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Isabelle Stengers (Traducteur)
EAN : 9782366244113
208 pages
Cambourakis (03/04/2019)
4.09/5   17 notes
Résumé :
À partir de son expérience dans le mouvement altermondialiste, Starhawk, féministe et sorcière, aborde dans cet ouvrage des questions cruciales qui sont toujours celles des mouvements sociaux aujourd’hui. Elle y examine tour à tour la relation à la nature et aux lieux, l’organisation d’une démocratie directe, les problèmes posés pour construire un mouvement plus diversifié, la question de l’appropriation culturelle, l’importance de repenser la non-violence, le lien ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Écrit en 2002, ce livre est la suite de Chroniques altermondialistes - Tisser la toile du soulèvement global, paru en 2016 chez Cambourakis (mais il peut se lire indépendamment du premier), et fait furieusement écho aux mouvements militants de ces dernières années (et bien plus encore). Starhawk, qui s'identifie entre autres comme païenne, féministe, sorcière et anarchiste, est surtout connue pour sa participation à des actions directes non-violentes depuis les années 70 jusqu'à nos jours. Dans ses textes, elle essaye de concilier le monde spirituel et le monde politique, tente de trouver des solutions pour construire un monde meilleur et réveiller le pouvoir intérieur des gens pour se libérer du pouvoir de domination exercé sur elles et eux.

Il va donc être ici question des différents pouvoirs de domination contre des minorités, comment leur système s'inscrit durablement et parfois inconsciemment, comment essayer de les contrer, les changer, les défaire. Il va sans dire que son point de vue reste celui d'une personne blanche qui bénéficie de certains privilèges et elle admet volontiers devoir défaire elle-même des préjugés encore tenaces, distillés par une culture principalement dominante. Néanmoins, son approche entrera en résonance avec les personnes qui s'identifient comme militantes, activistes et anti-oppressives, tout en étant conscientes de leurs propres pouvoir-sur, volontaires ou involontaires.

Starhawk commence par le plus global : l'environnement, le rapport entretenu avec la nature. Il est bien fait mention du fait que l'on sépare encore nature et humanité, comme si nous n'en faisions pas partie mais étions une entité bien différente. Ce travers qui fait que l'on a plus de facilité à se dissocier de son environnement et à ne pas s'en sentir responsable. Bien qu'il paraît clair qu'il est difficile pour les habitant•e•s des villes de se sentir proche d'un environnement non-artificiel, et donc de se préoccuper d'un aspect de la nature qui n'est pas côtoyé chaque jour, nous avons aujourd'hui le souci et la responsabilité d'agir pour la durabilité de l'écosystème, chacun•e à sa manière.

Il est donc posé que la plupart des humains se détachent de l'entité nature, mais il est tout aussi troublant que les humains se détachent à l'intérieur même de leur propre espèce, pour se placer toujours plus au-dessus, pour toujours plus exploiter, contrôler, profiter, diminuer. Et c'est d'autant plus inquiétant que si l'humain n'est pas capable de respecter ce qui lui ressemble, il est donc incapable d'avoir du respect pour sa propre maison et sa famille élargie. En cause ici, principalement : racisme, sexisme, hétérosexisme, classisme, etc. mais aussi appropriation culturelle, réappropriation des luttes... D'où viennent ces préjugés, comment s'en défaire, comment être un•e bon•ne allié•e, quelles sont les erreurs à ne pas faire, comment mieux vivre ensemble : un mini-traité qui ne se veut jamais exhaustif et qui prend en compte ses propres oeillères tout en tentant de faire toujours mieux.

Et puisqu'il est question de tout ça, il est donc question de violence. Starhawk donne sa propre définition de la violence : « Je définis comme « violence » la capacité d'infliger de la douleur physique, de nuire, ou de tuer, la capacité de punir en restreignant la liberté ou en limitant les choix, la capacité de s'accaparer des ressources vitales ou pécuniaires et de les redistribuer à sa guise, la capacité de blesser émotionnellement ou psychologiquement, de faire honte et d'humilier. » Elle admet également qu'il est difficile d'établir une définition de la violence qui soit la même pour tou•te•s et en toute circonstance. Elle fait aussi le tour de ce qui constitue une action « non-violente » et à quel moment il peut être acceptable de laisser parler sa colère et faire preuve d'une certaine violence si ça peut mener à des résultats concrets.

