Pierre Bonte a le courage d'être nostalgique dans la synthèse réussie des deux qualités qui le définissent: d'abord le sentiment vrai, pur, viril, sans sentimentalisme, mièvrerie ou complaisance, et d'autre part le courage de ses opinions, sans agressivité, paisiblement, avec bienveillance.
Bonte ne fait aucune concession face à l'intimidation des bien-pensants aux réactions lobotomisées. le ricanement automatique et télécommandé de l'idiot utile réglé pour tourner en dérision une critique potentielle du pouvoir: "Mais oui, mais oui, c'était mieux avant..."- ce sarcasme dérisoire, préformaté, standardisé de boîte noire tombe à plat devant la sincérité du Bonheur était dans le pré.
Oui, c'était effectivement mieux avant, et Pierre Bonte nous invite à nous souvenir avec le talent qu'on lui connaît. Celui qui a prétendu que le bonheur n'existe pas n'a jamais connu l'odeur du blé en herbe, la couleur d'un champ en été, le murmure des rivières. Et celui qui les a oubliés n'a pas lu Pierre Bonte ni fait connaissance avec sa faculté de les ressusciter le temps d'une lecture.
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« Jean Domec est à la chèvre ce que Brigitte Bardot fut aux phoques, si vous me passez l'expression. C'est un militant éperdu de la cause caprine. Depuis des années, il m'inonde de lettres, d'articles, d'extraits de livres qui vont tous dans le même sens : dénoncer l'exploitation de la chèvre comme une simple machine à faire du lait et revendiquer pour elle le droit à la liberté. Il est criminel, selon lui, de condamner un animal aussi primesautier, aussi fantasque, à vivre enfermé dans un atelier de cent, cent cinquante ou deux cents bêtes. Dans la zone d'appelation sainte-maure, m'a-t-il appris, on est allé jusqu'à envisager de créer des « cours d'exercice », près des étables pour que les pauvres bêtes puissent se dégourdir les jambes de temps en temps. Comme dans les prisons ! Il a d'ailleurs lancé en 1997 un « appel pour la libération de la chèvre ». »
« La curiosité m'a conduit, un jour, jusqu'à sa propriété de Saint-Avertin (Indre-et-Loire), où il vit depuis sa retraite avec deux chèvres, qui sont avant tout pour lui des animaux de compagnie. J'ai rencontré un homme plein de sensibilité et d'une grande culture, qui m'a parlé avec beaucoup de tendresse de ses compagnes favorites. Savez-vous que Jupiter eut pour nourrice une chèvre ? Que le lait de la chèvre est le plus proche du lait maternel ? Que depuis l'antiquité, la chèvre a nourri l'humanité et sauvé de la famine les populations les plus déshéritées ? Je pourrais remplir des pages avec tout ce qu'il m'a appris, Monsieur Domec. »