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Maurice Pons (Traducteur)Michèle Witta (Traducteur)
EAN : 9782020127141
341 pages
Seuil (12/02/1993)
3.66/5   16 notes
Résumé :
Le nom de Tennessee Williams est associé à d'inoubliables chefs-d'œuvre, tant au théâtre qu'au cinéma : Un tramway nommé désir, La Chatte sur un toit brûlant, Soudain l'été dernier, La Nuit de l'iguane, pour ne prendre que quelques exemples. Mais en deçà et au-delà de cette œuvre monumentale se trouve ce qui l'a sustentée et produite : la vie même de son auteur, nourrie d'échecs et de triomphes, d'expériences douloureuses, de rencontres avec d'autres mythes - Greta ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Pas forcément évident de comprendre pourquoi Tennessee Williams a non seulement écrit ses mémoires, mais aussi de cette façon, sans bien connaître le contexte de cette écriture. Autrement dit, il serait quasiment nécessaire d'avoir lu une biographie de poids pour mieux appréhender cette autobiographie un peu particulière. Pour ma part, j'ai bien lu il y a déjà quelque temps la biographie de Liliane Kerjan, et j'avais auparavant écouté une série d'émissions sur Tennessee Williams, mais je n'ai pas l'impression que ça soit suffisant pour se mettre complètement dans le bain.


Ce qu'il annonce tout de go, c'est qu'il a écrit ses mémoires pour des raisons alimentaires, et ensuite qu'il a décidé d'opter pour une narration proche de la séance de psychanalyse. Catherine Fruchon-Toussaint, qui a dirigé une anthologie de Williams en 2011, s'interroge sur le motif "alimentaire". On peut nous aussi se demander si Williams était si pauvre que ça - je suis bien sûre que non - dans les années 70, pour en être réduit à écrire pour gagner sa pitance. Ce qui est certain, c'est qu'alors qu'il écrit ses mémoires, donc entre 1972 et 1975 (ce sera publié en 1975), il est passé de mode. Ses heures de gloire sont derrière lui, son théâtre, dont le style a pas mal changé, n'attire plus les foules, et il ne s'est jamais remis de la mort de Frank Merlo, qui fut son compagnon pendant quatorze ans. Il a une bonne soixante d'années, une santé de plus en plus fragile, ce qui n'est pas étonnant vu qu'il est accro aux somnifères, aux barbituriques et à l'alcool, et écrire est de plus en plus difficile. Ce n'est pas par hasard si ces Mémoires démarrent par l'évocation d'un symposium pendant lequel tout ce qui intéresse les étudiants, c'est de savoir si la carrière de Tennessee Williams est finie.


Dans de telles circonstances, et alors qu'il a déjà écrit beaucoup d'essais sur ses pièces (qu'on ne trouve pas en français), Tennessee Williams ne choisit pas d'écrire un énième essai sur son théâtre déguisé en autobiographie, ni de suivre le cours chronologique de sa vie. le livre débute alors qu'il a peut-être 16-18 ans, peut-être plus - c'est difficile de lui donner un âge ici ou là, parce que très souvent on n'a pas de date -, qui vient de gagner un prix pour une nouvelle, je crois. Et c'est parti pour des tas d'anecdotes personnelles et pour pas mal d'histoires de fesses. Ça va se calmer au fur et à mesure de l'avancée du livre, mais il vaut mieux savoir avant de l'ouvrir à quoi s'attendre (il se trouve que je l'avais oublié, et que j'étais un peu étonnée). Ça a provoqué un énorme scandale à la publication, et beaucoup de lecteurs ont acheté ces Mémoires pour leur côté scabreux, tandis que les critiques s'indignaient : "Quoi, comment, mais il ne parle pas de son théâtre, mais enfin, c'est inadmissible !" Les mêmes le descendaient en flèche dès qu'une de ses pièces était montée, donc on peut imaginer que Tennessee Williams a choisi de leur faire un joli pied-de-nez.


