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Une biographie de plus à son arc, elle qui s'est fait une spécialité de cet exercice dans lequel elle excelle. Pour s'en convaincre il suffit de se reporter aux excellents ouvrages consacrés entre autres à Stefan Zweig, Romain Gary, Clara et André Malraux, Gala, et à travers elle Paul Eluard et Dali ...... par exemple.

Ici, elle met en parallèle les vies de Joseph Kessel et Maurice Druon mais, plus que sur leurs ressemblances, - ils ont en commun la passion d'écrire, ne l'oublions pas -, Dominique Bona met l'accent sur les profondes différences qui les séparent, mais qui n'empêchent pas la complicité et l'immense tendresse qu'éprouvent l'un pour l'autre l'oncle et le neveu, neveu qui se laissera guider par cet oncle qu'il admire avant de prendre son envol.

Mais cet ouvrage "Les Partisans" met d'abord en avant l'élan patriotique qui les a conduits tous deux en Résistance, dès 1941, en compagnie de Germaine Sablon, jusqu'à rejoindre Londres courant 1942 où ils mettront leurs talents respectifs au service du Général de Gaulle et auront de conserve composé "le chant des partisans" hymne emblématique de la Résistance, dont Germaine Sablon sera la première interprète.
La vie trépidante et dangereuse à Londres donne lieu aux plus belles pages de cet ouvrage, Dominique Bona, d'une plume inspirée, contant avec verve les péripéties de chacun des deux compères, mais surtout évoquant la figure lumineuse de Germaine Sablon au courage et à la détermination sans faille.
Cette femme énergique va s'investir tout d'abord dans des tournées de spectacles destinées aux troupes, puis désireuse de s'impliquer plus directement dans l'effort de guerre, elle s'engage dans une unité médicale ambulatoire, où de la frontière tunisienne jusqu'à la Bourgogne et la Franche-Comté, en passant par l'Italie, elle va se mettre avec ardeur au service des médecins et infirmières dans les ambulances des zones de combat, exécutant sans rechigner toutes les tâches qui lui seront confiées.

La parenthèse de la guerre refermée, Dominique Bona va suivre les trajectoires si différentes de Maurice Druon et Joseph Kessel dues à leur vision profondément opposées de la vie.
Jef, le baroudeur risque-tout, généreux, excessif et angoissé, cherchant la confrontation violente avec les confins et les paysages bruts, ne tenant pas en place, se devant d'être partout et se sentant partout à l'aise, aimant le contact et attirant l'amitié, ce que l'auteur montre constamment avec bonheur.
Druon, quelque peu compassé et grandiloquent, coulé dès l'enfance dans un univers stable et bourgeois grâce à l'influence de son beau-père, féru d'Antiquité, se complaisant dans l'harmonie classique, aimant le luxe et les apparences et séduit par l'aristocratie.

Kessel a empoigné l'Afghanistan à bras le corps, et en a tiré son chef d'oeuvre "les cavaliers" alors que Druon, quant à lui, s'est contenté de le rêver, en contant les tribulations d'Alexandre le Grand !

Mesure chez l'un, Druon bien sûr, démesure pour l'autre, capable d'excès parfois très malvenus, comme de tout casser et de croquer du verre par exemple, après avoir trop bu !

Leur oeuvre respective leur ayant grand ouvert les portes De l'Académie Française, Jef a enfilé avec désinvolture sa défroque d'académicien, alors que Druon s'est coulé avec aisance et bonheur dans son habit rutilant. Voilà ce qui met particulièrement en évidence les profondes différences existant entre les deux hommes.

Pour passionnant qu'il soit, l'ouvrage souffre cependant d'un léger déséquilibre, Dominique Bona n'ayant pas su ou pu, à mon sens, relier avec aisance, d'un chapitre à l'autre, les fils narratifs, hors la période de la guerre bien sur, où Druon et Kessel ont ensemble occupé le terrain.
Ce qui ne nuit pas à l'intérêt de l'ouvrage cependant mais lui retire quelque peu de sa force et de sa vitalité.
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Joseph Kessel et Maurice Druon : deux écrivains de grand talent.

