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EAN : 9782757826850
312 pages
Points (05/01/2012)
4.16/5   49 notes
Résumé :
Mano Solo fut à la fois chanteur, dessinateur, peintre, nouvelliste et poète.
Cet ouvrage réunit, pour la première fois, les principaux écrits et dessins de l'artiste : un roman édité à compte d'auteur, Joseph sous la pluie, des nouvelles, des poèmes et des dessins inédits. Ces documents permettent de plonger dans le cœur d'un homme déchiré par la maladie et la culpabilité, mais chez qui ressort toujours la joie de vivre et de créer.
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
C'est en plein dans « les années sombres ».
Quoique, « je sais pas trop ».


Mano nous fait passer quelques jours avec joseph, à bord d'une péniche, sous la pluie.
Il nous déroule et nous tord les tripes, on sent la puanteur vaseuse de son espoir noyé sous la pluie.

Il raconte quelques journées passées seul avec lui-même à combattre les fantômes qui l'habitent à ce moment-là.
Quelques journées à fumer, à boire, à chier, à ressasser des idées noires, des désespoirs… qui lentement vont se muer en espoirs quand il va se tourner à nouveau vers les autres, vers la vie.

Séropositif depuis 1986, Mano combat le sida depuis quelques mois en 1997, lors de la publication de « Joseph sous la pluie ».



Joseph/Mano, c'est un type qui a la tchatche et un sourire à vous submerger accroché à une gueule d'ange.
De quoi faire chialer les filles.
Mais la maladie a sali son corps. Il était déjà le serpent qui vous tente, il devient aussi la pomme empoisonnée d'un venin qui le détruit tout autant qu'il menace celles qu'il aime.


Et la plupart des pensées de Joseph vont vers elles, les femmes de sa vie, résumées en deux symboles.
Cheveux blancs : il l'aime mais elle le fait souffrir en lui donnant de la haine en réponse à son amour.
Cheveux noirs : c'est lui qui la fait souffrir, en lui apportant la mort en réponse à son amour à elle.



Mano était rempli de contradictions, plein de talents et super émouvant (oui, oui, bien sûr que je lui porte l'amour éternel d'une groupie – que je n'ai pas été cela dit…) et en même temps hyper orgueilleux et avec un caractère de petit con, mais en plus il en avait conscience, ce qui appelle à coup sûr l'indulgence.



Il allait jusqu'à penser, dans ses moments les plus noirs que les gens l'aimaient parce qu'il souffrait à leur place et que sa souffrance était si belle…
Mais assurément, ce sont les mots qu'il collait sur sa souffrance qui étaient si beaux.

« Dans ma tête résonnaient tes insultes, l'air était de plomb et mon corps s'écrasait sous les pressions. J'aurais voulu qu'il ploie, qu'il se brise comme un arbre trop sec, qu'il croule sous la charge et que s'effondre cette instinctive résistance qui tient debout la somme de malaises que je suis, sous ma couche de chair avariée, viciée, sale et abritant la vermine, tombereau d'immondices à la gueule d'ange et au coeur de lave refroidie. »



Ces mots que Mano semble jeter, cracher, vomir… Ces mots qui claquent, qui déchirent, qui bavent, qui collent…
Des mots pourtant apprivoisés, pensés, donnés et même offerts, pour transmettre, pour partager, pour réveiller ou endormir des tourments…

« Je suis là. Je marche mes trente-trois ans et je me demande combien de fois une vie peut-elle basculer de combien de naufrages peut-on se retrouver chié épuisé sur une plage aux vapeurs mortelles de marée noire […] »



On dit que c'est la souffrance qui s'exprime le mieux dans l'art. Mais on est souvent assez seul dans la souffrance, alors n'est-ce pas une bonne façon de la supporter et de s'en distraire en l'exprimant dans l'art ?
Tandis que le bonheur est souvent partagé et surtout, on se contente souvent de s'y adonner et d'en profiter plutôt que de le faire partager.


Et Mano Solo a su aussi sublimer dans son art des choses bien plus optimistes quand il s'est tourné vers les autres, vers le reste du monde, dans son album « dehors » par exemple.
Et la chanson éponyme de l'album me semble une vraie merveille pour exprimer une joie, une paix de l'esprit, un bonheur de la vie.



J'aurais aimé pouvoir lire d'autres écrits de Mano à d'autres périodes de sa vie, quand il était plus en paix avec lui-même.
Ce livre contient aussi des poèmes et des dessins, nous permettant de toucher du doigt l'univers rempli d'émotions de Mano Solo.

C'est beau, c'est Mano Solo...



