Un aéroport... Ambiance à peu près aussi spectrale que celle restituée par un spectacle de patronage. Derrière un comptoir surélevé, une femme grisonnante aux traits froids et cireux de bureaucrate intergalactique. Elle porte un uniforme bleu-gris. Lointains bruits d'aéroports, brouillés et incompréhensibles, et par moments, plus forts et plus clairs.
"Le vol 69 a été..."
Parasites... brouillage...
"Le vol..."
Sur l'un des côtés du comptoir, sont plantés trois hommes, visiblement tous heureux à l'idée de partir là où ils vont.
"Votre éducation n'a pas encore été faite", me déclare la femme quand je me présente moi-même au comptoir.
J'ai fait ce rêve il y a à peu près trente-cinq ans, peu après la publication du Festin nu par Olympia Press en 1959.
En termes humains, mes émotions sexuelles semblent s'être étiolées, ou plutôt appartenir à un corps et un esprit que je n'occupe plus. Mais je conserve d'intenses émotions envers les animaux. Imaginez un grand lémurien. Un lémurien aussi grand que moi, qui se pelotonne contre moi - rien de sexuel, c'est bien plus intense que ça.
Des métros, des gares, des aéroports, des bateaux... des voyages, en serrant sans cesse la clé de ma chambre d'hôtel. Le seul lien dont je dispose. Le seul foyer que j'aie. Je me rassure constamment en vérifiant que la clé est bien dans ma poche. Non que ça signifie grand-chose, puisque ces lieux ne permettent aucune intimité.
Nos dirigeants s'efforcent désespérément de produire un individu moyen et malléable.
Pourquoi être si pressés d'aller nulle part ?
Le 18.01.18, Jérôme Colin (Entrez sans frapper - RTBF) recevait Gérard Berréby pour évoquer "Révolution électronique" de William S. Burroughs.