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Citations de Italo Calvino (997)


Tu auras tiré de mon discours cette conclusion que la véritable Bérénice est une succession dans le temps de villes différentes, alternativement justes et injustes. Mais ce dont je voulais te faire part n'est pas là : savoir, que toutes les Bérénice à venir sont déjà en cet instant présentes, enroulées l'une dans l'autre, serrées, pressées, inextricables.

Les villes cachées. 5.
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A la différence de la lecture des pages écrites, la lecture que les amants font de leur corps (de ce concentré de corps et d’esprit dont les amants se servent pour coucher ensemble) n’est pas linéaire. Commencée n'importe où, elle saute, se répète, revient en arrière, insiste, se ramifie en messages simultanés et divergents, elle revient pour converger, elle affronte des moments de lassitude, tourne la page, retrouve le fil, se perd. On peut y reconnaître une direction, un parcours dirigé vers une fin, dans la mesure où elle tend vers un climax, et qu'en vue de cette fin elle dispose des phases rythmiques, des scansions métriques, des retours de motifs. Mais le climax est-il vraiment sa fin ultime ? Ou la course en direction de cette fin ne s'oppose-t-elle pas à un autre élan qui s'épuise, à contre-courant, à remonter les instants, à récupérer du temps ?
Si l'on voulait représenter l'ensemble au moyen d'un graphique, chaque épisode nécessiterait, avec son point culminant, un modèle à trois dimensions, peut-être à quatre ; aucun modèle, aucune expérience ne peut se répéter. Ce par quoi l'acte sexuel et la lecture se ressemblent le plus, c'est que s'ouvrent en eux des temps et des espaces différents du temps et de l'espace mesurables (2015 : pp. 220-221).
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Et pourtant je crois que, au moins les premiers temps de son séjour sur cet astre désert et oublié, il lui arrivera encore de continuer à discuter mentalement avec Ggge. Ce ne sera pas facile pour lui de s'arrêter. Je crois le voir, seul dans le vide, en train de parcourir l'étendue des année-lumière, mais se disputant toujours avec sa femme. Ces expressions "je te l'avais bien dit" et "la belle découverte !" qui ont commenté la naissance des étoiles, la course des galaxies, le refroidissement des planètes, ces "maintenant tu vas être contente" et "tu ne sais dire que ça" qui ont marqué les épisodes, les phases, les explosions de leurs disputes et des cataclysmes célestes, et ces "tu crois toujours avoir raison" et "parce que tu ne veux jamais m'écouter" sans lesquels l'histoire de l'univers n'aurait pour lui ni nom ni souvenir ni saveur, cette querelle conjugale ininterrompue, si jamais elle finissait un jour, quelle désolation, quel vide !
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Une nuit, j'observais comme d'habitude le ciel avec mon télescope. Je remarquai que d'une galaxie distante de cent millions d'années-lumière se détachait une pancarte. Dessus, il était écrit : JE T'AI VU. Je fis rapidement le calcul : la lumière de la galaxie avait mis cent millions d'années pour me joindre, et comme de là-bas ils voyaient ce qui se passait ici avec cent millions d'années de retard, le moment où ils m'avaient vu devait remonter à deux cents millions d'années.
Avant même de contrôler sur mon agenda pour savoir ce que j'avais fait ce jour-là, je fus pris d'un pressentiment angoissant : juste deux cents millions d'années auparavant, pas un jour de plus ni de moins, il m'était arrivé quelque chose que j'avais toujours essayé de cacher. [...] Et voilà que d'un lointain corps céleste quelqu'un m'avait vu, et maintenant l'histoire revenait au jour.
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Maintenant vous allez me demander ce que diable nous allions faire sur la Lune, et je m'en vais vous l'expliquer. Nous allions ramasser le lait, avec une grande cuiller et un baquet.
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« Comment faire pour raconter maintenant que j'ai perdu la parole, et les mots, peut être la mémoire aussi, comment me rappeler ce qu’il y avait dehors, et si j'y parviens comment trouver les mots pour le dire, et les mots comment les prononcer, nous sommes tous là à chercher à faire comprendre quelque chose aux autres par des gestes, par des grimaces, comme des singes. » La taverne des destins croisés.
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C"est en restant impitoyablement lui-même, comme il le fit jusqu'à la mort, qu'il pouvait donner quelque chose à tous les hommes.
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C'était en un temps où les aliments les plus simples recelaient des menaces insidieuses et relevaient de la fraude. Il n'était pas de jour où le journal ne révélait des choses épouvantables à propos du panier de la ménagère : le fromage était fait de matière plastique ; le beurre, avec des bougies ; dans les fruits et légumes, le taux d'arsenic des insecticides était plus élevé que celui des vitamines ; les poulets étaient engraissés avec certaines pilules synthétiques qui pouvaient transformer en poulet ceux qui en mangeaient une cuisse. Le poisson frais avait été pêché l'année précédente en Islande, et on lui maquillait les yeux pour qu'il parût de la veille. Une souris, dont on ne savait pas si elle était vivante ou morte, avait été découverte dans un bidon de lait. Des bouteilles d'huile ne coulait point le suc doré des olives, mais de la graisse de vieux mulets opportunément filtrée.
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Du fond des tentes coniques, montait comme un sourd concert de souffles d'hommes endormis. Ce que pouvait être le bonheur de fermer les yeux , de perdre tout sentiment de soi-même, de s'abîmer dans le gouffre de sa propre durée, et puis, au réveil, de se retrouver tel qu'avant, prêt à tisser de nouveau les fils de son existence, cela, Agillulfe était incapable de le concevoir ; l'envie qu'il éprouvait devant cette faculté de dormir accordée aux personnes existantes, restait un sentiment confus, l'envie de quelque chose dont on n'a pas la moindre notion.(p 19)
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Le moi qui nage, de monsieur Palomar, est immergé dans un monde sans corps, intersections de champs de forces, diagrammes de vecteurs, faisceaux de lignes droites qui convergent, divergent, se brisent. Mais il reste un point en lui où tout existe d'une autre façon, comme un nœud, comme un caillot, comme un engorgement : la sensation précisément qu'on est là mais qu'on pourrait ne pas y être, en un monde qui pourrait ne pas y être mais qui est là.
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A 6 heure du soir, la ville tombait aux mains des consommateurs. Durant toute la journée, le gros travail de consommation active était la production: elle produisait des biens de consommation. A une heure donnée, comme si on avait abaissé un interrupteur, tout le monde laissait tomber la production et, hop! se ruait sur la consommation. (p.129).
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On ne lit pas les classiques par devoir ou par respect, mais seulement par amour.
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Si jamais tu deviens la moitié de toi-même et je te le souhaite, enfant, tu comprendras des choses qui dépassent l'intelligence courante des cerveaux entiers. Tu auras perdu la moitié de toi et du monde, mais ton autre moitié sera mille fois plus profonde et plus précieuse. (p.60)
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- Lire, dit-il, c'est toujours cela ; une chose est là, une chose faite d'écriture, un objet solide, matériel, qu'on ne peut pas changer; et à travers cette chose on entre en contact avec quelque chose d'autre, qui n'est pas présent, quelque chose qui fait partie du monde immatériel, invisible, parce qu'elle est seulement pensable, ou imaginable, ou parce qu'elle a été et n'existe plus, parce qu'elle est passée, disparue, inacessible, perdue au royaume des morts...
- Ou bien parce qu'elle n'existe pas encore, quelque chose qui fait l'objet d'un désir, d'une crainte, possible ou impossible : lire, c'est aller à la rencontre d'une chose qui va exister mais dont personne ne sait encore ce qu'elle sera...
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Italo Calvino
Lire, c'est aller à la rencontre d'une chose qui va exister, mais dont personne ne sait encore ce qu'elle sera... (Soudain, tu vois la Lectrice penchée en avant, scrutant par-delà le bord de la page imprimée l'apparition à l'horizon de navires venus en sauveurs ou en conquérants, de tempêtes...)

