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Dans ce récit, Tolstoï déploie son style franc et incisif plein de beaux adjectifs vigoureux qui vont droit au coeur. Il endosse l'habit d'Olénine, son double littéraire, jeune aristocrate épris d'absolu et aspirant à une vie simple et sauvage qu'il va vivre au contact des Cosaques.

Ces guerriers et leurs familles sont un peuple aux moeurs bourrues : costauds et agiles comme Lucas ; rusés et grandes gueules comme « l'oncle Erochka » ; ils sont riches d'une qualité que tout le monde ne possède pas : ce sont des Cosaques.

C'est aussi pour Olénine la révélation de l'amour lorsqu'il pose les yeux sur Marion, la fille de ses logeurs : sa grâce simple et naturelle, la sauvagerie rétive qui habite ses yeux sombres, son corps svelte et fort l'émeuvent immédiatement comme jamais une femme ne l'a ému.

Les jours passent et se ressemblent, la vie au cordon est rythmée par les tentatives d'incursion des abreks, les chasses d'Olénine et les discussions très arrosées de vodka (doux euphémisme !) ; des liens prudents et farouches se nouent. Malgré cela, les parlers différents rappellent la frontière tacite entre Cosaques et Russes, comme un mur de verre que Tolstoï, grand admirateur de Rousseau, chercha toute sa vie à briser pour se dépouiller enfin des fioritures indignes d'un homme de nature.

Tolstoï peint vivement la beauté rude, impitoyable et noble des Cosaques ; leur tempérament d'ours ; leur attitude austère pleine d'orgueil ; leurs traits communs d'humanité affleurant sous la couche de rudesse. Les belles envolées d'un lyrisme limpide alternent avec un réalisme qui ne manque pas d'espièglerie.

C'est l'histoire déchirante d'une nature fraîchement révélée à elle-même et ambiguë face à une nature indomptable ; de la méconnaissance de soi et de l'incompréhension de l'Autre ; de l'incompatibilité de ce qui semblerait s'accorder.

Quelle belle allégorie que cette histoire ! Marion est de ces beautés féroces qui semblent nées pour entraîner les hommes dans le désespoir. Elle est la femme sauvage, la chimère vénérée de Tolstoï. La vraie richesse, la vraie noblesse sont dans la nature qui porte en elle les secrets inaccessibles et inlassablement convoités de leur pureté.
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J'ai entrepris depuis quelques mois de découvrir les auteurs russes dits "classiques" car je n'en avais jamais lus auparavant.
J'ai commencé par une courte nouvelle de Dostoïevski et j'ai été enchantée. Je continue avec Tolstoï, et la magie continue.

Cette langue ! Même traduite, c'est magnifique, alors je me dis qu'en russe, ça doit être juste fabuleux...
Il est rare que j'aime les descriptions à répétition, et c'est pourtant ce que j'ai préféré dans ce livre ! Incroyable tout de même... A dire vrai, la Mongolie, les steppes, les mongols, ça fait partie d'un mythe (de l'histoire, je sais, mais pour moi c'est de l'histoire mythique) qui m'a toujours fascinée, au même titre que l'Egypte ancienne. Donc ce livre tombait à pic, les cosaques étant, dans mon esprit, les héritiers des mongols, et d'après les descriptions de Tolstoï, je ne suis pas très loin de la réalité.
Il n'est pas trop long (il est difficile de trouver du Tolstoï qui ne soit pas "pavesque", et lire un pavé d'un auteur que je ne connais pas, très peu pour moi !), et j'ai pu donc m'y plonger sans hésitation.

Oups, je me rends compte que j'ai hérité la tendance de Tolstoï à faire des phrases interminables, je dois tout réécrire en coupant ! Mdr !

Ma version contient une notice à la fin, sur la vie de Tolstoï et l'épisode qui a donné lieu à ce roman, ses 3 ans de "cosaquerie". Il est très autobiographique donc, et ça se sent, ses personnages sont tangibles, vivants, Erochka étant mon préféré ! Marion, malgré les descriptions enthousiastes de son côté naturel, solide et travailleur, m'a parue très "fille", bien plus que ce à quoi je m'attendais ! Je me doute bien que ça changeait Tolstoï des femmes poudrées qui ne faisaient rien de leurs dix doigts, ce qui l'a séduit, bien sûr, mais quand même, elle fait un brin caractérielle sur la fin du bouquin lol !

