Bon , soyons clair , net et précis , ce roman , c'est un immense coup de coeur , un bouleversement qui m'a tenu en haleine , sans m'arrêter ... ( non , je mens , j'ai dormi à cause de l'heure qui devenait indue ).... ou presque . de l'émotion , des émotions à ne plus savoir comment les gérer , un style au diapason , et puis le thème que j'adore et qui m'obsède , l'enfance et ses mystères , ses non-dits , les histoires de famille enfouies , cachées mais tapies en soi , prêtes à fuser , à jaillir pour le meilleur ou pour le pire ....Ce " petit livre "(145 pages ) dégage une force incroyable , c'est un cri destiné à évacuer un trop plein d'amertume , de frustration , de souffrance et ...c'est beau , violent mais beau , un personnage fragile comme du cristal .
Mais , voyons un peu tout cela de plus prés , enfin pas trop prés tout de même car ce livre , il faut le lire , ou plutôt le vivre , pas se le faire raconter .Gabriel est écrivain.Pour poursuivre son oeuvre d'écriture , il décide de retracer la vie d'un homme emprisonné et , pour cela , il va le rencontrer et remonter le temps avec lui....Encore faudra-t-il que notre homme accepte de se livrer ...Dans cet univers carcéral , ce milieu d'abandon , les sentiments maltraités trouveront -ils leur passage vers la lumière ?
je disais que , pour moi , ce roman était remarquable et posait bien la problématique de l'enfant et de son devenir , sujet certes souvent abordé en littérature mais sujet éternel .
Qui est ce prisonnier en face de toi ? Connais tu son histoire ? Et toi ? Te connais tu ? Entre abandon , quai de gare , rupture familiale ou amoureuse , qu'aimerais tu montrer pour être compris ?
Gabriel W Eliane a vécu , observé , analysé .Il ne porte pas de jugement , ne se laisse pas submerger par le pathos , son écriture soignée se montre violente ou apaisée , phrases indépendantes juxtaposées ou plus complexes , on suit une partition mélodieuse et méticuleuse et je trouve que la poésie du langage porte harmonieusement la dureté du propos .
" Nous sommes tous de notre enfance " et chacun et chacune d'entre nous trouvera dans ces pages une part de lui même ...ou pas . Personnellement .....Désolé , j'allais m'égarer....
Je remercie Gabriel qui m'a fait deux cadeaux : un objet - livre soigné avec une couverture , ouahh , et une histoire qui ne m'a pas ému , non , bien mieux que ça , qui m'a bouleversé .Son livre va occuper une place privilégiée dans ma bibliothèque ....Merci , cher ami .
Et puis , pour terminer , un petit " coup de G...." . Que doit faire un auteur pour être publié ? Gabriel W Eliane a fait publier son livre à compte d'auteur , je crois qu'il aurait mérité un peu plus d'égards , mais ce n'est que mon avis de lecteur ....Comme je voudrais qu'un éditeur le remarque .Ce sont les lecteurs qui en seraient heureux , ça j'en suis sûr . Allez , à bientôt.
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Gabriel est un jeune écrivain de vingt-six ans ; il s'occupe de sa mère, âgée qui vit seule repliée sur elle même. Sur une idée de son frère Paul, qui vient de réapparaître après avoir disparu une dizaine d'années, il décide d'écrire l'histoire du détenu Germain Weirdo ; il obtient l'autorisation de le rencontrer.
Germain Weirdo, un peu réticent au départ, accepte de lui raconter des pans de sa vie ; au fur et à mesure de leurs rencontres, il se confie sur son premier amour, ses désillusions, les violences familiales quand il était gamin.
Il y a aussi les discussions dans la cellule avec les co-détenus ; Weirdo qui raconte les entretiens avec Gabriel et qui avoue ne pas tout lui dire ; les autres détenus se confient aussi par bribes, des souvenirs d'enfance, des galères dans leur vie, des manques, des envies qu'ils ont et parfois il y a quelques altercations.
Et puis de temps en temps, Gabriel raconte sa propre vie, son frère qui s'occupait de sa mère et qui a disparu pendant dix ans, le laissant seul et désemparé à prendre le relai, son désarroi face à cet abandon.
Gabriel W. ELIANE a une écriture fluide et agréable à lire ainsi qu'un don de la narration exceptionnel. Il balade le lecteur d'un environnement à l'autre, du quotidien de Gabriel l'écrivain, aux entretiens entre Gabriel et Germain, puis des discussions avec les codétenus. Un texte assez cru, fort et tellement vrai ; on a parfois l'impression de se trouver dans la cellule et on ne s'ennuie pas, tout s'enchaîne de façon agréable.
