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EAN : 9782360840847
236 pages
Inculte éditions (06/01/2021)
3.98/5   75 notes
Résumé :
La femme et le robinet de cuisine de Paul Solveig fuient. Pour sa femme, il ne peut rien faire, pour le robinet, il appelle un plombier tchèque. Au cours de son intervention, ce dernier laisse échapper une ancienne photographie de sa mère, disparue dans sa Moravie natale pendant la période communiste. Cet étrange cliché, d’une grande beauté formelle fascine Paul. Son épouse partie, son robinet réparé plus rien ne le retient à Paris. Aussi le jeune homme quitte la Fr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Que direz-vous d'un petit voyage en Tchéquie ? Vous , Paul Solveig, ne connaissez rien des Tchèques et de la Tchéquie , à part le nom d'un ancien président moustachu et celui d'un décathlonien. Pas grave, car cette fichue vieille photographie qu'a laissé tomber le plombier tchèque, qui était venu réparer votre fuite d'eau vous obsède, et puis vous êtes techniquement au « break » , votre conjointe vous l'ayant sollicité 😊.
Donc curiosité + temps libre + votre vie actuelle d'un ennui mortel, va vous entraîner en Moravie, dans une petite bourgade au nom de Blednice …..démarche assez absurde, je reconnais,pourtant l'histoire que va en suivre , celle de retrouver dans un pays à la langue inconnue, la mère d'un faux plombier exilé qui figurait sur une vieille photo floue va s'avérer intéressante loin de vos attentes, et vous réchauffer comme une petite lumière , secrète et précieuse qui vous accompagnera durant tout votre séjour ( Attention n'oubliez pas le dé qui va vous aider à résoudre vos indécisions sur les choix à faire 😊).

J'aborde pour la première fois Jérôme Bonnetto, et je dois dire une belle surprise, ne me souvenant même plus de la souche qui me l'a fait acheter. Il a l'art d'inventer des personnages indescriptibles qu'il esquisse pourtant à merveille avec un mélange d'humour, de poésie et une petite touche tragique qui relève l'ensemble. Son récit est aéré d'anecdotes et de réalisme magique comme la lettre de sa compagne qu'il jette dans la Seine sans la lire, mais dont nous nous en saurons le contenu, « Une mouette flirta avec la surface de l'eau, plongea et repêcha la lettre. Elle dessina une parabole parfaite pour rejoindre le quai au-dessus duquel elle laissa s'échapper l'enveloppe qui atterrit quelques mètres plus bas sur la boîte à hameçons d'un pêcheur de nuit, spécialiste des silures. Voici donc ce que le pêcheur lut à la lueur d'une lampe de poche. »
Un livre aussi riche en références littéraires et cinématographiques , surtout Tchèques, et qui m'a fait acheter un livre et un film 😊. Et pour finir j'ai eu l'impression de lire plus un roman tchèque que français vu l'atmosphère et dirais-je même ce réalisme magique propre aux pays slaves. Superbe lecture , une ode à la littérature et au cinéma tchèque, que je conseille vivement !

« C'est que la culture tchèque savait se rendre aimable : cousine de la française, autre par ses proximités avec l'Est que nous n'avons pas, elle porte également quelque chose de difficile à définir, une force tendre qu'il lui vient peut-être de sa fragilité dans l'Histoire, la conscience d'avoir échappé de peu à sa fonte définitive dans un monde plus grand et plus fort qu'elle. »
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"Is this the real life ?
Is this just fantasy ?"
(Queen, Bohemian Rhapsody)

... voilà ce qui m'est venu à l'esprit après avoir refermé "Le silence des carpes". Et pour cause...