Ce livre nous montre un élan très romantique dans la démarche de Tolstoï/Olenine qui part sur un coup de tête, quittant sa vie facile d'aristocrate russe pour devenir "junker" (élève-officier) dans l'armée russe qui appuie les cosaques livrant batailles aux tchétchènes (appelés ici "montagnards ou abrek").

Et Tolstoï est envouté par ces paysages grandioses (déjà que ça fait un moment que j'ai envie d'y aller voir, il n'a pas arrangé les choses pour moi, là, mdr !), qui l'inspirent, le transportent, lui donnent un désir mystique. Il y a pourtant la dureté et la violence du monde cosaque, même si j'ai trouvé que c'était assez édulcoré par Tolstoï, qui, finalement, semble fuir pas mal ce côté "guerre" pour se consacrer à la chasse et à la nature, et ensuite à l'amour, même s'il rêve de "croix de guerre" et de devenir officier (il se sent obligé de participer aux raids, mais pas du tout de gaieté de coeur, contrairement à Lucas, "vrai" cosaque sanguinaire et voleur), la contradiction ne semble pas le déranger, lol...

C'est très humain comme texte, on reste un peu sur un goût d'inachevé quand il part, à la fin, mais c'est ça, la vraie vie, et Tolstoï est assez lucide sur lui-même et sur tout ce qu'il a vécu chez les cosaques. L'herbe paraît toujours plus verte ailleurs, on aimerait "y être né", dans cet ailleurs, mais si on y était né, on ne serait pas qui on est. On n'obtient pas toujours ce qu'on veut, et l'amour ne suffit pas, contrairement à ce qu'il écrit à un moment. Il part en s'en étant rendu compte, en ayant beaucoup grandi...


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Voici un formidable roman littéraire, historique et humain... Tout comme dans « Enfance, Adolescence, Jeunesse », Lev Nikolaïevitch (dit Léon) tolstoï écrit une autobiographie romancée. C'est sa vie qu'il commente en parallèle à son journal intime qu'il tiendra jusqu'à la fin. Quelle écriture ! Limpide, fluide tout comme la vie captée au plus près des personnages qui évoluent ici. Il s'agit d'un texte court de 255 pages possédant bien des attraits dont celui de pouvoir en faire une relecture plus facilement que le célèbre « Anna Karénine » (1 000 pages en folio) ou « Guerre et paix » (2 tomes et plus de 2 000 pages). Un écrit de jeunesse par un homme qui deviendra un monument incontournable de la littérature russe et mondiale. Un destin hors du commun ! Jugez-en ! En 1847, à dix-neuf ans à peine, il décide d'abandonner ses études de droit pour vivre de ses rentes dans le domaine familial dont il est maintenant le propriétaire – il avait deux ans à la mort de sa mère et neuf ans à celle de son père. A vingt-trois ans, pour fuir une vie d'ennui et rechercher l'authenticité d'une vie nouvelle en pleine nature, il accompagne son frère lieutenant au Caucase, avec un statut de demi-civil avant de devenir junker (élève-officier). Il y séjournera trois ans.

Peu de romans atteignent la force absolue que possède ceux de tolstoï. Peu de personnages littéraires me sont restés à ce point en mémoire : peut-être Sophie dans « le choix de Sophie » de William Styron ou bien Ivitch dans « Les chemins de la liberté » de Jean-Paul Sartre, ou encore Rosario dans « le partage des eaux » de Alejo Carpentier.

