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EAN : 9782368481530
128 pages
Tertium (15/09/2014)
4/5   5 notes
Résumé :
C’est un récit " à mi-chemin entre l'histoire et la poésie, un livre de rencontres avec le temps (...) il est rare de pouvoir faire apparaître tant d’images avec les seuls mots." (JMG Le Clézio). Pétra, en Jordanie, est une cité mythique où, pour entrer, il faut traverser le Siq, s’engager dans une gorge, comme un rite de passage. C’est une terre où se sont croisées les 3 religions révélées, leurs saints et quelques-unes des plus grandes civilisations. C’est un lieu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Plus que tout autre site archéologique peut-être il semble difficile d'évoquer Pétra (pierre, en grec) en Jordanie sans que son exceptionnelle architecture rupestre ne fasse resurgir de nos mémoires oublieuses l'histoire la plus lointaine. Grâce à un itinéraire très peu conventionnel ces pages inspirées d'Emeric de Monteynard invitent à découvrir Amman et sa région dont le coeur battant serait Pétra. Quelques denses et brefs chapitres, édités par Tertium éditions, dans la collection Pays d'encre. Ici on oublie les appareils et les photos pour se laisser emporter par d'autres images.

Mais qu'est-ce qui amène ici ? La question revient comme une ritournelle sous la plume de l'auteur. Voyageur pressé s'abstenir - pourtant le livre est court - car les lignes tracent des chemins de détour pour s'envoler progressivement vers les hauteurs de la méditation. "Pétra métaphysique" dit Le Clézio en quatrième de couverture, et il a bien raison. L'éblouissement des grès incarnat de Pétra (dont le nom sémitique "Raqmu" signifie la bariolée ou la polychrome) magnifiés sous la lumière, méritent infiniment plus qu'un simple éloge de la beauté. Plus qu'ailleurs, les portes de l'histoire ou celles des textes anciens ne demandent qu'à être poussées dans cette partie du monde où s'interpellent les prophètes, où ont marché des saints et des aventuriers, des rois et des sultans, où des combats se sont tenus, où des négoces et des trafics ont prospéré. Saül, Moïse et Aaron, Hérode, Saint-Paul, Zénobie, Mahomet, Saladin, Soliman, Constantin, Baybars auraient pu s'y croiser. L'histoire, d'ailleurs ne fait qu'y continuer. Qu'est-ce qui amène ici ?

La richesse sûrement, en partie. Entre le Nil et l'Euphrate, Une route caravanière, chargée d'épices, d'or, de gomme et d'acacia, de myrrhe, d'encens, de perles ou de corail fonde, vers -1400, la prospérité des premiers Edomites, orfèvres et tisserands, autour du site probable de Pétra. le commerce est si lucratif que Pharaons, Assyriens, Perses, Grecs et Romains se la disputent intensément. Edom est annexée à la Judée par Salomon en -930. Des guerres avec les Hébreux, puis des marchands arabes (Nabitus) sédentarisés autour d'Aqaba prennent peu à peu la place des Edomites. La Nabatène devient une région autonome, un royaume indépendant ensuite qui se donne Pétra pour capitale au quatrième siècle avant JC.

De cette époque hellénistique date l'apogée dont les monuments encore debout aujourd'hui sont les témoins. Pétra pactise avec Rome mais soumise à la concurrence de Palmyre et devenue en 106 simple province d'empire, décline. le désintérêt des Omeyyades (Ummayades) qui installent leur capitale à Damas au viiè siècle fera sans doute le reste. L'influence byzantine s'y fait également sentir et pendant les croisades deux forteresses y sont bâties. Les Francs enfin chassés, Baybars est le dernier sultan en 1276 à visiter Pétra désertée qui sombre prétendument dans l'oubli pendant six siècles, jusqu'à sa "redécouverte" par Johann Burckhardt en 1812. Car enfin, les pasteurs de la région, eux, n'ont jamais quitté, ni oublié Pétra. Encore deux empires, celui des Mamelouks jusqu'au xviè siècle puis celui des Ottomans jusqu'en 1918, une révolution arabe et un mandat britannique qui prend fin en 1946 pour qu'un nouveau royaume, hachémite celui-là, s'installe. Pétra, c'est une affaire de strates, ainsi s'égrène l'histoire au fil du séjour énigmatique de l'écrivain voyageur et de tout cela il est question entre ces pages évocatrices.

