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EAN : 9782954516387
136 pages
Signes et balises (16/11/2018)
4.12/5   4 notes
Résumé :
Christophe Dabitch nous offre une déambulation le long du 45e parallèle, qui traverse la Dordogne de part en part, à égale distance de l’Équateur et du pôle Nord. Une ligne à la fois imaginaire – aucun tracé ne la matérialise – et réelle, comme le savent les géographes et les astronomes. Une ligne de frontière invisible.

Et au débouché de plusieurs jours de marche en compagnie de trois camarades, il nous propose ce texte, tout autant poésie, reportage... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Nul besoin d'avoir fait 41 fois le tour de la terre ni d'avoir dormi dans des igloos pour se sentir voyageur et aventurier. C'est ce que nous écrit Christophe DABITCH dans ce singulier récit de voyage dans lequel, dès le préambule, il prévient son monde quant à son choix de « marcher » sur le 45e parallèle nord en France : « À égale distance du pôle Nord et de l'Équateur, entre les grands froids et les grands chauds, on dit de ce parallèle qu'il incarne la tempérance et l'équilibre, un rapport d'échange ».

Christophe DABITCH, natif de Bordeaux et déjà auteur de plusieurs livres, a (un peu) préparé son parcours, ce sera certes ce désir de suivre au plus près le 45e parallèle nord en France, mais de l'effectuer dans le département plutôt rural de la Dordogne. Vous possédez toutes les données avant de vous glisser dans les pas de Christophe et ses trois compagnons. Suivez-moi.

Christophe DABITCH est en effet accompagné de trois amis : Nicolas pour la postérité derrière son appareil photo, Frédéric au son et Patrick aux godasses, l'autre marcheur. le périple va se faire au jour le jour, pas trop de plan défini, un vrai désir d'une aventure unique. Alors les quatre z'amis vont improviser, dormir chez l'habitant. S'ils ont décidé de chausser les pompes de randonnée en octobre, c'est qu'à cette époque-là il est plus aisé de glaner des fruits, plein de fruits, mûrs et juteux, car le quatuor souhaiterait être le plus proche possible de l'autosuffisance et de l'entraide.

Bien sûr, dans pareil exercice les rencontres ne manquent pas, elles sont même quotidiennes devant l'aspect un peu « original » du but. Les habitants questionnent, mais interviennent aussi : « Dans les discussions autour d'un verre, il est assez étonnant de parler du parallèle nord, car on ne peut presque rien en dire ni rien en tirer, sinon la certitude de son passage à l'endroit où nous nous trouvons. Ces habitants savent que le 45e passe par là, quelque part, parfois même précisément au croisement d'un champ, d'un bois, d'une rue. Ils en connaissent la présence et je sens que quelque chose les y relie ». Salut fraternel aux autos et leurs autochtones pour une balade poétique (la langue est bien menée, bien traitée, elle n'en sortira que grandie).

D'ailleurs, qu'est-ce donc que ce 45e parallèle nord ? L'auteur se pose pour nous éclairer, et en profite pour donner quelques détails sur le méridien de Greenwich, comment et pourquoi il a été choisi en tant que référence en 1884.

Et puis des rencontres, des milieux, des bouts de nature qui font décoller la machine à remonter le temps : évocation de temps plus ou moins anciens, souvenirs dilués, une petite digression hors sujet, pleine de tendresse ou d'horreur (cette maison noire rappelant la Bosnie et des dizaines de massacrés dans la population civile pendant la guerre civile). Mais la nature reprend ses droits : l'odeur, les animaux (en liberté ou domestiqués), les arbres, les prairies, les traces de l'homme, les ponts traversés au-dessus des rivières et ruisseaux. La campagne est pleine de surprises : séquence voyeurisme avec un inconnu habillé en femme dans son jardin, ou encore cette aire de golf comme venant d'un autre monde et d'une époque futuriste : « Avec parfois des îles étranges, comme ce golf, caricature verdoyante de perfection et de maîtrise avec son idéologie de tondeuse à gazon, où l'on éprouve le soudain désir d'être chef d'une armée conquérante de taupes ». Car l'auteur ne manque pas d'humour et il le fait partager.