On raconte que dans les temps fort anciens, quand les déesses se promenaient sur la Terre encore toute plate, la plus belle trébucha et s'étala de tout son long, en imprimant à jamais son corps gracieux dans le paysage. Bien sûr, ce charmant accident s'est passé en Bohême, petit pays au coeur de l'Europe composé de doux vallons, de vertes forêts et de massifs montagneux de taille raisonnable, qui apaisent le regard et vous font ressentir cette étrange nostalgie qui accompagne toujours la contemplation de quelque chose de plaisant et d'harmonieux. La seule chose que les Tchèques puissent regretter est l'absence de mer... mais il est bien possible qu'elle soit là aussi, cachée quelque part, car William Shakespeare l'a vue. Et Jérôme Bonnetto aussi, à sa façon, même s'il ne la mentionne pas dans ses contemplations.
La bière y coule à flots, la gastronomie enchante le palais et fait frémir les diététiciens, et ses sympathiques habitants ont un humour particulier hérité de Kafka et de Hašek. Impossible de dire s'ils sont sérieux ou s'ils plaisantent, mais qu'importe, dans cette ambiance chaleureuse de chopines qui s'entrechoquent ? En descendant plus au sud, vous arriverez dans la région de la Moravie, avec ses omniprésentes statues baroques qui vous font un clin d'oeil sur chaque pont, ses pyramides atlantes (récente découverte brillamment démontrée par les ufologues moraves !) à peine dissimulées sous ses vignobles, et ses caves à vin, où vous passerez des moments inoubliables... à condition de vous souvenir encore le lendemain de votre dégustation du "Rulandské šedé" tout en écoutant le traditionnel cymbalum, l'instrument qui volera vôtre âme pour toujours.
C'est dans ce pays de Cocagne que le destin mènera Paul Solveig.

Rien ne va plus pour Paul à Paris. Pauline est sur le point de le quitter (cela le chagrine, mais il ne fait presque rien pour la retenir), son travail l'ennuie, et le robinet qui goutte le rend fou. Ce sera sa rencontre avec le plombier possédant une "charmante raideur surannée dans la syntaxe" (sic !) qui sera à l'origine de son fabuleux périple. Enfin... la rencontre, mais surtout ce cliché de jeune femme tombé de la poche dudit plombier tchèque. Une belle fille disparue en 1977, sans laisser la moindre trace. Paul devient obsédé par ce visage... au point de faire un "break", et partir vers le grand inconnu en direction de l'Est.
Pour y chercher l'oubli, le dépaysement, mais aussi pour mener une enquête sur le sort de cette mystérieuse Mlle Rybova.
Son séjour à Blednice (une ville imaginaire à mi-chemin entre "bled" et une bourgade morave typique, disons "Lednice") sera rempli de moments et de rencontres mémorables, et peut-être que, malgré ses pauvres qualités d'enquêteur, ses questions trouveront aussi quelques réponses.

J'étais très curieuse de cette "magnifique ode à la République Tchèque, à sa culture, à son cinéma et à la folie (eh ?) de ses habitants" ; et qui pourrait mieux en parler (à part ce fieffé tchécophile polonais Mariusz Szczygiel) qu'un auteur français qui vit et enseigne à Prague ?
Ce fut une plaisante lecture qui mérite amplement tous les qualificatifs évoqués sur la quatrième de couverture : "drôle", "aigre-doux", "mélancolique", "burlesque"... et je vois avant tout ce livre comme une sorte de conte à la Hrabal, avec la Bohême entière dans le rôle de l'un de ses attachants "palabreurs", capables de vous convaincre que la vie est pleine d'insoupçonnables délices, même si vous vous sentez au plus bas. L'auteur ne le cache même pas, en insérant à dessein des petits intermezzos inspirés de Bohumil Hrabal et d'Ota Pavel, dont l'étrange poétique prendra tout son sens à la fin du roman.