Passé Amman, à l'ouest apparaît le Mont Nébo, la fournaise est suffocante au pied du Mont Ajlun, l'humeur salée de la Mer Morte se répand, inonde tout le pays de Moab et celui d'Ammon. Visions des vallées encaissées du Wadi Mujib, de montagnes accidentées, du bastion croisé de Kérak et plus au sud, soudain, des sables du wadi Rum l'ombre de T. E. Lawrence se profile. Pétra inquiète presque, avant de la voir, de la saisir, de la toucher, de se l'approprier. Qu'est-ce qui amène ici ?

Huit heures, un matin du 25 mai d'une année de ce xxiè siècle, a lieu la rencontre tant espérée pour l'auteur. Jour férié en Jordanie, d'effervescence, il faut être parmi les premiers à Pétra. On aperçoit d'abord le mont Haroun (Hor), à l'est. Après l'entrée du site, une première nécropole le bloc des Djinns ; des inscriptions gravées. On Marche et enfin on atteint la porte du défilé : les parois dressées. "Nous y sommes" ; long corridor effilé où l'oeil doit s'habituer. La roche et l'eau, des canalisations vieilles de deux mille ans, des pavés, la lumière avare, apprendre à regarder de plus en plus haut. Un bétyle aux yeux immobiles. le choc de la verticalité. « Quelque chose de religieux » ?

"Entrer dans le Sîq, c'est entrer dans quelque chose de l'ordre du silence".

On marche encore et au détour d'un coude, brusque chatoiement de roses un peu lointain : al-Khazneh, appelé "le Trésor", mariage de la Grèce et de l'Orient dans cette façade connue de tous, palais, sanctuaire ou tombe, nul ne sait vraiment déterminer. Il y a là aussi quelques touristes, des chevaux et des carrioles, un dromadaire et son chamelon, un pistachier, du thé. le Tombeau de la soie dit aussi bigarré, d'autres tombes partout, tombeaux de Romains mais aussi un théâtre, une allée romaine à arcades et colonnades, un nymphée, des thermes, des temples, un forum et même une basilique. Pétra est une vraie ville, superposition d'habitats, de nécropoles et de sanctuaires construits en un site imprenable, une cuvette encaissée d'environ deux kilomètres sur cinq dans un chaos géologique enluminé.

Falaises d'al-Khubtha, ses bâtiments et ses villégiatures. Des bergers et des chèvres surgissent avant d'atteindre le Triclinium aux Lions. Monter, descendre. Les sommets avoisinants sont accessibles par des sentes ou des escaliers creusés dans les parois, le Deir ("monastère" en arabe) surprend autant que le Khazneh par son emprise décorative monumentale sur la roche et son défi aux canons de l'architecture ; de sa terrasse, le mont Haroun et le Sinaï au loin. Une tente bédouine accueillante à proximité. Deux heures d'ascension de plus pour accéder au Zibb attuf où l'on domine tout Pétra. Qu'est-ce qui amène ici ?

Un poème de Paul Eluard en conclusion fournira au lecteur la réponse à une question restée volontairement sans réponse. Un voyage, un vrai.
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Pétra, s'égarer vers le ciel

Voilà un très beau texte sur Pétra la ville des Nabatéens.
L'auteur nous raconte Pétra.
Parti d'Amman, en Jordanie, il nous raconte, nous conte le désert, les couleurs, le sable et l'eau. Et au fil de son récit il nous dit aussi l'Histoire avec un grand H, Les pages se tournent et voilà Moïse, David, Zénobie, les Romains, Mahomet, Burckhardt, Lawrence d'Arabie et même Indiana Jones.

J'ai apprécié ce livre car tout en nous offrant ses sensations, l'auteur nous fait rêver et déclenche en nous des émotions que nous aimerions toutes aussi semblables aux siennes. Nous mettons nos pas dans les siens et nous sommes tout prêt d'entendre le sable crisser sous nos pas, de sentir la roche rugueuse sous nos doigts. C'est un texte débordant de poésie, c'est doux, tendre, pas de violence juste des mots plein de douceur. Moi qui ne connais que des images ou des films de Pétra j'ai vraiment eu l'impression d'être derrière le narrateur et de voir, de sentir ce qu'il décrivait.J'adore ces livres qui me font rêver et m'emmènent très loin

L'auteur, Emeric de Monteynard, né en 1956 tous ces textes sont empreint de poésie.

Son texte est édité dans la collection pays d'encre -littérature- aux éditions Tertium – C'est un livre de petit format, pratique pour mettre dans la poche ou dans le sac et s'y plonger dans des endroits calmes et sereins. La couverture représente La Khazneh un des monument les plus connus de Pétra.