L'autrice termine par un chapitre qui répond à la question première du livre : Quel monde voulons-nous ? Voici ce que nous voulons. Cela passe par "la viabilité des systèmes qui entretiennent la vie sur la planète", le respect du "domaine du sacré", le contrôle des communautés sur leurs propres ressources, droits et héritages, la responsabilité des entreprises, le soutien équitable pour tou•te•s, une juste compensation du travail, le droit à la dignité et à la sécurité, la responsabilité collective et la démocratie. Les rôles de l'économie sont définis ainsi : la sécurité, l'abondance, l'équité, l'efficacité, la durabilité, la solidarité. Et si nous voulons être de bon•ne•s allié•e•s : être honnêtes, faire de la place, nous définir autrement, approfondir nos savoirs, demander la permission et reconnaître les dettes, contrecarrer l'oppression, donner en retour, penser aux enfants.

Ce livre est un bon rappel pour toute personne déjà un peu engagée ou qui souhaite l'être encore plus, encore mieux. du bon sens, des vérités simples, des prises de conscience, du pragmatisme, des solutions, pas de moralisme, une tentative de rassembler, réfléchir, reprendre le pouvoir ou donner un peu de sa part... Pour celles et ceux qui ne se sentent pas spécialement d'affinité avec le côté "sorcière" mais qui se sentent plus ancré•e•s dans le quotidien pratique, ce livre conviendra parfaitement pour s'initier à la vision de Starhawk.
Lien : https://lecombatoculaire.blo..
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J'avais, je pense, une idée erronée de Starhawk. Bien qu'ayant déjà lu plusieurs articles la concernant, j'imaginais une sorte de chamane, un peu échevelée, un peu déconnectée des réalités du monde, écoféministe mode hippie. C'était bien réducteur et à côté de la plaque.
Certes, Starhawk se définit elle-même comme sorcière mais les pages que je viens de lire me montrent surtout une activiste engagée, une redoutable théoricienne de la lutte pour une plus grande justice sociale et une écologie réelle et raisonnée. On retrouve un peu de tout dans cet ouvrage : notre place dans la nature, l'organisation pratique de la démocratie directe, la question de la diversité et de la légitimité dans les mouvements et organisations « contestataires », le débat autour de l'utilité de la violence dans les combats sociaux et une critique du système économique actuel agrémenté de solutions en lien avec la permaculture. le tout brillamment introduit par Isabelle Stengers qui réactualise certains passages déjà un peu datés (l'essai date de 2002).
C'est clair, c'est intelligent et ancré dans le réel : je ne peux que conseiller à tous ceux qui continuent à croire qu'un autre monde est possible.
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Préfacé par l'incroyable Isabelle Stengers, la collaboration entre les deux femmes n'est pas nouvelle, l'une connaissant très bien les sujets de l'autre.

Quel monde voulons nous est une anthologie de divers textes de Starhawk, initialement publiés sur son blog. Elle explique bons nombres d'aspects de sa philosophie écologique. Respect de l'environnement, des rituels, astuces de reconnexion avec la nature. Elle rappelle que l'idée n'est pas de se couper du monde, au contraire, mais d'apprendre à se connecter aussi bien aux réseaux qu'à internet.

Militante, elle défend son mouvement écologique, explique l'urgence de la situation, elle a également passé plusieurs jours en détention pour ses convictions… Il y a donc une longue explication de ce qu'est la défense écologique, et cela est particulièrement intéressant car ça entre en raisonnement avec notre actualité directe. Non pas parce que la planète est clairement en train de crevée, mais parce que Starhawk a mené de réelles actions pacifiques militantes. Il est donc intéressant de lire ça aujourd'hui quand on voit les mouvements de contestations actuels en France et à travers le monde. La non-violence est de ne pas pratiquer la violence malgré le fait de la subir.

