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EAN : 9782246178538
224 pages
Grasset (27/10/2010)
3.93/5   15 notes
Résumé :
Contre l'oubli rassemble des reportages, des chroniques, parus pour la plupart dans Combat et Terre des hommes entre 1944 et 1948. La fin de la guerre, ses lendemains. Une époque en demi-teinte : le soleil de la victoire crève à peine le brouillard des chagrins. Une époque pour Calet, dont l'humanité, la mélancolie, la simplicité et l'humour acide triomphent ici dans l'évocation de Couillard défiguré par un milicien ou dans le compte rendu d'audience d'un tribunal a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Recueil posthume de chroniques journalistiques dont Henri Calet avait choisi le titre mais qu'il n'a eu ni le temps ni le loisir de revoir ou corriger avant sa mort survenue brutalement le 14 juillet 1956. Publiées à l'origine entre 1944 et 1948 dans divers journaux (Combat, Terre des Hommes, le Clou, France Soir ou Hommes et Monde etc.) et introduites par Pascal Pia*. S'il existe un style de l'auteur c'est bien celui que Pia reconnaît en priorité à Henri Calet dans la vie qu'il faudrait rechercher ici (un certain esprit doux-amer) tant il y transparaît. Lisons. Ce n'est pas exactement le vent de la paix encore moins celui de l'optimisme qui souffle sur ces chroniques en demi-teinte de l'immédiat après-guerre que l'auteur a voulu laisser à la mémoire. L'heure y est encore aux craintes (une dernière offensive allemande en décembre 1944) et aux privations ; on compte les portions, le lait manque et les radiateurs sont froids ; des enfants vagabonds dorment sur les marches du métro à Paris ; on se désespère de ne pas pouvoir encore trop espérer, on lit des lettres en attendant le retour des prisonniers, on écoute la radio ; on parle surtout beaucoup, à l'imparfait, de morts et d'amis disparus ; A noël 1944 a lieu La semaine nationale de l'absent (« Un grand bruit de souliers … » Combat, 18 décembre 1944). L'antisémitisme et la xénophobie perdurent, Combat se fait l'écho de lettres anonymes ignominieuses. Une condamnation par un conseil de guerre américain de plusieurs GI pour vol et trafic de cigarettes fait grand bruit par sa disproportion et mobilise le soutien des lecteurs du journal (« A propos de cette cigarette américaine » - Combat, 26 janvier 1945). le fantôme de Berlin bombardée surgit, Calet y a vécu quelques temps en 1932 ; la guerre a déménagé ses horreurs ainsi qu'il l'écrit. le 1er mai 1945 il est à la Bastille et le même mois il rend compte du retour des survivants des camps (« Hôtel Lutetia », mai 1945) alors que se profile une nouvelle apocalypse : la bombe atomique.

Rien de vraiment anodin – excepté peut-être une visite au musée Grévin ou au jardin d'acclimatation –, dans ce pêle-mêle où l'entrée en matière pourrait effaroucher une cervelle sensible : « Je vous amène Couillard... » (Combat, 13 octobre 1944). Voilà simplement pointée, avant son atmosphère, la vraie nature de la période : « Vous verrez Couillard (Emile), […] Il a maigri, ses cheveux sont blanchis. Et puis, on ne comprend pas bien quand il parle. Une balle lui a brisé la mâchoire. Il a comme un accent. Une autre balle lui a traversé le cou de part en part, près de la carotide. Une autre balle lui a crevé l'oeil droit… Cinq balles en tout dans la tête. Bien visé, Milicien ! » Au milieu des autres chroniques, Couillard reparaît parmi les vivants plusieurs fois, entre deux chirurgies et paré de toutes ses médailles, pour quelques visites à l'indéfectible ami journaliste. Pages courtes et très fortes, mots crus, de ceux qu'on retient. Couillard et Barnabé qui a perdu lui aussi une tranche de figure côté droit (« Héros en visite » - Terre des Hommes, 6 octobre 1945) ou, un peu plus loin, avec Caillet et Doublet, pas mieux lotis (« L'histoire de France à domicile » - Terre des Hommes, 15 décembre 1945)… le reportage en quatre chroniques à la prison de Fresnes est assez bouleversant et finit par donner sens et intention à un ensemble qui porte bien son titre. Calet relève les graffitis sur les murs de chaque cellule et recense quand il peut les noms et les adresses gravés des détenu(e)s. Il part ensuite sur leurs traces en petite et grande banlieue en quête des rescapés de la tragédie. Tout(e)s ont été torturé(e)s, fusillé(e)s, déporté(e)s, ou sont porté(e)s disparu(e)s. A l'exception de deux ou trois ("Les survivants de Fresnes" - France-Soir, février 1946 et "Ne les oublions pas encore" - Hommes et Monde, juin 1946). Si la quête semble vaine la lecture ne l'est pas et la fin du recueil est éclairée par un élan de solidarité en direction d'enfants errants auxquels Calet s'est attaché et qui ont pu être recueillis dans un foyer de Montreuil (« De bonnes nouvelles de Montreuil » - Combat, 23 septembre 1947).


