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Critiques de Anthony Burgess (141)
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L'orange mécanique

C'est le récit d'un jeune homme qui s'intéresse essentiellement à la violence, qui tue et qui viole. Le livre va bien au-delà de ce raccourci rapide pour parler d'une société qui entend transformer chaque individu en agneau et le modeler à sa guise. Renvoyant dos à dos les extrêmes, Anthony Burgess n'est pas de ceux qui pense que le peuple vendra sa liberté pour une existence formatée. Place à l'homme capable de songer par lui-même, quitte à s'engouffrer dans le pire chemin ...
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Au sujet de James Joyce : Une introduction ..

J’adore certains livres de James Joyce. J’ai adoré Orange Mécanique (le livre). Je me suis lancé confiant dans ce livre qui analyse les écrits du romancer « pour le lecteur ordinaire ».

Bien que rempli d’exemples et de décorticages profonds de la prose de Joyce, ce livre reste assez pointu.

De plus, il s’agit d’une traduction. Ce qui rend l’exercice encore plus abscons. Joyce jouait bien trop sur les mots. Leurs diverses traductions sont à la base déjà des approximations (celui qui le peut trouvera plus de plaisir à lire Joyce dans le texte, la musicalité lui apparaîtra directement. Cela demande un bon niveau malheureusement, ça limite par là les possibilités).
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L'orange mécanique

Moi qui adore les films de Stanley Kubrick, je n'avais pas trop aimé le film « La mécanique orange ». C'était bien sûr un beau film, Kubrick n'était pas capable d'en faire un qui ne serait pas bon. Mais pourtant, quelque chose semblait clocher. La succession des scènes, la façon dont l'histoire est racontée… ça ne m'a pas vraiment emballé.

J'ai lu le livre après, et je le trouve vraiment meilleur. J'aime le style, y compris le langage que parle Alex avec les membres du gang (j'ai lu le livre en anglais). Par contre, c'était parfois très violent, heureusement qu'il y avait un humour qui a fait que j'ai pu continuer. Ce n'est pas le genre de livre que je lirais régulièrement, trop violent pour moi.

Le scénario est aussi beaucoup mieux décrit que dans le film, dans le livre tout collait bien.





Même les thèmes sont beaucoup mieux exposés dans le livre. Il y a l'agression gratuite, les psychopathes, les gangs, ce qui est une critique de la société, et qui reste hélas très actuel (qui devient chaque jour plus actuel avec le problème de surpopulation). Il y a aussi le conditionnement comme thérapie, qui est un thème intéressant à étudier. C'est pourquoi ce vingt-et-unième chapitre est très intéressant. Faut-il l'ajouter ou pas ?

Pour autant que je sache, ces méthodes ne fonctionnent que quand le sujet le veut lui-même. Et peut-être aussi lorsque leur traumatisme n'est pas assez grand. Les hypnotiseurs savent bien qu'ils ne peuvent pas hypnotiser quelqu'un si cette personne ne le veut pas. Une avocate aux États-Unis, experte en violeurs et tueurs en série affirme que les vrais durs de durs ne peuvent changer ou être changés. Toutefois, si on peut aider les autres, cela mérite l'étude.





Mais au final, ni le livre, ni le film n'avancent une vraie solution à l'agressivité de l'humanité, du cerveau humain dans son entièreté, ou n'essaie de l'aborder, et à cause de cela, le problème de notre conditionnement collectif n'est pas abordé en profondeur non plus. C'est sans doute cela qui me déçoit quand même dans le livre - sans une vraie profondeur, c'est un très beau livre. Sans plus, oui. Mais, très beau, c'est beaucoup, tout de même.
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Rome sous la pluie

Un bel ouvrage qui nous emmène dans la ville éternelle. Dont je suis un fan. le récit est assez ubu-esque, car le héros amnésique se fait malmener par la vie, on dirait une sorte de "After- Hours" à la sauce italienne que nous a concocté Anthony Burgess
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L'Homme de Nazareth

Un poil trop évangélique à mon gout d'athée total mais très agréable à lire. Fidèle aux quatre évangiles, Anthony Burgess comble les trous pour écrire un roman d'aventure, le long cheminement d'un homme, tant physique, vu les déplacements, que spirituel qui le mèneront au martyre. C'est souvent très drôle, le langage utilisé est celui de l'individu X du XXème siècle qui prend le métro, celui déjà utilisé pour l'empire des mécréants.

