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sur 7105 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Il est bien difficile de s'imaginer 75 ans après sa parution l'effort d'anticipation de Barjavel pour projeter un Paris 2052 si avant-gardiste pour l'époque et bien plausible à l'heure actuelle ; y manque peut-être la percée dans l'intelligence artificielle. Côté dérives : quelle anticipation ! de l'hyper dépendance aux machines en passant par la désertification des campagnes pour une folle concentration urbaine, de l'éloignement total de la nature à la perte du sens de l'effort, l'homme s'est créé par la science et les techniques un environnement fragilisé tenu par le fil qui amène l'électricité, tout y est en passant par la fabrique des rêves et des stars. Merveille de créativité avec son plastec, ses trains à très hautes vitesses, ses méga-tours climatisées, ses, ses ... esquissés en moins de 75 pages (mais quelles pages !) Les temps nouveaux. Fin de la 1ère partie.

Tout encore à son éblouissement le lecteur est brutalement plongé dans la sidération : La chute des villes, dans une compression espace-temps 165 pages mais seulement quelques jours à peine, bardaf c'est l'embardée ! Le ciel et les avions vous tombent sur la tête, en un claquement de doigt tout collapse : la population est dans le déni, les élus dans l'affabulation (oui, oui plus qu'en temps ordinaire). A remarquer que les mieux adaptés aux temps nouveaux, les "maîtres du monde" qui rayonnaient il y a peu sont les premiers à s'écrouler. A contrario les plus marginaux sont les premiers à prendre conscience de la gravité du séisme et de l'ampleur de la situation. J'ai rarement lu une telle apocalypse, il faut dire que de trois à huit ans René Barjavel né dans la Drome a vu passer au loin la première guerre mondiale. Sûrement son enfance a été toute bercée des récits de la vie dans les tranchées ... La faim, la barbarie. Tous crapules et chacun pour soi. Le verni a fondu sous la chaleur, les esprits plus enflammés que la ville embrasée par la bêtise d'un gendarme. La survie au plus violent !

Au déni succède la fuite dans le chemin des cendres, 3ème partie pour déboucher sur ... sur quoi ? Sur la partie de trop : Le patriarche. Quel dommage que ces 20 dernières pages où se révèlent toutes les limites de l'utopie ! Ou peut-être tant mieux car elles clarifient le modèle proposé par Barjavel, hélas tellement proche de celui de Daesch ou de tout autre totalitarisme. Voilà pourquoi ma cote est finalement de 3 étoiles. Tenté par 5 étoiles pour ses qualités d'observations et la lucidité de son analyse, j'aurais pu basculer sur 1 étoile pour l'abjection de son modèle obscurantiste. Ce livre est un peu l'histoire d'un chirurgien posant un excellent diagnostique très en amont sur un mal qu'aucun n'aurait vu venir pour ensuite se gourer complètement dans le remède prescrit. (Cela dit ce n'est pas, me semble-t-il, le seul roman d'anticipation où l'analyse des dérives du système sont des plus pertinentes mas face auxquelles derrière la solution proposée par l'auteur se cache un totalitarisme sournois.)

