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EAN : 9782070144129
144 pages
Gallimard (02/01/2014)
3.11/5   56 notes
Résumé :
«Témoins vigilants, observateurs attentifs, il arrive parfois que les romanciers se voient confier des vies pour les raconter dans leurs livres. Ils font alors fonction d'écrivain public. C'est ce qui m'est arrivé il y a deux ans lorsqu'un ami, qui avait été opéré de la prostate, m'a demandé d'écrire l'histoire de son ablation. Je l'ai écouté pendant des heures. Je l'ai accompagné dans ses pérégrinations hospitalières. Je suis devenu ami avec le professeur d'urologi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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L'Ablation, est un récit unique en son genre, à deux mains, celles de Tahar Ben Jelloun, mais à deux têtes, puisque le romancier se transforme en écrivain public, ou plutôt en écrivain amical, permettant à un de ses proches à qui il a fallu procéder à l'ablation de la prostate, de tout dire, sans fards, sur les conséquences d'une opération qui bouleverse la vie de ceux qui doivent l'endurer, et qui bouleverse au moins autant, en 130 pages à peine, la conception que l'on peut avoir de la vie avec une sexualité perturbée, voire anéantie.

Car voilà, hommes et femmes qui lirez ce récit, vous comprendrez dès la première phrase, le drame de tout homme attaqué par le cancer de la prostate : « Depuis que je ne baise plus… » C'est dit : il y a très peu de chances de ne pas rester impuissant après l'ablation. Outre la honte première de l'incontinence qui, durant les premiers mois suivants, trempe l'homme dans la gêne de sa pisse dont il ne s'aperçoit qu'il est trop tard que lorsqu'elle a mouillé son pantalon, c'est d'impuissance que l'on parle.

« Voilà, je ne bande plus. Ma verge est morte. (…) Je n'ai plus de sperme. Pas de liquide séminal. (…) le sang qui gonfle le pénis ne passe plus. » Puis, plus loin, un soupir, un cri, un sanglot d'impuissance : « Je ne suis plus un homme ». A la place de son sexe, il n'y a « qu'un trou béant. La déprime commence par ce constat. » Comment font donc les abstinents ? Ils ont la volonté de leur impuissance, ils n'y sont pas contraints par une défaillance technique, une ablation irréversible.

Le « cerveau n'est pas en cause » ; pourtant, avoir un sexualité sans sexe, cela ne peut se produire que grâce au cerveau. Il y a beaucoup de pensées puissantes dans ce récit, fondée sur une certitude énoncée ainsi : « Nous sommes le temps. » Pourtant, l'homme devient impatient, il peut souhaiter mourir, ayant subi l'ablation de sa prostate, mais surtout de la sexualité qui fut la sienne, longtemps, avant l'opération. C'est donc bien au cerveau, organe compliqué de notre être, qui a sa vie propre, savez-vous, qu'il faut confier la reconquête de sa puissance.

Parce que l'abstinent est souvent religieux, l'ami de Tahar Ben Jelloun rencontre un charlatan indien qui déclare, en transe : « Devil Inside ! » C'en est trop, l'amie qui a conduit l'impuissant à l'imposteur subit une ablation elle aussi : celle du carnet d'adresse. Dommage, il ne lui restait que peu d'amis ; les autres : « C'est plus fort qu'eux. Ils projettent leur propre angoisse de la maladie et de la mort. Il faut éviter qu'ils le sachent. Tu pourras mettre dans la confidence une ou deux personnes de confiance, pas plus. » Demandez à un malade de combien d'amis son état a généré une ablation : l'abandon est plus rapide que les métastases.