Petite remarque : Jésus est mort juif, pas chrétien, c'est juste pour ceux qui s'étripent au nom du vrai dieu, d'ailleurs l'islam puise aux mêmes racines. Autre détail, les romains n'utilisaient pas de croix mais un Tau, plus facile à construire et moins couteux en bois, mais bon, c'est un détail...

C'est du pur Burgess, on adore ou on déteste. A vous de voir.
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L'orange mécanique

J'ai voulu tenter l'expérience, après avoir vu le film.

Je n'ai jamais connu une lecture aussi complexe. Le vocabulaire est incompréhensible, l'histoire n'avance pas à cause de la lenteur que provoque le langage, tout semble décousu à cause de cela.

Pour apprécier, et lire cette œuvre, il faut déjà comprendre. Et cette tâche elle-même s'avère compliquée.
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Le royaume des mécréants

Énorme ! Le style est nerveux, incisif. Souvent très drôle... les références historiques sont fouillées alors que ce livre est écrit dans l'urgence. A mon goût, c'est le meilleur écrit d'Anthony Burgess. Revivez les débuts de la chrétienté et l'agonie de l'empire romain. Passionnant.
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Petit Wilson et Dieu le père

Who is Mr. Burgess ?



Petit Wilson et Dieu le père est la première partie des mémoires de l'auteur de L'orange mécanique. John Anthony Burgess Wilson, dit Anthony Burgess, nous apparaît dans les pages de ses mémoires, tout autant en brillant intellectuel, qu’en ivrogne, coquin et combattant du système, qu'il s'agisse de l'armée ou des responsables du Ministère de l'Éducation.



Au cours de sa longue vie, Burgess a accumulé de nombreuses observations acrimonieuses et peu flatteuses de ses contemporains, particulièrement ses supérieurs. Les longues années passées en Asie du Sud-Est lui ont permis de se rendre compte de la différence entre les cultures britannique et locale, ce qui rend les Malais et les Chinois pratiquement étrangers. Qu'est-ce qui unit les représentants de peuples si différents alors ? Le sexe et l’alcool.



À la fin du premier volume de ses mémoires, Burgess a quarante ans. Vivre la meilleure partie de la vie est possible - mais le bilan est décevant. Les années passées dans l'armée ne comptent pas comme un travail qualifié (Burgess a enseigné aux militaires les méthodes et objectifs de la politique britannique), ainsi il ne parvient pas même à trouver un emploi d'enseignant classique en Angleterre, d'où son départ pour la Malaisie.



Mais qu'en est-il des romans ? Burgess les écrit — en particulier, La trilogie malaisienne — rapidement, un travail qui lui semble même si facile par rapport à la composition d'opéras - tâche à laquelle il a voulu se consacrer dans sa jeunesse. Graham Greene qu’il rencontre, lui fait comprendre qu'en tant qu'écrivain il n'est pas très professionnel, par contre quel chef-d'œuvre le dernier roman publié par Evelyn Waugh...



Burgess écrit à ce sujet avec ironie, mais aussi avec amertume. Cependant, le malheur et la mélancolie n’auront pas raison de lui, son moteur créatif demeurant toujours la curiosité pour les hommes, le désir de créer et changer le monde, le rendre meilleur.
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Le testament de l'orange

Sans doute l'ouvrage de Burgess le plus hardu que j'ai lu, mais cela n'en reste pas moins un chef d'oeuvre. On retrouve l'esprit caractérisant l'ensemble de ses textes, par le biais d'un humour caustique et d'un personnage hors norme. Le délabrement de ce dernier n'empêche pas à la fois de s'y attacher, tout en le trouvant détestable, et le fou rire est à maintes reprises, impossible à retenir.
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L'orange mécanique