Littérairement parlant, c'est à mon avis une oeuvre marquante. Bien loin d'être spécialiste du genre je pressens une influence importante sur d'autres oeuvres de science fiction ainsi le concept de la mer : ce rouleau de viande artificiellement généré est repris tel quel dans le transperceneige, BD culte dans ce domaine. Et ce passage où alimenté d'énergie les cerveaux de quelques humains révèlent une phénoménale puissance, jusque là inexploitée, au-delà de l'imaginable (sauf pour Barjavel) ; est-ce que cela ne vous évoque pas Lucy de Luc Besson ? Non, je ne regrette pas de l'avoir lu, tout au contraire.
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Ravage, le fameux ravage,roman de science fiction. Je dirais roman d'anticipation, cet adjectif me semble mieux convenir que le terme générique de science fiction. Certes pendant les premières pages, Barjavel décrit le Paris de 2052 avec une certaine clairvoyance, notamment la dépendance absolue de l'Homme aux machines, le culte de la société de l'apparence, la société des loisirs et des spectacles, le renoncement à tout effort inutile ( songez donc marcher à pied 5 min est un drame pour un personnage !) mais aussi des idées bien senties comme cette histoire de lait arrivant dans les robinets comme l'eau ! Et pourquoi pas après tout. L'anticipation la plus juste reste l'évolution agricole, l'agriculture remplacée par les chimistes pour nourrir la population... on y est !
Mais ensuite il s'agit d'un roman épique avec toutes les problématiques de la survie, des sacrifices dépassant largement le cadre de la science fiction.
Le milieu du récit est le plus intéressant correspondant à la chute de Paris, j'ai adoré les réunions du gouvernement, j'en conviens tout ce qui touche de près ou de loin l'univers des coulisses du pouvoir me fascine c'est comme ça, la foule en délire en plein doute.
J'ai eut un peu de mal avec les premières pages, il faut se familiariser avec cet environnement, surtout j'ai du mal à conceptualiser, à imaginer les immeubles de la citée à la sauce Barjavel : on aurait donc une sorte d'un seul bloc immense faisant office à la fois d'habitation, de jardin, de salle de spectacle, de cabinet médical... Bref j'arrive pas à voir à quoi ça peut ressembler, brouillard total dans esprit, aucune image, aucun décor ne me vient.
La force de ce récit reste l'opposition puissante entre ce monde bourré de technologie, ce monde futuriste et les moeurs qui elles ont plutôt fait un retour vertigineux vers les pratiques du moyen âge ! le ton entre les amoureux est digne de la grande bourgeoisie XVIII, " nous allons si tu veux prendre les nouvelles", plus aristos tu meurs, aucune femme au gouvernement, le héros ne promet rien d'autre à sa belle le statut de femme de foyer avec l'apothéose finale puisque dans la société post ravage, le héros charismatique impose la polygamie, réduit la femme à un rôle de reproductrice.
La relation François / Jérôme est intéressante en ce sens qu'elle se retrouve inversée avec l'apocalypse. Jérôme riche, très riche, rien ni personne ne lui résiste aime Banche, l'amie d'enfance de François. Mais Jérôme est perdu face à la perte de l'électricité et devient une sorte de subordonnée de François, son domestique docile. François dirige tout et ce n'est qu'un début... Voir Jérôme qui avait le seul mérité d'être un héritier dans cette situation m'a bien amusé.
Autre point fort du livre, la parfaite maitrise par Barjavel des temps du passé, le passé simple et l'imparfait sont brillamment utilisés rendant la lecture agréable parfois envoutante.
En revanche, quelques partis du récit m'ont moins convaincu comme la description du Paris artistique ou encore lors de leur fuite de Paris, le passage sur la maison des fous un peu long. Quelques descriptions sont également à rallonge.

Pour finir, je souligne une phrase magnifique, peut être l'une des plus belles que j'ai lu : " nous allons avoir besoin désormais de valeurs plus solides" (pour évoquer l'argent), il serait temps en effet...

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Paris, dans le futur.
François Deschamps vient poursuivre ses études en agronomie. Son amie Blanche est sélectionnée par Radio-300 pour devenir une future vedette de la chanson. Jérôme Seita, le patron de l'antenne, est prêt à tout pour faciliter la réussite de la jeune femme, et l'attirer dans son lit.
L'empereur d'Amérique du Sud, Noir Robinson, choisit ce moment pour déclarer la guerre à l'Amérique du Nord.
Le soir du premier concert de Blanche, un cataclysme s'abat sur la planète : l'électricité disparaît, et c'est tout le modèle de développement de la société qui est détruit, renvoyant l'humanité à des modes de vie auxquels les hommes ne sont pas préparés.

Cela commence dans une société futuriste comme dans le film "Le cinquième élément" de Luc Besson (1997). Cela se poursuit par un long combat pour la survie, un peu comme dans "La route" de Cormac McCarthy (2006) ou "Et toujours les Forêts" de Sandrine Colette (2020). Et cela se termine par une tentative de reconstruction d'une société utopique, plus humaine, non industrielle, comme dans "Malevil" de Robert Merle (1972). Sauf que Barjavel a écrit son roman dès 1943...
Il faut louer l'imagination de l'auteur pour avoir su créer ces trois univers très différents, qui reflètent ses inquiétudes, ses peurs et ses aspirations. Mais c'est également le défaut du roman : la juxtaposition de trois parties qui s'enchainent logiquement mais véhiculent des idées presque opposées.
Je n'ai pas totalement retrouvé dans ce roman la fluidité d'écriture, et donc de lecture, que j'avais beaucoup appréciée dans "Une rose au paradis", un peu sur le même thème, mais écrit près de 40 ans plus tard...
Une petite déception, donc...
Lien : http://michelgiraud.fr/2021/..
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Imaginez un monde où tout, absolument tout, fonctionne à l'électricité, des moyens de transport à la production d'eau et de nourriture. Seuls certains, dans les zones les plus reculées, vivent encore « à l'ancienne », en autarcie, travaillant la terre et élevant quelques animaux.
Bienvenue en l'an de grâce 2052, tel que pensé par Barjavel 110 ans plus tôt.