Pour autant, je ne vous cacherai pas que les grivoiseries de Tennessee Williams sont un peu lassantes, un peu redondantes, un peu ennuyeuses aussi. Mais ça permet de comprendre que, par exemple, dans le printemps romain de Mrs Stone, un de ses romans, c'est bien ses propres relations avec des prostitués de tous genres qu'il met en scène. Et à propos de mise en scène... Ce n'est pas écrit n'importe comment, malgré les allers et retours chronologiques qui nous embrouillent parfois la tête. C'est très dramatisé. Je ne sais pas s'il était aussi hystérique ou dépressif ou désagréable ou pénible à vivre qu'il le répète inlassablement, mais le fait est que beaucoup d'anecdotes prennent vite le ton de la saynète. C'est drôle ou pas - c'est vraiment très drôle au tout début, puis un peu moins, et encore un peu moins. C'est quand même une autobiographie où affleure l'humour et où Tennessee Williams ne se prive pas d'user de l'auto-dérision. Liliane Kerjan dit qu'il s'agit là d'une littérature de cancans... Je n'ai pas trouvé qu'il était langue de vipère avec les personnes dont il parle, mais il est vrai que je lis ce livre 45 ans après sa sortie et que je ne sais même pas qui sont la plupart des personnes qui sont citées, mis à part Kazan, Brando, Magnani, Frank Merlo... et en gros c'est tout. Des allusions désagréables me seraient-elles passées au-dessus de la tête ? En revanche, toutes les anecdotes rapportées ne sont pas intéressantes, c'est certain.


Et qu'en est-il de cette écriture qui serait plus ou moins psychanalytique ? C'est pas franchement ça, et d'ailleurs ça n'aurait pas de sens, car ça supposerait non seulement que Williams divague et erre sans arrêt d'un détail à l'autre, et surtout s'ouvre complètement aux lecteurs, procède à une dissection publique pour satisfaire son monde. Aucun lecteur de ces Mémoires ne voudrait se livrer entièrement aux autres, et c'est bien normal - c'est déjà bien assez compliqué de parler à un psychothérapeute ou à un psychanalyste -, il serait donc assez curieux d'attendre de Tennessee Williams, sous prétexte de sa célébrité, qu'il s'engage à tout dire de lui. Ce n'est pas comme ça que marche une autobiographie. Dans une autobiographie, c'est le jeu, l'auteur est maître de ce qu'il écrit et il procède à une composition ; bref, il est écrivain. Et le lecteur fait avec, quitte à se sentir frustré ou à traiter l'auteur de gros menteur. Là, il apparaît, je pense, que Tennessee Williams a recouvert d'anecdotes croustillantes sa vie, non seulement pour agacer les critiques, mais aussi parce qu'il y a des sujets qui sont visiblement trop difficiles à aborder. C'est à peine s'il parle de son frère Dakin et de son père. Je me suis demandé s'il allait même s'attarder sur la maladie mentale de sa soeur Rose, ce qu'il fait effectivement, mais on sent - ou du moins c'est ce qu'il me semble - qu'il a surmonté pas mal de réticences ; et je ne crois pas que ce soit par hasard qu'à un moment-clé du récit concernant Rose, il interrompe soudain son texte pour parler d'une anecdote toute récente et sans importance. Procédé qu'il utilisera à plusieurs reprises, notamment à propos de Frank Merlo.


Alors, fallait-il parler ou pas de son théâtre ? le fait est qu'il en parle, mais pour raconter comment se sont déroulées l'écriture ou la création de telle ou telle pièce. Pour ce qui est de l'analyse de son théâtre, il est, lui, d'avis qu'il a suffisamment écrit là-dessus - et quand on lit la scène du symposium en avant-propos, on comprend bien qu'il n'ait pas envie d'y revenir. Ce sont les mémoires d'un homme vieilli, aigri, désabusé, et qui pourtant ne manque pas d'humour. On pense bien ce qu'on veut de cette autobiographie, mais ça vaut toujours mieux que de lire les inepties de Sarah Bernhardt !



Challenge Théâtre 2020
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Memoirs
Traduction : Maurice Pons & Michèle Witta.

C'est pour de l'argent que Thomas Lanier Williams, plus connu sous le pseudonyme de Tennessee Williams, accepta de rédiger ces "Mémoires d'un vieux crocodile" qui ne peuvent laisser au lecteur qu'un sentiment d'intense frustration.

