N°774 – Août 2014.
LE ROMAN DES ESPIONNES – Vladimir Fédorovsky- Éditions du Rocher.
Pour le commun des mortels, l'univers de l'espionnage est fascinant. Quand il s'agit d'espionnes, le sujet devient passionnant puisqu'elles ajoutent l'amour au mystère. Ces femmes sont nécessairement belles, intelligentes, vives, cultivées, parlant le plus souvent plusieurs langues, aimant le luxe et paradoxalement elles sont discrètes, mais d'une discrétion déguisée qui donne facilement le change ; elles ont servi leur pays à l'égal des combattants du front en exploitant la vanité et la naïveté des hommes qui furent leur proie. Ce sont des séductrices mais ce qui les caractérise le plus c'est le génie de la vie puisqu'elles ont, pour la plupart exercé dans le contexte de la guerre froide et ont réussi à échappé « à cet instrument de souffrance de mort que fut le communisme ». C'est que l'activité d'espionnage s'est développée presque essentiellement au XX° siècle et évidemment à l'occasion des guerres, la 1° et la 2° guerres mondiales, la guerre d'Espagne puis la guerre froide et dans ce domaine l'importance de ces femmes a été déterminante. L'auteur distingue les professionnelles comme celle qui livra les secrets de la bombe atomique américaine à l'Union Soviétique mais il y eut aussi des agents d'influence, des « idiotes utiles » qui étaient sûres de la justesse des idées soviétiques et de son modèle de société, telle Mme
Romain Rolland qui convainquit son époux de prendre partie pour l'URSS ou
Elsa Triolet qui de la même manière persuada
Aragon parce qu'à l'époque le choix idéologique entre le nazisme et le communisme penchait pour ce dernier. Il y ajoute les vraies- fausses espionnes telle Mata Hari qui selon lui fut un fantasme collectif mais surtout un bouc-émissaire.
C'est que l'amour dans ce domaine interfère largement dans le travail d'espionne pour lequel elles ont un atout supplémentaire dans la collecte de renseignements : la séduction . Ainsi Olga Techekhova , intime d'Hitler et amie d'Eva Braun informa-t-elle Staline sur les secrets du III° Reich. de même les soviétiques réalisèrent-ils la bombe atomique grâce aux espionnes infiltrées aux États-Unis.
A travers des témoignages et des documents d'archives, l'auteur nous livre une liste des plus emblématiques d'entre elles, en commençant par la période de la Grande Guerre. L'incontournable Mata Hari et, on s'y attend sûrement moins,
Marthe Richard, qui a par ailleurs attaché son nom à la fermeture des maisons closes en 1946. La liste est longue de celles qui ont, par leur action, pesé sur le destin du monde. Plus tard, ce fut notamment le cas en 1963 lors du scandale Profumo qui éclaboussa la Grande-Bretagne mais la France ne fut pas en reste avec l'affaire Dejean. Aux « hirondelles », jolies femmes chargées d'obtenir des renseignements des diplomates et hommes politiques occidentaux correspondaient les « Roméo » qui visaient les secrétaires travaillant dans les ambassades occidentales.
L'auteur rappelle le rôle considérable qu'elles ont joué mais insiste sur leur état de solitude.
Outre les révélations passionnantes de ce livre, ce que je retiens c'est, comme toujours, l'hommage de l'auteur à notre langue française qu'il pratique avec bonheur. C'est toujours un plaisir de le lire !
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Hervé GAUTIER – Juillet 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
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