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EAN : 9782234078086
360 pages
Stock (18/02/2015)
4.04/5   96 notes
Résumé :

« Quiconque veut vivre à Téhéran est obligé de mentir. La morale n’entre pas en ligne de compte : mentir à Téhéran est une question de survie. »

Ramita Navai explore les secrets de la ville à travers la double vie de ses habitants.

Sur l’avenue Vali Asr,
on rencontre Dariush, un terroriste repenti ;
Farideh, une femme divorcée ;
Bijan, un trafiquant d’armes ;
Leyla, une actrice porno ou encore So... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Vali Asr, c'est l'avenue de 18 km de long qui traverse Téhéran du nord au sud...une avenue emblématique de l'Iran, un peu comme nos Champs Elysées, une avenue qui sert de fil conducteur à ces huit portraits d'iraniens ou d'iraniennes. Huit portraits courageux pour tracer un autre portrait, celui de l'Iran moderne, de son rigorisme, de sa violence, de son luxe et de sa crasse.
Huit hommes et femmes, dont certains en totale opposition avec les images de l'Iran des religieux que les médias, nos médias occidentaux nous présentent. Aucun de ces personnages ne peut nous laisser indifférent, tous traduisent la violence, l'hypocrisie et le mensonge dans lesquels les iraniens sont contraints de vivre. Tous nous révoltent car tous sont des uppercuts.
Et surtout tous confirment l'extraordinaire courage de cette journaliste. Dans les notes de fin d'ouvrage elle précise : "Durant l'été 2004, j'étais correspondante du Times à Téhéran quand l'idée de ce livre m'a traversé l'esprit pour la première fois. Je venais d'être privée de ma carte de presse par l'Ershad, le ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, ce qui arrivait régulièrement à tous les journalistes. On ne nous donnait jamais d'explications précises, mais ce jour-là, un fonctionnaire plus amical que les autres me dit de but en blanc : « Mademoiselle Navai, vous avez couvert une affaire de droits de l'homme importante et vous avez écrit que certaines personnes se moquaient des mollahs. Vous savez qu'ils n'aiment pas qu'on soulève la question des droits de l'homme. Quant aux plaisanteries à leur propos… » le fonctionnaire se mit à rire. Il me conseilla de me tenir à carreau et de laisser passer quelques mois qui me « serviraient de leçon »."
Ces hommes et femmes, personnages principaux ou non de ce livre sont des anonymes, des hommes et femmes de la rue : un terroriste repenti, une femme divorcée, mais aussi une actrice porno, des bassidjis violents, des jeunes filles vues avec un ado de leur âge, des jeunes voulant changer de sexe...L'histoire de chacun et chacune d'eux sert de fil conducteur pour nous permettre de rencontrer d'autres personnages secondaires, courageux ou hypocrites, forts ou menteurs, pour nous permettre de voyager dans le temps, depuis le Shah qui voulut ce boulevard, jusqu'à l'époque actuelle où les Mollahs firent abattre des arbres afin mieux voir ce qui s'y tramait à leur ombre.
