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EAN : 9782374910758
167 pages
Quidam (01/02/2018)
3.6/5   10 notes
Résumé :
Une jeune femme est enfermée pour des raisons obscures dans un asile d’aliénés, au centre d’une ville sans nom. C’est La Folle. Nuit et jour, elle voit une masse chaotique en plein ciel, sorte de Big Bang qui met à mal les lois admises de l’espace et du temps. Aidée par un interne en médecine, elle s’évade et part à la rencontre de sa sœur jumelle, qu’elle n’a pas vue depuis des années.

Quête abracadabrante, délire gorgé de sens aussi construit qu’éru... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
J'ai rarement lu un livre aussi tortueux et excentrique, qu'il m'en est devenu troublant presque fascinant.
« Chaos » m'a laissé sur le carreau, K.O

Mathieu Brosseau a fait tout de même une belle performance pour raconter son histoire étrange, avec pour seul style, cette poésie des limites, avec rien que des mots qui se bousculent, des phrases saccadées et fragmentées qu'il a fait déferler au fil des pages.
Un ouragan d'images et de descriptions phantasmagoriques où se tutoyaient les rêves, les cauchemars, les obsessions des êtres en mal de vivre.
Un flot insensé de mots et de pensées qui semblaient parfois venir d'une autre réalité ou jaillir de l'imaginaire d'un cerveau éthéré.

Car parmi cette folle écriture d'une énorme poésie, il y a bien un récit celui de cette jeune femme qui est appelée « La Folle ». Un récit écrit par petites touches frénétiques, par petites embardées, comme si l'auteur avait fait un puzzle, afin que le lecteur remboite les mots qui avaient trébuché.

« La Folle », une jeune femme anonyme, dont on ne sait pas si elle est vraiment folle. Dont on ignore les raisons de son enfermement dans cet hôpital psychiatrique.
Et puis il y a « l'Interne », un homme aussi anonyme, mystérieux. Est-il fou lui aussi ou est-il amoureux de sa belle patiente aux yeux bleus.
Ce sera la fuite, où ce couple à la fois disparate et uni, se retrouvera dans un train pour se rendre à « l'Autre Ville. »
Pour revoir « L'Ainée », la soeur jumelle de « La Folle », dont cela fait quinze ans qu'elles sont séparées.

« Chaos » est un grand voyage onirique, un voyage halluciné dans les profondeurs de l'âme, perdue et esseulée quelque part entre deux mondes.
Un voyage enchanteur et poétique dans le monde désenchanté de la folie…
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Chaos : ouverture, abîme, cavité / confusion générale des éléments de la matière, avant la formation du monde / ensemble de choses sens dessus dessous et donnant l'image de la destruction, de la ruine, du désordre.

Dans un monde tout en dualité et en conjonction, où la cellule se divise d'abord en deux, pour former trois, trois femmes au même prénom, qui ne se distinguent que par leurs caractéristiques, trois furies, reines du chaos, la sainte trinité de la noirceur, en deux lieux différents, la Ville et l'Autre Ville, mais aussi la Ville Frontière, deux puis trois, encore, et ce train qui traverse les lieux comme la pensée traverse l'esprit, charriant son lot de paysages, de lieux communs, de nouveauté et d'émotions. Lorsque l'on n'a pas d'identité, qu'on est juste la copie de la copie, qu'on est soi en même temps qu'une autre, mais pas tout à fait, et qu'on est plus que la Folle, il y a de quoi devenir...

La folie, qui n'est ici rien d'autre qu'un traumatisme, celui d'être venue au monde dans un monde qui ne veut pas de soi, le cordon non encore coupé et ce vide qui aspire, toujours, l'invitation du chaos, comme celle du serpent, l'oeuf cosmique. La mort plutôt que la vie, et comment ne pas perdre la tête, le corps, et cet oeuf toujours, sur le front, le phoenix qui renaît de ses cendres et les avale toutes crues.

Récit étrange, décousu, le passé mélangé dans le présent, une institution psychiatrique où l'on peut juste disparaître comme ça, presque un conte de fée où le preux chevalier enlève la princesse, sauf que non, c'est beaucoup plus noir. Une enfance terrible, une vie en hôpital, un exil thérapeutique, un élan de folie dans la folie dans la...