Ce récit s'adresse à tout homme, à toute femme, pas seulement touché directement ou indirectement par le cancer de la prostate. Il va bien au-delà. Il voit bien plus loin. C'est un livre sur le réapprentissage de la sexualité lorsqu'un événement l'a perturbée. C'est pourquoi, paradoxalement, il y a un grand absent parmi tous les spécialistes rencontrés par l'ami de Tahar Ben Jelloun : le sexologue. En effet, si notre cerveau a une vie propre, sur laquelle il serait vain qu'un être humain puisse penser avoir la puissance de la maîtriser, n'est-ce pas avec ce spécialiste de l'introspection dans les méandres cérébraux de notre sexualité, que l'on peut trouver la réponse à : « Vivre sans bander ? Sans baiser ? » C'est la proposition que l'on pourrait faire à l'ami du romancier, s'il est encore temps. « le temps sera mon ami », dit-il ; oui, mais pourquoi cette alternance soudaine, inquiétante, entre les temps du futur et du conditionnel ? Il y a plusieurs manières de rencontrer le temps. Gageons qu'il ne s'agisse pas de seulement l'arrêter.
Lien : http://tmblr.co/Z4Dxcn1ZfFxn3
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Avec crudité, lucidité, l'auteur raconte la maladie, la perte de libido, l'incontinence, la douleur, la peur, l'angoisse et l'espoir. Pour témoigner et sensibiliser sur le cancer de la prostate. Une lecture à recommander.
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La vieillesse et la maladie comme une nécessité d'abandonner de bonnes "vieilles" habitudes... Ce que l'on pourrait reprocher à l'auteur - mais il prétend devoir faire office de franchise vis-à-vis de l'histoire réelle qu'on lui demande de rapporter - serait de reprendre ce topos contemporain selon lequel l'unique issue pour l'individu qui vieillit serait le refus du "handicap". Mais cette thèse n'est possible que pour des individus seuls et inconscients de mener une existence, qui est pourtant par définition finie, dans un monde où les "handicaps" sont omniprésents et ne restent inaperçus que par refus exclusif de les voir.

Ce que révèle le texte n'est pas tant un drame personnel qu'un drame sociétal d'une époque imbibée de naturalisme, d'ultraégocentrisme et de rapport précritique au monde qui repousse au moment de la préscénessence le passage de l'état de l'enfance à la conscience adulte. Le drame étant que l'âge adulte conscient est une construction qui peut le cas échéant mener à la constitution d'une société cohésive, tandis que le passage à la conscience à l'âge préscénessent est la prise de conscience que tout est trop tard, y compris votre maintien dans le monde. Double désillusion où la fin de l'être devient la fin du monde...
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Dans L'ablation, Tahar Ben Jelloun annonce jouer l'écrivain public pour un ami mais c'est bien un homme conscient du problème qui parle.
Le cancer de la prostate ( comme le cancer du sein pour la femme), arrivé à un certain terme, se traite par la soustraction de l'organe malade. Certains patients, inquiets des conséquences sur leur vie intime préfèrent " la vie même brève plutôt que l'ablation."
Ce chercheur en mathématiques, après l'angoisse des différents examens, opte pour l'ablation de la prostate sur les conseils de son ami médecin. C'est avec beaucoup de naturel, sans aucun tabou que nous vivons ces moments difficiles (examens, opération, suites opératoires) pour tout être humain.
Chaque étape est humiliante, dégradante même si les soignants sont d'un grand naturel. La dépression post opératoire est inévitable et même si le malade évite le mot "cancer" auprès de ses amis, l'isolement finit par avoir lieu.
"Même quand elle ne s'affiche pas, la maladie isole, impose la solitude et le silence."
Pour cet homme " qui a passé sa vie à courir les femmes", ( on retrouve notre Don Juan de L'amour conjugal) ne plus avoir de sexualité est sans aucun doute le plus difficile à assumer.
Est-ce la raison pour laquelle les souvenirs de femmes sont si présents dans les deux derniers livres de l'auteur ?
" Comment apprécier un Renoir si ta vie sexuelle est un désert." J'ose espérer que c'est encore possible.
La cécité de l'écrivain Jorge Luis Borgès ou la surdité de Luis Buñuel ne sont-elles pas plus affligeantes?
Tel Philip Roth qui accepte mal la vieillesse et la déchéance des corps dans Exit le fantôme, les écrivains n'hésitent pas à aborder ces thèmes qui nous concernent ou concerneront tous, sans aucun tabou.
Et c'est une bonne chose car dans un monde où la publicité affiche des corps sains, jeunes (même pour les produits concernant les personnes âgées), la déchéance des corps, l'humiliation de la perte de fonctions élémentaires sont souvent inévitables.
Le récit est une vision assez exhaustive des différentes étapes de la maladie, du dépistage aux conséquences. Je me serais bien passée des détails de la sexualité du malade mais il était sûrement important de montrer toute l'importance qu'il y portait.
Heureusement, l'auteur a cet altruisme de penser aussi aux femmes atteintes du cancer du sein ou aux enfants malades croisés à l'Institut Curie.
Un essai, qui, même si il n'apprend pas des choses essentielles, est un témoignage nécessaire pour exorciser ce tabou de la maladie et de la senescence.
Lien : http://surlaroutedejostein.w..
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Cru, sincère, mais assez creux