Avant d’être un chef-d’oeuvre de Stanley Kubrick, « L’Orange mécanique » est un livre effrayant et prémonitoire d’Anthony Burgess. Dans une banlieue déshumanisée, Alex, un ado déjanté dingue de Beethoven, sème la terreur avant d’atterrir en prison pour y subir un traitement effrayant.
Lien : https://www.elle.fr/Loisirs/..
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Mort à Deptford

Pour son dernier roman, Burgess reprend le sujet de son mémoire universitaire de 1940 sur Christopher « Kit » Marlowe. Curieuse fiction. Comme attendu, l’auteur d’Orange mécanique s’inspire de la vie du contemporain de Shakespeare dans toute sa brutalité, mais il ne cite son œuvre que par des poèmes académiques. Veut-il souligner que Marlowe a été formé à Cambridge à la différence du « Will du Warwickshire », issu d’une petite ville de province ? On n’approche son théâtre que par le narrateur qui se découvre p 145 comme l’acteur du rôle de « la divine Zénocrate » (?) dans son plus grand succès, Tamerlan. Plus surprenante, une très longue citation — cinq pages d’un interminable ennui —, vient d’un concurrent peu connu, Thomas Kyd (p 180-4). Les interventions de Kit se limitent souvent à une ou deux phrases introduisant le discours éloquent de ses protagonistes (une exception p 64 pour un mémorable dialogue avec Dieu).



Jeu de contraste sans doute, ou contrepied goguenard d’un virtuose du coq-à-l’âne qui nous perd dans les identités multiples de ses personnages et la confusion des idées politico-religieuses de l’époque. Marlowe est embringué par un dangereux commanditaire dans une affaire sans retour face à l’ennemi papiste, huguenot, puritain, athée, écossais, espagnol ou flamand. Sans ambiguïté est la description de la crasse, du sordide, du sanglant, du blasphème et de la pratique assidue de la sodomie au « propre » et au figuré (voir l’initiation au tabac p 154, « une sodomie des poumons »). Ces thèmes — l’homicide, la sexualité, l’hérésie nommée trahison ou la trahison nommée hérésie — persistent à la troisième partie, de loin la plus courte, sans narrateur, où Kit se découvre expert en théologie et parle de sa mort annoncée avec autant de gravité que ceux qui le questionnent.

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Les Puissances des ténèbres

C'est en effet un roman du siècle, qui se demande pourquoi ce siècle, qui avait assez bien commencé, a si mal tourné.



Mais c'est surtout une interrogation sur le Mal. Pourquoi les innocents sont-ils broyés? Pourquoi le frère du narrateur meurt-il d'un cancer ? Pourquoi tout ce que fait Carlo tourne-t-il aussi mal ? C'est un personnage bien intéressant. Il n'a voulu que le Bien et pourtant c'est lui qui a causé indirectement la mort de ses neveux, et pour sa nièce à cause d'un miracle mal à propos qu'il a accompli, et de ses réformes mal comprises par certains ; à ce sujet, je soupçonne Burgess de ne pas avoir eu un enthousiasme débordant pour Vatican Il.

Dans le roman, le Mal est incarné et on voit le Démon à l'œuvre (je pense en particulier à l'étrange mort de l'ami de Toomey que Carlo ne pourra sauver malgré l'exorcisme qu'il pratique).

On pense aux romans de Graham Greene, catholique comme Burgess (et Toomey) avec la nuance particulière du catholicisme anglais, où le Mal est également très concret.

Burgess a établi son bilan du siècle en 1980. Je ne suis pas sûr qu'il serait meilleur aujourd'hui.

A part cela, le livre est très drôle. . La première phrase est éblouissante

Oui, très drôle. Qui a dit que l'humour était la politesse du désespoir ?

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Les Puissances des ténèbres

Plus de 1000 pages, de quoi développer des personnages épatants, qui vieillissent, évoluent, traversent des années et le siècle, ce 20e siècle qu'on imaginait, évidemment, comme le plus complexe de notre humanité.

La place de Dieu du diable, l'amour et la sexualité, l'orientation sexuelle, la politique, la sainteté...

J'ai particulièrement apprécié le personnage de don Carlo, prêtre élevé au rang d'évêque puis pape, puis saint, (alors que c'est) un sacré (putain de) gars.