Ces huit petites histoires, toutes vécues, permettent d'aborder des faits de société ou de vie tels que les disparitions d'opposants dans les prisons, les sinistres grues auxquelles sont pendus les condamnés à mort, la prostitution, le trafic de drogue, la consommation d'alcool, les interdits sexuels, la masturbation, l'homosexualité, la virginité des femmes, la violence armée de groupes réprimant ouvertement ceux et celles vivant dans l'immoralité ou cette violence plus insidieuse : celle des religieux et de leurs interdits.
Et j'en passe !
Et surtout deux maîtres-mots, deux notions sans lesquelles tout iranien, toute iranienne ne peut vivre : l'hypocrisie et le mensonge. Hypocrisie et mensonge des religieux, des juges et de la justice, du régime et ses lois. Les tchadors cachent bien des turpitudes. Et les robes des mollahs aussi. Mensonge imposé pour vivre et résister.
Comment vivre dans ce Téhéran moderne dans lequel "C'est pas illégal d'être gay, ce qui l'est, c'est de baiser gay." ? Il est inconcevable qu'une jeune fille ne soit pas vierge lorsqu'elle se marie. Alors des chirurgiens, comme Cousu-main, ont pignon sur rue et reconstruisent des hymens, d'autres plus inventifs ont mis sur le marché des artifices permettant de tacher de rouge le drap nuptial...
On sourit parfois, rarement toutefois. Là-bas, certains risquent des coups de fouets ou l'emprisonnement voire leur vie.
Mentir devient le seul moyen de vivre. Rigueur religieuse et porno cohabitent. La prostitution aussi. ..... Ou comment aller voir les prostituées légalement, en se mariant pour une heure devant un religieux....
Le lecteur est le plus souvent fortement secoué, indigné par ces violences physiques mais aussi et surtout par ces violences morales, par ces interdits que l'Iran connut à toutes les époques, ces interdits que chacun tente de contourner, par ces prisons iraniennes. Ces interdits pour lesquels les religieux qui les ont promulgués et qui punissent afin qu'ils soient respectés, passent outre en ce qui les concerne. Et ceci depuis bien des années, depuis qu'ils ont pris le pouvoir.
Reporters sans Frontières, qui s'appuie semble-t-il sur un "registre officiel" de la justice iranienne mentionnait il y a quelques semaines qu'au moins 860 journalistes et journalistes-citoyens ont été "arrêtés, détenus ou exécutés" par le régime iranien entre 1979 et 2009.
"Vivre et mentir à Téhéran" est un témoignage fascinant et courageux de Ramita Navai qui devrait être lu par le plus grand nombre. "Ce sont les histoires vraies de la ville des mensonges." (P. 15)
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Ramita Navai, journaliste pour le Times de Londres et native de d'Iran, décrit la vie à Téhéran sous le régime des mollah.
La géographie de cette ville est omniprésente dans ce récit avec pour repère central, l'avenue Vali Asr ( l'ultime sauveur, baptisée ainsi par l'imam Khomeiny en hommage à l'imam Madhi).
Cette avenue, bordée de sycomores coupe la ville en 2 et s'étend sur 18 km du Nord au Sud, de 1900 m d'altitude, à 1200 m . Elle est prise en étau entre 2 chaines de montagnes culminant à 4000 m, et sert ainsi de réceptacle des fumées et des gaz engendrés par le nombre croissant des voitures, avec pour conséquence une pollution permanente.