* Pascal Pia dirigea Combat, d'abord journal clandestin, de 1943 à 1947.




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livre attachant à plusieurs titres : le rappel de ce que fut cette période, de la dureté de la prolongation de la guerre, du retour des prisonniers et des déportés, de la pauvreté s'installant sur l'Europe, du souvenir des résistants, de la richesse de certains, du désir de paix et de conditions moins dures, et puis de l'installation dans la peur atomique, du début désespérant de la guerre froide - attachant par le ton de Calet, un peu d'humour jaune sans méchanceté, un peu de rage rentrée sans trop de pathos, une conviction politique sous jacente, un refus de céder un pouce de son humanité, une attention aux gens
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un écrivain rare et un peu tomber dans l'oubli." ON se rappelle l'affaire. Rien de sensationnel. Un conseil de guerre américain siégeant à Paris, doit juger deux officiers et 182 soldats inculpés de vol de cigaretteset autres choses." contre l'oubli
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critiques presse (1)
LeFigaro
20 février 2012
En quelques lignes, Henri Calet réussit à brosser le portrait d'un homme ou d'une femme et sa psychologie profonde, à expliquer un contexte historique, à monter un décor…
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Sixième hiver sans feu, sixième hiver de privations de toutes sortes, et peut être pas le dernier. Nous nous lamentons un peu, et sans trop insister. À quoi bon ? Les explications qui nous sont fournies en haut lieu nous paraissent valables, en général. On nous démontre par des statistiques et des chiffres de catastrophe que nous sommes ruinés, que nous ne possédons plus rien ; nous le croyons. Le monde subit les conséquences d'une guerre au cours de laquelle il a été détruit le maximum de choses ; sans compter les hommes qui se remplacent plus aisément qu'une usine ou un barrage. On ajoute que cette misère, d'autres peuples le connaissent également. L'Europe entière est dans la misère. Nous sommes convaincus de tout cela et c'est pourquoi nous rouspétons à peine ; nous nous montrons compréhensifs. On souligne par ailleurs que nous vivrons dans la même gêne durant des années
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Mais treize ans ont passé, et une guerre ; j'y suis seul, presque vieux ; il fait froid et humide comme dans les cimetières ; je me perds entre ces ruines, ces cendres et ces murs écroulés ; la ville est morte, mes amis sont morts. Je me balade en compagnie de fantômes. […]
Avec celui de Liselotte, fantôme de dix-sept ans à peine. Elle ne voulait pas voir le danger, Liselotte, petite autruche qui refusait de rien écouter. Fantôme en chair fraîche et blonde pour un four crématoire. Je l'appelle : Liselotte ! Liselotte! Elle ne répond pas.
Personne ne répond par là. Ils sont tous morts.

Terre des hommes, 10 mars 1945.
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[...] Il n'y a pas de responsables à qui s'en prendre, sinon la guerre elle-même. Mais la guerre, c'est un mot (et des maux). Depuis un temps immémorial, nous ne cessons de la maudire, tout en la faisant du mieux que nous pouvons. La dernière, c'est nous (nous ?) qui l'avons déclarée à l'Allemagne. Nul n'ignore qu'Hitler la préparait de longue date. Hitler, voilà un responsable : il est porté disparu. Pour la précédente, les historiens ne se sont pas mis pleinement d'accord : les uns désignent Guillaume II, les autres, Poincaré. Attendons. Et puis, Guillaume II est mort, il me semble. Poincaré aussi. Non, il ne reste plus aucun coupable.
A y mieux réfléchir, on ne croit pas vraiment que deux hommes, ou trois, aient pu provoquer seuls d'aussi grands malheurs. Il leur a fallu le consentement des foules. Les foules ? Mais c'est nous.
Et il vient le soupçon que le coupable n'est pas si loin et, qu'en cherchant, on le trouverait en soi. De là, nos airs, un peu contrits, de ces derniers temps.
Le corysa m'incline, dirait-on, à quelques misanthropie.

Terre des Hommes, novembre 1945

Un peu plus de trente-huit.... (p. 110)
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Dans le hall, c'est la bousculade, l'encombrement. On se cherche ; on ne se trouve pas. Parmi la foule, se glisse parfois un homme en pyjama, ou une femme. Voyageurs de passage, venant d'Auschwitz, de Ravensbrück, de Buchenwald, ou de Dachau. [...]

C'est un palace pour revenants.

Mai 1945.

Hotel Lutétia (p.94 - 95)
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Marchant, peu à peu, j'ai retrouvé la foule. A l'entrée du métro, un vendeur de journaux criait : « Les Russes foncent sur Berlin ! »
Nous vivons une époque historique qui s'écrira en lettres victorieuses. D'autres, par millions, vivent l'Histoire sans gloire : prisonniers, déportés, réfugiés.

Combat, 4 février 1945.
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Vidéo de Henri Calet

Chronique de Laurence Goullieux : Henri Calet
Laurence Goullieux, directrice de la Bibliothèque Municipale de Liévin, évoque la vie et l'oeuvre de l'écrivain Henri Calet. le site internet de la Bibiothèque Municipale de Liévin :...
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