Burgess a écrit là une somme, comme tout pavé il peut rebuter et il nécessite de s'accrocher parce que son style est aussi assez déroutant parfois et parfois trop beau...

Au final, je n'arrive malgré tout pas à le mettre dans mon panthéon des 5 étoiles... Peut-être avec le recul... Peut-être.
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L'orange mécanique

L'orange mécanique (avec un L apostrophe pour commencer) est l'exemple type de roman génial dépassé par son adaptation au cinéma.



Qui ne connait pas le film fabuleux de Stanley Kubrick, qui a marqué son époque à sa sortie, il y a déjà un demi-siècle ?



Et pourtant, le mérite en revient essentiellement à Anthony Burgess car le film "tient" presque entièrement dans le roman !



Dans un univers futur qui ressemble - malheureusement - beaucoup à certains quartiers de notre présent, Alex, le personnage principal du roman balade sa désespérance à coup d'ultra-violence, avec sa bande de copains (aujourd'hui, on dirait son gang).



Il frappe, il boit, il viole, tout ça en écoutant du Beethoven... jouissance extrême.



Dès la première page, le lecteur est saisi à la gorge par le fond du récit (c'est un des premiers grands romans dystopiques, à réserver exclusivement aux adultes, tant il est violent), mais surtout par sa forme.



L'idée géniale d'Anthony Burgess - qui était linguiste avant de mettre à l'écriture - est d'avoir inventé de toutes pièces une novlangue du futur, le nadsat, dans laquelle Alex s'exprime à la première personne.



Un extrait pour bien comprendre l'exercice : "Alors il a joué les gros bras sur la dévotchka, qui n'arrêtait pas de critch critch critch critcher à quatre temps, tzarrible; il lui a fait une clé aux roukeurs par-derrière, pendant que j'arrachais ci et ça et tout et que les autres continuaient à pousser leurs "hah hah hah", et c'étaient des groudnés drôlement chouettes tzarrible qui ont montré alors leur glaze rose, Ô mes frères, tandis que je dénouais les aiguillettes et me préparais au plongeon".



Le nadsat est difficilement compréhensible au début de la lecture, puis le lecteur s'habitue peu à peu, au fur et à mesure qu'il s'éloigne de la réalité et plonge dans cet univers bizarroïde.



(Lire la suite de ma critique sur le site Le Tourne Page)
Lien : https://www.letournepage.com..
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L'orange mécanique

Le livre dont a été tiré le film de Stanley Kubrick mondialement celebre.Tout d'abord la particularité du livre: son style avec un phrasé rustique,voire impoli, qui colle au personnage de voyou du "heros" de l'histoire et donne un rythme au livre, un condensé d'action brute qui se lit en un clin d'oeuil et ne vous laisse pas une seconde de repit ! Foncez les amis vous ne serez pas déçus !
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Mort à Deptford

Voilà un petit roman historique consacré à la vie de Christopher Marlowe (1564-1593), dramaturge élisabéthain qui le premier fit de Faust un personnage de théâtre. La lecture de ce livre d'Anthony Burgess procure tant de plaisir qu'on regrette beaucoup sa brièveté, à peine trois cent dix pages, mais cette brièveté est celle de la vie du héros, poète libertin, espion à ses heures et tant d'autres choses, trouvant trop tôt une mort violente. Comme les affiches de théâtre du temps, qui ne laissaient aucun doute sur le genre de la pièce et sur sa fin : tragédie, farce ou comédie, le lecteur sait d'avance le destin fatal du héros.



Burgess n'écrit pas une biographie de Marlowe, à l'oeuvre de qui il consacra sa thèse universitaire. Les renseignements historiques sont maigres, mais leur rareté permet au romancier de déployer son invention et sa fantaisie. D'abord, il fabrique un narrateur acteur de théâtre, et témoin, qu'il va dénicher dans les erreurs d'impression des Folios de Shakespeare. Il donne ensuite libre cours à la verve renaissante de son narrateur, s'amusant à mélanger le réalisme du roman contemporain, avec les discours sentencieux, à peine sérieux, des auteurs du temps. Cet habile tressage de l'archaïsme et de la modernité a un effet plaisant : il dépayse sans lasser, donne à goûter le temps d'Elisabeth sans trop imposer une langue et des pensées anciennes. La culture, les débats theologiques passionnés de l'époque sont rendus sans lourdeur et deviennent amusants.



