La marginalité comme châtiment volontaire
Mon intérêt pour l'académie française mène à tout, même à
Dominique Fernandez. Sans ce blason sur son passeport d'écrivain, il serait resté pour moi un étranger, un clandestin du livre qu'aucune partie charitable de mon intellect n'aurait voulu accueillir. Et je serais passé à côté d'un passionnant ouvrage.
Une réflexion tout en subtilité et en légèreté sur l'homosexualité et les conflits de génération entraînant des malentendus au sein de l'orientation. La vieille garde considérant que l'on perd un peu de son âme à trop se normaliser, ayant porté avec fierté l'étendard de la marginalité où on les enfermait, elle voit la nouvelle génération décomplexée comme les proies du miroir bourgeois, les jouets de l'affadissement organisé. Pour ne plus susciter la peur, embourgeoiser la transgression, le mariage comme point final de l'opération.
C'est correctement écrit, en tout cas digne d'un académicien, délicat sur le fond comme dans la forme, un voyage sans vulgarité au pays de Sodome. Rien de punk, de rock, de grunge, de graveleux en somme, mais une oeuvre faite toute de dentelle au service de la nostalgie et de l'incompréhension, centrée sur un héros banal, confusément humain, qui se souvient et se pose des questions.
Et la question qui se pose, fondamentale, n'est pas de savoir si l'homosexualité est bonne ou mauvaise mais pourquoi la nature crée ou produit des homosexuels en quantité à peu près égales depuis, peut-on le penser, les origines ? Mon hypothèse est que c'est dans le but d'atténuer la concurrence des mâles pour l'accès aux femelles. Réduisant les frustrations et donc les conflits qui débouchent souvent sur le massacre, ceux-ci participent grandement à la pérennité de l'espèce. le rôle qui leur est alloué est donc crucial.
Pour conclure, honneur m'aura été fait de découvrir
Dominique Fernandez, son sens du récit et du dialogue, ainsi que ses pertinentes réflexions. Il y a longtemps que le soufre inhérent à ce genre de livre s'est évaporé, dispersé aux quatre coins de l'époque. le sujet devenu trivialité, ne subsiste que la littérature, et de la littérature il y en a dans
L'homme de trop.
Samuel d'Halescourt