C'est vraiment passionnant de lire ce qui se passe à travers le monde à la lumière ce des réflexions sur l'unité citoyenne, humaine, l'écologie et la non-violence.
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Le titre du livre pose une question : quel monde voulons nous ? le livre montre ensuite un cheminement possible, un cheminement intérieur.
Dit comme ça, cela peut sembler obscur. Plus que de nous poser des questions précises, le livre nous aide à penser ces questions. D'un côté, elles dépendront du monde souhaité par le lecteur. D'un autre côté, elles orienteront le cheminement et donc la destination que le lecteur atteindra peut-être un jour. Quoi qu'on arrivera bien quelque part mais où par rapport au monde désiré ?
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Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
Lorsque nous comprenons ce pour quoi nous nous battons, ce pour quoi nous acceptons de courir des risques, lorsque nous déchiffrons les critères grâce auxquels nous évaluons nos actions et nos choix, ce qui est le plus profondément important pour nous et nous nourrit, nous inspire le plus profondément, nous savons ce qui, pour nous, est véritablement sacré. Tout ce que nous avons alors à faire est de mettre à sa disposition notre énergie, notre temps, notre créativité, quel que soit le nom que nous lui donnions. Alors, les grandes puissances de l'univers, en nous et hors de nous, visibles et invisibles, s'alignent et, en tant qu'agent e's d'un amour qui fait corps avec nous, nous sommes nourri.e.s et soutenu.e.s.
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Si nous mettons de côté pour un instant les raisons morales et spirituelles pour lesquelles nous pourrions refuser la violence, nous devons nous rendre compte qu'une stratégie basée sur la violence ne peut être gagnante pour la simple raison que nous ne sommes pas de taille. La différence entre les armes est mille fois plus grande depuis l'époque où les paysan.ne.s de la Révolution française se sont soulevé.e. contre leurs seigneurs ou depuis que le prolétariat russe a renversé le tsar. Jeter des pierres et même des cocktails Molotov contre la police antiémeute lourdement capitonnée, protégée par des boucliers, avec leurs grenades à gaz lacrymogène et leurs fusils à balles de caoutchouc, peut avoir l'air d'un acte fort, mais c'est un acte plus symbolique qu'effectif face à leur violence.
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Le pouvoir de l'analyse féministe a été de concevoir notre oppression comme une force sociale dirigée contre les femmes en tant que classe. Il est dans l'intérêt des exploiteurs - qu'ils soient patriarcaux, capitalistes ou les deux - de maintenir la croyance dans le caractère purement individuel des problèmes dont souffrent les opprimé.e.s. Ils et elles doivent penser que seul un effort de changement de type individuel peut les résoudre.
Il est difficilé de saisir, et même de se rappeler quelle force explosive, libératoire a pu dès lors avoir, disons en 1970, cette expérience: se rendre compte enfin que les choses douloureuses, débilitantes qui vous sont arrivées, depuis le fait de vous être laissé décourager de poursuivre vos études jusqu'au viol et à l'abus sexuel, traduisaient, non de simples échecs personnels, mais une oppression sociale.
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La tâche de l'économie est de produire la sécurité et l'abondance pour toutes de manière équitable, efficace et durable, sur un mode qui promeuve la liberté humaine et la solidarité mutuelle, renforce notre attachement au local et protège les intérêts des générations futures.
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M'identifier comme païenne, féministe, sorcière et anarchiste peut être alarmant pour beaucoup mais cela m'empêche au moins de sombrer dans l'ennui respectable de l'âge mûr.
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Videos de Starhawk (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de  Starhawk
Herstory Starhawk VOSTFR 31 mars 2017 https://archivesherstory.com/ Starhawk, née en Californie, en 1951, est une théoricienne du néo-paganisme. Elle est une des voix les plus écoutées de l’éco-féminisme. Starhawk vit à San Francisco où elle travaille sur la tradition de la WICCA, tradition qu’elle a contribué à fonder au travers de cours, ateliers, camps et rituels publics avec pour objectif d’unir spiritualité et politique. Son livre Rêver l’obscur - Femmes, magie et politique est un best-seller, il est à la base de la création de mil- liers de groupes de sorcières dans le monde.
HERstory – des archives à l’heure des postféminismes La maison des arts, centre d’art contemporain de Malakoff a présenté du 21 janvier au 19 mars 2017, l’exposition HERstory – des archives à l’heure des postféministes, proposée par l’historienne d’art et commissaire d’exposition, Julie Crenn et l’artiste, Pascal Lièvre.
Grâce à Internet, les paroles et les écrits issus des différentes aires géographiques et culturelles sont accessibles, pourtant un problème de langage freine le développement théorique. HERstory se saisit de ce problème par un travail de traduction. Traduction: Emilie Notéris
Starhawk
Women and Spirituality Discusses the Witch 1989 42 s
Pagan Witch Ritual extrait de the Women and Spirituality trilogy from Alive Mind Media 1min 38 s 1989
Permaculture and the Sacred extrait d’une conférence de 1 h 24 mn Harvard Divinity School 2013 9 min
Spiral Dance with Starhawk Glastonbury (Crone) Goddess Confe- rence 4 min 48 s, 2014
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