Une lecture pour le moins dérangeante, avec des faux airs parfois presque enfantins, naïfs - parce que si spontané, hors des règles adultes -, mais sans joie, sans illusion, avec le mauvais oeil qui guette, comme une plaie qui démange. Une écriture à vif, comme le dégorgement d'un mental à nu, sans le filtre de la raison, de l'esthétique, comme attrapée en l'air et retranscrite par le chaos. Spectateur silencieux qui entend palpiter les cerveaux et les tripes de chaque personnage en approche et tout se mélange en une cacophonie à bout de souffle, pour qu'à la fin on ne sache plus, et c'est comme une sorte de virus dans l'air qui contamine, pour qu'à la fin les médecins deviennent fous et que les fous retrouvent leur tête - et tout le monde a du sang sur les mains dans cette famille, absolument tout le monde.

Et puisque c'est dans un train que j'ai englouti ce chaos, dans un train vers d'autres lieux, et ce sentiment d'étrangeté qui fait quitter les repères pour s'abandonner dans le grand vide, alors je peux le dire, j'ai été littéralement soufflée, et ça m'a piqué, un peu, puis comme une caresse et des chatouilles dans le ventre pour finir comme une bosse au milieu du front. Il y a là de quoi être secoué.e si tel est votre souhait, attachez vos ceintures et enfoncez vos chapeaux, glissez dans l'abîme.

(voir la critique intégrale sur le blog)
Lien : http://lecombatoculaire.blog..
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Le premier mot qui me vient à l'esprit en refermant ce roman est PSYCHEDELIQUE.
Quel étrange roman très très, mais alors vraiment très loin des romans dont j'ai l'habitude.
Et pourtant, il s'agit assurément d'un roman noir. Je dirais même d'un bon roman noir.
Sauf qu'on peut avoir l'impression de lire sous l'emprise de substances illicites ou de souffrir d'une indigestion de Space Cakes.
Mais ce n'est pas une critique, loin de là !
Une des choses très surprenantes dans ce roman, c'est la dépersonnalisation totale des personnages. Ainsi, ils n'ont pas de prénoms. Ils sont la Folle, l'Interne, l'Ainée, la Mère, etc. de cette façon, ils peuvent être tous et n'importe qui, y compris l'auteur ou le lecteur…
Dans un caléidoscope incroyable de mots, de métaphores, de sous-entendus, l'auteur nous dresse le portrait d'une femme qui garde une partie de lucidité dans sa folie.
Tout comme elle entraîne l'Interne dans ses délires, elle nous amène aussi à la réflexion.
Et peut-être, au bout du compte, le plus fou n'est pas forcément celui qu'on pense. Ou peut-être que si…
La Folle et l'Interne vont nous entraîner dans leur voyage vers l'Autre Ville où vit l'Ainée et nous laisser pénétrer dans l'esprit de cette jeune femme jusqu'à toucher la vérité.
Un roman noir unique que je conseille à tous les curieux qui voudraient sortir un peu des sentiers battus.

Lien : http://www.evadez-moi.com/ar..
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Une plongée dans la folie, le temps de quelques lignes, quelques pages, cela peut être tentant. Toutefois, le voyage proposé par Mathieu Brosseau n'est ni confortable, ni de tout repos.

D'une écriture hallucinée et percutante, l'auteur offre une récit étrange, sans repère, derrière cette jeune femme multiple, « la folle », et ses élucubrations. Un long poème en prose sur l'identité, la gémellité, la folie comme virus.

Mathieu Brosseau a ce talent de bousculer son lecteur, de l'entraîner dans un tourbillon de mots, de phrases, d'allitérations qui se chevauchent et s'emmêlent, dans une expérience de lecture assez hallucinatoire. Une expérience qui se savoure d'une traite dans les pas de « la Folle », et de « l'interne », dans « la ville », vers « l'autre ville », dans un temps incertains, bien que moderne, peut être un futur proche.

Et le monde qui enferme, empêche. Peut-être est ce lui qui est fou, à l'image de ces médecins « contaminés » ? le Chaos est il dans la tête de « la folle » ou dans le monde qu la refuse ?

Ce livre ne se laisse pas facilement aborder. Les voix sont discordantes, dissonantes. le récit n'est ni linéaire, ni forcément cohérent. Plusieurs fois je me suis demandé si l'auteur utilisait de temps en temps la technique du cut up. le résultat est un objet littéraire poétique, ambitieux.

