cesse repris, enjambe les deux grands conflits mondiaux du XXème siècle. C'est celui que Mann voulait le plus léger, le plus agréable, mais il ne parvint pas à lui donner une fin bien délimitée. de démarrages et redémarrages en interruptions puis abandon, cet ouvrage, qui devait d'abord revêtir la forme d'une nouvelle, dont les premières pages ont été noircies entre 1909 et 1911, et dont la rédaction a été abandonnée, non seulement pour cause de guerre, mais aussi parce que l'auteur allait entreprendre l'écriture d'un monument littéraire, La Montagne Magique, terminée dans les années 20, et celle d'un pamphlet contre les Alliés franco-britanniques, Les Considérations d'un Apolitique, "valable" durant le temps du conflit, allait bientôt ne plus pouvoir tenir dans le moule initialement prévu, et s'amplifiant, allait bientôt devenir un roman, repris et continué des décennies plus tard, entre la fin de 1950 et le premier semestre de l'année 1954, mais finalement laissé inachevé, volontairement ou pas.
Si sur le ton de l'humour, Thomas Mann laissa entendre qu'il prenait ce travail pour un amusement et une détente, on peut reconnaître toutefois que l'auteur avait pris grand soin de chérir son bébé et de donner au personnage principal, Félix Krull, des traits physiques et moraux qui faisaient de lui un esthète et un charlatan, un jouisseur assumé, dont la beauté et le charme conquéraient tous les coeurs en endormant même la méfiance des bourgeois les plus endurcis. Sa façon d'évoluer en société et sa manière de vivre faisaient presque de lui un artiste, au sens où il développait ses talents et ses dons, pas toujours louables comme nous allons le voir, en signant ses actes comme un peintre le ferait d'un tableau ou un écrivain de son livre le plus achevé.
Né dans le Rheingau d'un père fabricant d'un ersatz de "champagne" - un vin mousseux rhénan baptisé Loreley extra cuvée -, Félix Krull devait avoir les fées qui s'étaient penchées sur son berceau, car même si les affaires de son géniteur étaient sur le déclin, lui allait, dans toutes les situations, savoir tirer son épingle du jeu, et se tirer de tous les embarras possibles, lors même que des ennuis semblaient poindre à l'horizon, prenant la vie comme une scène de théâtre et se jouant de toutes les difficultés. Aimant jouer la comédie, se grimer et se costumer, allant jusqu'à imiter le Kaiser Guillaume faisant la pose dans son uniforme, trompant le conseil de révision en jouant les garçons tout justes bons à réformer et en simulant la totale incapacité de servir malgré la volonté de le faire afin d'échapper au service militaire "à la prussienne", le voici qui, après un bref séjour à Francfort, débarque en France, dans un hôtel parisien, le James and Albany, pour y servir comme garçon d'ascenseur, il n'évite pas les mauvaises fréquentations mais sait aussi en avoir de bonnes et ne se départit jamais de ses bonnes manières. Et l'employé de jour de se transformer la nuit en voleur de bijoux, mais à la façon d'un gentleman comme le Lupin de Leblanc, dans l'élégance et la distinction, sous le regard complice de la détroussée, Madame Houpflé, qui va se payer le luxe de l'aider à commettre d'autres larcins.
Suprême raffinement, le voici qui, ajoutant une corde à son arc, va se glisser presque naturellement dans la peau d'un aristocrate, et conclure un marché avec le marquis de Venosta, en prenant sa place dans une vie de représentation et de voyages, alors que le vrai porteur du titre entendait échapper à ces mondanités ennuyeuses pour aller roucouler incognito dans les bras de sa maîtresse. Dans son nouveau rôle - rôle que l'on dirait fait pour lui -, Félix va enfin mener la belle vie dont il rêvait, et qui était à sa hauteur. Il est si crédible et si parfait dans la comédie qu'il livre, que personne ne se doute une seconde de cette imposture et de cette usurpation de l'identité d'un autre et qu'il puisse se prêter à pareil jeu, de mèche avec le véritable marquis.
Et le voici voyageant en train vers Lisbonne en compagnie du directeur du Musée des Sciences naturelles du lieu, le professeur Kuckuck, avec la fille duquel, une prénommée Zouzou, tous noms qui prêtent à sourire, il va entretenir une liaison, sous le regard d'une mère jalouse. Mais alors que l'on pourrait penser à une histoire d'amour parfait qui pourrait s'achever en happy end, comme dans Altesse royale, nous découvrons que Félix, fidèle à son personnage libre, impertinent et fier, prend bien soin de ne pas se mettre la corde au cou.
La ville de Lisbonne telle qu'elle est décrite dans le livre ressemble à un décor de carte postale. Mais le clou est la visite du musée, avec ces scènes de vie préhistorique décrites de manière saisissante et réaliste, et ces personnages de cire plus vrais que nature, ce qui m'a laissé un souvenir impérissable, malgré une lecture qui remonte à ma jeunesse.
Au-delà de la personnalité et du parcours de Félix Krull qui sont bien ceux d'un personnage de roman, il y a bien sûr dans ce livre de Thomas Mann des aspects autobiographiques évidents (il suffit de relire ce qu'il a écrit sur le Gymnasium prussien pour s'en convaincre, et le dandysme du personnage rappelle le besoin qu'avait Mann de vivre dans le confort de sa société d'origine, la bourgeoisie, tout en affichant son tempérament d'artiste, avec tous les droits qu'un individu de ce genre peut s'accorder).
Ce sont, de façon imagée, une partie des aspirations et tendances de Thomas Mann qui transparaissent finalement dans Les confessions du chevalier d'industrie Félix Krull. L'humour propre à l'auteur y est bien sûr très présent.