Le temps de Marlowe est, selon les termes de la célèbre malédiction, "des temps intéressants" : guerres de toute sorte, violences quotidiennes et religion partout, un peu comme aujourd'hui. Notre héros, libertin comme Théophile de Viau, Giordano Bruno ou Molière, philosophe en fumant (on se souviendra de la grande tirade du tabac au début du Don Juan de Molière), écrit des pièces que l'on retient contre lui, et tâche de vivre du mieux qu'il peut, aussi longtemps qu'il peut, malgré les ennemis qu'il se fait. Il ne ressemble guère au tragique et génial Zénon Ligre, l'esprit libre de L'Oeuvre au Noir de Marguerite Yourcenar, ni à l'humble Nathanaël ou à Lazare, héros d'Un homme obscur et d'Une belle matinée. Burgess n'a pas la gravité ni le digne sérieux de la romancière française, ni sans doute son sens du tragique. Il choisit un point de vue extérieur au personnage et ne prétend pas pénétrer dans l'intimité de ses pensées. Il s'amuse et il amuse avec l'effervescence de la Renaissance anglaise, sans prêcher d'ennuyeux messages citoyens à la Rachel Kadish.



Pour finir, tout comme on remercie Masse Critique quand elle donne à lire un livre, que soit remerciée Madame Lama, célèbre Babéliote angliciste, qui sait aiguiser les curiosités et indiquer les bons livres.
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Mort à Deptford

"What doctrine call you this ? Che serà, serà : What will be, shall be ?"

(C. Marlowe, "The Tragical History of Doctor Faustus")



Est-ce que l'auteur de "Faust" se disait la même chose, en se rendant à Deptford ce jour fatidique du 30 mai 1593 ?

On sait qu'il a été assassiné dans une bagarre de taverne d'un coup de poignard dans l'oeil, on connaît le nom de celui qui a tenu le poignard, mais le reste demeure entouré de mystère. Etait-ce un accident ? Un acte de jalousie ? Kit Marlowe est-il devenu dangereux ? Gênant ? Il avait à peine 30 ans, et une grande carrière théâtrale devant lui...



Anthony Burgess n'a pas écrit seulement "L'Orange Mécanique".

Et Shakespeare n'est pas le seul dramaturge élisabéthain à la fois célèbre et entouré de tant de spéculations et incertitudes.

Alors quand Burgess combine son talent linguistique avec sa passion pour Marlowe (il lui a consacré sa thèse universitaire), cela donne comme résultat un succulent morceau de choix nommé "Mort à Deptford".

Une biographie du poète Kit, contée par un narrateur anonyme, dont on sait seulement qu'il a joué des rôles féminins dans la troupe de Ned Alleyn. Cet ami de Kit (et l'un de ses nombreux amants) va déployer devant vous toute la richesse foisonnante de la langue du 16ème. Tout comme dans "L'Orange", Burgess s'amuse avec la langue, et le lecteur anglo-saxon s'en arrache les cheveux tout en s'inclinant devant ce feu d'artifice verbal. Et même la traduction française est loin d'être mauvaise.



On va donc passer avec le narrateur devant la grande scène de l'époque élisabéthaine, pour suivre le drame d'un de ses illustres dramaturges...

- Le premier acte se passe à Cambridge, où le boursier Kit fait (avec une assiduité mitigée) ses études de théologie. Mais c'est la vie qui l'intéresse, le bruit des tavernes, les bagarres verbales (et autres, moins philosophiques), et surtout, surtout... la poésie ! Ses opinions frôlent dangereusement l'athéisme et l'hérésie, et ses jurons défient toute concurrence.