Au fil du roman, Germain Weirdo se dévoile, on apprend à le connaître, à l'apprécier, cet homme qui a eu une enfance meurtrie.
L'auteur traite des sujets difficiles, sans concession, c'est parfois assez violent, toujours percutant, l'enfance et les mauvais traitements, les séquelles que ça laisse, les difficultés de se reconstruire après certains évènements marquants…
L'histoire suit son cours, gentiment, et puis tout à coup… bing ! On se prend un uppercut en plein estomac, parce que sur la fin, tout s'emballe, les révélations pleuvent, et là, c'est la sidération totale ! Bravo, Gabriel W. ELIANE, je n'ai rien vu venir ! J'ai carrément été estomaquée ; ça commençait avec un bon roman, ça se termine en chef-d'oeuvre ! J'étais toute retournée quand j'ai refermé le livre, côté émotions fortes, j'ai été servie !
Bref, un roman qui aborde des thèmes difficiles, une histoire déchirante, émouvante, avec des rebondissements et une fin qui va vous scotcher ! Un livre que je recommande vraiment et que vous n'êtes pas prêt d'oublier !
À lire allongé(e) dans un hamac, avec un coussin et une boîte de mouchoirs (pour les émotions fortes) ; régalez-vous de quelques tartines grillées beurrées accompagnées d'un chocolat chaud (avec un peu de muscade râpée pour les amateurs).
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Merci à Gabriel W. Eliane pour l'envoi de son roman, et quel roman pour un premier!
J'ai particulièrement apprécié la délicatesse, la poésie, la belle écriture, qui baignent la rencontre avec Nath, le côté soft-sexe, l'éloge du corps féminin.
Par contre, écouté en audio, certains détails ont du m'échapper, expliquant le rapport avec le père violent ou la pédophilie de l'oncle, mais la lecture reste très agréable.
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Depuis qu'elle n'est plus là, je suis un frêle esquif, une ombre abîmée, une coque vide quibderive sans cap. Depuis ce jour, je suis devenu quelqu'un d'autre. Autre chose.une ombre... là nuit venue, le noir envahit la pièce et laisse apparaître, tapi dans les ténèbres, ce grand-père au regard placide qui me glace le sang.
Ce soir, il frappe pour enhardir tes instincts carnivores. Hier, il a molesté tes désinvoltures provocatrices à l’école pour encourager ta discipline. Le plus souvent, il grommelle sans prévenir. La moutarde lui monte au nez d’un coup. Il a l’affection des hommes de ta famille. La colère lui chatouille la moustache pour une raison anodine et jaillit. Son coffre se fend alors de rage et crache des aboiements sauvages. Les cris soumettent à l’instant. Ses mains, elles, s’agitent, donnant la mesure aux grondements, et finissent par s’abattre, laissant sur le corps une marque éphémère et dans l’esprit une empreinte indélébile. C’est ça, le courroux de ton père.
Les couloirs de l’école fleurent bon la cire et la lavande. La classe embaume l’alcool des polycopiés et le feutre d’ardoise. Tu es aussi sensible à la fragile douceur de Gaëlle qu’à l’espièglerie sauvageonne de Sophie. Tu admires la chevelure dorée de la première, la profondeur de son regard, la finesse de ses traits, la pâleur de son écaille. Tu contemples la crinière brune de la seconde, la beauté de son sourire, la rondeur de son visage, le teint mat de son écorce. La rectitude des mouvements de Gaëlle. La grâce des gestes de Sophie. Le parfum de violette qui habille la première, les fragrances de rose qui déshabillent la seconde.
Tu ne sens plus ni l’odeur de résine sous les pins, ni la caresse du vent sur ta nuque, ni la tiédeur du soleil sur ta peau. Tu n’entends plus ni le chant des tourterelles, ni la cloche de l’église, ni la ritournelle des rouleaux qui s’écrasent sur la plage. Tu es habité d’une honte coupable qui t’éloigne inexorablement de l’enfance. Tu nourris les fringales compulsives qui t’assaillent. Tu exauces tes boulimies gloutonnes en t’empiffrant sans plaisir. Tu chasses tes monstres pour quelques heures seulement.
Deux ans que tu as investi cette ville noire et caverneuse, cette prison de pierre et d’asphalte. L’agitation y est constante et le bruit ne cesse qu’au milieu de la nuit pour reprendre au petit matin. Aux fragrances des lilas à l’aube de ton enfance s’est substitué l’empyreume grisâtre des trottoirs qui distille aux premières lueurs du jour les crachats, la pisse et le vomi. Au milieu de cette puanteur, seul subsiste le parfum de Lili.