« On ne naît pas femme, on le devient. » (
Simone de Beauvoir) C'est joliment écrit et c'est, physiologiquement, stupide. Cela dit sans remettre en cause la réelle inégalité homme/femme qui sévit çà et là dans le monde.
Précisément,
Gabrielle Cluzel, auteur(e) du présent essai, ne la remet pas en cause non plus. Elle tente simplement, avec le style enlevé qui la caractérise, de mettre un bémol aux envolées lyriques du féminisme, cette dictature du bien-être des femmes, sur le ton du : « Je sais ce qui est bon pour vous. » le communisme ne disait pas autre chose à l'Est !
Sauf que la femme n'est pas un homme comme les autres, et ce n'est pas en singeant ce dernier qu'elle s'accomplira pleinement.
Ce dont il est question ici c'est de l'absurdité du féminisme majoritaire – je veux croire qu'il en existe un autre, intégrant plus subtilement la spécificité des femmes –, fustigeant la petite fille jouant à la poupée et ne trouvant rien à redire sur la presse féminine, temple de la futilité et du consumérisme effréné, sans parler des modèles anorexiques exhibés comme un idéal à destination des jeunes femmes, qui se découvrent soudain obèses parce qu'elles ne ressemblent à une brindille idiote au nez poudré avec autre chose que des cosmétiques de chez Guerlain !
Les conséquences ayant toujours des causes, après
Finkielkraut dans
L'identité malheureuse,
Gabrielle Cluzel déplore à son tour la disparition de la galanterie, ce « sexisme bienveillant », hurlent certaines ! Sur le ton de l'humour, qu'elle manie fort bien, elle en joue : puisqu'une phrase comme « les femmes et les enfants d'abord » contribue à « asseoir la domination des hommes », « c'est sans doute pour ne pas se rendre coupable de sexisme bienveillant, pour éradiquer cette coutume archaïque et misogyne, que le pacha du Concordia s'est précipité dans la première chaloupe » !
Les femmes qui me liront apprécieront diversement, je pense, que leur conjoint tienne la porte ou leur envoie une pleine face pour ne pas infliger son sexisme paternaliste ! Mieux vaut donc demander directement, de nos jours, à une femme si elle veut bien baiser plutôt que de faire montre d'un machisme effroyable en lui offrant des fleurs ! Chacun appréciera.
A tout libérer, on finit par tout perdre car les règles sont parfois des contraintes salutaires. Hélas, dans une société où tout doit aller vite, on séduit comme on consomme. Quid de cette attente amoureuse désuète qui faisait battre les coeurs aussi vite qu'un guépard en pleine course ? Mais attention : tout ce qui se consomme a une date de péremption, les femmes y compris. Pour aller dans le sens de
Gabrielle Cluzel, voici une petite anecdote que l'on m'a rapportée : « Elle n'a pas honte,
Claire Chazal, de montrer son cou plein de rides ? » Authentique. Et comme le mariage est déconsidéré, voilà madame, passé quarante ans, mise sur la touche.
On voudrait libérer la femme de tout, même de la maternité en congelant ses ovocytes ! N'en déplaise pourtant à
Chantal Jouanno, la femme est d'abord là pour la perpétuation de l'espèce, ce qui ne doit en aucun cas la réduire à une reproductrice, comme le suggérait
Pierre Bergé en proposant de louer son ventre. Pourquoi croyez-vous que la grotte Chauvet recèle des signes vulvaires ? Parce que c'était là l'oeuvre d'un pervers sexuel ?! Non : pour les hommes du paléolithique supérieur elle avait un pourvoir magique : celui de procréer, justement.
Et l'avortement alors, on le remet en cause ?! Non, bien entendu, pas moi en tout cas, mais il n'en reste pas moins vrai que ce n'est pas un acte anodin comme on voudrait le laisser croire en ayant « supprimée la notion de « détresse » prévue par la loi Veil de 1975. » Et qui fait les frais de l'avortement dans le monde ? La femme, qu'on fait ainsi plus facilement « passer », comme on disait autrefois.
Mais le féminisme officiel semble s'arrêter aux portes du progressisme. On peut ainsi lâcher des délinquants sexuels dans la nature sans contrôle et sans que ces protectrices du droit des femmes ne s'en émeuvent beaucoup. Vienne à passer par là une joggeuse et l'inégalité des sexes se rappelle violemment au bon souvenir de tous, comme le souligne
Gabrielle Cluzel avec l'exemple de Natacha Mougel, assassinée par un violeur récidiviste. Il y a plus « drôle » encore : Shéhérazade se fait tuer à coups de tournevis. le journal gratuit 20minutes parle d'une « drague qui a mal tourné »… ! Où sont les féministes pour manifester ?!
Quant au travail des femmes, les faits ne s'accordent pas vraiment avec les idées reçues et dévoilent une réalité odieuse : elles aimeraient donc passer du temps avec leurs enfants, ce qui n'exonère en rien les papas de leurs responsabilités, précise
Gabrielle Cluzel.
Enfin, il y a l'apothéose du féminisme : « Mais l'incohérence la plus flagrante, la plus incroyable, la plus ubuesque du féminisme, est son extrême complaisance vis-à-vis de l'islam. » Complaisance qu'elle n'a pas eue pour le catholicisme, nettement plus émancipateur que n'importe quelle autre religion du côté des femmes. Ce que d'authentiques misogynes ne contestent pas, on peut donc leur faire confiance !
Celles qui se font un devoir moral de pister le sexisme ordinaire, paraissent bien tolérantes à l'égard du plus extraordinaire sexisme qui consiste à voiler, battre, tuer parfois, les femmes. Qu'une petite fille porte un cartable rose, c'est un stéréotype atroce, mais le voile intégral c'est acceptable ! Ce seul exemple révèle la supercherie d'un féminisme devenu la milice d'un certain pouvoir.
« Les droits de la femme se résument en un seul : celui d'en être une, pleinement. » conclut
Gabrielle Cluzel. Merci donc à elle pour cette mise au point salutaire et vive les femmes !