La boucherie des amants, c'est une histoire d'amour sur fond de carcasses de viande et de dictature chilienne.
Je pourrais m'en tenir là, mais j'imagine que vous voulez en savoir un peu plus...
Le boucher des amants, c'est un petit livre qui m'a touché par sa tendresse et sa cruauté.
Les personnages principaux de ce court récit sont attachants comme la vie peut l'être, pour peu qu'on la laisse en paix.
Si je vous dis que l'histoire se déroule dans une ville du Chili, Tocopilla, sous le régime de Pinochet, si je vous dis qu'une boucherie de quartier est le théâtre de ce récit, si je vous dis que cette boucherie possède une arrière-boutique où se tiennent des réunions obscures, alors je ne vous aurai encore presque rien dit.
Rien ne serait sans ces quelques personnages haut en couleur, notamment ce trio qui compose et articule le récit : Juan un boucher veuf et fort en gueule, Tom son enfant aveugle, et Dolorès de la Peña, son institutrice.
Derrière l'apparente naïveté de l'histoire, ou plutôt la manière dont est traitée la narration, on imagine un quotidien presque ordinaire, sur lequel pèse juste un des pires régimes totalitaires du XXème siècle. On imagine une boucherie de quartier aussi familière qu'un bistrot, distillant la vie chaleureuse
parmi ses clients goguenards...
Juan, Tom, Dolorès, je me suis laissé emporter par les rêves étoilés de ces trois-là.
Tom est orphelin. Il n'a jamais connu sa mère, décédée au moment de sa naissance. C'est un enfant haut comme trois pommes. Cela m'a fait penser au récit Tom, petit Tom, tout petit homme, Tom...
Tom est petit, mais il a un pouvoir énorme, il sait faire des miracles avec ses yeux de cendre posés sur la nuit définitive. Par exemple, il sait faire apparaître un poste de radio quand le téléviseur du coiffeur Chico rend l'âme. Pour l'amour qui manque désormais à son père Juan, le boucher du quartier, c'est un peu pareil... Il pense très fort, et hop !
Pourquoi ne réussit-il pas alors à faire disparaître ces fous furieux qui font si mal au pays ?
Dans l'arrière-boutique de la boucherie, on se décarcasse pour retrouver le chemin d'une liberté perdue.
S'aimer, quoi de plus normal pour Juan et Dolorès, mais s'aimer sous un régime totalitaire, hélas ! C'est là qu'est l'os, pour citer un acteur comique français. Quand le coeur est épris de liberté, c'est un peu plus compliqué...
Car, lorsqu'on s'aime, on est prêt à tout, n'est-ce pas ?
Tom deviendra adulte au cours d'une seule nuit embrasée par une éclipse de lune, parce que tous les personnages dans la vraie vie ne sont pas attachants...
Gaetaño Bolán nous dresse ici une fable teintée d'humour et de poésie, traversée par la tendresse d'un enfant, un réquisitoire coup de poing pour dénoncer l'horreur des régimes totalitaires.
Merci à toi Marie qui m'a donné l'envie et la possibilité de lire ce court et intense roman épris d'une grande sensibilité.