Le livre devrait charmer tout lecteur pour qui la République Tchèque n'est qu'une vague petite tache abstraite sur la carte, et qui veut en apprendre un peu plus.
Mais voilà que le bât blesse...et une descendante des Atlantes moraves que je suis trouvera l'image du pays un peu formaté aux idées qu'on pourrait s'en faire.
Disons que Paul a beaucoup de chance de tomber sur des autochtones pittoresques avec lesquels une conversation soutenue en anglais (et en allemand pour les plus âgés) ne pose aucun problème... et les plus importants pour l'histoire sont bien sûr francophones. Ainsi va t-il apprendre bien des choses sur le passé totalitaire, sur l'art, sur les livres qu'il faut lire, et sur les films qui représentent l'apothéose du cinéma tchèque. Tout cela est très intéressant : beaucoup de Tchèques évoquent volontiers l'époque socialiste, tantôt avec douleur, tantôt avec humour, les oeuvres mentionnées valent vraiment le coup (bravo à l'auteur pour penser à L. Fuks !) mais tout cela sont les choses qu'internet vous proposera en premier lieu, si vous faites des recherches sur la culture tchèque. A vrai dire, je m'attendais à quelque chose de plus... authentique ? A quelque chose qui s'approche davantage de la Tchéquie véritable de nos jours ?
Paul sera enchanté par "Les Amours d'une blonde" de Forman, mais j'aurais préféré voir sa réaction aux comédies populaires de Troška ou de Klein. Il récite les vers de Mácha, mais j'aurais aimé le voir surmonter la barrière de la langue en achetant des yaourts et des "rohlíky" chez Kaufland, au nom si typiquement tchèque. Bref, j'aurais aimé qu'il se frotte un peu plus au quotidien banal, mais ce serait sans doute aller contre les intentions de l'auteur.
Soit, c'est un conte : l'histoire d'un gars qui découvre une autre vie, pour mieux se réconcilier avec la sienne. Un conte de miracles, une rhapsodie pleine de fantaisie et même une "magnifique ode à la République Tchèque", si vous voulez... mais n'hésitez pas à aller vérifier sur place !
3,5/5... "...any way the wind blows...
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C'est lors d'un de mes petits tours dans ma librairie préférée que ce livre m'avait interpellé, avec sur sa 1re de couverture cette photo un peu surannée, cette voiture des pays de l'Est (me rappelant les célèbres Trabant), cette jeune femme décontractée assise sur le capot, et ce titre « le silence des carpes » … Un titre qui m'évoquait de suite un pays que j'aime… Dans ce pays, à Noël, il n'y a pas de dinde en plat principal, mais une belle carpe bien dodue ! Les habitants de ce pays l'achètent vivante quelques jours avant, mais ne la préparent que le 24 décembre. En attendant, ils la conservent généralement… dans la baignoire familiale !
Les quelques mots au dos du livre me confirmaient bien que je ne m'étais pas trompé sur le pays en question !

Au début de ce livre, le narrateur est agacé par une goutte d'eau qui fait ploc, ploc, ploc. Ce goutte à goutte incessant le perturbe, et dans le même temps, il apprend de la part de sa compagne qu'elle veut « faire un break » ! le narrateur, c'est un trentenaire parisien, Paul Solveig. Il ne comprend plus très bien sa vie. le démarrage burlesque de ce roman m'emballait déjà, et je me demandais comment il allait évoluer…
Ce robinet qui fuit et sa femme qui veut le quitter, sont des problèmes qui n'ont pas le même poids, mais qui vont se conjuguer pour révéler la médiocrité de sa vie et lui permettre de prendre conscience qu'il lui faut changer quelque chose rapidement !
Bien sûr, la première chose qu'il va faire, c'est appeler un plombier ! Celui-ci va le dépanner, mais en repartant, sans s'en rendre compte, il laisse échapper de sa sacoche une photo que Paul va incidemment trouver en dessous de sa table de cuisine… Il est intrigué par cette photo un peu floue, en noir et blanc, qui date un peu, qui représente une jolie femme en maillot de bain, cadrée de manière tout à fait particulière, et sur laquelle quelqu'un a surligné le contour de ses formes avec un Bic et apposé une couleur sur une zone de l'arrière-plan…
Il rappelle le plombier qui a « une charmante raideur surannée dans la syntaxe » ! Un plombier à l'accent tchèque ! Celui-ci va lui expliquer qu'il s'agit de sa propre mère sur la photo et il va raconter l'histoire tragique qui est arrivée à sa maman, disparue en 1977 sans laisser de trace, en pleine période de « normalisation », sous le régime communiste tchécoslovaque.
Cette photo, c'est la seule image qu'il possède encore de sa mère. Il ne sait absolument pas ce qui lui est arrivée, et ce mystère va donner l'occasion à Paul Solveig de révolutionner sa vie, et de partir comme ça sur un coup de tête ! Il abandonne tout à Paris, et il part en Moravie (partie est de la République tchèque) pour essayer de faire la lumière sur cette mystérieuse disparition, et également pour peut-être retrouver l'auteur de cette photographie curieusement artistique, à ses yeux !