Joseph Kessel, né en 1898, a été journaliste, correspondant de guerre, écrivain prolifique et résistant, connu par plusieurs de ses écrits, en particulier L'armée des ombres, transposé au cinéma en 1969 par Jean-Pierre Melville.

Maurice Druon, né en 1918, est fils de Lazare Kessel, frère de Jacques Kessel lors d'une relation avec sa mère, Léonilla Samuel, encore mariée. Lazare n'a jamais reconnu la paternité et s'est suicidé peu de temps après (2 ans). Sa mère, s'est marié ensuite avec René Druon, qui l'a adopté. Lui aussi, résistant et écrivain prolifique est surtout connu par la saga Les rois maudits, portée à la télé dans les années 2000.

Tous les deux sont des membres De l'Académie Française : Joseph Kessel en 1962 et Dominique Druon en 1966.

La première moitié du livre est consacrée à l'époque de la deuxième guerre, surtout à la période où ils ont vécu en Angleterre au service de De Gaulle. Maurice Druon était dans la vingtaine et cette époque a été importante dans la formation intellectuelle de Maurice Druon. C'est dans cette période qu'ils ont créé, ensemble, le Chant des Partisans, le hymne de la Résistance. La deuxième partie du livre est consacrée plutôt à leurs carrières après la guerre.

Les deux sont restés attachés l'un à l'autre pendant toute leur vie malgré leurs différences : Kessel était un journaliste baroudeur, intéressé par la couverture des conflits, alors que Maurice Druon était plutôt sédentaire (par rapport à Kessel). Il s'est intéressé à la politique et est même devenu Député européen et Ministre de la Culture sous Pompidou. Tous les deux étaient des bons vivants, chacun à sa façon.

C'est une très bonne idée écrire cette biographie croisée. L'auteure s'est inspirée de leurs mémoires et biographies mais pas que. C'est un travail minutieux, plein de détails et anecdotes intéressants qui illustrent très bien qui étaient ces deux la et surtout la relation entre eux, ce qui justifie amplement le sujet du livre. Une lecture agréable et prenante.
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N°1754 – Juin 2023