Ici la plupart des personnages entrent en résonance avec des mythes, des fantasmes qui les rendent universels. D'Olenine – double de l'auteur –, à Marion – dont il a été amoureux, belle caucasienne évoquant Carmen de Prosper Mérimée –, de Lucas l'intrépide cosaque à Erochka – copié sur « une figure locale » selon le Journal de tolstoï, que d'images et de vie (rehaussées encore par les impressions recueillies en Géorgie où j'ai eu l'occasion de séjourner). Les rapports D'Olenine et son ordonnance Jeannot reproduisent la situation de tolstoï et le serf domestique emmené pour le servir au Caucase, assez lettré pour recopier ses brouillons mais qu'il fit renvoyer (cela rappelle Montaigne et son serviteur à qui il fait écrire la première partie de son « Journal de voyage ».)
L'action se déroule sur le fleuve Terek dans le Caucase, au nord de la chaine du Grand Caucase avec ses sommets impressionnants de plus de 5 000 m, entre la mer Noire et la mer Caspienne. tolstoï s'immerge dans la nature, qu'il décrit merveilleusement.

Les personnages sont parfaitement décrits, le talent de l'auteur arrive à restituer et à nous faire vivre des scènes inoubliables : par exemple la scène du départ d'Olenine en traîneau dans la neige, la scène aussi de Lucas tuant un abrek (rebelle au colonisateur russe), la scène de chasse en forêt avec Erochka et Olenine, les scènes entre Olenine et Marion toutes oniriques rejoignant le « ça y est enfin, c'est elle ! » de son premier livre « Enfance, Adolescence, Jeunesse » dont il constitue une suite passionnante.

A travers les personnages et les dialogues, l'auteur exprime ses idées sur la société de son temps, sur la guerre, la religion. Des idées qui vont participer à bien des évolutions futures en Russie.

Léon Tolstoï est né en 1828 (mort en 1910). A la fois prophète et grand artiste, grand propriétaire, comte et opposé au servage – il a voulu affranchir et donner des terres à ses serfs sur sa vaste propriété cinq ans avant l'abolition du servage en 1861–, « poète de sa vie » comme l'avait nommé Stéphan Zweig. Un personnage multiple, d'une grande modernité. Vivant à une époque où la Russie sortait tout juste d'une période très francophile. Il a été influencé par la civilisation occidentale et est à la fois resté très critique vis-à-vis d'elle.

En marge de l'oeuvre, aujourd'hui : C'est un chef d'oeuvre classique qui nous fait voyager dans des contrées lointaines, dans une nature vierge avec une belle histoire d'amour et de l'action. C'est déjà passionnant mais c'est plus que cela ! tolstoï nous donne accès, indirectement bien sûr, à la géopolitique d'une région du monde toujours autant convoitée et instable. le Caucase du nord, appelé Ciscaucasie, a été conquis par la Russie au XIXe siècle après une guerre interminable de 47 ans, entre 1817 et 1864. Il abrite des populations très diverses qui cohabitent ou pas...

La désintégration de l'empire ottoman à la suite de la première guerre mondiale, puis de l'Union Soviétique après la chute du mur de Berlin laisse une région du Caucase exposée à tous les dangers. Malheur aux petits Etats situés au carrefour de la Turquie, de la Russie et du Moyen Orient, avec en voisin l'inquiétant Erdogan – mais il n'est pas seul dans cette volonté de reconquête –, courtisé en plus par l'Europe pour faire tampon avec les mouvements de migration du Moyen orient. Les récentes guerres de Tchétchénie, trouvent des racines dans les génocides et exodes liés à la guerre du Caucase. Et l'histoire se répète avec la guerre entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan pour la possession du Nagorny Karabakh. Les peuples (en premier arméniens, tchétchènes...) de cette multitude de petits Etats du Caucase font les frais de ces guerres incessantes avec génocide et exil massif, souvent pilotées de l'extérieur, dangereuses car risquant de déboucher sur un conflit de plus grande ampleur encore !
Un livre à lire et relire pour toutes ces raisons, sans avoir peur des termes spécifiques, enrichissant le texte, dont on peut facilement trouver la signification dans les précieuses notes. tolstoï utilise une langue composite incluant des termes caucasiens, des expressions françaises, illustrant ainsi parfaitement ce carrefour de civilisations.

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Visitez mon blog clesbibliofeel à l'adresse indiquée ci-dessous afin de compléter cette chronique par des photos, cartes géographiques et compositions personnelles ainsi que des vidéos et musique en lien avec ce récit.