On suit notre narrateur, parti pour Blednice (le plombier avait reconnu sur le fond de la photo cette petite bourgade de Moravie), une ville de 11 000 h. Paul Solveig ne sait absolument pas ce qu'il va y trouver. Il ne connaît pas la langue. Il ne sait pas non plus pour combien de temps il est parti…
Ce qu'il sait, c'est qu'il ne rentrera pas tant qu'il ne saura pas ce qui est arrivé à cette femme !
Alors il commence son enquête, mais c'est la première fois qu'il fait ça et ses méthodes sont un peu rustiques. Comme il ne possède que le nom pour investiguer, et qu'il n'a pas accès au bottin téléphonique, il va devoir faire le tour de tous les interphones de la ville… mais ayant fait un calcul savant, il s'aperçoit que ce travail, bien qu'ardu, est possible à faire en quelques jours.
Et cette enquête va le mener jusqu'à la police secrète de la Tchécoslovaquie !

Dans sa quête, il va faire des rencontres. Trois personnages, notamment, vont l'aider dans son enquête, mais aussi dans sa découverte du pays et de sa riche culture.
Il y aura - Míla, une serveuse grande fan de cinéma et libre comme le vent, - Veselý, un sculpteur contemporain, un peu dépassé par l'art qui évolue sans lui, et puis, -Antonín, un jeune menuisier qui n'aime plus son métier ! Grâce à ce trio, notre narrateur va être invité à participer à un « Cercle de poètes disparus » tchèque. Progressivement, il va entrer véritablement dans la culture tchèque, découvrir la langue, l'apprendre et changer complètement sa vision du monde.

Pendant ce temps-là, on suit à la fin de chaque partie, deux pêcheurs expérimentés, Ota et Pavel, qui découvrent au début du roman un étang mystérieux, dont ils ne connaissent pas l'existence jusque-là… Dans cet étang, frétillent des centaines de carpes d'une espèce rare et prisée, des carpes-amour, qu'il leur est bien difficile d'attraper !
Je n'ai pu m'empêcher de penser que le choix des noms attribués à ces pêcheurs n'était pas anodin, me rappelant immédiatement l'excellent livre écrit par Ota Pavel, « Comment j'ai rencontré les poissons » ! Et en plus, le nom que Jérôme Bonneton a donné au plombier est « Ryba », qui veut dire
« poisson » !

Tout au long de ce livre, il y a de chouettes métaphores, de belles trouvailles dans les expressions.
Grâce au narrateur (l'auteur a un vrai talent d'observateur !), vous arriverez même à distinguer 5 catégories dans la nature humaine en observant comment les clients mangent leur petit gâteau dans les restos ! Il y a … mais je vous laisse les découvrir vous-mêmes ! C'est très juste et absolument hilarant !
Beaucoup de psychologie, de mélancolie, de nostalgie, quand le narrateur parle de son enfance, de ses parents… On s'immisce aussi avec lui dans ces brasseries au décor suranné, toujours vivantes et bruyantes avec le tintement des chopes de bière qui s'entrechoquent toutes les deux minutes, et où les rencontres sont souvent hautes en couleur. Sur ce thème, on sent que l'auteur a apprécié les lectures de certains livres de Bohumil Hrabal et de Vlastimil Třešňák !

« le silence des carpes » est un roman sur la culture tchèque bien évidemment, sur le cinéma, avec sa Nouvelle vague -dont le célèbre film
« Les Amours d'une blonde » de Miloš Forman, mais également sur la musique, sur la littérature, sur les habitants, sur leur culture populaire et sur leur force de vie ! Mais au-delà, c'est aussi un roman sur la culture en soi.

Si Jérôme Bonneton parle si bien de la culture tchèque, c'est parce qu'il la connaît bien. Cela fait une douzaine d'années qu'il vit en République tchèque et qu'il s'y intéresse.
Ce livre est un roman humoristique avant tout, d'humour burlesque, mais d'humour également mélancolique. Les deux s'y mélangent. C'est un humour difficile à définir, qui renvoie peut-être quelque chose de l'âme slave.

