Écrit en 1975, marqué du sceau du courant "cyberpunk", j'avais un peu peur de commencer ce petit roman : il arrive que la technologie dépasse la science-fiction et celle-ci prend un tel coup de vieux, qu'on en oublie le message initial de l'auteur.
Dans le cas présent, je me suis aperçu le vocabulaire science-fictionnesque employé est tout à fait abordable, pas comme peuvent l'être William Gibson ou Walter John Williams, dans le même genre. L'histoire est rythmée par de courts chapitres dont les titres sont pleins de jeux de mots, ce qui permet de se détacher de l'intrigue et de rigoler un peu. De même le "style-de-vie banane" qui n'est pas sans rappeler les "bobos".
Les thèmes employés sont très actuels : crise de l'énergie, individualisme, hédonisme, accaparement du pouvoir par une soi-disant "élite", dénonciation de la techno-science voire retour d'une forme d'eugénisme, refus par les dirigeants de voir se développer d'éventuelles alternatives à leur "nouvelle conformité". Bien entendu, l'écriture de se roman s'est faite en plein mouvement hippie : il y a une préoccupation écologique, la mise en valeur des communautés, la sobriété joyeuse... J'y verrais une petite touche de décroissance, ou tout simplement l'héritage de certaines valeurs des années 70.
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récit d'anticipation de 1972,qui pourrait etre proche tant la société qui y est décrite ressemble à la notre(ne sommes nous pas en 2011?...).Description clinique d'une terre polluée,d'une population malade,à coups de courts chapitres comme tirés d'un article de presse,d'une émission radiophonique,télévisée,d'un compte rendue médical.C'est un roman qui semble s'éparpiller,comme l'implacable pollution.En fait les personnages et nous,lecteurs,ne pouvons que finir regroupés en "troupeau" ;aveugle pour eux, moins aveugle et tout autant amer pour nous.Ce livre pourrait précéder et"expliquer "La Route" de Cormac Mc Carthy en moins noir mais pas beaucoup plus gaie.
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Cela fait déjà longtemps qu'Austin Train a mis tout le monde en garde contre les dangers de la pollution. Mais rien ne semble y faire et le monde court à grande vitesse à la catastrophe.
Un roman patchwork, à la manière d'un Dos Passos, paru en 1972 mais qui colle à notre actualité. Une vision du monde absolument cauchemardesque, un monde pollué à outrance, qui n'arrive plus à respirer.
Brunner est un visionnaire au talent fou. Il avait par exemple extrapolé sur la surpopulation dans "Tous à Zanzibar", et nous livre ici un quasi traité mettant en garde contre la pollution.
On y suit plusieurs personnages, dont le destin est retranscrit par le biais de courts chapitres entrecoupés de slogans, d'extraits de bulletin radio...
Un excellent et hallucinant roman qui fait froid dans le dos lorsqu'on le compare à notre monde actuel.
Un chef-d'oeuvre à coup sûr.
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Dans cette dystopie publiée en 1973 ( !!!) l’Union européenne a explosé , le Royaume Uni est fracturée par la contestation sociale, la guerre menace en Europe et le fanatisme religieux gagne du terrain à coup d’attentats et d’exactions diverses ( il est chrétien ,pas musulman) . Et il y a même un virus (voir le titre) mais il n’a pas aussi mauvais rôle que le COVID … Brunner est vraiment un auteur étonnant (« Le troupeau aveugle » , « Tous à Zanzibar » … ont aussi un côté prédictif fort inquiétant) . Sa méthode d’écriture , nombreux personnages ,narrations parallèles est extrêmement efficace .
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J'ai une histoire particulière avec ce bouquin. Il y a un élément de l'histoire qui a pris le pas sur tout le reste dans mon souvenir, à tel point que j'en avais changé le titre pour "Le pavillon d’Eustache". Dans ce roman dystopique, d'une dictature basée sur le numérique, le seul espace de liberté qui reste sont des cabines téléphoniques où les gens qui n'en peuvent plus peuvent se rendre pour y déverser toute leur hargne ou leur désespoir, en toute impunité (y compris s'en prendre aux autorités, avouer un crime…), auprès d'un numéro d'urgence tenu par des psychologues à l'écoute de la désespérance de la société (d'où l'appelation de "Pavillons d'Eustache"). Cet îlot de ”liberté de parole" dans un monde totalitaire, constitue sa soupape de sécurité. Le dénouement final est d'un cynisme complet, mais qui fait réfléchir.
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Dur dur ! Je suis totalement partagée entre une admiration dingue pour l'auteur qui a créé ce monde (qui ne donne vraiment pas envie) comme cadre de sa dystopie et un rejet de ce roman de SF qui m'a donné du fil à retordre. Lu il y a quelques années déjà, je me rappelle avoir persisté tout en luttant régulièrement pour ce faire. Finalement, la construction a eu raison de moi puisque je n'ai plus vraiment de souvenirs aujourd'hui de l'intrigue. A lire pour des initiés (que je n'étais - ne suis - définitivement pas).
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Cinq nouvelles assez intéressantes dans lesquelles nous suivons un étrange personnage répondant au nom du passager de la nuit. Ce dernier qui a des pouvoirs assez particuliers sortant des forces des ténèbres.
Une lecture assez légère qui nous fait passer un agréable moment avec de la bonne science-fiction.