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Pris au hasard dans la bibliothèque qui me vient de mes parents. C'est mon premier Tolstoï et, un peu frileuse, je l'ai choisi parce qu'il ne comportait que 216 pages. Oui, je sais, c'est lâche.
Dans l'ensemble, j'ai aimé ce roman mais j'ai été un peu déconcertée par le style d'écriture de l'auteur, pas toujours très clair dans sa narration. Ainsi, à maintes reprises, je me suis fait la remarque qu'une action se préparant arrivait subitement à sa conclusion sans que l'on sache vraiment comment elle s'était déroulée. On a l'avant, l'après, mais le pendant est laissé à notre supposition.
Dommage car l'histoire en elle-même est vraiment intéressante mais cette absence de clarté, de précision, m'a empêchée d'être complètement accrochée. A moins que cela ne vienne d'un manque de concentration de ma part, ce n'est pas exclu...
Impression générale un peu tiède, donc. Comme ma critique, je l'admets.
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Il regardait au loin tandis que ses naseaux expulsaient d'épais nuages qui disparaissaient aussitôt dans l'air givré. C'était l'hiver et je me tenais à quelques mètres de lui, scrutant le moindre de ses mouvements. Il restait immobile, les yeux vissés sur l'horizon. Sa tranquillité me fascinait. À pouvait-il penser ?

Au bout de longues minutes de silence, il enfouissait son nez dans l'une des rares touffes d'herbe qui n'avaient pas succombé au poids de la neige, l'arracha avec délicatesse, releva les yeux vers le lointain et mâcha tranquillement sa pitance hivernale. Sans doute savait-il qu'il était inutile de disperser de l'énergie alors que l'hibernation était proche. Mes pas, que je pensais feutrés, trahirent mon approche. Une branche morte craqua sous mes chaussures et le cheval tourna soudainement la tête.

Il m'examina de ses yeux clairvoyants et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, je me retrouvais à nu. Mes peurs, mes joies, mes désirs et ma vie avaient été dépouillés par le simple regard de cette bête. Les circonvolutions de l'âme n'avaient plus cours, seul subsistait la conscience de ce moment. le masque était tombé, là, au milieu d'une prairie enneigée. Il disparu en marchant dans un nuage de brume et je compris ce qu'il regardait au loin.

Je me surprend encore des années plus tard à me remémorer ce moment, qui ne dura qu'une poignée de minutes, où un cheval changea la trajectoire de mon existence ! Rien de neuf dans cette anecdote puisque la relation entre l'Homme et le Cheval a toujours été spéciale, et ce n'est pas le livre Les Cosaques de Tolstoï qui démontrera le contraire. Analyse.

Une histoire autobiographique

L'écrivain russe a écrit des dizaines d'ouvrages mais si l'on demandait aux lecteurs francophones quels sont les romans de Tolstoï qu'ils connaissent le mieux, sans doute répondraient-ils Anna Karenine ou Guerre et Paix. Rares sont ceux qui choisiraient Les Cosaques comme livre à mettre au-dessus de la pile. Or ce roman n'est pourtant pas dénué d'intérêt, loin s'en faut.

Il raconte l'histoire d'Olénine, un jeune homme déçu de sa vie dans la capitale moscovite, qui met les voiles pour le Caucase afin de se faire enrôler en tant qu'officier dans un régiment de cosaques. Ce voyage sera pour lui une première expérience, loin de la ville, où la nature est aussi rugueuse que splendide. Cette expédition vers l'inconnu lui fera découvrir la culture cosaque, la guerre mais aussi l'amour. Les voyages forment la jeunesse disaient-ils 😉.

Ce court roman, publié en 1863, est, en fait, une autobiographie. Les aventures d'Olénine sont celles du jeune Tolstoï lors de son passage dans le Caucase. On y retrouve déjà les questionnements classiques de l'auteur russe sur le bonheur et sa quête pour une vie simple, loin des frasques mondaines

« Vous croyez connaître la vie, savoir où est le bonheur ! Or, vous ignorez totalement la façon de vivre simplement et suivant la nature. Vous ne pouvez imaginer les merveilles qui s'offrent chaque jour à mes yeux : des neiges éternelles et vierges, des forêts touffues, une femme pure, dans la floraison de sa beauté primitive […] J'éprouve un véritable malaise dès que je revois vos salons, ces femmes aux cheveux pommadés, piqués de boucles fausses, ces bouches ignorantes des propos naturels, ces bras graciles, ces jambes lourdes, ces inconsistantes cervelles qui ne savent discerner le bavardage mondain d'une vraie conversation.»

