On n'entend parler presque jamais en Perse d'enfoncer les maisons, d'y entrer à vive force, et d'y égorger le monde. On ne sait ce que c'est qu'assassinat, que duel, que rencontre, que poison. Dans tout le temps que j'ai été en Perse, où j'ai fait tout mon séjour à la ville capitale, ou à la suite de la cour, ou bien en d'autres grandes villes, je n'ai vu exécuter qu'un seul homme; de manière, qu'à celui-là près, tout ce que je puis rapporter des supplices de ce pays-là, n'est que par ouï-dire...
ce mot d'afium, que les Persans donnent à cette drogue, et dont nous avons fait celui d'opium, signifie, dans son origine, «affaibli de sens», parce que l'usage immodéré de ce suc affaiblit l'esprit et les sens. On l'appelle aussi tériac, qui veut dire «cordial », et ceux qui en prennent, teriaki; ce qui est une injure en Perse, comme chez nous celle d'ivrogne.
Il y a des filles de gouverneurs de provinces et des plus grands seigneurs du royaume dans le sérail; mais le plus grand nombre sont géorgiennes, circassiennes, ibériennes, et autres personnes de ces provinces d'alentour, où il semble que la beauté répande ses charmes avec plus de libéralité qu'en aucun autre endroit du monde.
Les Persans n'ont jamais été informés des étranges prérogatives que le pape s'attribue, ni de l'autorité qu'il a prise sur la conscience de la plupart des chrétiens. On leur a dit que le pape est un souverain temporel, qui, en qualité de successeur de Jésus-Christ, tient le premier rang entre les princes chrétiens, de la même manière que les califes de Bagdad étaient révérés des princes mahométans; mais on ne leur a jamais rien dit de ses incompréhensibles prétentions à l'infaillibilité: cela choquerait trop rudement leur bon sens, et l'on ne veut pas leur faire paraître absurde et contradictoire une religion qu'on est venu leur enseigner.
Il faut se souvenir en cet endroit de la frugalité des Orientaux, parmi lesquels les Persans particulièrement sont à estimer, mangeant beaucoup moins que les Turcs; car d'ailleurs, si on couvrait les tables à Ispahan, comme à Londres, ou à Paris, il faudrait bien faire venir des provi- sions de plus loin. Les Persans ne mangent de la viande que le soir, et n'en mangent qu'avec du riz et aussi des légumes. J'ai observé ailleurs combien leurs chairs sont pleines de suc, de manière qu'on peut dire en général qu'il ne se fait que la dixième partie de la consommation de chair en Perse, qu'il se fait en nos pays par proportion.