Les partisans – Dominique Bona – Gallimard
Ce titre n'est pas pris au hasard puisque Joseph Kessel et Maurice Druon sont les deux auteurs du « Chant des partisans » dont la musique est due à Anna Marly, française d'origine russe. Il symbolise cette douloureuse période de l'histoire de notre pays dont il faut se souvenir parce que des gens sont morts pour que soyons libres et parlions le français. Ce sont aussi deux « hommes de Lettres », à la fois semblables et différents, oncle et neveu par filiation naturelle et que vingt ans séparent, ils sont unis par cet amour de la France, par leur envie de se battre pour elle et par cette irrésistible envie d'écrire, de porter témoignage. Ils seront tous les deux académiciens. Kessel, « Jef », a créé avec son neveu, français malgré un état-civil quelque peu bousculé, des liens quasi-filiaux en accompagnant premiers essais littéraires. Au cours de ce voyage pyrénéen à destination de Londres, ils sont accompagnés d'une femme, Germaine Sablon, une des nombreuses compagnes de Kessel, célèbre chanteuse de variétés qui sera une courageuse ambulancière de la « France libre », accompagnant des troupes alliées depuis l'Italie. Elle sera aussi, plus tard, l'interprète du «Chant ». Les quelques détails de sa vie présents dans cet ouvrage sont passionnants et mériteraient un développement plus grand sous la forme d'une biographie.
Ainsi commence cette évocation. Kessel, fils d'émigré juif d'origine russe, fait partie de ces étrangers qui ont choisi de défendre la France, pays de la liberté et des Lumières, contre la barbarie nazie. Il redeviendra aviateur, officier dans la RAF sous les couleurs de la France, grand reporter à la fin des combats puis de romancier et scénariste. Druon se transformera en correspondant de guerre puis à la Libération en homme de plume. Leur complicité littéraire est fructueuse, leur amour de la vie intact, leur regard sur les femmes est différent comme celui qu'ils portent sur la religion, Maurice est catholique, sur les origines sociales et ethniques, sur la famille, sur le style de vie, sur les fréquentations, mais chacun garde sa personnalité, son style d'écrivain. le prix Goncourt que son oncle n‘aura jamais vient consacrer le talent d'un Druon trentenaire, plus bourgeois voire aristocrate qui plus tard sera le ministre jupitérien des Affaires culturelles de Pompidou puis député et Kessel reste lui un auteur à succès. Il est grand reporter, conteur, aventurier, globe-trotter, amateur de whisky, à lui les paysages bruts et les conflits du monde, à son neveu l'harmonie de l'Europe, la tempérance contre l'irrationnel et l'imprévu, l'Afghanistan contre la Grèce, le témoignage contre l'épopée. Les deux hommes poursuivent leur chemin dans un respect réciproque, donnant ensemble à leurs lecteurs l'émotion et le plaisir de partager leur talent. L'auteure se livre a une analyse détaillée et pertinente de leur deux modes d'écriture, un véritable travail de critique littéraire. Elle est aussi attentive à des détails anodins mais révélateurs à propos de leur entourage ; les mauvaises langues pourraient y voir quelques velléités de dénigrement mais ce n'est en réalité qu'une façon de remettre les choses à leur vraie place.
Deux personnalités différentes donc, deux parcours mais un seul amour du pays et de l'écriture, deux monuments de la littérature nés dans un période bouleversée de notre histoire. La Camarde les a emportés, « Jef » d'abord, d'un coup, puis Maurice.
J'ai toujours plaisir à lire Dominique Bona, depuis son roman « Argentina » jusqu'aux différentes biographies dont elle est l'auteure, non seulement à cause du style fort agréable à lire qui m'a toujours attiré, mais aussi de la précision et de la richesse de la documentation qui font de chacune d'elles un document exceptionnel de référence. Son travail ne m'a jamais laissé indifférent. Elle déroule la saga familiale de ces deux géants de la littérature qui ont traversé leur époque parfois mouvementée en y laissant leur marque. C'est l'apanage des êtres exceptionnels que de laisser ainsi une trace pour les mortels que nous sommes. Elle dissèque leurs similitudes, leurs différences, explique leurs prises de position au regard de leur personnalité, de leurs convictions. Cela a été non seulement un moment passionnant de lecture mai aussi l'occasion d'en savoir davantage sur ces deux écrivains majeurs.
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Pour le lecteur passionné par Kessel ou Druon cet ouvrage de Dominique Bona particulièrement documenté est une mine.