La chanson, pour l'ambiance est celle, de Mano Solo bien sûr, qui à mon avis, colle le mieux à ce livre.
Avec des paroles poignantes, elle s'écoute sans déprimer grâce à la musique, qui contrebalance la tristesse de tant de lucidité :


« La liberté se paie
D'un linceul de regrets
Mais ai-je vraiment eu tort
Tous les chemins ne mènent-ils pas à la mort
Qui n'échangerait pas cent ans d'ennui
Contre trente-cinq ans de vie
J'ai voulu voler pas voulu marcher
Voulu réchauffer ma couenne de papier

J'ai joué avec le soleil
Qui m'a cramé les ailes
Mais je l'ai vu de si près
Que peu de gens peuvent en dire autant

J'ai vécu si fort
Que j'ai tué ce corps
Fondu désintégré en plein élan
Comme une statue éphémère
En suspens dans l'air
Les plus belles femmes du monde
Se sont penchées sur mon cas au moins cinq secondes
J'ai été riche à millions
De tous ces petits corps si mignons
La liberté ou la mort
J'aurai eu les deux
La liberté ou la mort
C'est mieux que finir vieux
[…] »

Extrait de « la liberté ou la mort », dans l'album « Je sais pas trop », Mano Solo :
https://www.youtube.com/watch?v=eFEGnlCepX8
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Dans Ce livre, Mano se livre a sa façon. C'est la vie d'un écorché vif, une vie qui ne lui a pas fait de cadeaux. On retrouve tous les thèmes que Mano a chanté.. l'amour, la mort, la drogue, l'espoir et l'envie de se battre toujours, la liberté

Si les chansons de Mano vous parlent comme à moi alors obligatoirement ce livre vous parlera aussi
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Mano, enfant perdu, atteint de la maladie du siècle et des junkies, Mano qui marche tout seul, et trop seul. Mano à la voix éraillée, qui choisit son pseudo :Solo, lui qui aimait tant la chaleur du public.Son public lui rendait au centuple ce qu'il pouvait exprimer de désespoir et d'espoir mêlés,désespoir lucide et espoir insensé, celui qui fait rester debout, dans la tempête, sous l'orage et la pluie. La dérive de sa péniche, la solitude absolue sous la pluie, envasé ou sans gouvernail, c'est l'histoire de Joseph qui évoque aussi l'amour impossible, l'abandon par l'être aimé et cet amour, ce sacré désir aussi qui palpite dans le corps malade et affaibli.
Un texte bien sûr autobiographique et métaphorique. Les amateurs des textes noirs et désespérés de Mano auront bien sûr lu ce texte. Pour les autres, écoutez la voix de Mano Solo avant de le lire, elle porte encore mieux l'énergie désespérée de celui qui a encore besoin de "chialer sa mère" pour être justement un homme. Fils de Cabu et d'Isabelle Monin, RIP tous les trois..
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Mano Solo nous a quitté le 10 janvier 2010. Il nous a laissé beaucoup de chansons, des peintures, des poèmes, et un roman. Je l'ai lu pour la première fois à sa sortie en 1996 et je l'ai relu ce week-end pour pouvoir vous le présenter aujourd'hui...

Défoncé jour et nuit, Joseph remonte la rivière sur sa péniche mais le déluge le fait dériver et il finit par s'accrocher à des arbres. L'attente d'une accalmie sera pour lui une longue introspection.
On y retrouve tous les thèmes que Mano Solo aborde dans ses chansons : l'amour, la haine, le désir, la mort...son combat face à la maladie, la lutte entre désespoir et rage de vivre.
" Lui qui croyait ne plus aimer la vie, son instinct l'aimait pour lui."
"Je resterai accroché par les ongles à cette vie de merde. Par pur esprit de contradiction."
"Je te ferai bouffer tes rêves, jaloux de la chance que tu as d'en avoir encore."
"Il en voulait à la vie de cette maladie sur laquelle il n'avait aucun pouvoir et qui lui gâchait le meilleur de son existence."
"J'ai mis des bougies. le jour de ma mort, je veux qu'on mette autant de bougies autour de moi que j'avais d'années, comme ça ma mère croira que c'est mon anniversaire."

Les femmes ont une place importante dans les textes de Mano. Sur ce bateau, deux images l'accompagnent : une grande histoire d'amour et un énorme sentiment de culpabilité.
"Je ne sais plus si j'ai le droit d'insister, de dire à cette fille viens, viens ma peau ne brûlera pas tes mains, de ma bouche ne coule pas le poison."

Tout au long de cette lecture, on a l'impression d'être dans sa tête. Il nous livre ses sentiments bruts, directement sortis de son coeur, de son âme. Les mots sont forts, crus. Mano nous bouscule, nous emporte avec lui dans sa dérive.
"Tu es si vivant qu'on ne peut t'imaginer mort."

La longue dérive de Joseph sur cette rivière, dans son corps et dans son âme, se termine sur sa rage de vivre et sur l'espoir. Un long chemin pour se pardonner et être de nouveau en paix avec lui-même...jusqu'à la prochaine dérive...
"Il s'était jugé et condamné lui-même, il était temps de se libérer sur parole, de se réinsérer dans le monde des vivants."