C'est vraiment un coup de cœur avec plein d'étoiles ***********

Je remercie Babelio, Masse critique et les éditions Tertium de me l'avoir fait découvrir

Challenge abc 2014/2015
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Très bien écrit, très beau texte, qui fait de Pétra une poésie, un voyage, une initiation,ou plutôt : qui rend à Pétra tout le mystère qu'elle peut susciter en nous. Très lisible en même temps. de brèves irruptions historiques. Des noms exotiques. Rien de trop. Cela reste très simple, comme un haïka, avec de brefs chapitres.

L'objet-livre, le travail éditorial qu'il y a autour, vaut aussi une mention : le livre est petit, facile à transporter, le papier est plus grammé que les livres habituels, le papier est plus épais et donc plus blanc, ça éblouit comme le calcaire en été, c'est étrangement bien adapté à Pétra, présenté en photo de couverture. Un livre "pétresque" en somme, si ce mot n'était pas de trop.

Pourquoi ne pas mettre 5 étoiles, alors ? Parce qu'il y a parfois des digressions qui nous emmènent un peu trop loin de Pétra, à mon goût, même si elles correspondent peut-être à une atmosphère, aux pensées du voyageur.
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Je m'aventure précautionneusement sur le chemin escarpé de la lecture de ce Livre hors du temps, entre Bible, Histoire universelle et histoire personnelle de l'auteur, son voyage, sa rencontre émerveillée avec la mythique Pétra jordanienne. Deux temps mêlés s'interpénètrent, Pétra perdue dans la Nuit des Temps, puis retrouvée et rejoignant le présent.
C'est puissant et émouvant, chaque mot, chaque phrase est pensé, amoureusement posé à la bonne place, construit pierre par pierre, comme les blocs des djinns. On prend le temps de progresser, de s'arrêter, de contempler, d'écrire. Cela demande de lire de la même façon qu'Emeric de Monteynard a dû voir, s'arrêtant, repartant, embrassant du regard tantôt l'ensemble du paysage, grandiose, à perte de vue, tantôt un détail, qu'il remarque et marque à son tour de son empreinte.
Je suis envoûtée.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Pétra... c'est un peu comme chandernagor, Babylone, Alep ou Angkor, Samarkand ou Zanzibar ! Oulan-Bator, Bam ou Bagdad ! Lhassa, Leh, Pagan ou Mandalay ! Kaboul ou Boukhara ! Karakorum, khartoum ou Carthage ! Saveh, Mogador ou Ségou ! Ouadane ou Ouarzazate, Tamanrasset ou Tombouctou, Ispahan...Des villes qu'on ne situe pas toujours bien, dont on ne sait même plus si elles existent ou non ou si elles appartiennent au passé, mais dont le nom nous hante d'une façon tellement précise, que de simplement les nommer, que de dire ces noms, de les entendre ou de les lire, trace en nous des lignes nouvelles, comme des drains, des sillons, vers un passé encore inconnu.
Et nous apprenons à rêver un peu plus ou plus loin.
Un peu mieux.
Nous apprenons à nous bâtir.
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Avant même de la rencontrer, nous savions, sentions que Pétra, c'étaient des strates où l'Egypte et Sumer, l'Assyrie ou Edom, son vassal, des nomades et le désert, la Perse, Rome et peut-être aussi quelques Hindous, avaient laissé comme une empreinte, un assemblage, un alliage, une cohésion : quelque chose de vraiment très particulier, de terriblement fort - quasiment indestructible.
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Rien n'est plus ici à décorer.
La pierre est souffle.
Des bleus chinés, aux ocres moirés.
Des roses diaprés de rouges, ou l'inverse.
Un violet, violet, qui tire sur le pourpre et le mauve.
Et le noir, ici, est ourlé d'un blanc d'argent, poudré, crayeux ou très lunaire.
Des verts pastels.
Un jaune japon presque irisé.
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Comment ne pas faire silence devant la puissance de ces masses ? Comment ne pas chercher à prendre ses distances avec le grés ou ce granit couvert de mica et de quartz, tout droit venus du magma ? Devant ces monts de sienne et de blanc, savamment disposés sur des fonds d'ocre et de rouge, comme des cathédrales du bout du monde, perdues après un cataclysme ?
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-Qu'est-ce qui vous amène ici ?
-Là, à ce moment-là ? Un besoin terrible et urgent d'échange et de partage ! Un besoin absolu de se lier, de tisser des attaches, de celles qui nous ancrent dans la verticalité et qui nous permettent de résister, rallier, de relier peut-être. Ô religare Pétra !
-Quelque chose de religieux ?
-Peut-être. Ou non. C'est le désert et sa nécessité. La traversée des apparences. C'est le vide qu'on découvre et sur lequel on bâtit l'assise de sa vie - le vide, le vrai. Les mots, ici, n'ont plus de sens !
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