Imaginez maintenant, dans ce monde merveilleux, une panne d'électricité. Pas une petite coupure d'une heure ou deux, pas une baisse temporaire de tension sur le réseau, non, une panne générale et définitive. C'est purement et simplement l'apocalypse. Plus moyen de se déplacer de façon motorisée, bientôt plus rien à boire ni à manger, les avions s'écrasent sur les immeubles, les trains ne freinent plus. Et bien sûr, débandade des autorités, émeutes, pillages, agressions, guérillas urbaines, violences, morts. Puis, la canicule aidant (une prémonition du changement climatique?), incendies dévastateurs et épidémie de choléra se répandent à travers un pays en grande partie urbanisé.
Pour un petit groupe de survivants mené par François, jeune homme d'origine paysanne, la seule échappatoire est l'exode vers le village de ses parents, à supposer qu'il existe encore.
Récit apocalyptique et post-apocalyptique de la catastrophe puis du long calvaire de la petite troupe de François, à travers mille dangers et dans le plus profond dénuement matériel et moral, sur le chemin d'une hypothétique Terre promise, « Ravage » est une dystopie brutale et sanglante, dans laquelle la loi du plus fort l'emporte largement sur toute morale, la survie du groupe étant la seule option, quoi qu'il en coûte.
Ce n'est pas très reluisant et cela ne rend pas François très sympathique, mais bien malin qui pourrait jurer qu'il se comporterait différemment dans la même situation.
L'univers créé par Barjavel est visionnaire, et ce qui était de la pure anticipation en 1943 s'est en partie réalisé aujourd'hui, les intelligences artificielles en moins.
Barjavel met en garde contre le « tout à la technologie », et cela n'est pas blâmable, me semble-t-il. Mais de là à envisager comme remède un « retour à la terre » moyenâgeux, patriarcal et autoritaire dans lequel les femmes sont réduites à leur fonction de mères et sont priées de "servir" à plusieurs hommes, et dans lequel les livres ne sont accessibles qu'à l'élite, merci, mais non merci. A cet égard, le dernier chapitre est nauséeux et n'est plus « lisible » aujourd'hui. Je ne sais pas s'il reflète les convictions profondes de Barjavel ou s'il correspond aux moeurs de l'époque (en tout cas en ce qui concerne la place des femmes dans la société) et/ou du contexte de la guerre et de l'Occupation, ou encore si c'est une satire. Et je n'ai pas compris non plus l'intérêt des épisodes (aux relents racistes) dans lesquels intervient l'empereur noir Robinson.
« Ravage » est certes un roman remarquable par sa créativité et son inventivité (et sa crédibilité a posteriori sur son volet technologique). L'avertissement contre les dérives du « progrès » est louable et nécessaire. Mais, à moins qu'il ne s'agisse d'un second degré qui m'a échappé, l'issue proposée en 1943 par Barjavel met fort mal à l'aise aujourd'hui.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Totalement d'accord avec Nanou2008 :
Le début est vraiment bien fait avec la déliquescence progressive mais finalement très rapide, non seulement des villes, mais aussi en fin de compte de tout le monde moderne. Ne subsiste à la fin que le village "originel" qui a conservé un certain mode de vie archaïque, et ce n'est pas pour rien que c'est le village natal du héros

Mais, à l'arrivée, c'est un roman aux idées très réactionnaires (attention, il y a quelques spoilers dans les mots qui suivent) :
- L'origine de la tragédie reste mystérieuse, mais ressemble beaucoup à une intervention divine.
- Je ne sais trop quel sens on peut donner à "la maladie des vierges", mais au moins permet-elle d'être certain que Blanche est encore "pure" HA ha ! Pratique...
- Et surtout la misogynie et la vision très traditionnelle du rôle et de la place de la femme dans la société :
Le personnage de Blanche : écervelée, qui se laisse prendre au jeu de l'argent et de la célébrité (alors que son ami, bien sûr, garde la tête froide). Et les autres personnages féminins sont tous du même acabit.