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Ce roman est passionnant ! Je croyais avoir entre les mains un livre de science-fiction mais bizarrement il ne m’a pas paru être dans ce thème là… Qui est cette femme retrouvée nue, amnésique non loin d’un hôpital psychiatrique ? Il me ferait plutôt penser à un polar (bien qu’un peu long à démarrer) : du suspense, des indices qui se contredisent…. et la vérité qui est dévoilée qu’aux toutes dernières pages. Une découverte pour moi et qui me donne envie de lire d’autres romans de cet auteur que je ne connaissais pas
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Il faut à mon sens trois éléments pour faire un bon roman : une intrigue travaillée, des personnages qui nous donnent envie de voyager à leurs côtés, et un univers cohérent et précis. John Brunner semble avoir travaillé presque exclusivement le dernier aspect, au détriment des deux premiers. Alors oui, la narration est savante, avec des tas de petits clins d'oeil ici ou là, des liens, une espèce de kaléidoscope qui en effet retranscrit bien la vision "hachée" qu'ont les personnages de l'existence. Mais l'intrigue est pauvrement développée : même si elle part de deux éléments intéressants (le rachat d'un pays d'un côté et les dérives de l'eugénisme de l'autre), une centaine de pages seulement se détache en termes d'action, sur la totalité de ce roman qui en fait six cents. La narration est souvent déséquilibrée, trop elliptique pour qu'on ait le temps de s'attacher à quoi que ce soit qui nous ferait véritablement plonger dans l'histoire. Quant aux personnages, ce sont des coquilles vides : en ce qui me concerne, rien n'a pris, ce qui rendait la lecture encore plus ardue car je n'avais strictement rien à cirer de ce qui pouvait leur arriver, en bien comme en mal. Je veux bien croire en effet à l'aspect précurseur du roman, à ses prédictions qui se sont pour beaucoup avérées ; je lui reconnais un travail intéressant sur la langue et la pensée (et un boulot pharaonique de traducteur). Mais cela suffit à faire un bon essai, non un bon roman. Je me suis forcée à aller jusqu'au bout car je me documente sur la science-fiction en ce moment. Mais si j'avais ouvert ce livre pour mon simple plaisir de lectrice de romans, je ne serais pas allée jusqu'au bout. Si des choses m'ont échappé, je serais ravie qu'on me les explique ! Car si je reconnais à Tous à Zanzibar des qualités, son aspect romanesque est pour moi définitivement un flop...
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Un homme dit avoir été agressé par une jeune femme nue et ne parlant pas un traitre mot d’anglais en pleine campagne. Après recherche, l’inspecteur de police du coin et le Dr Paul Fidler la retrouvent et l’amènent dans l’établissement psychiatrique où travaille ce dernier. Peu à peu, un lien s’établit entre le patient et le médecin qui va finir par lever le voile sur sa véritable identité.
Une bonne première partie du bouquin manque d’action, il est davantage axé sur les réflexions du psychiatre sur sa vie, sa femme, ses collègues, ses patients. D’ailleurs toutes ses réflexions sont précédées d’un rond dans le livre et il y en a beaucoup, beaucoup. Bref, elles sont un peu déprimantes, d’ailleurs le psychiatre est déprimant, sa vie aussi.
Ensuite quand Loustic décide de se livrer cela devient bien plus intéressant. Une nouvelle dimension s’offre à moi… Euh au Dr Fidler surtout, qui découvre un monde merveilleux appelé Llanraw. Les confessions de Loustic lui donnent des envies de changement et de liberté.
Et là, paf, la bulle de bonheur éclate ! Finalement, l’histoire est bien tarabiscotée et les idées bien trouvées, quelle imagination de la part de l’auteur mais pas suffisamment exploitée car tout ça arrive bien trop tard, le livre est quasi terminé.
C’est dommage car j’aurais aimé en découvrir davantage sur ce monde que nous laisse entrevoir l’auteur, il me laisse comme un goût d’inachevé. Mais cela reste tout de même une bonne découverte livresque.
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Noire est la couleur annonce... la couleur, justement.
Roman noir, longue traversée de l'underground londonien... pour peu, on croiserait Moorcock se shootant dans des toilettes aux portes défoncées. Pourtant, la langue reste pure, non démonstrative, pas de glauque, hormis dans les situations, sobrement décrites.
Crossover multigenre, lorgnant abondamment vers le polar, ce roman déroutera les fans de SF qui restent focalisés sur Tous à Zanzibar. On est pourtant dans un des thèmes chers à Brunner, le délitement de la société, la perte de valeurs, l'effritement des codes...
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Ce livre est bien plus que de la SF. Ecrit en 1968 - déjà presque 40 ans, gosh - , s'il reste d'une étrange actualité, c'est parce qu'il s'agit plutôt d'une réflexion politique sur notre monde. Lu en français il y a 25 ans, il m'avait beaucoup impressionné, par la cohésion d'une organisation hybride du texte - quelque peu complexe dans sa structure, son foisonnement, son invention littérale, ... - et d'une pensée profonde, organisée, que l'on découvre peu à peu. Je retrouve mes impressions en le relisant, en anglais cette fois - ce que je ne recommande qu'à un lecteur averti, car le texte fourmille de néologismes et d'inventions morphosémantiques - . et je considère qu'avec "Limbo" de Bernard Wolfe, c'est un des plus grands romans de politique fiction jamais écrit.
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Un roman d'anticipation écrit en 1975 et qui a aujourd'hui pour une large partie rejoint la réalité, preuve de l'intuition géniale de son auteur. A l'époque Arpanet, ancêtre militaire d'Internet, n'en était pourtant qu'à ses débuts. Ce roman n'a donc pas vieilli (ou presque), et le style d'écriture très agréable en fait un classique incontournable pour tout fan de SF.
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