Léo, on l'aime pour sa verve, ses provocations et la poésie de ses textes. Bien sûr, quand on enlève la musique, on peut davantage goûter aux mots, mais n'est-ce pas risqué pour des textes écrits pour être chantés ?
« Je suis l'enfariné dans le pétrin à rire
Je suis la poésie et je me bois cul sec »
Pour les inconditionnels de Ferré, « l'enfariné » restera toujours le poète épris de liberté, l'anarchiste au grand coeur, le poète qui criait sa colère.
« Place à la poésie, hommes traqués ! » disait Ferré dont la poésie a toujours sa place, cette poésie qui se chante, se clame ou se murmure, c'est selon.
« Les plus beaux chants sont des chants de revendication » et le poète n'a pas été en reste pour dénoncer l'injustice. Et même si certaines de ses chansons sont sombres, l'espoir n'est jamais loin, il le disait lui-même : « Je voudrais que ces quelques vers constituent pour les hommes libres qui demeurent mes frères un manifeste de l'espoir »
Alors, lisons Ferré !
Commenter  J’apprécie         673
"Le vers doit faire l'amour dans la tête des populations", alors forcément lire la poésie de Ferré c'est un peu atteindre le ciel, le 8e, le 9e celui qui vous rendra un peau plus beau.
Lui qui se foutait du "qu'en dira t on" et qui claironnait le "quand nous serons", aurait pété une colère en écoutant certains "étroits", des obscurs du front bas nous raconter des coulisses qui ne nous regardent pas.
Ferré c'est la poésie. La Poésie.
Celle qui ne concède rien, qui tente tout, qui prend les mots, les accouple, les étire, les soude, les ourle, qui les tend, qui trousse le vent, qui court devant le temps.
Les mots de Ferré c'est le Chant.
Si vous aimez Ferré, lisez ses vers. Écoutez le.
ça grouille, ça bouge, c'est frémissant, c'est un tambour, c'est du cuivre, c'est une balle d'or tiré à bout touchant dans la gueule des méchants.
Anarchie... A comme amour, comme ami, A comme avec, comme arme, comme arrêtez vos conneries !
Lisez Ferré, clamez, déclamez le.
Il a injecté dans le ventre de la Muse tout ce qu'il contenait.
C'est là que vous le trouverez!
Astrid SHRIQUI GARAIN
Commenter  J’apprécie         193
Une relecture un peu déçue. A la réflexion je me demande si je n'avais pas aussi été déçue la première fois. Bien sûr j'ai adoré « C'est extra », « Les anarchistes », « Le testament », … bref, tous les poèmes qu'il a chanté. Est-ce à dire que les autres sont moins bons ? Je n'en suis pas sûre, il y a bien le style Ferré dans les autres. Mais il manque sa voix qui ne fait certes pas tout, mais qui manque terriblement. Peut-être qu'une version audio lue serait pas mal ? Si ça existe je le tenterai éventuellement en troisième essai !
Commenter  J’apprécie         151
L’opéra du ciel.