Quelques paragraphes sur la science, l'astronomie, la rotation de la Terre, et puis le retour sur les chemins cahoteux et secs de Dordogne. Petites touches du témoignage du passé par des constructions faites jadis de la main de l'humain et qui représentent aujourd'hui une période révolue, comme anachroniques.

Et d'abord, ce n'est pas que de la marche, mais une recherche plus spirituelle vers un bien être, une fatigue positive, la satisfaction de la souffrance physique. C'est un sacerdoce mais aussi un besoin vital, une pause dans le quotidien : « La marche devient un travail absolu qui occupe les jours, une répétition rassurante, un mouvement qui nous transforme en nomades sortis de nos vies. Nous sommes socialement en suspension, en récréation, et presque plus rien d'autre, sinon le repas chaud du soir, ne compte. L'alternance d'épuisements et de souffles retrouvés joue son rôle ».

L'auteur va nous présenter quelques figures disparues, comme celle d'Albert DADAS qui a porté dans sa vie, en fin de XIXe siècle, la marche sur un piédestal de marbre, en faisant une sorte de divinité. Quand DABITCH sort de ses rêveries, c'est pour croiser des randonneurs outillés et harnachés se rendant à Compostelle. Mais aussi (et surtout ?) pour admirer les arbres, véritables héros de cette marche : « Un chêne se penche lourdement sur le pré. Un autre, au tronc blanchi, dégarni, dont certaines branches tordues se dressent encore, est à terre ».

En fin de volume, par les simples informations offertes il est possible de recréer cette randonnée à laquelle nous a invité l'auteur : toutes les communes traversées, tous les lieux-dits (certains avec des noms assez croquignolets) sont cités. Puis le marcheur, épuisé, semble touché soit par la grâce soit par une insolation en fournissant quelques interprétations que pourrait penser un extra-terrestre en atterrissant sur le parallèle numéro 45. Court exemple pour donner l'eau à la bouche : « Représentant de la sous-espèce noble, qui déclare : ‘La Révolution a beaucoup pris à ma famille, vive la République !' (cas étrange, à placer en observation) ».

Laissez-moi vous livrer le fond de ma pensée : Un homme qui en pleine randonnée, de surcroît à but inutile, cite comme référence Edward ABBEY, a tout de suite droit à mon plus grand respect, il se pourrait même que je le tutoie assez promptement.

Ce petit bouquin de moins de 130 pages, qui se lit d'une traite avec une bouteille de flotte fraîche et un peu de tabac à rouler, fait du bien en cette période printanière, il est sorti fin 2018 aux petites éditions Signes et Balises dont nous reparlerons par ailleurs très prochainement tant pour la qualité des choix littéraires que du matériau (superbe papier épais et format poche à couverture soignée en couleur). Allez zyeuter leur catalogue, il donne soif d'aventure ! Et munissez-vous de bons godillots de marche et de jumelles.

