Ce ne sont pas seulement des génies adolescents qui révèlent de profondes aspirations humaines et créent une nouvelle façon de s’exprimer plus intense et plus intime, ce sont aussi des artistes à l’âge extrême de la vieillesse qui, dans leurs œuvres finales, se libèrent des conventions auxquelles ils obéissaient encore dans leurs œuvres de maturité, et nous livrent le message de l’ultime créativité. C’est la peinture du Turner de la fin, les derniers quatuors de Beethoven, les dernières œuvres de Monet. Ces œuvres sortent des rails, composent au-delà des normes évidentes, au-delà de l’harmonie, au-delà de la beauté, et nous introduisent au sublime.
Il y a dans le grand art la complexité d’une évasion du réel immédiat où nous retrouvons le réel de notre condition avec passion, compassion, compréhension. Il y a à la fois évasion du réel et invasion par le réel. Pascal, penseur de la complexité humaine, n’avait pas vu la face complexe du divertissement.
Nous pouvons donc mobiliser l’esthétique et la poésie pour vivre pleinement la réalité, tout en ayant conscience de sa cruauté. Depuis que l’esthétique est séparée de la religion et de la magie, elle crée de la joie (« A thing of beauty is a joy for ever », la beauté est cause de joie pour toujours, a écrit John Keats), elle nous introduit aux ravissements de l’existence, nous aide à supporter le trop-plein insupportable de la réalité ; les émerveillements que nous y puisons nous donnent l’énergie d’affronter la cruauté du monde.
Enfin la poésie de la vie comme épanouissement, communion, plénitude échappe au divertissement. Elle ne nous sauve pas de la mort mais, avec l’amour qu’elle intègre et qui l’intègre, elle est la seule vraie réponse à la mort.
L’auteur n’est pas nécessairement conscient de ce que contient son œuvre, parce que cette œuvre vient d’un état second dont la créativité a dépassé la conscience.
La vie n'a pas de sens, mais la poésie donne sens à nos vies.
La vie n'a pas d'autre sens qu'elle-même.
Lors de l'édition 2001 des Rendez-vous de l'histoire sur le thème "L'homme et l'environnement", le sociologue et philosophe Edgar Morin dressait un panorama historique de l'apparition de cet "agrégat de détritus cosmiques" qu'est la planète Terre, avant d'examiner son peuplement progressif par l'humanité, "partie intégrante et désintégrante de la biosphère".
Conférence inaugurale de l'édition 2001 des Rendez-vous de l'histoire sur le thème "L'homme et l'environnement, quelle histoire ?".
0:00 Générique
0:33 Conférence
Retrouvez l'épisode sur toutes les plateformes de podcast : https://urlz.fr/qoPB
© Edgar Morin, 2001.
Voix du générique : Michel Hagnerelle (2006), Michaelle Jean (2016), Michelle Perrot (2002)
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