Il Faudrait être fou pour ne pas le lire !
Lien : https://bonnesfeuillesetmauv..
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Prose poétique hallucinée, aux confins de la folie, sur la gestation et la gémellité, Chaos intime un flux verbal, et sonore, plein de résonances et de "revenances.". L'écriture de Mathieu Brosseau, somptueuse et pleines de discordantes assonances, porte dans le flux de consciences moins dérangées que dérangeantes. Une très belle, mais ardue, découverte.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Il Padrino, lui, était désormais immobile et muet, sur son siège à bascule. Une poche à pisse à droite, une poche à merde à gauche, il portait un bavoir couleur arc-en-ciel qui recueillait la mousse écumeuse que sa langue repoussait par à-coups brefs. Il ne bouge pas le vieux, se disaient ensemble les sœurs jumelles, la vieille a dû lui couper les roustons, à force de les lui ronger, c’est ça l’amour, pas vrai ?
Elles en déduisaient qu’avec l’âge et l’infirmité, on était moins conquérant.
Quand il était beau gars, il avait dû traficoter pas mal, Il Padrino, comprenaient-elles, à venir de l’Autre Ville avec sa palabre, à faire son commerce avec les peuples en guerre, ceux du désert, qu’est-ce qu’il avait dû pavoiser ce conquérant voleur de pièces de musée, pilleur de païens animistes, aspirateur de cultures à recracher plus tard aux archéologues amateurs de ruines, poussières, et qu’est-ce qu’il en vendait des armes pour que les primitifs s’entretuent, munitions aux fous de dieux archaïques, ventes d’œuvres d’art aux opulents, et on tire sur ceux qui ne veulent pas de nos armes, et on écarte ceux qui ne veulent pas de notre culture-la-nôtre, on vend des mitraillettes et avec l’argent récolté, on se fabrique des musées dans la Ville ou dans l’Autre Ville monte des expositions qui inspirent nos peintres en mal de gâchettes, parce qu’il n’y a pas de sang sur les pinceaux, tout se transforme, et dans le désert, ça vend, ça n’arrête pas de vendre, et ça transite comme dans les intestins, la guerre, ça se passe dans les boyaux, il y a un espace pour tout, le lieu des intestins et le lieu du crâne, les militaires se musclent l’œsophage barbare à force de gueuler, et les kalachnikovs caquètent, dessinent le contour des corps étendus, et les agonisants font la même tête que lorsqu’ils sont nés, magnifiques, qu’ils sont beaux ! une bulle sur leur bouche, qui claque, un soubresaut avec le ventre rouge, si beau ! et Il Padrino, il en vendait du sang, de la gouache, et les barbares, eux, pour croire que le monde a une raison d’être, qu’il a la vérité d’un art, et c’est pourquoi ils s’entretuent, la prière, et Il Padrino, il savait ça, il avait des relations à travers le monde, les barbares pensent qu’il y a des idées qui valent mieux que leur propre vie, mais ils ne savent pas que la nature, c’est-à-dire les vagues continues de la matière, est la seule chose qui ait une raison, parce que les hommes, eux, n’ont pas encore leur vrai visage.
Il Padrino avait toujours été une ordure, il n’avait plus de roustons, il voyait le monde comme un réseau de capitaux, un marché de symboles et de faux sentiments dégueulasses. La Bourse des guerres et des Musées, il avait tiré des ficelles, lui et ses amis. (…) Il Padrino et ses pairs avaient passé leur vie à faire croire qu’ils ne faisaient que bouger des flux, fruits de leurs vols et ventes et c’était tout, que ça bougeait comme des cartes sur une table de voyante, un point c’est tout, ils déclinaient toute responsabilité, ne faisaient jouer que des mouvements entrants et sortants, tout naturellement, rien de plus. C’était ça la vie, entrer et sortir. Rien de plus. Entrer ➔ sortir.