J'ai tant pleuré que je n'ai plus
Le souvenir de mes alarmes
Car j'ai versé jusqu'à la larme
Qui me donnait l'air ingénu
Et si mon coeur n'est pas plus pur
Que la source où boivent mes rêves
C'est qu'il est transpercé de glaives
Et qu'il reste criblé d'azur
Si j'avais les yeux du Bon Dieu
Je me les crèverais
Et pour amuser les curieux
Je les leur donnerais
Et par ces fenêtres nouvelles
Ils verraient ce qu'on a cru voir
Tous les millions de désespoirs
Vomis par mille clientèles
Si j'avais les yeux du Bon Dieu
Je pleurerais des larmes rouges
Et jusqu'au plus profond des bouges
J'apporterais la paix des cieux
J'ai tant battu la vanité
Que le sang me monte à la tête
Moi qui croyais être à la fête
Et qui vis dans l'absurdité
Le grand amour que j'ai conçu
Pour les humains de la déroute
A terminé sa longue route
Et je demeure un invendu
Si j'avais les mains du Bon Dieu
Je me les couperais
Et pour aider les pauvres gueux
Moi je les leur coudrais
Sur les moignons de la misère
Dans les coulisses du bonheur
Ils pourraient se pétrir des coeurs
A renverser la terre entière
Si j'avais les mains du Bon Dieu
Je giflerais la bourgeoisie
Et trouverais des chirurgies
Pour occuper ces beaux messieurs
J'ai tant chanté les désespoirs
Que ma voix s'est humanisée
Et qu'elle semble être passée
Sur de sinistres abattoirs
Je me fous de leur Rédemption
Et je ne crois pas aux miracles
Car dans l'enfer de mes débâcles
Satan n'est qu'un échantillon
Si j'avais la voix du Bon Dieu
Je l'humaniserais
Et dans le micro des pouilleux
Je l'emprisonnerais
Et sur les ondes migratrices
S'envolerait le chant nouveau
Qui bercerait tous les salauds
A la recherche des polices
Si j'avais la voix du Bon Dieu
Je gueulerais dans le silence
De l'éternelle voûte immense
QUE L'ON PRÉTEND ETRE LES CIEUX
Divine Anarchie, adorable Anarchie, tu n'es pas un système, un parti, une référence, mais un état d'âme. Tu es la seule invention de l'homme, et sa solitude, et ce qui lui reste de liberté. Tu es l'avoine du poète.
A vos plumes poètes, la poésie crie au secours, le mot Anarchie est inscrit sur le front de ses anges noirs; ne leur coupez pas les ailes! La violence est l'apanage du muscle, les oiseaux dans leurs cris de détresse empruntent à la violence musicale. Les plus beaux chants sont des chants de revendication. Le vers doit faire l'amour dans la tête des populations. A l'école de la poésie, on n'apprend pas: on se bat.
Place à la poésie, hommes traqués! Mettez des tapis sous ses pas meurtris, accordez vos cordes cassées à son diapason lunaire, donnez lui un bol de riz, un verre d'eau, un sourire, ouvrez les portes sur ce no man's land où les chiens n'ont plus de muselière, les chevaux de licol, ni les hommes de salaires.
Ce n'est pas le mot qui fait la poésie, c'est la poésie qui illustre le mot.
L'alexandrin est un moule à pieds. On n'admet pas qu'il soit mal chaussé, traînant dans la rue des semelles ajourées de musique. La poésie contemporaine qui fait de la prose en le sachant, brandit le spectre de l'alexandrin comme une forme pressurée et intouchable. Les écrivains qui ont recours à leurs doigts pour savoir s'ils ont leur compte de pieds ne sont pas des poètes: ce sont des dactylographes. Le vers est musique; le vers sans musique est littérature. Le poème en prose c'est de la prose poétique. Le vers libre n'est plus le vers puisque le propre du vers est de n'être point libre.
J'ai bu du Waterman et j'ai bouffé Littré
Et je repousse du goulot de la syntaxe
À faire se pâmer les précieux à l'arrêt
La phrase m'a poussé au ventre comme un axe
J'ai fait un bail de trois-six-neuf aux adjectifs
Qui viennent se dorer le mou à ma lanterne
Et j'ai joué au casino les subjonctifs
La chemise à Claudel et les cons dits "modernes"
"Poète vos papiers" extrait
La poésie contemporaine ne chante plus . Elle rampe . Elle a cependant le privilège de la distinction , elle ne fréquente pas les mots mal famés , .......
Le progrès c'est la culture en pilule . Pour que le désespoir se vende , il ne reste qu'a en trouver la formule . Tout est prêt : les capitaux , la publicité , la clientèle . qui donc inventera le désespoir ?..........
N'oubliez jamais que le rire n'est pas le propre de l'homme , mais qu'il est le propre de la société . l'homme seul ne rit pas , il lui arrive quelque fois de pleurer .
Leo Ferré - L'école de la poésie