Personnellement, je l'ai trouvé beaucoup trop long dans la narration des biographies croisées de Joseph Kessel et de son neveu Maurice Druon ,fils naturel de Lazare, frère de Jef, Joseph Kessel.. Lazare se suicide sans écrire une seule pensée pour son fils Maurice.La mère de Maurice épouse Rene Druon, un cinquantenaire courtois, aisé qui adopte Maurice.
Kessel Croix de Guerre 14-18 , Croix de guerre 39-46 est un immigré russe, un Juif des confins de l'Oural , habité par un imaginaire de pogroms et de dibbouks.Druon quant à lui rejette le judaisme et un certain folklore russe.
L'univers de Druon est stable, bourgeois , il aime la dolce vita alors que son oncle est un baroudeur.
Une femme libre, artiste croise la route de Kessel, il s'agit de Germaine Sablon .
Les premières pages du texte nous décrivent les trois protagonistes en partance en 1940 de Lisbonne vers Londres pour rejoindre la France Libre.En Angleterre Kessel est un journaliste engagé au service de la Résistance, Druon intervient dans la célèbre émission « Les Français parlent aux Français ».
L'auteure retrace la vie sentimentale des trois personnages. Kessel est un séducteur. En 1941 il réside près de Nice avec les quatre femmes de sa vie à proximité. Les absences de Germaine Sablon l'intriguent. Elle fait partie du réseau d'Andre Girard, en lien avec les services d'espionnage britannique.
Maurice Druon forme un couple mal assorti avec Genevieve Gregh, de 14 ans son aînée.
L'oncle et le neveu rédigent « Le chant des partisans » dont la première chanteuse officielle est Germaine Sablon.
Le livre déroule la vie de reporter de Kessel après la guerre. Il voyage aux frais de France Soir , avec son épouse Michèle il fait un périple au Kenya qui sera sa source d'inspiration pour le Lion( 1958), il fait un film en Afghanistan sur une course traditionnelle de chevaux, il en tirera un roman, Les Cavaliers.
Druon publie Les grandes familles et Les rois maudits.
Kessel est élu à l'Academie française en 1962,son neveu en 1966…
Merci à Babelio et aux éditions Gallimard.
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Mon coeur s'est serré de rage lorsqu'en 2001, les talibans ont fait tomber les Bouddhas de Bâmiýam, érigés depuis près de deux siècles en Afghanistan, ce pays libre, fier, majestueux jusqu'à ce que la folie des hommes s'en empare.
Mon coeur s'est serré de larmes lorsqu'en 79 s'est éteint le lionKessel, qu'enfant, je voulais immortel.
J'ignorais jusqu'à aujourd'hui que les deux étaient si intimement mêlés. Et voilà que mon coeur se serre à nouveau.
Je ferme le livre de Dominique Bona avec lenteur, rechignant à quitter ces hommes et femmes ayant fait de leur vie un mythe dans le siècle le plus bouleversé de l'histoire.
Bien sûr, Jef, Joseph Kessel, gueule de boxeur et silhouette de baroudeur, conteur infatigable, bateleur de nuits enivrées, cet amoureux de l'humanité jusqu'au-boutiste qui aura écrits les pages les plus merveilleuses qu'il m'ait été donné de lire.
Et puis Maurice, le neveu du premier, mondain jusqu'à la caricature mais prosateur de génie, que j'ai toujours pensé fourvoyé en politique, mais racheté par ses élans courageux dans les rangs de la France libre comme dans ceux de la francophonie.
Enfin, Germaine, du clan Sablon, dont la bravoure découverte en ces lignes ressuscite l'émotion jamais lassée à l'écoute du chant des partisans, hymne de la France libre refusant la barbarie.
Composé à trois mains, ce chant de Liberté leur doit tout.
Dominique Bona, en racontant les vies tumultueuses de ces personnalités, ouvre grand les portes de destinées si gigantesques qu'on peine à les absorber. Pêle-mêle s'y entremêlent La Grande Histoire, la Littérature, les paysages de terres lointaines, des amitiés fraternelles, la judaïté... On y croise autant de héros que de dibbouks, ces mauvais génies de la tradition yiddish qui ensemençaient de mélancolie les coeurs les plus trempés. Et s'invite l'âme slave, dans toute sa tragédie, belle à force de pleurer au son de violons Tziganes, chevillée à Kessel comme à Romain Gary, dans l'ombre tutélaire et composite de Tolstoï et Dostoïevski...
Un livre à chérir pour se remémorer ces géants, peut-être en fredonnant tout bas "Ami, entends tu... Sifflez, compagnons, dans la nuit la Liberté nous écoute. "
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Trois figures de la scène littéraire et artistique de la seconde moitié du XXème siècle : Joseph Kessel, Maurice Druon son neveu et Germaine Sablon, la chanteuse célèbre, maîtresse de Kessel.
Un récit croisé qui me rappelle la vie de mes parents. Trois évadés de France qui rejoignent le général De Gaulle, les bisbilles avec le falot Giraud à Alger, la campagne d'Italie et la remontée de la division blindée jusqu'en Alsace …

