Notre accord est conclu : c'est un jeune poète
qui dès demain rédigera cette chanson.
Elle sera plus fraîche et, je crois, plus honnête :
sans doute plaira-t-elle au public sans façon.
Dieu me demande une faveur : l'accompagner
au bord du lac, là où la foi n'est pas utile.
Nous nous taisons, respectueux et résignés.
Bientôt est apparue, vivace et blanche, une île.
p.10
Mon océan s'arrache à mon vieil océan.
Vautour après vautour, mon ciel se désaltère.
Mon verbe cesse d'être un verbe en se créant.
Le miracle et l'horreur sont toujours solidaires.
Il y aurait quelques visages bien-aimés,
une musique frêle, une horloge très lente,
le sentiment que le vieux cœur va s'animer.
Je connaîtrais une agonie obéissante.
p.13
Il ne veut plus parler. Il ne veut plus savoir.
Il confond la musique et la pluie monotone.
L'aurore peut venir à toute heure du soir.
Il partage son corps avec d'autres personnes.
Je remercie le jour parce qu'il est le jour.
Je remercie le chrysanthème et la cerise.
Je remercie le baiser long, le baiser court,
et tout ce qui me vaut une terreur exquise.
p.9
Poésie - Une graine voyageait - Alain BOSQUET