A la fin, Comme par hasard, il reste plus de femmes que d'hommes, ce qui favorise la polygamie masculine, le contraire n'était pas du tout envisageable semble-t-il.
Et malgré cette majorité écrasante de femmes, on en arrive à une société totalement patriarcale où la femme est soumise et se contente d'accomplir, docile, sa mission : reproduire l'espèce !
C'est cette image finale de ce nouveau monde "idéal" (parce qu'il est bien présenté comme ça) que le roman pèche le plus et agace.
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Ravage de Barjavel m'a été de nombreuses fois chaudement recommandé ! Cela fait un an que j'ai entendu parler pour la première fois de cet auteur contemporain d'une époque riche en distopie (Orwell, Bradburry…). Il m'aura fallu du temps et une édition de masse critique pour enfin me lancer dans la science-fiction made in France !

L'histoire est efficace : Dans les années 2050, à l'époque d'une France à la pointe de la technologie, l'électricité abandonne l'humanité. Que va-t-elle devenir ? Peut-elle survivre ? Et oui ce roman est un vrai « survivor ». La plus grande partie du bouquin (très chiante en soi) repose sur le voyage du héros vers sa terre de salut, loin de l'anarchie parisienne.

Mais ce n'est pas cela qu'il faut retenir de ce roman. Non ce qui m'a frappé, c'est l'esprit visionnaire de Barjavel. Dans son futur, les végétaux poussent hors sol ! Non mais quelle idée… Dans son futur, l'Amérique du sud est un empire puissant prenant le dessus sur l'état fédéral d'Amérique du Nord. Encore une belle connerie… Dans le futur, les ouvriers meurent tôt mais peuvent heureusement consommer pour oublier leurs conditions : encore une sacré absurdité ! En fait, ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il a utilisé de la noëlite pour voyager à notre époque… C'est évident ! Comment peut-on viser aussi juste ? On observant une société qui devient malade ?

Enfin, et je conseille d'arrêter ici la lecture de cette critique pour ceux qui désirent lire ce livre, je dois dire que la fin m'a laissé sur le cul… Une société patriarcale où un homme a les pleins pouvoirs et une horde de femme et de gosses… J'espère vraiment que Barjavel ne partageait pas cette idée d'un retour aussi extrême à la terre. Extrême c'est bien le mot, un culte du passé qui fait froid dans le dos. Peut-être y a-t-il derrière un climat pétainiste ? Une critique de l'idéal de l'époque? Si quelqu'un à une réponse à me proposer je suis preneur !