Quand Tolstoï rédige Les Cosaques, il a déjà publié quelques écrits mais ses chefs-d'oeuvre sont toujours en gestation. Ce roman est l'occasion de découvrir le style déjà bien affirmé de l'auteur russe. Les descriptions typiquement tolstoïennes sont déjà présentes et empreintes d'un réalisme qui sera la marque de fabrique de Tolstoï. Dans ce livre de 267 pages, le maître russe dévoile déjà son amour pour la campagne et laisse apparaître ce qu'il a réellement vécu dans le Caucase puisqu'il y passa quatre années en tant que sous-officier de l'artillerie russe. Comme le héros de son roman, le jeune Tolstoï vivra là-bas des aventures et une certaine gloire qu'espéraient tant de jeunes de son âge. le Caucase était, à cette époque, le lieu idéal des exploits héroïques. Et ce n'est pas Lermontov ni Pouchkine qui auraient démenti, eux qui ont tant écrit sur cela ! 😉

Qui étaient les cosaques ?

Voilà une question qui mérite d'être abordée puisqu'il s'agit de l'un des thèmes centraux du roman. L'image clichée la plus connue du cosaque veut qu'ils soit coiffé d'un bonnet et qu'il parcoure, en groupe, les steppes au fil des différentes époques de manière assez nomade. Ainsi, l'histoire de la cosaquerie ne date pas d'hier puisqu'il faut remonter au XIVème siècle afin de retrouver leur origine du côté des actuels territoires de l'Ukraine et de la Russie.

Quand on emploie le terme de cosaque, il s'agit d'un mot générique puisqu'il existait plusieurs communautés différentes. Parmi les plus connues on retrouve les cosaques zaporogues (comme dans le Tarass Boulba de Gogol !), les cosaques du Don ou encore ceux du Terek.
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Avez-vous déjà eu envie de tout plaquer, partir pour une vie rude et simple, retrouver le rythme primitif des origines ? Allez donc vivre comme les cosaques
Sur un coup de tête ! C'est ce que fait Olénine (le Tolstoï de papier), à l'occasion d'une campagne militaire contre d'insaisissables rebelles Tchétchènes.

Et comme tous les paradis, celui-ci ne sera accessible que pour mieux se perdre. En dépit de toute sa volonté de tomber la veste du civilisé pour rejoindre les cosaques, le sang d'Olénine ne peut mentir, il ne deviendra jamais un vrai Djigit. C'est le roman de cette perte. Olénine au lieu d'être révélé à lui-même, sera au contraire amené à prendre conscience de qui il n'est pas.

Reste le souvenir d'une aventure qui s'abîme peu à peu au contact de la guerre; cruelle mangeuse de frères de quel bord que l'on soit.

Allez-y les yeux fermés c'est un très beau roman
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Les Cosaques

On a dit beaucoup de choses déjà sur les Cosaques, que puis-je rajouter de plus. Ici un beau billet a été fait tout récemment, et j'aurais mauvaise grâce à m'essayer à mon tour. J'ai moi-même déjà voici un an cité la rencontre magnifique d'Olenine avec la cosaque Marion que je trouve sublime : " Avec la curiosité de la jeunesse , il remarqua malgré lui les formes vigoureuses et virginales qui se dessinaient sous la fine toile, ainsi que les beaux yeux noirs fixés sur lui avec un effroi enfantin et une sauvage curiosité", et il est clair que dans cette rencontre le jeune Tolstoï semblant tout intimidé devant l'amour comme une première fois y voit beauté sauvage et altérité et confond même cette beauté sauvage et cette altérité avec le pays qu'il découvre en 1851, le Caucase et son charme des montagnes, étant militaire de son état parti rejoindre son grand frère Nicolas alors officier qui l'a enjoint de le suivre vu la vie dissolue qu'il menait à Moscou.