Avec un acharnement exceptionnel et à l'encontre du principe même des mémoires, objet par essence autobiographique, le dramaturge sudiste se dépeint tout à la fois comme un hypocondre, un obsédé sexuel quasi priapique, une caricature d'homosexuel truffant ses discours de "adorable", de "charmant" et de "merveilleux" extatiques, un égoïste maniaque incapable de s'attacher durablement, voire simplement de s'intéresser à autrui ... bref, comme un homme qu'on ne peut regretter de ne pas avoir connu. Pour un peu, il parviendrait à convaincre le lecteur influençable de jeter à la poubelle tous les recueils de ses textes, poétiques ou théâtraux, qui ont fait sa joie !

Sur le théâtre, qui fut tout de même, le pivot central de son existence, Williams ne donne que de très parcimonieuses indications. A la limite, il préfère évoquer son travail en tant que comédien - car il joua dans nombre de ses pièces - plutôt que son oeuvre d'écrivain qui, selon lui, parle d'elle-même. Evidemment, il n'a pas tout à fait tort : l'oeuvre d'un créateur est le premier révélateur de sa personnalité et peut-être le seul vraiment authentique puisque, par l'acte même de la création, littéraire ou autre, l'être se révèle absolument complet. Mais de là à n'en rien dire du tout - ou si peu - tout au long de 340 pages en édition de poche, il y a un abîme !

Que Tennessee Williams franchit avec une désinvolture à la fois fausse et grinçante. Lui qui, dans son théâtre, sut si bien nous décrire les mères abusives, les maris trop faibles et les enfants perdus dans la folie ou la marginalisation sociale se révèle ici incapable de regarder en face toute la haine qu'il éprouve envers ses parents et aussi envers lui-même pour avoir abandonné sa soeur Rose à l'emprise familiale.

Oh ! bien sûr ! Cà et là, il lance une pique qui révèle la présence en lui de cette souffrance qui n'a rien oublié, rien pardonné. Mais ça ne va pas plus loin. Que son lecteur, surtout s'il est cinéphile, se rappelle Mrs Venable/Katherine Hepburn tentant de faire lobotomiser sa nièce. Ou qu'il évoque les délires de Blanche Dubois, "vraie jeune fille du Sud", qui l'amènent à se faire violer par son beau-frère. Lui, Williams, ne peut exprimer tout cela s'il ne se réfugie pas derrière les décors de son théâtre. C'est au-dessus de ses forces.

Cette faiblesse ultime, qu'on peut interpréter comme la lâcheté d'un enfant qui fut toujours le préféré de sa mère, apparaît comme la bas non seulement de ces "Mémoires ..." mais aussi comme celle de la vie tout entière de leur auteur. Bien que l'on pressente également le masochisme et la culpabilité qui ne cessèrent d'accompagner Tennessee Williams, bien qu'on se dise qu'il grossit le trait à dessein afin que nul reproche ne puisse rejaillir sur ses parents, et surtout pas sur sa mère, on sort de cette lecture non seulement frustré mais très, très déçu. Et l'on ne peut s'empêcher de penser que le dramaturge américain vécut en fai une schizophrénie similaire à celle de sa soeur. Seulement, plus chanceux (?) et parce qu'il était né dans un corps d'homme, il eut plus de facilité pour la transposer dans un monde imaginaire qui prit vie sur les scènes du monde entier.

Et si Tennessee Williams est parvenu un jour lui aussi à cette conclusion, nul doute que son état ne s'en soit pas trouvé amélioré, bien au contraire ...

Ces "Mémoires d'un vieux crocodile" sont donc à lire comme une curiosité, en sachant pertinemment que leur auteur triche effrontément et se dérobe du mieux qu'il peut à son passé et à son lecteur, notamment en usant d'une méthode assez brouillonne
pour évoquer ses souvenirs. L'étape suivante sera de dénicher une bonne biographie impartiale. Mais ça doit pouvoir se trouver ... ;o)
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Les mémoires de W. faulkner par lui-même. Beaucoup d'anectodes, de petites histoires, de rencontres, développées dans un ordre plus ou moins chronologique.

