Je ne sais pas comment je suis passée à côté de ce livre à sa sortie... soit. Après avoir écouté
Dominique Fernandez dans un documentaire récent, j'ai cherché ce roman et l'ai finalement trouvé dans une bibliothèque.
Roman historique, il couvre la période qui va de l'Occupation, (le héros et narrateur, David, est lycéen à Paris et vit avec sa mère...) jusqu'aux années 70, avec les retombées de mai 68. le narrateur fait ce récit pour Alain, rencontré dans les rues parisiennes en mai 68. Pour qu'il se rende compte du chemin parcouru.
David nous entraîne donc dans les rues du Paris occupé, dans les classes d'un lycée élitiste où les élèves mal scolarisés sont exclus du système (David retrouvera l'un d'eux, militant communiste, en 44 et en 68)... puis le jour de la Libération de Paris. Et enfin, devenu professeur de langues modernes, David part en Lorraine où il raconte son quotidien et quelques rencontres clés. Un noble de province original et solitaire, désireux de documenter la cause gay, que l'on n'appelle pas encore ainsi, victime d'un crime crapuleux et homophobe. Puis un psychiatre... auquel le narrateur se confie, (et qui parle en bon freudien...) puis un collègue qui revient des États-Unis. Lui utilise le terme "gay" plutôt que les termes médicaux ou insultants habituels.
La situation évolue lentement. La loi Mirguet est comme un retour en arrière, peu reluisant, avec des relents vichystes...
David nous emmène aussi à Cambridge, (une bien jolie promenade, très détaillée...), tout en dénonçant les thérapies de conversion. (Note,
en 2022, elles viennent d'être déclarées illégales en Belgique. )
Mais le meilleur du livre concerne mai 68. La rencontre d'Alain, le motard (et qui a été expulsé de chez lui...), de ses amies, avec qui David discute. Puis les manifestations, les violences policières... mais surtout, la création de toutes sortes d'assemblées et de groupuscules d'étudiants, et parfois de jeunes adultes. Et de militants communistes. Un joyeux b.o.r.d.e.l soixante huitard... et pas toujours drôle. (Alain quitte son groupe en déchirant sa carte du parti.) Mais Fernandez le décrit avec un humour tendre et féroce ensemble, à travers le Journal de David.
Enfin, les deux héros vont également aux États-Unis, à New-York. C'est l'époque de Stonewall et des premiers groupes ou associations de militants LGBT. On visite ainsi la librairie associative
Oscar Wilde... et les débuts du Village.
Dominique Fernandez est académicien. le style de son roman est classique, parfaitement maîtrisé et la langue, d'une grande élégance et sensibilité. Une raison de plus pour le lire...