Je ne puis y aborder que des aspects périphériques. D'abord, ce n'est pas son premier roman, il a déjà commis Enfance, de la trilogie magnifique Enfance, Adolescence, Jeunesse, et ma foi je ne peux qu'en encourager le lecture à celui qui ne sait pas trop par où entamer Tolstoï, puisque je suis moi-même passé par là et je suis encore à ce jour dans la marmite. Et pas plus Enfance est son premier texte puisque Histoire de la veille l'a précédé ..

Tolstoï a éprouvé quelques difficultés à achever ce roman, il lui semblait que la multiple dernière mouture n'était pas la bonne et ce n'est qu'en 1862 que fut publiée cette oeuvre. Un peu plus tard, de ses amitiés américaines qui vont favoriser la percée, trois romans de Tolstoï vont défrayer l'Amérique : Guerre et paix, Anna Karénine et donc Les Cosaques. Pas comme en France où un certain nombre de bégueules prétendument experts dans la société bienpensante et hypocrite vont faire la fine bouche à cette nouvelle littérature venue des frimas. Il faudra attendre vraiment le coup de main de Tourgueniev qui considérait Tolstoï comme le nouveau maître de la littérature russe, celui que toute la Russie attendait comme le Messie pour que non seulement Tolstoï mais le tsunami littéraire russe pénètre sur le sol français.

1862, c'est l'année où Tolstoï fonde son foyer, se marie avec Sophie et qui va lui permettre pendant quinze, vingt années de félicité, de réaliser ses chefs d'oeuvre. Alors cette oeuvre on la retrouve naturellement chez Bienstock au début du siècle, puis chez Gallimard au sortir de la guerre traduite par Pierre Pascal et en poche en 1965 avec la préface de Boris de Shloezer, et la traduction du même nom plus récemment dans l'édition présente qui est la plus aboutie, la plus éclairée. Entre temps, il y a cette traduction, et bien d'autres, chez Albon de Yacha Zwizagora qui comporte une préface de 25 pages fort intéressantes d' Edouart Krakowski.

Alors que trouve-t-on d'intéressant dans ces préfaces qui ont tendance à disparaître aujourd'hui qui étaient précieuses, mais vu les nanars qui paraissent, ça fait un peu prétentieux d'être préfacé, encore faut-il qu'il y ait du contenu. Mais j'en conviens, une préface n'est absolument pas indispensable, en catalogue de beaux-arts c'est absolument dramatique. Quand elle est faite par un pair de renom c'est souvent remarquable et se justifie, quand c'est fait par un tâcheron comme on a tendance à considérer un préfacier aujourd'hui, c'est variable voire faible. Mais j'en prends toujours mon parti. Boris de Schloezer nous apprend ou nous rappelle que Tolstoï avant de partir pour le Caucase était criblé de dettes et avait même joué sa montre. Ca me rappelle que Dostoïevski avait joué l'alliance de sa jeune femme en Suisse. C'est donc en slip qu'il a fait toute la route pour aller s'habiller à bon port en junker. BdeS nous précise que son protégé rejoint ainsi Pouchkine et Lermontov. On peut ajouter que Soljenitsyne est passé par là bien après en quasi-voisin sur les traces de Lermontov. Les Cosaques ont un caractère autobiographie : Olénine, c'est un peu lui, et qu'il a eu réellement une fiancée cosaque : Maremka avec laquelle il a songé s'installer à Starogladovskaïa (Caucase), un nom à coucher dehors, que le fidèle Erochka n'est autre comme deux gouttes d'eau qu'un ami vieux chasseur qui s'appelait Iepichka ..Il transpose tout son vécu au Caucase sur le plan de l'art et n'en perd pas une miette. Sa littérature est abondante et au demeurant cent fois moins connue que ses chefs d'oeuvre universels, alors qu'elle est intéressante au même degré. Mystère de la vie des oeuvres ?.. Tourgueniev et Gide considèrent les Cosaques au même titre qu'un grand roman de la maturité .. A ce stade, je ne peux pas ne pas citer BdeS tellement c'est juste et bien dit : " voir citation à suivre"