La cinquantaine se profilant à l'horizon, j'ai eu la curiosité morbide de découvrir à travers ce roman toutes les horreurs associées à l'ablation de la prostate... Histoire romancée mais très crue d'un homme que je qualifierais plutôt de sex-addict, et qui se retrouve du jour au lendemain impuissant à cause de son opération. Impuissant et incontinent. Aller-retours sur une vie avant et après l'opération, en passant par la dépression, et finalement par une sorte d'acceptation et de renoncement à la libido. Un livre dont je suis largement passé à côté tellement le narrateur m'est resté curieusement étranger, tout simplement parce qu'il m'a laissé l'impression d'un jouisseur sans aucune profondeur, ce qu'il n'est peut être pas le cas, d'ailleurs. Comme quoi, être dans la tête de quelqu'un n'est pas forcément le connaître...
A travers l'obsession, il manque une foule de détails qui pourraient rendre ce personnage attachant. Se voyant lui même par le miroir grossissant de sa maladie et de son obsession sexuelle, il reste froid et distant alors que l'on devine, ne serait-ce que par les amitiés sincères qu'il semble entretenir, qu'il y a plus en lui que ce qu'il veut bien en décrire.
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critiques presse (3)
LaPresse
08 avril 2014
Tahar Ben Jelloun a choisi de tout dire dans ce récit qu'un ami lui aurait demandé d'écrire après une ablation de la prostate. L'auteur y ajoute sa propre expérience, même s'il a opté pour la curiethérapie afin de vaincre une tumeur semblable.
Lire la critique sur le site : LaPresse
LaLibreBelgique
21 janvier 2014
Tout n’est pas dramatique dans ce récit qui souligne que l’obscurantisme ne sert jamais à rien et qu’il vaut mieux devancer la maladie et ses conséquences que les subir.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Lexpress
13 janvier 2014
Le narrateur ne se paie pas de mots. Tout est cru, lucide, terrible, saisissant, dans ce récit de l'ablation de la prostate et de ses conséquences sur le corps et l'esprit.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
2. Le tournant
Cinq ans après la mort de ma femme, ma vie a pris un tournant. Mon corps soudain a changé. Son fonctionnement, son rythme, sa respiration. La modification s'est opérée de l'intérieur […] Voilà : je ne bande plus. Ma verge est morte, réduite à une vague présence sans vie, sans chaleur, un truc qui pendouille […]
3. La décision
ABLATION, n. f. - action d'enlever entièrement ou partiellement un organe […] Cancer... le mot est à peine prononcé. On vous parle de tumeur... et pour soi on fait un jeu de mots : tu meurs […] « On retire la prostate ; on n'enlève rien d'autre, rassurez-vous. » J'avale les informations et je ne dis rien. Discipliné et surtout confiant [...]
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J'ai un don maintenant : je perce, je dévoile, je découvre et je comprends ce qui se cache derrière les apparences que les femmes exposent par peur, par timidité ou par hypocrisie.
Mon instinct me mène vers vous, ô femmes que j'aime et que j'attends avec patience, impatience, avec joie, folie, obsession. Chaque rencontre avec vous est un feu d'artifice qui m'aveugle, me donne ivresse et légèreté. Je vole, je chante (mal mais je m'améliore), je ris, je danse, je cours et je reviens vers vous les bras ouverts. Champagne dans les coupes et dans l'air, dans la musique et dans les fleurs. Tout est champagne, tout est lumière. Tout pétille à la moindre étincelle. Plus besoin de tomber dans un sommeil profond pour rêver. Il me suffit de tendre la main vers vous. Les draps en soie ne sont plus nécessaires. L'amour n'a pas besoin de décor. Ou alors un décor grandiose comme ceux qu'Alexandre Trauner fabriquait pour des films de légende.
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Se supprimer par que le "puissant" a changé de statut, ça existe. On s'enfonce dans une déprime dont l'issue est fatale. Une question de dignité, d'amour-propre, d'orgueil. Le mot "impuissant" est violent, fort, dramatique.
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Vieillir, ce n'est pas uniquement prendre de l'âge, mais c'est surtout intérioriser le fait que le temps de la défaite est arrivé.
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Quand un homme est abîmé, on l'écarte. Nous sommes dans la civilisation des valeurs marchandes et rentables : un homme qui a dépassé la cinquantaine peut se faire du souci pour son emploi.
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