Une lecture plaisante qui permet de découvrir la vie de cet auteur autrement que par une biographie plus classique.
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Les memoires sont une reussite si la vie de l'auteur en est digne et celle de Tenessee Williams en faitvpartie tant l'auteur a eu une vie privee et professionnelle riche qu'il nous livre ici.Ce livre est un beau moyen de decouvrir l'oeuvre de l'auteur et de se donner envie de se replonger dans la lecture de ses oeuvres.Je vous le conseille.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
J'étais invité à tenir un symposium avec les étudiants en art dramatique de Yale. Cette grandiose réunion avait été organisée par le génial directeur du Département des arts dramatiques de l'université. J'entrai donc, par une porte marquée «sortie», dans un auditorium considérablement plus petit que le Shubert, mais contenant une proportion encore plus faible d'auditeurs. Je dirai qu'ils étaient une cinquantaine, sans compter un gros chien noir qui se tenait au premier étage sur les genoux d'un étudiant.
Pour ma part, je disposai d'une chaise pliante posée derrière une table pliante, sur laquelle se trouvait un gobelet rempli d'un liquide qui semblait être de l'eau et qui, je le découvris rapidement, en était effectivement.
Lorsque j'entrai par cette porte marquée «sortie», tous ces jeunes visages devant moi restèrent uniformément vides de toute réaction émotionnelle. En fait, la seule figure qui me parût refléter un réel intérêt était celle du chien.
Je ne suis pas très doué pour déguiser mes sentiments et, après quelques instants, j'abandonnai toute prétention à dissimuler le découragement que je ressentais. Je parlai. Je me mis à faire toutes les vieilles plaisanteries usées qui me venaient à l'esprit, comme un pauvre bougre désespéré, au cantonnement, au cours d'une guerre perdue d'avance. Je me surpris à me tasser de plus en plus sur ma chaise pliante et cette posture effondrée que soulignaient des accès d'étouffement, d'éternuements ou de toux, encouragea certains membres à se lever pour quitter la salle, ce qui n'éveilla pas vraiment en moi le sentiment d'une providence favorable.

Avant-propos
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À la fin de l'automne 1939, pendant une période de claustration dans la mansarde de la résidence familiale, dans un faubourg de Saint-Louis, je reçus un câble de Miss Luise M. Sillcox, la secrétaire de la Guilde des auteurs dramatiques de l'époque, ainsi qu'un coup de téléphone d'Audrey Wood m'informant que j'étais le bénéficiaire d'un prix de mille dollars. Sur quoi ces deux dames me pressèrent de prendre le premier autocar pour la grande ville de New York où les jeux se jouaient à l'époque, et où ils se jouent probablement encore aujourd'hui.
Lorsque cette nouvelle arriva, ce fut ma mère, Mrs Edwina (Cornelius C.) Williams qui la reçut. Elle s'évanouit presque. Je crois que c'est la première fois que je la vis en larmes et c'est une image très impressionnante qui me touche encore profondément, cette image et son cri :
- Oh, Tom, je suis si heureuse !
J'étais au moins aussi heureux qu'elle mais, pour une raison obscure,le bonheur ne m'a jamais fait pleurer, pas plus que le malheur, d'ailleurs. Je ne pleure qu'en voyant des films d'amour, généralement très mauvais.

Chapitre 1
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C'est alors que je fus bloqué dans ma tentative d'évasion par un immense jeune homme en uniforme d'infirmier. Il était blond, je m'en souviens, avec une figure musclée et moqueuse. Je lui glissai entre les mains et entrai dans la cabine de l'ascenseur, mais il empêcha les portes de se refermer.
J'étais fou de rage. Je vociférais des invectives, je retournais en courant vers la pièce, où ma mère demandait des sels à une infirmière. Jésus ! Je tournai vers elle l'éclair de ma foudre vengeresse :
- Pourquoi les femmes mettent-elles des enfants au monde pour les détruire ensuite ?
(Je suis encore d'avis que c'est une assez bonne question.)

Chapitre 10
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Comme toujours, ce sont les critiques TV qui tombèrent en premier et, comme toujours, elles étaient peu flatteuses. Je piquai ma crise d'hystérie habituelle des soirs de première. Je me souviens d'avoir dit :
- Si le théâtre n'a pas besoin de moi, eh bien moi non plus, je n'ai pas besoin de lui ! et d'autres affirmations aussi excessives, dictées par mon ego aux abois.
Puis, on nous apporta les critiques du Times et du Tribune, et elles étaient dithyrambiques.

Chapitre 9
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Vidéo de Tennessee Williams
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