https://deslivresrances.blogspot.fr/
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Très joli petit livre lu dans le cadre de l'opération Masse Critique, donc je remercie Babelio et les éditions "Signes et balises" de m'avoir fait découvrir cet auteur et cette lecture poétique très enrichissante.
Pourtant, les premières pages m'ont quelque peu dérouté, il m'a semblé, à tort certainement, que le cheminement avait du mal à se mettre en place. de même, les quelques digressions m'ont écarté du chemin de manière un peu surprenante, heureusement il revenait assez vite.
L'originalité de cette randonnée suivant d'ouest en est le 45ème parallèle nord à travers la Dordogne fonde la richesse de ce récit. En effet, la progression des marcheurs est toute droite, envers et contre tout, en dehors des chemins tracés sauf s'ils viennent à suivre le 45ème. Ainsi, peu de rencontres, l'esprit des quatre marcheurs peut vagabonder tandis que leurs pieds suivent la ligne.
L'auteur n'encombre pas le récit de détails sur ses partenaires, il consacre tout son texte à ses perceptions de la nature vivante, qu'il s'agisse des vaches, taureaux, cochons, et, surtout des arbres et des plantes. Les descriptions s'attardent sur la terre, l'humus, les feuilles, les labours au long de ce voyage automnal et c'est un vrai plaisir que de s'enfoncer avec les marcheurs dans ces profondeurs d'ornières ou de forêts.
Une poésie très douce émane de ce texte, hymne à la nature et à la lenteur; les rares références au monde de la vitesse et de l'urbanisation ne l'entame aucunement et l'on se laisse glisser dans cette torpeur qui progresse très paisiblement.
Ce livre peut donner envie de continuer le chemin sur un ou plusieurs départements suivants et, qui sait, relater ce parcours nature.
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Tout d'abord,je remercie Babelio et les éditions "signes et balises" de m'avoir permis de decouvrir ce livre dans le cadre de la masse critique.
Un petit livre empli de poésie et de douceurs. Ce fut un plaisir de déambuler avec l'auteur et ses comparses le long du 45e parallèle.
La seule chose qui m'a un peu dérangé et dérouté ,ça a été les retours en arrière. J'avais du mal a suivre le cheminement a force,mais ce n'est pas très grave. Je pense que c'est le genre de livre qu'il faut lire 2 fois afin de.bien comprendre tous les tenants et aboutissants.
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Un livre qui sort des sentiers battus, qui nous amène à la réflexion de savoir si notre vie est si équilibrée que ça.
L'auteur et trois de ses comparses ont décidé de traverser la France en suivant la 45 ème parallèle nord, parallèle qui pour certain est un peu l'équilibre, car tous les temps si retrouve, la vie est en harmonie. Seulement pour cette traversée qui paraît si simple vue du ciel, ne l'est pas d'un point de vue terrestre. Dû au forêt, rivière, la nature en somme, mais surtout à l'homme qui lui, l'équilibre ne consiste qu'à son petit bonheur qui est de cloisonner, couper, s'approprier.
Ils devront donc, souvent, frauder pour continuer leur chemin.
Un livre qui est plus un road book, on suit notre écrivain dans son parcourt, mais aussi dans ses pensées, ses souvenirs, ses sentiments. On a l'impression d'être les pages sur lesquelles il écrit son périples. On l'accompagne et on essaie de le suivre.
Ce qui m'a un peu perturbé, c'est justement ces fameux souvenirs, par moment on ne sait plus où on se situe, ni quand et surtout pourquoi.
Un livre à decouvrir, pour une traversée au coeur de cette 45 ème parallèle.