François Sarindar
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Les confessions du chevalier d'industrie Félix Krull détonnent dans l'oeuvre romanesque du Prix Nobel 1929, oubliez la prose tudesque et roborative des chefs d'oeuvre qui l'ont précédé, vous rentrez dans un monde de masque et de fantaisie.

Le roman s'inscrit dans la tradition du Bildungsroman ou roman de formation. Félix Krull est le fils d'un failli qui produisait du champagne de piètre qualité. Son parrain, qui lorsque notre héros était petit, l'affublait de costumes et de déguisements qui lui seyaient à merveille tant il était beau garçon - témoignant des dispositions précoces de ce dernier pour endosser tout les rôles, décide de l'adresser à un ami qui tient un hôtel parisien de grande classe. D'abord il faut passer par le service militaire où il se fait réformer haut la main. le voici à Paris, où tout lui semble sourire et où il va débuter par l'humble poste de garçon d'ascenseur.

Félix Krull présente bien, il s'exprime avec aisance, il se montre tour à tour d'une extrême politesse, d'un charme irrésistible et d'un esprit délié selon l'auditoire qu'il a devant lui . Les bonnes opportunités s'offrent à lui, il ne fait que les saisir, les victimes semblent le devancer dans ses projets, étourdis qu'il sont par son brio, sa séduction, son esprit, c'est à peine un escroc, il ne leur vole pour ainsi dire rien, il leur vends plutôt du rêve.

Quelle agréable roman, le récit est enlevé, c'est drôle, çà vous étourdit irrésistiblement. Le héros nous est immédiatement sympathique.On croirait lire un roman français, parfois çà vire au vaudeville; que Thomas Mann est pu écrire une telle oeuvre laisse pantois. C'est avec le plus grand des regrets qu'on découvre que le texte est inachevé, le père éternel l'ayant rappelé fort importunément au panthéon des écrivains.
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Felix Krull de Thomas Mann,
c'est vraiment lecture amusante, même si l'on ne sait pas ce que wikipedia disait sur Goethe et Simplicissimus.
Adapté au cinéma, 1957, avec Horst Buchholz et Liselotte Pulver.
Le lien de amazon.de montre la couvertrure de la DVD du film. Avec des photos de Buchholz et Liselotte Pulver.