J'espère que ma critique vous donnera envie de découvrir ce livre au texte vif et libre surtout, qui fait la part belle au romanesque, et de goûter au fil de ses pages aux charmes de la Tchéquie et de ses habitants ! C'est très bien écrit, fluide, parsemé d'anecdotes amusantes, de réflexions profondes et de mots d'esprit. En conclusion, un roman très agréable à lire, divertissant et vite attachant ! = 5/5

« … La culture tchèque savait se rendre aimable : cousine de la française, autre par ses proximités avec l'Est que nous n'avons pas, elle porte également quelque chose de difficile à définir, une force tendre qui lui vient peut-être de sa fragilité dans l'Histoire, la conscience d'avoir échappé de peu à sa fonte définitive dans un monde plus grand et plus fort qu'elle. »
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Il y a des périodes, comme ça, où rien ne va.
Non, je ne vous parle pas de celle que l'on vit en ce moment (!) mais de ce que subit un certain Paul Solveig : sa femme le quitte et le robinet de la cuisine fuit. Oui, difficile de placer ces deux faits sur le même plan me direz-vous, n'empêche qu'un robinet qui goutte, ça peut mettre les nerfs en pelote! Et puis, allez trouver un plombier, vous… Mission quasi impossible… C'est un certain monsieur Boulay, enfin plus exactement son beau-frère qui se présente enfin. Il a un léger accent : il est tchèque. Jusque là tout va bien… Sauf qu'il va malencontreusement laisser tomber une photo. Oui, une photo un peu floue d'une très belle femme… Notre Paul apprend, en restituant la photo audit plombier, qu'il s'agit de sa mère disparue dans sa Moravie natale pendant la période communiste… Paul est intrigué et comme sa vie part à vau-l'eau, il se dit que c'est peut-être un signe : et s'il partait ? Oui, s'il se lançait à la recherche de cette femme? Pourquoi ? Ben pourquoi pas ? Où ça ? Ben en Moravie voyons ! Bon, ok, la Moravie, c'est un peu nulle part (comme la Pologne hein). Laissons à Paul et à son humour pince- sans-rire le soin de résumer la situation : « Je savais que je partais pour longtemps, résolu à me consacrer aux chose essentielles, et j'avais pour cela un projet à ma mesure : retrouver dans un pays à la langue inconnue la mère d'un faux plombier exilé qui figurait sur une vieille photo floue. » 
Et si l'aventure commençait précisément là où on ne l'attend pas : à Blednice au coeur d'une région qui va se révéler follement attachante, d'une très grande richesse culturelle et d'une beauté telle qu'on aurait plus qu' envie d'aller y faire un tour nous aussi !
Après l'excellent « La certitude des pierres » (voir chronique sur le blog), Jérôme Bonnetto nous régale avec ce roman désopilant, rocambolesque, pétri d'humanité et d'amour, de tendresse et d'humour… Ajoutez à cela une petite dose de mélancolie slave qui achève de nous faire succomber...
Un VRAI délice !
Je recommande vivement !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Le silence des carpes de Jérôme Bonnetto, mon premier coup de coeur de 2021. Il y a tout simplement tout ce que j'aime dans ce roman. Une pépite !
L'histoire commence à Paris. Paul Solveig semble mener une vie réglée comme du papier à musique, une compagne, Pauline, un boulot, un appartement, mais, "plic, ploc", un goutte-à-goutte infernal s'est installé dans son évier, comme le présage du chaos, car Pauline le quitte juste au moment où le plombier débarque. Paul est sous le choc, seul dans sa cuisine, son regard se pose sur une photo, abandonnée sur le sol. Elle a sûrement glissé de la poche du plombier. L'obsession grandit autour de ce portrait d'une belle jeune femme tchèque. La mère du plombier qui a disparu durant la période communiste. Paul, concentrant toute son énergie à oublier que sa vie s'effondre, se donne pour mission de découvrir ce qui est arrivé à la mère de son plombier et s'envole, ni une ni deux, pour la République Tchèque.