Et puis, tous mes souvenirs devant la télévision que mes parents avaient achetée dès 1948 : les chansons du crooner Jean Sablon, frère de Germaine, les Compagnons de la Chanson, Suzy Solidor, Georges Guétary et sa manie de jouer au tennis en tenue d'Adam dans sa villa de Cannes …

Maurice Druon est le neveu de Joseph Kessel : c'est l'enfant jamais reconnu de son jeune frère Lazare qui s'est suicidé avant sa naissance. Ils ont vingt ans d'écart, et seront tous les deux élus à l'Académie française, aucun n'aura d'enfant.

Kessel est une force de la nature, un journaliste prolifique, courant au-delà de tous les dangers, travailleur acharné, amant polygame, buveur de choc … de lui je n'ai encore rien lu, mais j'ai adoré le film de Luis Buñuel tiré de son roman « Belle de jour », publié en 1928.

En revanche, j'ai dévoré l'essentiel de l'oeuvre de Maurice Druon : Les grandes familles, Les rois maudits (au moins deux fois), Alexandre le Grand, Tistou les pouces verts. Je me souviens de lui en tant que ministre de la Culture, j'ignorais tout de sa vie privée mouvementée.

Cette biographie à trois voix balaye l'ensemble de la vie politique de cette époque troublée : la Résistance, la guerre d'Algérie, la naissance d'Israël, les petites haines politiques des partis et la haine contre De Gaulle (déjà !), mai 68 (j'ai toujours dans ma bibliothèque l'ouvrage d'Arthur Conte, père de Dominique Bona), l'ambiance délétère où l'on trouvait affrontés deux camps : ceux qui avaient choisi à temps la France Libre, et les fidèles du Maréchal … de tous ces hommes politiques, je me souviens très précisément.

Cette triple biographie se lit comme un roman policier. La création du Chant des Partisans en sert de prétexte – mais on cite aussi la Complainte du partisan, composée par Anna Marly et dont le texte est dû à Emmanuel d'Astier – des musiques qui ont marqué ma jeunesse.

C'est le parcours de trois êtres exceptionnels, où les femmes – en particulier le courage de Germaine Sablon comme conductrice d'ambulance et aide infirmière sur les champs de bataille tout comme ma belle-mère adoptive Jacqueline Briot (elle aussi infirmière Croix-Rouge) dans l'armée de Lattre. Des héros de guerre que l'on a oublié …

Une conclusion s'impose : je vais lire quelques romans de Joseph Kessel, et relire pour la troisième fois la série des 7 épisodes des Rois Maudits, réédités en version compacte et intégrale !