"Celui qui n'aime ni le tabac ni les garçons rate quelque chose", dixit Kit en pensant au beau Thomas Walsingham, tout en bourrant sa pipe avec le cadeau de Walter Raleigh, apporté des Amériques. Sa "nymphe" puante est un peu difficile à apprivoiser, mais bientôt il ne s'en passe plus... Surtout dans ce cercle restreint (et suspect) chez le "comte mage" Percy de Northumberland, où Kit discute de sujets sulfureux avec Raleigh et l'astronome Hariot, admirateurs de Giordano Bruno.

- Mais c'est déjà l'acte 2, celui qui montre Kit comme l'espion au service de Francis Walsingham, chef de la police secrète d'Elisabeth. Espion recruté un peu malgré lui, il s'acquitte cependant de ses diverses missions, tout en s'empêtrant de plus en plus dans une toile d'araignée d'où il ne pourra plus se libérer. La menace catholique est omniprésente, et les yeux et les oreilles de la Reine doivent être partout. Espionne-t-on même les espions ? Une fois ce jeu dangereux commencé, impossible de quitter la partie pour se consacrer entièrement au théâtre et à la poésie.

- Dans le troisième acte on apprendra que c'est fort dommage, car le talentueux Marlowe (ou Merlin, ou Morley, comme il vous plaira) écrit comme il respire, et ses pièces ont du succès. On va dévoiler par la même occasion quelques horreurs sur la censure élisabéthaine et les secrets de ce grand business populaire qu'était le théâtre de l'époque. On va rencontrer ses entrepreneurs : Alleyn, Burbage, Henslowe (qui dirigeait d'une main de fer tant son théâtre The Rose qu'une arène de combats de chiens et plusieurs bordels à Southwark), ses acteurs et ses dramaturges. Le sympathique Thomas Kyd, vivant dans la misère, ou le vieillissant Robert Greene, vert de jalousie à l'arrivée de la jeune génération : notre Marlowe (ou Merlin, ou Morley), et puis ce campagnard pouilleux qui savait tant plaire au public, un certain Shagspaw, ou Choxper, ou Jacquespere... il me semble même que Greene a écrit quelques lignes assez méchantes à son sujet, en le qualifiant de "Corbeau parvenu". La rivalité, mais aussi la collaboration nécessaire, car le "show must go on".

- Le quatrième et dernier acte se passe à Deptford, et on sait déjà que la fin sera tragique.



Kit nous a légué un peu de poésie et quelques pièces (La Tragique Histoire du docteur Faust, Juif de Malte, Tamerlain le Grand, Massacre à Paris...) en vers blanc, ainsi que plein d'incertitudes le concernant. Etait-il vraiment athée et espion, liquidé sur ordre de la police secrète ? On dit aussi qu'il est possiblement l'auteur de l'intégralité de l'oeuvre de son collègue Shogspere, qui ne nous a pas laissé une seule ligne de sa propre main. Avec la vie qu'il menait, on se demande où il trouverait le temps d'écrire tout ça...



Burgess pousse son jeu littéraire encore plus loin, en dévoilant à la fin l'identité de son narrateur. Quand il a perdu sa voix de jouvenceau, il aurait joué le rôle de Balthasar dans une des pièces à succès du populaire Corbeau. Les rôles étaient souvent écrits "sur mesure", et quelque part dans le First Folio, il est par erreur mentionné non en tant que "Balthasar", mais sous son vrai nom. Simple comme bonjour !

Tous ce que vous avez à faire est de parcourir la version numérisée du First Folio de 1623 avec les pièces de Shakescene, et c'est bien là, dans "Much Adoe About Nothing", noir sur jauni, Acte 2, scène 3 : "Enter Prince, Leonato, Claudio and..." Ha ! Quel sacré joueur, ce Hamburgess ! Ca me fait une belle jambe, mais je peux enfin dormir sur mes deux oreilles.



5/5 pour tous ces personnages historiques rendus tellement vivants (y compris l'authentique bandit élisabéthain nommé George Orwell), pour les réjouissants dialogues littéraires, politiques, théologiques, impertinents et croustillants, pour le mélange d'érudition, de dérision et d'esprit typiquement "burgessien". Et simplement par bonheur que ce livre existe.