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Ce roman est la troisième mouture du texte des Cosaques.
À l'origine Tolstoï avait écrit un poème en vers.
Ce livre est autobiographique et Olénine est son porte-parole.
Après avoir fait connaissance de la nature, le héros ressent une grande béatitude et décide de faire le bonheur de Marianna et de Loukachka.
Mais l'amour charnel l'emporte. Il courtise Mariana qui se rapproche de lui par intérêt.
Or Loukachka est gravement blessé et la jeune fille se rend compte que c'est lui qu'elle aime et rejette Olénine qui comprend alors qu'il n'appartient pas à ce monde.
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Je n'ai pas été particulièrement sensible à ce roman de Tolstoï, contrairement à beaucoup des critiques m'ayant précédée. le personnage principal d'abord, Olénine, m'a semblé assez vain, un aristocrate qui s'ennuie à la ville, qui s'engage dans l'armée pour voir autre chose, mais qui ne fait pas grand-chose non plus. Il ne semble pas vraiment participer à des campagnes, ou, en tout cas, il ne les raconte pas. Il reçoit la croix, sans avoir rien fait d'héroïque, mais pour son nom prestigieux, il n'est pas astreint à des obligations de service. Non, il était oisif là-bas, il est oisif ici, chassant, buvant, regardant les filles.
Justement, les filles, elles, sont peu présentes. Marion est ainsi quasiment muette, elle est presque réduite à une figure et un corps qui passent, que le personnage principal observe d'une façon que l'on peut considérer comme voyeuriste, voire malsaine. Après tout, on ne saura pas vraiment ce que pense et ce que ressent vraiment Marion, aime-t-elle vraiment Olénine, est-elle intéressée par le profit potentiel d'une liaison avec un seigneur, est-elle jalouse de son fiancé...
Plus que pour son intrigue, c'est donc un roman qui vaut pour son approche presque ethnographique : décrire un peuple dans les marges de la Russie, un peuple qui ne parle pas russe, qui n'a pas les mêmes croyances, qui n'a pas les mêmes vêtements... Les habitants du Caucase sont ainsi plus proches des ennemis de l'autre côté de la frontière, les Tchètchènes, que des Russes. Dommage que le personnage ambigü de Lucas n'ait pas été plus creusé, lui qui sert dans l'armée russe mais sert aussi ses propres intérêts d'abord.
Ce sont les descriptions du paysage qui sont les plus belles, surtout celles des montagnes et de la forêt, avec l'abondance des animaux et la majesté des hautes montagnes.
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« Les Cosaques » a été pour moi une découverte charmante.

Il ne s'agit pas d'un roman de guerre à proprement parler, à peine plus qu'un roman d'aventure mais plutôt d'un parcours initiatique d'un jeune homme déchiré intérieurement, en quête d'apaisement et de pureté.

Cet apaisement il pense le trouver dans le renoncement, le retour à une vie ascétique, simple, proche de la nature comme le prônent certains philosophes grecs depuis fort longtemps, mais finalement l'amour lui apparaît comme une force supérieure digne de transcender son existence même si on peut penser que cette Marion à la beauté simple et virginale n'est finalement que l'incarnation humaine de cet idéal de pureté naturelle.

Pourtant le bonheur et l'équilibre ne sont jamais atteints, puisque Olénine malgré tous ses efforts ne parvient pas à se détacher totalement de ses liens avec la sophistication des officiers russes et n'est pas non plus accepté au sein de la population cosaque qui se méfie de ce officier étranger au comportement atypique.

Malgré cette quête inaboutie, le roman est une belle description du mode de vie de ces hommes rudes ayant fascinés l'écrivain.

Tolstoï se montre d'ailleurs étonnamment virulent contre ces compatriotes russes qu'il semble accuser de tous les maux comparés aux « bons sauvages » cosaques.

Quand aux Tchétchènes bien qu'entre aperçus on comprend vite que leur mode de vie montagnard proche de celui des Cosaque les rend plus sympathiques et proches d'Olénine que les Russes eux mêmes.

« Les Cosaques » est donc un livre complexe, riche et intéressant à découvrir pour qui s'intéresse à une époque, une région donnée mais également à l'étrange fascination que peut ressentir un jeune soldat soumis au contact prolongé avec des populations quasi étrangères.
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