Le niveau social de la population est corrélé à la situations géographique des uns et des autres, au regard de cette fameuse avenue, les plus riches au Nord, les plus pauvres au Sud.
L'auteure a infiltré différentes milieux sociaux culturels et nous fait partager sa lecture du monde Téhéranais sous forme de récits fictifs collant au plus juste à la réalité quotidienne des habitants.
A travers 8 histoires associées au prénom d'un personnage symptomatique, elle nous raconte les problématiques des uns et des autres dans une société où le mensonge et l'hypocrisie sont indissociables mais nécessaires pour vivre sous ce régime théocratique.

Dariush, radicalisé à l'étranger cherche à commettre un attentat contre un haut fonctionnaire, puis se trouve dé-radicalisé par le régime.

Somayeh est l'histoire générique d'une jeune fille d'un milieu modeste jonglant entre les désirs intimes et son rapport à Dieu. Les mollah donnent des exercices physiques associés à des lectures sur les prophètes aux jeunes filles pour éviter toute pensée libidinale. Les codes vestimentaires, notamment le port du voile sont bien disséqués jusqu'à cette publicité affichée sur les murs de Téhéran montrant 2 bonbons, un ouvert recouvert de mouches et un enveloppé de papier, avec pour légende »Le voile c'est la sécurité »
Le tchador est synonyme de pureté, de piété et de pudeur.
Ce chapitre est à mon avis le plus symptomatique d'une société qui officiellement cherche à étouffer la sexualité, mais qui officieusement ne pense qu'à ça.
Les filles se doivent d'être vierges au mariage au niveau vaginal, peu importe leur »virginité « annale ce qui fait de Téhéran (selon l'auteure) la championne mondiale de cette pratique sexuelle !!
Les mariages sont le plus souvent arrangés et les divorces peu acceptés.
Somayeh se marie puis se trouve vite confronté à l'adultère et ses conséquences . La piété apparente est un gage d'honneur, le voyage à la Mecque est un nec plus ultra, le père de Somayeh en est le champion, jusqu' à ce que sa femme découvre qu'il voyage en fait en Thaïlande assouvir ses besoins sexuels.
Amir est un jeune homme non croyant dont les parents ont été pendus (avec 5000 autres) par le régime des mollah en 1988 , après des jugement sommaires rendus par des juges croyant à leur mission de dispenser la justice de Dieu.
Le juge responsable de la mort des parents de Amir, cherche son pardon après avoir réalisé à quel point le régime s'était laissé miné par des questions d'argent et de pouvoir.
Bijan

On perçoit le niveau de collaboration entre le grand banditisme et la police, dans les quartier Sud où le trafic d'armes, de drogue, de prostitution fond abstraction de la théocratie, on apprends le lien entre la mafia Japonaise et Iranienne.

Leyla
ou l'itinéraire d'une jeune fille issue de la classe moyenne qui se prostitue pour vivre puis tourne pour des films pornographiques amateurs très prisés de la société des nantis à Téhéran .Les juges abusent de leur pouvoir pour profiter sexuellement des femmes accusées de prostitution.
Les législateurs et érudits passent des heures à parler sexe, philosopher sur le sexe afin de le condamner et le punir selon leurs lois.
Le comble de l'hypocrisie de ce régime est le Sighieh ( mariage temporaire approuvé à la fois par Dieu et par l'état qui lie un homme (qui peut être marié) à une femme (qui ne peut pas l'être).
Ainsi les mollah, ayatollah et tous les hommes mariés peuvent avoir des rapports sexuels avec une prostituées ou une jeune fille en toute impunité devant la loi et devant Dieu.

Moteza ou la difficulté de vivre son homosexualité, notamment dans les milieux les plus populaires, ce qui n'empêchent pas certains commandants de brigades de la pudeur d'abuser en toute impunité de leurs recrues.
Asghar ou la vie d'un hors la loi pré révolutionnaire minée par la drogue omniprésente à Téhéran.
Farideh, l'aristocrate pré révolutionnaire qui vit dans le Nord mais qui doit composer avec un régime qu'elle ne supporte plus au point de quitter le pays puis y revenir malgré tout aimantée par cette ville qui malgré toutes les vicissitudes et interdictions diverses bouillonne de vie et où le mensonge et l'hypocrisie sont devenus un art de vivre.

Par-delà ces récits, Ramita Navai nous fait visiter une capitale dans son intimité la plus profonde , je pense à Loo Reed avec « take a waak on the wild side », déjouant l'idée d'une ville endormie par le joug chiite, elle nous montre un monde vivant, dynamique portée vers des excès ( drogue, alcool, sexe et pornographie), générés par la prohibition et le puritanisme officiel.


