En 1952, il avait voulu raviver l'actualité de
Zola avec un "
Zola par lui-même" dans la fameuse collection "Ecrivains de toujours".
Par un juste retour des choses, son compatriote gardois
Stéphane Bonnefoi relance, en un essai documenté et convaincant, notre connaissance du petit nîmois, fils du peuple, pauvre, très tôt orphelin, qui débuta comme ouvrier, fut un militant convaincu, et, alors qu'il n'avait que le certificat d'études, entrera à la prestigieuse NRF, épaulé par son ami nîmois
Jean Paulhan, obtiendra en 1934 l'Interallié pour son roman "Anny", et en 1942 le Goncourt pour "
Pareils à des enfants".
Oui, merci à Bonnefoi pour ce cheminement avec cet ami de
Paulhan, donc, mais aussi de Barbusse, d'
Henri Calet, de
Georges-Emmanuel Clancier. Merci d'avoir vaincu l'indifférence, pour ne pas dire l'hostilité, d'une fille dont le grenier débordait de précieux documents, mais qui ne lui pardonna pas de lui avoir très tardivement révélé que celui qui l'avait élevée,
Augustin Habaru, le rédacteur de Monde (la revue créée par Barbusse) n'était pas son père, mais seulement le mari de Snoes (en néerlandais "chérie"), l'amour passionné et douloureux de
Marc Bernard.
L'autre femme qu'il aima passionnément - au point de vouloir mourir avec elle après 31 ans de vie commune, et de n'y avoir renoncé que parce qu'elle le supplia de vivre pour continuer à écrire - fut Else, juive autrichienne, qui avait fui l'Anschluss. Avec elle il connaîtra l'errance, la peur, la pauvreté, mais aussi de lumineux moments à Majorque, lieu des racines paternelles de
Marc Bernard, et elle infléchira son inspiration vers le panthéisme de sa trilogie finale "
la Mort de la bien-aimée" (1972), "
Au -delà de l'absence"( 1976) et "Tout est bien ainsi" (1979).
Son époque fut celle de la littérature prolétarienne, et il en a été le fervent défenseur, après une phase surréaliste. Il chercha longtemps sa voie, connut des échecs, toucha à toutes les formes littéraires, théâtre, récits et nouvelles, essais journalisme, émissions de radios. Il était passionné de tauromachie, et aimait Nîmes, sa ville natale où il allait régulièrement se ressourcer. Il était voluptueusement effacé.
Oui, l'oeuvre de
Marc Bernard restera, lui qui, dans une série d'émissions intitulées "
Contre l'oubli" voulut rendre hommages aux écrivains oubliés, et on est heureux de partager ses luttes, ses amitiés et ses amours à travers cet essai, malgré quelque pesanteurs et longueurs, notamment sur les dissensions concernant la littérature prolétarienne ou les positions politiques.
Merci, vraiment, à Babelio et aux éditions le murmure.