"Déplume, si tu veux, le Saint-Esprit

Dis que de Dieu le Christ n'est pas le fils

Crache l'hostie et ce sans précaution

Soit, mais toujours avec dis-cré-ti-on !"



Pauvre Kit, sa discrétion n'était pas suffisante pour lui garantir la vie sauve. Il avait quelque chose de Faust, mais Walsingham était sans doute le Diable...
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Le testament de l'orange

Ce texte date de 1973 et pourtant apparait toujours très proche de l'actualité du moment. Il est en fait le troisième d'un quartet mettant en scène le personnage d'Enderby :



- Inside Mr. Enderby

- Enderby Outside

- The Clockwork Testament or Enderby's End (Le Testament de l'orange)

- Enderby's Dark lady or no end to Enderby



Comme c'est le seul à avoir été traduit en France, une facilitée d'éditeur a fait référence dans le titre à un opus mondialement célèbre de Burgess, « Orange mécanique » pour en assurer sa commercialisation.



Le seul lien avec ce livre précédent est un sujet lors d'un débat télévisé auquel participe le personnage principal qui donne à choisir entre une société qui laisse le libre arbitre à l'individu, au risque de le voir

opter pour le mal, la violence ou une société qui impose autoritairement sa vision du bien.



Cela devait d'ailleurs être un essai initialement et finalement Anthony Burgess a revêtu une nouvelle fois le masque du personnage principal. Il en profite pour distiller en vrac ses avis sur la religion, l'art, la morale, la mort, la sexualité, l'empire britannique et les roustons qui pendouillent.



Plus significativement sur la place de l'art, de la création littéraire et précisément la poésie, qui a vocation à décrire le mémorable, dans une société matérialiste, informatisée, automatisée ou une certaine jeunesse s'enferme dans le militantisme dans ces lieux d'apprentissage que sont les universités américaines où Enderby enseigne en tant que professeur temporaire.



Il met en parallèle son déclin physique et celui supposée de la société qui vient incarnée par ses jeunes étudiants américains. Une belle bande de "jeunes salopards" à qui il enseigne une matière, la poésie, qui leur semble historique voire archéologique, pour le moins inutile et contre laquelle, malgré sa virulence, il ne peut pas vraiment riposter, engoncé dans le contexte politiquement correct du moment.



Poète britannique vieillissant et cardiaque, Enderby propose, par ailleurs, pour des raisons pécunières une adaptation d'un texte d'un obscur poète britannique catholique à une société de production cinématographique américaine.



L'universitaire se retrouve alors malgré lui embarqué dans un scandale, le film ayant été remanié et transformé en un produit de grande consommation à fort caractère libidineux. le film est agoni par les critiques pour son aspect blasphématoire, qui remettent en cause la liberté d'expression au nom de la création. le poète doit finalement faire face à ses détracteurs, d'aucuns en viennent à le menacer de mort. Un étudiant noir s'en prenant au vieux blanc colonialiste et une admiratrice obsédée par l'oeuvre d'Enderby

qui souhaite la voir désacralisée après quoi la vie d'Enderby s'estompera définitivement.



Les quelques premières pages peuvent apparaitre foutraques mais on s'accroche rapidement au fil de la pensée de l'auteur, le récit en devient réjouissant, parfois truculent, cynique et certaines fois hilarant.



Burgess fait de son personnage une figure qui lui ressemble probablement, qui n'est pas infaillible et est, par certains cotés, agaçant mais reste terriblement humain. Un récit court, riche et complexe qui fait regretter que les autres opus ne soient toujours pas traduits.



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L'orange mécanique

L'orange mécanique prouve encore une fois que face à une situation violente, les réponses proposées par l'État ne sont pas à la hauteur et viennent au contraire entraver le plus pur des droits fondamentaux : Le libre arbitre.

Le style tout d'abord. Le narrateur, Alex est un rejeton qui choisit d'être ultra-violent (U.V). En plus de ces actes ignobles qu'il commet en toute conscience, lui et ses amis s'expriment avec un vocabulaire très particulier. Un mélange de gouaille prolétarienne et de mots empruntés aux langues slaves. Une « devotchka » sera une fille, « malenky » signifiera, peu ou un petit peu, etc. Tout un glossaire est d'ailleurs disponible à la fin du livre recensant chaque mot inventé. Cependant, je vous conseille de le lire sans, afin de vous imprégner totalement de l'œuvre.