Citation d'Italo Calvino
Si par une nuit d'hiver un voyageur
lue dans le Philosophie Magazine hors série SEMPÉ
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Et soudain, trois sonneries de trompette ; dans l'air immobile, les plumails des cimiers tressaillirent comme au passage d'un vent coulis. D'un coup s'éteignit cette sorte de rumeur marine qu'on avait perçue jusque-là : ce n'était, bien sûr, que le ronflement des guerriers, assourdi par l'embouchure métallique des heaumes. Enfin ! Là-bas au fond, c'était lui, Charlemagne ! Il s'avançait sur un cheval qui semblait plus grand que nature, sa barbe étalée sur sa poitrine, ses mains posées sur le pommeau de la selle. Régner et guerroyer, guerroyer et régner, pas de trêve, pas de repos : il avait quelque peu vieilli, depuis la dernière fois où ses soldats l'avaient vu.
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Alors il sentit la tristesse l'envahir à l'idée de devoir retourner là-bas, et il repéra dans le paysage grumeleux l'ombre de son quartier : il lui apparut telle une lande plombée, stagnante, recouverte par les écailles innombrables des toits et par les lambeaux de fumée flottant au faîte des cheminées.

(Le bon air)
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Mais déjà, les navires disparaissaient à l'horizon et je restai là, dans notre monde rempli de responsabilités et de feux follets.
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Toute chose dans ce jardin était ainsi : belle sans qu'on puisse vraiment s'en délecter, avec toujours au fond de soi un sentiment de malaise et la crainte que tout cela ne fût seulement dû qu'à une distraction du destin dont, bientôt, on leur demanderait compte.
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Irène est la ville qu’on voit quand on se penche au bord du plateau à l’heure où les lumières s’allument, et dans l’air limpide on distingue là-bas au fond toute l’agglomération : où les fenêtres sont plus nombreuses, où elle se perd en sentiers à peine éclairés, où elle amasse les ombres des jardins, où elle dresse des tours avec des feux pour les signaux ; et par les soirs de brume, une clarté fumeuse se gonfle ainsi qu’une éponge pleine de lait au bas des calanques
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