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Lui, l’Interne, futur obstétricien, encore jeune, il va passer sa vie à faire naître, naître, naître, il est fils de bonne famille, son trajet est tracé on dirait, et la réussite sociale l’attend probablement, c’est comme ça qu’on dit. Il gagnera la fierté de ses parents ! De ses amis, il sera notable, voilà, on l’écoutera, mais cela ne lui fait pas grand-chose, même quand il dira des bêtises, ses paroles auront du poids, c’est sûr, on souhaitera connaître son avis, sur tout, en politique, la psychologie d’un tel ou d’une telle, sur l’actualité scientifique, économique ou internationale, on voudra, on dira C’est le Docteur qui le pense, il sera envié, tu le seras ? Et certains s’identifieront à lui, ils diront Je t’aime bien. Et il aimera cela. Mais pour dire vrai, l’Interne n’a jamais douté d’être bien seul, comme les autres, oui, misérable parmi les misérables, oui, poussière qui redeviendra poussière, ça tourne, ça graine et ça fane, il est souvent déprimé, bien souvent passif. Des millions d’hommes vivent la même vie que lui, tous, tous possédés par le même esprit, le même grillage, le même plan, la stratégie du gain, la conquête de ce qui n’existe pas encore, c’est ça qu’il faudra dire à ceux qui l’envieront, il n’a pas toujours envie… Il s’en rend compte. Il ne sait pas. Mentir. Médecin, pour quoi faire ? Et si spécialisé ! Il aimerait vivre une rupture, une fission douloureuse.
L’esprit de dépendance des hardes grégaires est d’une triste vérité. Il en a conscience, l’Interne. Il est affaibli de le savoir, triste de ne trouver aucune voie de traverse, il a besoin des autres, dans le réseau des fourmilières, il a besoin d’être aimé bien que cela lui semble absurde. Il a des angoisses, il est fragile, mais il sait parfaitement s’oublier dans le silence et le travail. Pour taire son vœu, prendre la tangente.
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Entre chaque pavillon il y a des jeux pour les insensés, rire joyeux, balançoires et niches, au cas où une petite fatigue viendrait à advenir chez un patient. Et puis, au beau milieu de tout cela, de grands et nobles arbres tropicaux, acajous et amarantes, d’où dégueulent des insectes ailés et de nombreuses lianes humides que beaucoup de fous s’amusent à attraper pour tenter l’heureuse ascension simiesque. Rire joyeux. La Folle n’y a jamais mis les pieds. Elle n’aime pas le rire des singes.
La Folle voit la Ville, petites tours et immeubles résidentiels de taille moyenne, belles maçonneries et architectures d’époque, des fenêtres à travers lesquelles des vies de famille s’écoulent drôlement, passant au rythme des entrées et venues dans les appartements, des jours et des nuits. Elle les observe.
Cela fait longtemps qu’elle est là, elle, à regarder ces fenêtres impudiques et théâtrales faire représentation de belles scènes de famille, avec leurs inhérentes joies et mélancolies, toutes placées entre les quatre murs d’une vie qui vieillit. Anamorphoses. Dix ans déjà, dix ans que la Folle voit depuis sa fenêtre à barreaux quelques vies bourgeoises s’enrider, s’accoupler et se multiplier comme rats, se battre à coups de vaisselle parfois ou se haïr à s’en faire rougir les jugulaires. À en mourir aussi, suicide ou meurtre au nom de l’évangile de la liberté vraie, c’est-à-dire par dévotion. Mourir ou se mentir sur l’autel de cette même foi. Les sacrifices se font toujours par deux.
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Et dites-moi, vous saviez que sur Mars, malgré son nom, il n’y a pas d’armée ? Il n’y a que des Martiens, dit-elle avec un sourire dégagé. Ils élèvent des brebis rouges. C’est un peuple libre et sans attache, leur seule langue est celle de l’émotion, il n’y a pas de langage à proprement parler ; toute gesticulation, tout râle n’est bon qu’à transcrire l’émotion. Leur vrai problème, c’est que ceux des autres planètes souhaitent les envahir. Or ils sont sans défense et le rouge de leurs brebis attire tous les guerriers interstellaires. Un peuple maudit…mais ils nous survivront, je pense.
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Vivre ne sert qu'à ça -> voir les rêves dans la vie -> attendre, attendre qu'ils apparaissent et noyautent le Chaos, que des histoires fabuleuses interviennent toujours et encore dans le cours des choses. Pour que nous puissions nous rencontrer. Vous et moi.

Alors oui, sans les yeux, voyons-nous au milieu des flots torrentiels et des courants du Nouveau Monde.
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Vidéo de Mathieu Brosseau
Entretien pour Mediapart, 2019
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