Ce roman est tellement imprégné de lui que sa voix nous accompagne, et comme il le disait si bien dans sa chanson Je suis venu vous voir... "tant que quelqu'un écoutera ma voix, je serai vivant dans votre monde à la con".

En ce jour anniversaire, je retiendrai tout particulièrement cette phrase :
"Ce jour-là mon âme entière remplira le monde."

Plus d'infos sur mon blog!
Lien : http://lebacalivres.blogspot..
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J'ai dévoré ses mots comme je me suis enivrée de ses chansons. On retrouve son univers, la force de ses mots, la brutalité de ses expressions, son langage très imagé, ses failles, son écriture sans concession. C'est une véritable claque que j'attendais depuis longtemps. Trop longtemps épuisé puis réédité à sa mort. Dommage d'avoir attendu pour republier ce court roman.
Il y a également ses poèmes qui semblent être de véritables chansons. En les lisant, j'avais la sensation d'entendre sa voix unique, écorchée comme il l'était, mais d'une franchise cruelle et tendre.
Alors comme il disait dans sa chanson Je suis venu vous voir, "tant que quelqu'un écoutera [sa[ voix, [il] sera vivant dans [notre] monde à la con", faisons le vivre en découvrant son roman et ses poèmes.
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critiques presse (1)
LeFigaro
11 janvier 2012
L'étonnant, mais ce n'est pas un paradoxe, est que l'on retrouve une certaine dureté, une rage créatrice mêlées à une sorte de naïveté enfantine dans chacune de ces pages. De la poésie, tout simplement.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
On a ouvert des huîtres
elles restent là dans leur plat d'argent
elles sont vivantes
en les observant bien on les voit bouger
et quand on réfléchit
on ne voit plus là qu'un tas de douleur silencieuse
elles sont deux douzaines éventrées les unes contre les autres
c'est dingue le mal qu'on peut faire autour de soi
alors pourquoi attendre que ça s'arrête
je ne suis qu'une huître
et mon agonie ne prendra fin
que dévoré goulûment par une bouche amoureuse
mais je dois être une huître qui pue
ça fait un an que j'attends sur le bord du plat
les blessures gorgées de citron.
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La seule indulgence que je pourrai avoir sur ma vie me conduirait au suicide. Mais ce serait beaucoup trop simple. Je resterai accroché par les ongles à cette vie de merde. Par pur esprit de contradiction. Parce que la contradiction c'est la vie. Tant que je haïrai cette vie je serai vivant, pour en souffrir. C'est le Non qui tient debout. C'est la haine que j'aime. Les pierres n'ont pas la haine, les animaux n'ont pas la haine, les arbres n'ont pas la haine. Les hommes ont la haine. Je suis un homme parce que j'ai la haine. Peu importe contre qui ou quoi. Alors pourquoi pas contre moi. Je me hais et ça me tient debout. Haïr la vie c'est encore la vivre. Je vivrai cette vie que je hais. Je vivrai cette haine, parce qu'elle vit.
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Alors ils ont coupé les arbres
Dont les racines lézardaient les trottoirs
Pour en replanter des petits tout neufs
Rien ne s’est passé
Et ce sont nos veines qu’on arrache du pavé
Vides de cette sève torturée
Qui croyait que rien ne pouvait lui résister
Alors viendra couleur un bitume de plomb
Pour boucher la plaie
Et rendre leur perspective
Aux pavillons posés là
Sur lesquels on pourrait planter des croix.
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****** EXTRAIT DE LA PREFACE *******

Il était là , ce jour là , Joseph Solo , petit Mano , c'était un dimanche , je n'y étais pas , j'aurai pu , je faisais partie de l'équipe . J'étais de la maison , les éditions du square . Georges Bernier , dit le professeur Choron qui n'a pas donné , mais pris son nom à une rue , venait de faire l'acquisition d'une péniche . Il voulait en tant que directeur en faire une librairie ambulante pour vendre Hara Kiri , Charlie Hebdo , Charlie Mensuel et les albums qui en découlaient . Des membres de l'équipe étaient venus , certains d'entre eux avec leurs gosses . Mano était là avec son père ( le dessinateur Cabu ) . Une ballade sur la Seine un chaud dimanche d'été ...... ( Mano Solo meurt du sida en janvier 2010 ) .
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" J'ai cru être vivant jusqu'ici. J'ai cru beaucoup de choses. Je ne crois plus. La déréliction comme base de départ. Le néant me sera estrade, le Rien gonflera mes veines, le vent sera mon ami, la lune sera toujours pleine, l'air vibrera de ma chanson, l'ombre me découpera des tableaux, la lumière fera bouillir mes yeux. Je serais un homme. Debout sur le cadavre d'une enfance. "
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Videos de Mano Solo (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mano Solo
Documentaire de 31 minutes sur Mano Solo, à compléter par l'écoute du podcast de l'émission "Une vie, une oeuvre" de France Culture qui lui est consacrée :
https://www.franceculture.fr/emissions/une-vie-une-oeuvre/mano-solo-1963-2010-poete-punk
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