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J'hésite sur la qualification de cet ouvrage, formé des histoires de vie de huit Téhéranais, recueillies par la journaliste anglo-iranienne Ramita Navai et transformées en forme de nouvelles, tout en insistant sur les références réelles aussi bien des personnages et de leur langage, que des éléments descriptifs et contextuels qui abondent dans les récits. Si les personnages ne sont clairement pas typiques, ils sont sans doute emblématiques et de ce fait représentatifs. de plus, par-delà les deux fils conducteurs du livre : le mensonge (ou la duplicité) comme condition de survie à la répression sociale, et la position géo-urbaine par rapport à l'Avenue Vali Asr qui, en traversant longitudinalement la capitale, révèle physiquement une fracture censitaire de la population (le Nord des nantis, le Sud des classes populaires), ce qui frappe dans ces récits, c'est précisément la variété des déterminants et des trajectoires biographiques en fonction des inégalités socio-économiques. L'auteure semble avoir eu l'opportunité d'être introduite dans une variété de milieux et de narrations généralement mutuellement impénétrables : elle en explique le moyen chanceux dans une note en fin d'ouvrage. Ce vaste spectre social donne donc l'impression de la représentativité, à l'instar du cadre urbain multicolore, uni dans sa diversité, ciselé par des descriptions foisonnantes de détails, comme dans une fresque contemporaine gigantesque.
Chaque chapitre, qui possède la dynamique et le style propres de la nouvelle, est intitulé d'après le prénom du protagoniste, mais il pourrait aussi bien représenter une situation ou une problématique spécifique :
- Dariush ou de la radicalisation étrangère puis dé-radicalisation locale d'un militant d'une organisation terroriste opposée à la République islamique – une réalité dont j'étais totalement ignare, habitué à penser que les opposants étrangers de l'Iran ne seraient qu'humanistes, démocrates, pacifistes et laïques...
- Somayeh ou de la duplicité des rapports conjugaux, spécialement chez les hommes des familles conservatrices – une perspective étendue à deux générations, sur fond de l'évolution de la considération de la femme divorcée ;
- Amir ou de la clandestinité dans l'opposition politique, surtout lorsque l'engagement est hérité de parents ayant perdu la vie pour le militantisme – dans ce chapitre, le personnage le plus inattendu me semble être celui de l'antagoniste, le vieux juge retraité consumé par le remords ;
- Bijan ou de la prospérité des trafics criminels avec la connivence de la police – j'ai appris ici les rapports entre les mafias iranienne et japonaise, en particulier dans le commerce triangulaire de stupéfiants dont le troisième côté est l'Afghanistan ;
- Leyla ou d'une carrière entre la prostitution et la pornographie, en passant par la profession d'escort de haut-vol ;
- Morteza ou des difficultés de vivre et d'occulter son homosexualité, notamment dans le milieu des bassidjis, milices paramilitaires volontaires du régime, dont les membres sont issus des classes les plus humbles ;
- Asghar ou de la persistance, auprès de la classe ouvrière, de l'ancienne figure pré-révolutionnaire du "jahel", hors-la-loi fidèle à un strict code de conduite fondé sur l'honneur, la magnanimité, la chevalerie, gérant tripots de paris clandestins et débits d'alcools, et de la manière dont elle est minée par les ravages de l'héroïne ;
- Farideh ou de la perpétuité d'une certaine aristocratie pré-révolutionnaire, qui tente de garder un standing malgré la dépossession de la plupart de ses avoirs, et qui est tiraillée entre le désir d'émigrer en Occident, le regret de ne pas l'avoir fait plus tôt et la conscience de ne pas savoir vivre à l'étranger – j'apprends que ce groupe fort exigu est cependant parfois alimenté par des retours de jeunes entreprenants qui, ayant fait fortune à l'étranger, se constituent ou tentent de se constituer des fortunes en Iran, en créant des ponts pour désenclaver leur pays d'origine.

Cet ouvrage offre donc une vraie intimité avec la complexité sociologique de la ville de Téhéran, qui joint les avantages du reportage à la puissance de la prose fictionnelle.
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Ramita Navai est une opposante au régime iranien. Il s'agit de s'en souvenir à mesure que l'on progresse dans son livre. On pourrait sans doute dire "opposante aux régimes iraniens". le pouvoir tyrannique du shah, le régime de terreur des mollahs, la révolution islamique... tout cela n'agréee pas Ramita Navai.