Lien : http://armonyann.over-blog.c..
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Une herbe rase maintient toujours la trace sur ces chemins foulés pendant des siècles et cette terre tassée par les pas ne les efface pas. La végétation tente de les recouvrir, mais elle n' y parvient pas. Ces chemins abandonnés, qui reliaient des villages, des hameaux et des maisons isolées sont peuplés d'ombres. Ils complètent les fermes en ruine, les champs délaissés, les forêts rendues à elles-mêmes. C'est une désertion lente, car ces chemins ne servaient pas à la promenade. Un jour, une dame âgée, répondant à la question sur un sentier aperçu, conseille de ne pas l'emprunter car, ainsi qu'elle le dit joliment, après il n'y a rien. Il est toujours possible qu'un chemin n'aboutisse à rien mais nous retrouvons cette fois-ci une trace et une issue. Nous avons le sentiment de leur redonner vie le temps de notre passage, une vie aussitôt effacée car trop légère et furtive. Même si je suis persuadé qu'ils sont les meilleurs, qu'ils ont fait leurs preuves et qu'ils sont dignes de confiance, j'ai la sensation de marcher sur des tracés anciens devenus indéchiffrables. Ces chemins sont bien des ruines, populaires, douces et discrètes, des vies de passages. Ils surprennent au milieu des écroulements de forêts et nous les empruntons, à l'écoute.
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Ce chemin qu'on pense droit, de l'éveil à l'extinction -- ligne de fond palpable, physique --, ne l'est pas, même si la direction est assurée. On ne peut jamais s'écarter de cette ligne et ce qui en nous se répète, mais notre vie sera dans les détours -- ceux que nous choisissons et surtout, la plupart du temps, ceux qui s'imposent et que nous acceptons. Le 45ème ne serait-il pas cette tentative d'équilibre sans cesse recherchée dans les paradoxes, les contradictions et les forces qui nous animent et nous échappent?
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La terre foulée change : de l'auburn au rougeâtre ; du gris au marron noirci ; du calcaire caillouteux au clair sablonneux ; du vert tendre printanier à celui bruni, déjà en route vers la décomposition ; de la terre grasse à la terre sèche ; de l'humide et glaiseux au durci en roche ; du chemin herbeux à la fine trace oubliée des cheminements anciens ; de l'herbe vierge et gorgée de rosée au goudron bleuté ; de l'escarpé encombré de ronces aimantes, de repousses de châtaigniers et de sensuelles fougères aux sous-bois profonds, épais, doux d'humus et de mousse qui presque avalent ; des champs labourés en profonds sillons à ceux quadrillés par les maïs décapités et les tournesols aux têtes noires qui penchent ; des pare-feu de lignes à haute tension, en orties, genêts et piquants inconnus aux molles croupes herbeuses et rondes collines ; des fonds de vallées noyés sous les arbres aux modestes sommets surplombant les masses vertes foisonnantes qui ne font plus qu'une seule terre.
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A moins que sa grande force naturelle ne soit la halte éphémère, ce temps où la contemplation permet de reprendre souffle, peut-être que la marche procure une allure et un mouvement ancrés dans les profondeurs, une sensation d'avoir trouvé un rythme autorisant parfois des coïncidences avec le sol et les éléments qui nous entourent, que nous percevons de façon fragmentaire. C'est un rythme de perception qui s'impose et trouve une adéquation avec le paysage dans la distance et le temps. Etre bipède relève du temps long, être mécanisé du court terme, ce n'est peut-être que cela. Le corps redevient la mesure. Nous sentons ainsi que nous avons trouvé cette sensation de vivre concrètement, un rythme dans notre propre corps, en accord avec ce qui nous entoure. Une dissolution de soi est à l'oeuvre. C'est un rythme basique et binaire, ouvert et résonnant.
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Je marche toujours à l'aveugle, dans l'obscurité, en sachant qu'elle peut devenir définitive. Je n'en éprouve plus d'inquiétude et je me suis mis à aimer un temps qui n'est pas celui des entreprises futures et des projets qui poussent à l'oubli du présent, cet encastrement dans des compartiments régis par la vitesse. Cette obscurité est comme un parallèle invisible, je suis le seul à la percevoir et je sais qu'elle est un chemin qui s'éclaire progressivement. Je n'en suis pas spectateur, j'y marche et ce qui apparaît dépend de la façon dont je marche.
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Vidéo de Christophe Dabitch
Désormais parisien, l'italien Piero Macola publie chez Futuropolis des one shots contemporains profondément humains. Ses chroniques sociales gagnent en tension en frayant légèrement avec le thriller et focalisent sur les laissés-pour compte, les désoeuvrés ou les migrants en évitant les pathétiques lieux communs populistes. Ces sujets demeurent plus que jamais d'actualité. Nous l'avons rencontré à l'époque des "Nuisibles", mais nous vous conseillons "le Passeur de lagunes", scénarisé par l'excellent Christophe Dabitch, qu'il dessine à l'aide d'une technique mélangeant l'aquarelle et les crayons de couleur.
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