Lien : http://www.amazon.de/Die-Bek..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
... je me mis aussitôt à lui parler, en phrases préparées à l'avance, et ainsi me le concilier rapidement et l'empêchai de tout mettre sens dessus dessous. Car les Français aiment et honorent la parole - certes à bon escient. C'est elle qui différencie l'homme de la bête et il n'est sûrement pas absurde d'avancer que l'homme se distingue d'autant plus de l'animal qu'il parle mieux - et bien entendu, le français. Cette nation considère en effet le français comme le langage des humains, tout de même que le joyeux petit peuple de la Grèce antique tenait, j'imagine, son idiome pour le seul mode d'expression humain et les autres pour un aboiement et un coassement barbare, opinion qu'involontairement le reste du monde partageait plus ou moins, voyant dans le grec, comme nous aujourd'hui, dans le français, le fin du fin.
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Etre ne signifiait pas bien-être. C'était une joie et un tourment et tout être intégré dans l'espace et le temps, toute matière participait, fût-ce en état de profonde léthargie, à cette vie, à ce tourment, au sentiment qui inclinait l'homme, détenteur de la sensibilité la plus éveillée, à la sympathie universelle. " la sympathie universelle" répéta Kuckuck en s'appuyant des mains au-dessus de la table pour se lever. Il me regarda de ses yeux étoilés et me fit un signe du menton. 
- [...] Rêvez du bras d'un beau galbe à ossature primitive, et de la fleur des champs qui sait grâce à l'éther solaire extraire l'inanimé et en le transformant, se l'incorporer ! Et n'oubliez pas de rêver des pierres, du caillou moussu qui gît dans le torrent depuis des millénaires, lavé, rafraîchi sous le déferlement de l'écume et des eaux ! Considérez avec sympathie son existence, vous, l'être le plus conscient devant le plus profondément inconscient, et saluez-le dans la création ! Il connaît le bien-être, si tant est qu'être et bien-être se puissent concilier. Je vous souhaite une bonne nuit !
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... une telle confiance, une telle ferveur offrent des avantages considérables. En effet, qui accorde grande importance aux choses et aux êtres s'assure qu'ils lui sauront gré de son opinion flatteuse. En outre ses pensées, son comportement s'imprègneront d'un sérieux, d'une passion, d'un sentiment de responsabilité qui en faisant de lui un homme tout à la fois aimable et important, pourront le conduire aux réussites et aux exploits les plus insignes.
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Au fond, quel merveilleux phénomène que l'œil de l'homme, ce joyau entre toutes les formations organiques, lorsqu'il s'ajuste pour concentrer son éclat humide sur une autre forme humaine ! Précieuse gélatine composée d'une substance aussi commune que le reste de la création, il montre, tout comme les gemmes précieuses, que les diverses matières n'importent point en soi et que tout est dans leur assemblage ingénieux et heureux. Mucilage enchâssé dans une caverne osseuse, une fois privé de l'âme il est destiné pourrir quelque jour dans la tombe, à se dissoudre de nouveau en boue liquide ; mais aussi longtemps que subsiste en lui l'étincelle de vie, il sait jeter d'admirables ponts éthérés par-dessus tous les gouffres de l'extranéité qui se peuvent interposer entre un humain et un autre.
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La culture ne s'obtient point par un labeur obtus et intensif, elle est le produit de la liberté et de l'oisiveté extérieure ; on ne l'acquiert pas, on la respire.
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Connaissez-vous ce roman dont l'action se déroule toute entière entre les murs d'un sanatorium accroché au flanc d'une montagne ? Lieu qui exerce un tel sortilège sur l'un de ses visiteurs qu'il ne voudra plus en repartir ?
« La montagne magique », de Thomas Mann, c'est à lire au Livre de poche.
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