Une dernière réflexion, qui m'est toute personnelle : essayons d'imaginer quelle pauvreté de culture - littéraire, musicale, cinématographique, picturale, philosophique, médicale, entrepreneuriale - nous subirions si la France n'avait pas accueilli, reconnu et intégré ces fugitifs devant la barbarie totalitaire ... celle des années 40 et d'aujourd'hui.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Dominique Bona, connue pour son talent de biographe, a eu l'idée de saisir un instant de l'histoire, à savoir la composition du Chant des Partisans (et peut-être plus encore le départ en Angleterre de Germaine Sablon, Kessel et Druon), pour dénouer les fils des ces trois destins, qui se sont entrecroisés, si proches durant un temps et pourtant si différents.
La rencontre de ces trois là ne doit pas grand chose au hasard, rien en tous cas pour Kessel et Druon, oncle et neveu. Et pourtant leur profond attachement les uns aux autres, celui d'une vie entre les deux écrivains, et des liens plus éphémères en ce qui concerne Germaine Sablon, qui a souffert de cet éloignement, est plus étonnant qu'il n'y parait, tant leur personnalités sont différentes.
Kessel et Druon sont, chacun à leur manière deux monstres de la littérature du vingtième siècle. Je préfère Kessel, plus altruiste et plus entier, dont l'oeuvre me parait plus originale. C'est un avis très personnel. La vie de Germaine Sablon est moins intellectuelle. En comparaison avec les deux autres, elle semble presque rangée... Et pourtant, cette chanteuse un peu oubliée fut une femme profondément libre dont la vie vaut le détour.
J'ai beaucoup apprécié la distance prise par Dominique Bona vis à vis de son sujet. Un vrai recul, qui lui donne de la neutralité, tout en conservant tendresse et bienveillance pour des personnes complexes dont elle a bien rendu compte de l'humanité. Il ressort de son livre un grand sentiment d'authenticité, pour des personnages hauts en couleurs. On dirait presque du Kessel, au moins dans la posture.
Seul bémol, je regrette que Dominique Bona n'est pas été plus disserte sur la vie de Kessel entre les deux guerres. En définitive, elle dresse principalement une chronique de la France depuis les années 40 jusqu'à la fin des années 70, à travers ce portrait croisés de trois personnalités que la célébrité et le succès ont imposés à un monde intellectuel dans lequel ils font figure, chacun à leur manière, de marginaux incontournables.
Merci à Babelio et aux Editions Gallimard pour l'envoi de ce remarquable ouvrage.

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Druon allumant la clope de Kessel. Dans ce geste, dans cette image, mille mots. Une fraternité, une camaraderie entre l'oncle et le neveu. Une époque aussi, flamboyante, à l'image de ces hommes d'un autre temps. Ils ont fumé, résisté, écrit, aimé, osé. Ils ont vécu pleinement, mille vies à eux deux.

Dominique Bona prend pour postulat leur départ pour Londres et l'aventure auprès de de Gaulle qui s'ensuit. Et l'écriture d'une page de l'histoire française qui se chante : le chant des partisans. Un texte fort qui se griffonne sur un coin de table.
On oublie souvent que, pour que le chant des partisans existe, il aura fallut deux femmes. Anna Marly qui leur a apporté cet air russe, la mélancolie, la gravité et l'énergie de vie de cette musique. Et Germaine Sablon. Star de la chanson, elle a créé au sens music-hall du terme ce titre, dans une interprétation vive et rageuse. Qui s'effacera au fil du temps face à celle de Montand, plus lourde, plus lente.

Ce que j'ai aimé dans ce livre, c'est justement la part belle laissée aux femmes. Parce que ces deux hommes vivent entourés de femmes.
Germaine Sablon est emblématique, je la découvre en résistante. L'amante de Kessel sera la première à quitter la troupe londonienne pour aider et servir sa patrie. Ce qu'il ne lui pardonnera jamais vraiment. L'amoureuse a décidé de sa vie et a eu l'audace de faire de l'ombre au duo léonin.

L'amitié entre Kessel et Druon est indéfectible. Liés par le sang, ils le sont aussi et surtout par la littérature. Si leurs oeuvres ne se ressemblent pas, elles se repondent malgré tout. Et c'est à l'Académie française qu'ils seront finalement réunis, l'un séchant allègrement les séances du dictionnaire quand l'autre les chérit. Une question de signes astrologiques, la discordance du Verseau et du Taureau, comme il est noté en titre de chapitre.

Tour à tour roman d'amour, biographie littéraire, essai sur la résistance, chronique d'un monde perdu, Dominique Bona réussit une prouesse. Celle de nous plonger dans ce livre que l'on a toutes les peines du monde à quitter. Et l'envie de lire Kessel, Druon... et de laisser une place particulière dans mon répertoire à Germaine Sablon...
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La première moitié (250 pages) est consacrée à la période de la Seconde Guerre mondiale plus spécifiquement, avec les réminiscences du passé idoines permettant de comprendre les personnalités des non pas deux mais trois personnalités que Dominique Bona campe dans cet ouvrage. En plus de Joseph Kessel et de son neveu Maurice Druon, l'autrice fait une large place à Germaine Sablon, célèbre chanteuse de l'époque, compagne officieuse / maitresse officielle (une parmi d'autres) de Kessel, car le destin les lie fortement dans cette épreuve, même si leurs routes se sépareront pendant et à l'issue de la guerre.
La deuxième moitié de l'ouvrage présente la vie de chacun après la guerre.