Quel roman absolument incroyable ! Enchantée par la plume de l'auteur, son écriture m'a agrippée en quelques mots tant elle est sensible, poétique et drôle. L'histoire est rythmée par un sens de l'absurde fabuleux, terriblement bien écrit, des mots comme des images viennent vous faire sourire et rire souvent, viennent vous attendrir et vous cueillir complètement. J'ai adoré le petit grain de folie du héros. On part à l'aventure sur un prétexte complètement dingue aux côtés de Paul et c'est tellement frais, c'est s'ouvrir à l'inattendu, c'est lancer le dé et se laisser porter par le hasard. On s'évade complètement à Blednice en Moravie, on découvre un pays, on rencontre des personnages aussi touchants qu'originaux, on découvre de belles références de la culture tchèque. Il y a aussi ce fil rouge tout au long du roman, cette part d'ombre laissée par le communisme en République Tchèque qui nourrit l'intrigue, qui l'encercle de son atmosphère grave et brumeuse et vient contrebalancer les pérégrinations cocasses de notre héros.
Le silence des carpes est un roman doux-dingue porté par une plume extraordinaire. Il rejoint les précieux de ma bibliothèque.
Merci infiniment à la #massecritique @babelio_ et aux @editionsinculte.
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Après plusieurs semaines de ce régime, la méthode commença à donner des résultats étonnants. Tel un troubadour, je pouvais déclamer les cents premiers vers du grand poème romantique de Karel Hynek Mácha ou les dix premières pages d'"Anděl Exit" de Jáchym Topol. Ca plaisait beaucoup à Mila qui me trimballait, comme un singe savant, dans les brasseries pour me faire réciter ce que je connaissais. Une fois que j'avais commencé à réciter le poème "Ô ébène" d'Oldřich Mikulášek, je vis l'un des habitués taquins (au visage parfaitement marxiste - crinière et barbe blanches émaillées de petits reflets noirs) se lever et réciter à l'unisson le texte. Nous ne nous sommes pas quittés des yeux jusqu'au dernier vers. Alors, tout le monde a applaudi et nous nous sommes tombés dans les bras. C'était le seul poème qu'il connaissait, sa mère le récitait tous les jours (c'était aussi le seul poème qu'elle connaissait...) Alors quelqu'un a sorti une guitare de dessous une table et la soirée a basculé dans l'inoubliable.
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…..ma belle-mère elle lésine pas sur la panure, un bon centimètre d’épaisseur avant d’entamer la chair du poisson, bref, elle avait à peine mordu dans sa carpe que zang ! elle s’étouffe !….elle avait survécu aux Allemands et à Staline, et moi qui étais persuadé qu’elle nous enterrerait tous, qu’après la bombe atomique il ne resterait plus que les insectes et ma belle-mère, elle allait mourir là devant nos yeux à cause d’une simple arête de poisson, sur une aire d’autoroute en plus….
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Il y a une vieille tradition tchèque : personne ne connaît son origine, selon laquelle toucher le bouton de la veste d’un ramoneur le jour de son mariage porte bonheur. En échange de ce service, on donne une petite pièce, parfois plus. Alors à la belle saison – on enchaînait parfois cinq ou six mariages dans la matinée – mon père enfilait son costume, se barbouillait la gueule de charbon et allait traîner aux abords des mairies. En partant le matin, il disait toujours « je vais au bureau ». Et cela marchait bien ! Croyez-moi. Il lui arrivait même de se faire inviter au banquet. C’est que du bonheur, on n’en a jamais de trop d’avance quand on se marie. Et il revenait ivre mort. Et heureux, lui aussi. Il avait bu et bouffé à l’œil, dansé avec la tante, fait marrer le papy. Il nous ramenait toujours quelque chose, des escalopes panées ou du gâteau, même avec deux grammes dans chaque bras.
Il dégagea ses deux incisives en or du paster noster de ses lèvres. Puis :
-Je crois qu’il aimait se déguiser. Ma mère moins. Un jour, il est revenu plus tôt que prévu. En sang. On lui avait arrangé le pif et l’arcade sourcilière. Il en était venu aux mains avec un autre ramoneur des mariages qui voulait lui piquer son affaire.
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…..j’ai passé la journée à étudier le tchèque et à lire les grands auteurs. J’appris que le mot nevěstka désigne une prostituée alors que nevěsta est la mariée et qu’il vaut mieux ne pas se tromper.
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Plus tard dans la soirée, Míla remarqua pour la première fois le tatouage sur mon poignet.
-C’est quoi cette horreur ?
- Moi, j’aime bien, corrigea Antonín à qui l’alcool rendait un peu de bonté. Alors, je leur ai raconté Pauline, la preuve d’amour.
– Ce n’en est pas moins laid.
Elle avait raison, mais je ne pouvais pas me couper la main.
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