Bref, un livre assez court, qui mériterait d'être mieux exploité, qui nous laisse sur notre faim voir qui nous effraie sur la fin. Un livre plutôt déséquilibré mais qui frappe tout de même par sa richesse et son actualisme frappant !
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Un classique qui a un peu vieilli, un petit coté désuet. La vision de la femme , celle des années 40, fragile, éternelle mineure, écervelée qui une fois mère devient fidèle et acquiert un peu de plomb dans la tète à condition de bien vieillir s'entend...La quête de nourriture et la débrouillardise, les "profiteurs", la loi du plus fort , la guerre et ses restrictions sont là bien présentes dans les préoccupations de l'auteur...L'espoir dans la médecine du futur...on guéri de tout, grâce à des "rayons", Curie n'est pas loin....Le retour " à la terre" déjà présent alors que les campagnes commence juste à se vider...Le progrès source de tous les maux modernes...un retour au patriarcat des temps bibliques, alors que la femme commence seulement à s'émanciper....
Les voitures volantes et la nourriture en pilules...que me promettaient ma grand mère pour l'an 2000, était donc déjà une aspiration des années 40, le must du progrès alors pour elle...
Un sourire.... la standardiste indispensable alliée du téléphone, impensable de s'en dispenser...par contre les noirs ont des lèvres épaisses et le nez plat, mais ils peuvent avoir les yeux qui brillent d'intelligence...ouf
Enfin outre la fiction, Ravage nous restitue les craintes, les aprioris, les espoirs, les envies de nos grands parents, qui parfois nous font sourire, et aussi grincer des dents....Mais que diront de nous nos petits enfants dans 70 ans, après avoir lu les romans de SF actuels....s'ils lisent encore...!
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Ecrit en 1942, on peut voir le cheminement de la pensée de l'auteur qui, avec les données qui sont les siennes à cette époque, se plonge dans le futur et l'imagine. Si le monde qu'il a imaginé n'est pas techniquement comme il sera probablement en 2052, on en sera loin par certains côtés, on peut quand même souligner l'effort de penser le monde technologiquement au point, ayant débarrassé des hommes, pas tous, les tâches les plus pénibles. Tout est robotisé, on dirait aujourd'hui connecté, et voilà le drame du monde moderne qui survient, non pas à cause du réchauffement climatique dont il n'est fait aucune allusion, mais à cause d'une panne d'électricité! D'un seul coup plus rien ne marche, pire, toute la société qui était basée sur la fée électricité s'écroule. On pourrait se projeter avec ce scénario pour l'informatique, non pas que l'électricité vienne à manquer, encore que, mais que les ordinateurs cessent de fonctionner, peut être plus par absence de composants rares pour continuer à en fabriquer d'ailleurs. Voilà l'homme obligé de réinventer la vie, la solidarité le travail dans l'effort de de bannir à tout jamais ces merveilleuses machines capables de nous remplacer...c'est bien là tout le message de ce livre, notre technologie, notre modernité qui en ressort n'est-elle pas en train de couper l'homme de l'homme? de plus en plus dépendant d'internet, ne va-t-il pas se retrouver le bec dans l'eau si l'énergie pour faire fonctionner toutes ces machines vient à manquer ou si pire,, les matériaux pour les fabriquer n'existent plus! a méditer...
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Barjavel est un auteur que j'ai beaucoup aimé à l'âge du collège, puis de moins en moins. Avant d'aborder des relectures de romans dont je n'ai guère plus en mémoire que leurs titres et leurs couvertures, j'ai préféré lire un roman très connu mais que je n'avais pas lu.
Le résultat n'est pas très probant.
D'abord, le style est très quelconque sans être désagréable.
Points faibles de ce roman :
* la quatrième et dernière partie est moins bonne que la précédente qui elle-même est moins bonne que la deuxième, elle-même un peu moins bonne que la première partie (heureusement les deux dernières parties sont très courtes, mais ça laisse un ressenti final désagréable)
* le livre a été écrit pendant l'Occupation, et publié en 1943. Il est difficile de distinguer ce qui relève de l'influence de l'idéologie ambiante (et/ou des concessions pour passer la censure) de ce qui relève totalement des idées personnelles de l'auteur.
La société post-apocalyptique dépeinte est plutôt autocratique, avec un culte du chef bien de l'époque.
* Sans doute pour les mêmes raisons, la vision des femmes dans ce roman est très datée. François est, dès la première partie, un homme qui a une vision patriarcale de la place de la femme dans la société. Et ça ne s'arrange pas au fil du roman ! Pire, la polygamie est justifié dans le monde post-apocalyptique par la surabondance des femmes par rapport aux hommes. Alors que pourtant dans ce roman les proportions entre personnages féminins et masculins sont inverses. Et que dans la petite troupe de survivants qui quittent Paris, non seulement il y a très peu de femmes, mais en plus elles survivent plus facilement que les hommes qui tombent finalement comme des mouches.