Un roman à nouvelles, pourrait-on dire. Une série de portraits qui tissent l'image d'une ville cosmopolite, mutliforme, entre laïcité et religion, entre laissez-faire et terreur des Bassidjis, entre modernité et archaïsme, entre pauvreté et opulence obscène, entre technologie et système D...

Les personnages se suivent, on passe de quartier en quartier, le long d'une artère mythique de Téhéran: l'avenue Vali Asr, 10 km de long. Une actrice porno, un vieux mafieux, une femme extrêment riche, un activiste... Tous ces portraits sont issus de la réalité, de personnes et de faits divers qui existent, ont existé, et pour lesquels Ramita Navai a changé les noms, les lieux, les dates. Rappelons-nous qu'il ne fait pas bon exprimer ses opinions divergentes en Iran, pays où l'homosexualité est illégale, mais où le lesbianisme est davantage puni que l'homosexualité masculine... et où celui qui pénêtre est moins puni que celui qui est pénétré... y compris lors d'un viol. Quand la religion se mêle du vécu des individus, cela ne donne pas un bon résultat (les USA, pourtant l'opposé affiché de l'Iran, nous le démontrent en ce moment).

Le style de Ramita Navai n'est pas toujours aisé. On est davantage dans le récit de faits divers et dans le journalisme que dans le roman. C'est parfois lourd et indigeste. Mais c'est édifiant. Vivre à l'ombre de régimes totalitaires, où tout semble interdit et permis en même temps, c'est cela la terreur, l'espionnage, la délation... Vivre à Téhéran, c'est forcément mentir nous dit Ramita Navai, c'est avoir une part d'ombre en espérant qu'elle ne sera pas démasquée par ceux qui se sont autorisés à posséder un droit de vie et de mort sur autrui.
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Dans Vivre et Mentir à Téhéran, Ramita NAVAI nous offre un portrait intime de Téhéran à travers les histoires de huit de ses habitants. Et pour relier entre eux ces huit récits qui font chacun l'objet d'un chapitre, elle nous entraîne le long de Vali Asr, cette avenue de 18 km de long qui traverse la capitale du nord au sud. Au nord les belles maisons, les jardins verdoyants : c'est le quartier habité par les gens aisés. Quand on descend vers le sud, on traverse le coeur de la ville, bruyant, encombré et plus on progresse dans cette direction, plus les bâtiments se font décrépis et négligés, jusqu'à atteindre l'extrémité bordée de cabanes aux toits de tôle, et qui se termine en ruelles étroites et sombres, souvent couvertes de détritus. Ramita NAVAI a recueilli le témoignage de ces huit personnes, mais elle prend soin de protéger leurs identités. Elle a bien sûr changé les noms, mais pour certains de ses personnages elle a mélangé plusieurs témoignages. Ils ont tous en commun le désir de vivre dans leur ville en essayant de garder un peu de liberté. Et sous le régime des ayatollahs, ce n'est pas facile, il leur faut contourner les lois qui souvent se contredisent, éviter la police religieuse : pour cela une seule solution : mentir aux autres ou à soi-même, ou aux deux.

Parmi ces huit récits qui tous sont émouvants, j'ai été particulièrement touchée par l'histoire de Mortezza, et celle d'Amir.

Morteza un jeune homme des quartiers pauvres qui s'engage chez les "bassijis", (une force paramilitaire qui terrorise la population) pour cacher son homosexualité. Il ne pourra pas soutenir ce mensonge très longtemps et finira par demander à changer de sexe. Car à Téhéran, avoir des rapports avec une personne de même sexe est puni de plusieurs dizaine de coups de fouets, voire même de la mort, mais changer de sexe est autorisé.

Amir, le blogueur, harcelé par le juge qui a fait exécuter ses parents 25 ans auparavant. Celui-ci le supplie de lui pardonner : " Nous étions persuadés d'agir au nom du bien. Nous croyions sincèrement que tes parents étaient des ennemis de Dieu. Mais pour nous, c'était une question de survie, nous subissions un feu roulant d'attaques. Je n'ai fait qu'exécuter des ordres. Et puis un jour, j'ai perdu pied parceque j'ai compris que je me mentais à moi-même, que je mentais au monde et pire que tout que je mentais à Dieu."