Malgré la multiplication des présentations de personnalités plus ou moins connues qui émaillent le récit parfois à l'excès, surtout dans la première moitié, la construction globale de l'ouvrage est plutôt harmonieuse et facile à suivre.
Chaque chapitre traite d'une période de la vie de ses personnalités hors-norme, parfois ensemble, parfois successivement, ou les compare sur des thématiques, notamment pour évaluer les goûts et penchants de l'oncle et du neveu.

J'ai trouvé l'écriture très fluide et me suis laissée porter dans ces pérégrinations temporelles et spatiales avec délice.
Dominique Bona présente très clairement et sans fard le caractère, le parcours, l'oeuvre dans ces portraits au long cours : un Joseph Kessel flamboyant intrinsèquement humain et humaniste, un Maurice Druon fier et que j'ai trouvé quelque peu pédant, une Germaine Sablon maitresse de sa destinée quelque peu malmenée.
J'ai trouvé passionnant la description du parcours des trois protagonistes qui les a menés à la Résistance et à l'effort de guerre, leur investissement à leur manière selon leur possibilité, même si ce n'était pas toujours à la hauteur de leurs attentes (notamment pour Druon).
De façon plus générale, j'ai beaucoup aimé la peinture de la vie des résistants français à Londres. J'ai pris conscience à quel point la France d'après guerre a été baignée de l'héritage des actions et positions des uns et des autres dans cette guerre, à tous les niveaux, tant politique que social que personnel.
Il y a bien d'autres choses que j'ai trouvé intéressantes dans ce livre, beaucoup de choses qui m'ont surprise ou rendue curieuse, avec l'envie de découvrir davantage l'écriture de Kessel en particulier, reportages et romans.

Merci à Babelio, aux éditions Gallimard et à Dominique Bona pour cette belle fenêtre sur l'Histoire.
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Les deux auteurs, Joseph Kessel et Maurice Druon ont plus d'un point commun.
D'abord familial. Joseph Kessel est l'oncle de Maurice, ce que les noms ne disent pas puisque le neveu est né sous le nom de la mère qui s'est mariée par la suite à M.Druon.
Puis, un lien d'engagement politique. ils ont tous les deux été résistants de la première heure, et en Angleterre, on a utilisé leurs services pour des reportages et des discours à des fins d'encouragements. C'est ainsi qu'est né qu'ils ont écrit ensemble.
Enfin, un lien littéraire qui leur a fait écrire une oeuvre importante et formidable. Celle de kessel, la plus emblématique, fait la part belle aux aventuriers engagés, avançant avec courage mais aussi honneur et sensibilité pour toutes les rencontres. Celle de Maurice Druon, est tout aussi réussie avec le prix Goncourt pour un de ses premiers romans qui dépeint les moeurs des familles influentes du moment. Puis. une passion pour l'histoire l'amène à écrire la série grand succès en roman (pour lequel ils assume l'avoir écrit avec l'aide de documentalistes > et en série. télévision. Leurs relations avec les femmes seront aussi intenses que difficiles et ils n'auront pas d'enfant.
En plus, l'auteure s'intéresse à Germaine Sablon, un temps compagne de Kessel. Chanteuse, elle s'engage dans la résistance et rejoint la croix rouge .
Dominique Bona n'est pas seulement biographe mais elle est entrée intimement dans leurs vies et nous en explique tous les rouages, tout ceci avec une écriture sobre mais touchante
Je suis sortie de cette lecture très passionnée surtout par Kessel qui est une figure hors du commun
Gros coup de coeur









































temps compagne de Kessel,
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