* Dans le même ordre d'idée, il y a des relents fort désagréables de racisme. En particulier dans une scène de la première partie. C'est très contradictoire : l'Amérique du Nord a expulsé tous les noirs en Amérique du Sud. Les noirs sont présentés comme des sauvages qui festoient avec des danses tribales, et en même temps, ils ont tellement développé leurs industries qu'ils envoient des missiles pour attaquer le Nord. C'est cependant très secondaire dans l'intrigue puisque très vite Paris se trouve coupée du monde. Je relèverai plutôt qu'à côté de cet épisode odieusement raciste, il n'y a pas l'ombre d'antisémitisme dans ce roman. Qu'en penser ?
* La chute en fait, toute caricaturale qu'elle soit, ne me paraît pas claire. En fait tout le problème est dans l'interprétation. Pour la première partie, pas de problème, c'est de la dystopie, avec un humour féroce qui vise la France de l'époque, et une anticipation intéressante. La deuxième partie est clairement post-apocalyptique. Mais quid des deux dernières parties, Barjavel a-t-il vraiment voulu nous peindre une société idéale, utopique ? Je ne trouve aucun exemple de roman post-apocalyptique qui finisse ainsi. En général, il me semble que les fins sont ouvertes ou manifestement ambivalentes. En tout cas son monde «utopique» a tout d'une dystopie, pire, en germe, que le monde dystopique du début, jusqu'à la destruction des livres comme dans Fahrenheit 451 (roman pas encore écrit, mais les autodafés étaient bien dans l'air du temps). Comment était-ce perçu par le lecteur de l'époque ?
Et les points forts . Est-ce qu'il y en a ? Et bien oui !
* La peinture de la société future est intéressante : un monde architectural qui nous paraît encore futuriste sur bien des points, mais une vision de la société des médias très prémonitoire, alors qu'à l'époque, si la télévision existe, elle a encore du chemin à faire (moins d'une heure d'émission par jour, et pour très peu de public). La vision d'une société où le « plastec » remplace quasiment tous les matériaux est assez visionnaire aussi. Idem pour la description des rubans d'automobiles entre les villes. La satire sonne souvent assez juste pour maintenant.
* La catastrophe qui fait régresser les hommes n'est pas explicitée, elle est brutale, par perte totale de toute énergie électrique. Mais, en plus, il est évident que l'humanité était, au moment où cet événement arrive, en train de vivre une période de réchauffement climatique dû aux activités humaines.
Je ne trouve pas d'autre point positif, si ce n'est que c'est une curiosité fort intéressante dans la Science-Fiction française, quasiment hors influence de la Science-Fiction américaine.
Et je ne sais toujours pas si je vais relire Les chemins de Katmandou et La nuit des temps. J'ai peur de ne pas aimer du tout.
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1ère critique (*****)
1943. Il m'a bien fallu relire plusieurs fois la date de parution pour croire que ce livre a été écrit en 1943. Barjavel imagine une ville du futur, en 2040, mais elle ressemble tant à nos villes actuelles! Certes, les voitures volent, on peut aller en Ecosse en cinq minutes, il y a du plastec partout mais il y a aussi des intérieurs pas si éloignés des nôtres, un téléphone proche de notre internet actuel et un monde qui ressemble en beaucoup de points à celui du vingt-et-unième siècle. J'ai été vraiment impressionné, voire bluffé par cet aspect visionnaire du roman, surtout que la ville est bien décrite, par petite touches.
Il y a aussi l'histoire qui m'a beaucoup plu, et là on ne regarde pas vers le futur, mais on assiste à une réécriture de la Bible: la punition de Sodome et Gomorhe, le déluge, la traversée de Désert avec François en Moïse, le couple originel en François et Blanche, et j'en passe. Tous les évènements font référence à un passage du livre originel.
Enfin il y a l'écriture, magnifique, avec des descriptions structurées et splendides, une tension dramatique intense dans les passages de danger, qui font dévorer le roman et un recours au présent de narration bien choisi pour accentuer cette plongée au coeur du texte.
Un vrai bon roman, qui m'a vraiment bluffé par sa modernité, j'y ai retrouvé tous les films catastrophes actuels de fin du monde, Hollywood n'a rien inventé.

2eme critique (*)
1943. Ah, je comprends mieux: "Maréchal, nous voilà, devant toi le sauveur de la France..." J'ai, pendant ma lecture, été à la fois ravi par l'histoire et énervé par le personnage de François, dans sa relation avec Blanche, mais la quatrième partie m'a carrément fait bondir! Et j'ai compris: ce bon Français, heu, non, François, qui tire sa belle des griffes des artistes mielleux qui ruinent la France, pour la ramener à la bonne terre de Provence, où les paysans font vivre de vraie valeurs, loin de ce modernisme qui a ruiné la France. Et je ne parle pas du rôle des femmes, des livres brulés pour ne pas se rappeler le passé et de l'absence de démocratie... L'amour était niais, la nouvelle société limite totalitaire! A moins que Barjavel l'ai fait sciemment, pour se moquer, faire réagir, que ce soit ironique? Dans ce cas là je suis tombé dans le panneau, mais un panneau qui a gâché ma lecture de ce livre admirable...
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