C'est une description à la fois sombre et pleine d'espoir que l'auteure nous livre à travers ces huit récits. Tous ses personnages souffrent, mais tous ont une formidable envie de vivre et de liberté. La plupart de ceux qui quittent le pays, pensant trouver une vie meilleure à l'étranger, y reviennent. Outre les personnages qu'elle décrit si bien, elle a fait de Téhéran une personne à part entière. Au fil des pages et des récits, on sent battre son pouls, les odeurs de ses ruelles, toute l'ambiance qui y règne. le livre est particulièrement bien écrit et un plan du quartier de Vali Asr empêche le lecteur de s'y égarer. L'auteure a eu également la bonne idée d'ajouter en fin de livre un glossaire ou l'on peut trouver la signification des termes iraniens employés dans le récit.

En bref
Une magnifique lecture. Un coup de coeur.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Jamais elle n'aurait imaginé éprouver un tel soulagement, enveloppée par les montagnes de Téhéran, protégée par son ciel bleu vif et réchauffée par son soleil, abritée sous ses arbres, caressée par sa brise, subjuguée par la beauté brun-roux ou ocres des feuilles qui semblaient saigner. Ils passèrent devant des étals débordant des fruits de l'automne jaunes et orangés - citrons, coings, kakis ... Toute cette confusion, ce chaos, cette clameur, le parfum d'agneau grillant sur les charbons ardents effleurant ses narines, les mûries et le jasmin, la poussière, le crachotement des camionnettes, l'homme qui vendait des chiots sur le bas-côté, les essaims de mobylettes louvoyant entre les jolies filles habillées pour défier le monde entier, les stands de jus de fruit, les boutiques tapageuses, les vieux bazars et les passages souterrains, les carreaux bleus fêlés sur les façades de vieilles demeures décrépites, les jardins secrets.
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« Plus de trente années passées à servir la République islamique avaient nourri chez le juge un sens de l'humour original, ainsi qu'un profond désenchantement sur la façon dont la révolution avait été confisquée. […] Le juge avait très vite interprété les choses ainsi : le régime avait enfanté un monstre à qui il ne pouvait tourner le dos parce qu'en lui coulait le même sang. » (p. 237)
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Une Ferrari noire conduite par un garçon d'à peine 20 ans passa en trombe, zigzaguant dangereusement entre les voitures.
Un derviche se tenait là, sur le côté de la chaussée, avec une longue tunique vert vif et une chevelure blanche flottant sous un turban bleu saphir. Il balançait de la main droite un encensoir métallique dans lequel brûlaient des graines d'esfand, un mélange d'herbes qui dégageaient des volutes de fumée blanche destinées à éloigner le mauvais œil et effacer le chagrin. Sa main gauche était tendue en signe de supplication.
Rue Fereshteh, m^me les mendiants étaient haut de gamme.
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« À Téhéran, le sexe est un acte de rébellion. Une forme de résistance. Le seul moyen pour la jeune génération de conquérir un espace de liberté. D'avoir la maîtrise absolue de son corps, l'unique chose qui leur appartienne, et qu'ils ont transformée en une arme de révolte. Tel est le revers d'années de répression sexuelle ; à force d'être obligés de mentir et de cacher leur désir en permanence, ils ont perdu l'idée d'une vie sexuelle "normale", et les valeurs qui vont avec. » (240)
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Asghar était né dans une petite bicoque au fond d'une allée en terre du dédale de Nasser Khosrow, au nord du bazar. Il était fils de cordonnier et appartenait à une fratrie de 13 enfants.
C'était une autre époque...Une journée de travail suffisait à nourrir 12 personnes, alors qu'aujourd'hui il fallait en travailler 12 pour en nourrir une seule ...et c'était chacun pour soi.
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