Etendue sur sa paillasse sans avoir quitté ses vêtements de bergère, elle attendait le sommeil où ses velléités de femme prenaient quelquefois vie. La lune attisait le ciel étoilé et la blancheur des rochers entre les chênes-lièges et les cactus. Les brebis agglutinées au pied de l'olivier tricentenaire ne pouvaient s'ébrouer sans se déranger.,A la puanteur et au tintement de ses clochettes, elle savait que le bouc veillait sur elle, couché au seuil de la porte ouverte. Demain sera semblable à la veille. Toujours les mêmes taches, les mêmes gestes. La solitude.
"Cette maison, je l'ai construite de mes propres mains, un peu chaque jour, j'allais chercher les pierres une à une de ce côté-ci de la montagne et le sable sur la plage de Kissakas que je remontais à dos d'âne. Combien de voyages j'ai pu faire ! Nous ramassions les pierres à chaux, tu sais les pierres calcaires. Là, Véra, je ne te dis pas le travail. Il fallait les faire brûler dans un feu de bois, puis les cuire à gros bouillojs pour obtenir une pâte, la chaux en fait. Il en fallait du bois ! Des allers et retours jusque Tyros, à ramasser les branches. Les chemins à peine tracés, étaient difficiles. A cette époque on construisait les maisons à chaux et à sable; C'était solide. J'ai fini la mienne, j'avais trente ans. Quand on parle de maison, c'est un bien grand mot. quatre murs, un toit, une cheminée... Là, j'ai pu prendre une épouse, ma voisine, puisqu'elle étit libre. Je ne l'ai jamais regretté, elle a été une bonne épouse."
A lire avec délectation pour ce plonger au coeur de ce village, l'auteure rend un bel hommage plein de douceur à ces gens.
Un super livre sur un petit village de l'Arcadie en Grèce