Mêlé à ce nouveau vocabulaire, Burgess fait évoluer son récit en trois parties. L'ultraviolence, le centre de rééducation et le projet expérimental du gouvernement, et pour finir la sortie de notre humble Alex. C'est dans cette troisième partie que le récit s'embrase et livre une critique d'une société pressurisée par ses propres choix, gouvernée par des incompétents au service de l'ignorance. Alex devient alors un pion politique, et victime de son passé il va voir son destin évoluer violemment.

Tout n'est que violence, mais sous cette couche d'UV, se cache un roman quasi sociologique. Écrit dans une Angleterre qui se cherche encore et qui devient de plus en plus violente, l'auteur pose la question suivante : Vaut-il mieux avoir le choix de faire du mal ou ne pas avoir le choix de faire du bien ? Une question à laquelle chacun est libre d'apporter sa réponse. Réponse qui, toute évidente qu'elle semble être, est un embrouillamini de contradictions, que L'orange mécanique se pressera d'éclaircir, ou pas.
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Sherlock Holmes en toutes lettres

Le Reclus Brun – Davis Grubb



Petite nouvelle amusante et courte, mettant en scène une unijambiste savoureuse dont l’obsession pour Sherlock Holmes la mène à des actions macabres ! Savez-vous ce qui l’obsède autant dans cette nouvelle ? La pantoufle persane de notre bon Sherlock, oui. Une pantoufle que Ellen, notre protagoniste pour ces pages-là, fera tout pour avoir, oui, tout ! Dans une nouvelle que l’on aime, avec de l’humour malgré une touche de tristesse, on suit la quête d’Ellen vers le Saint-Graal, ou devrais-je dire, la Sainte Pantoufle.



Zolnay le trapéziste – Rick Boyer



Favorite des favorites, un petit bijou délectable bien trop court, mais qui n’a pas besoin d’être étiré sur plus de pages parce que bien mené. Nous suivons l’une des enquêtes de Sherlock et de son cher Watson, le tout dans une très belle ambiance. Au menu, le cirque! Et des drames, si vous saviez, que des drames, et des meurtres, bien sûr. Une jeune trapéziste tombe alors qu’elle s’appliquait à une cascade, elle s’appelle Anna, elle aime Gregor, et son destin funeste repose dans les sales paluches d’un autre homme dévoré par la jalousie. De là une stratégie machiavélique scelle la fin de cette jeune femme prometteuse.



Au-delà du mystère de sa mort, on découvre un visage dont on entend aujourd’hui encore parler, parce que c’est un visage qui marque, un visage que l’on ne veut pas regarder en face. L’homme-éléphant, le connaissez-vous ? On y découvre un homme difforme mais humain, bien plus humain que certains êtres doués d’un cœur, mais d’un cœur de pierre, empli de vengeance.



L’aventure du locataire de Dorset Street – Michael Moorcock



Bien sympathique, à lire même si je ne retiens au final que peu de choses de cette nouvelle. Tout tourne autour d’un mystère de famille, d’un américain qui, par un heureux hasard, se retrouve face à Sherlock à qui il explique la raison de sa venue en Angleterre. Le tout dans un décor différent du 221 Baker Street, puisque nos deux colocataires ont été délogés TEMPORAIREMENT pour causes de bidules !



Meurtre en musique – Anthony Burgess



Petit dernier du recueil de nouvelles, beaucoup plus court aussi. Vous saviez que Sherlock était un fan de musique, et que Watson était son contraire même ? Eh bien, pendant que notre cher médecin fait sa sieste en pleine représentation de Sarasate, musicien de talent, un meurtre a lieu sur un autre musicien dont, au passage, la mort est grandiose ! Avant de mourir, il trouve la force de composer quelques notes au piano qu’il jouait si bien. Le mystère consiste à résoudre le meurtre énigmatique. Un peu d'Histoire dans l'histoire, allez !
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