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EAN : 9782070337309
240 pages
Gallimard (02/03/2006)
4/5   3 notes
Résumé :
Avant-propos de Jacques Réda

À l'occasion du Printemps des Poètes 2006, dont le thème est «le chant des villes», Poésie/Gallimard, qui fête au même moment ses 40 ans, propose une anthologie des Poètes et la ville, qui ont été précisément publiés dans cette collection. De Juvénal à Larbaud, Apollinaire, Cendrars, Frénaud, Tardieu, Bonnefoy ou Roubaud, ce sont les cités que l'on célèbre ou dénigre ici. Car les splendides villes entrevues par Rimbaud son... >Voir plus
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
La voix dans l'intervalle -


Peut-être devons-nous parler encore un peu plus bas,

De sorte que nos voix soient un abri pour le silence ;

Ne rien dire de plus que l'herbe en sa croissance

Et la ruche du sable sous le vent.

L'intervalle qui reste à nommer s'enténèbre, ainsi

Que le gué traversé par les rayons du soir, quand le

courant
Monte jusqu'à la face en extase des arbres. (Et déjà dans le bois l'obscur a tendu ses collets,
Les chemins égarés qui reviennent s'étranglent.)
Parler plus bas, sous la mélancolie et la colère,
Et même sans espoir d'être mieux entendus, si vraiment
Avec l'herbe et le vent nos voix peuvent donner asile
Au silence qui les consacre à son tour, imitant
Ce retrait du couchant comme un long baiser sur nos

lèvres.
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Fragment des étés -


Rien par l'immense été clos que le tremblement
Des rails sous les coquelicots, et la poule qui râle
Au fond de la chaleur noircissante ; rien que
Ce duvet immobile et le nuage en exode, en fureur
Très lente sous la couvaison des préfectures, quand
Le destin surveillait les faubourgs par l'oeil de la volaille
Augurale et figeait des trajectoires de céruse
Dans l'ocre à déchiffrer de la fiente par un enfant.
J'arrivais à la gare, je

Serrais frissonnant sous mon linge ce peu de glace
Et midi comme un poing d'aveugle sur les toits
Cherchait pour l'écraser ma tête transparente.
Mais loin sous les parois de l'œuf caniculaire
Je naissais de nouveau dans l'oubli, dans la pure fréquence
Que des ondes coupées des deux sources du temps.
Lambeaux d'une mémoire en détresse par tout l'espace,
Troublaient — et je voyais des morts, des femmes, des

jardins
Me traverser tandis que vers le chœur du bleu marine
Entre les murs épiscopaux de
Langres ou d'Autun



Je montais, et vers les jardins bouillant d'oiseaux et de

racines
Enfouis dans la lumière ainsi que des yeux — et déjà
Sous les cils formidables de la chaleur n'était-ce pas
Les vôtres qui s'ouvraient en moi comme l'eau sous les

cygnes ?
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Personnages dans la banlieue -


Vous n'en finissez pas d'ajouter encore des choses,

Des boîtes, des maisons, des mots.

Sans bruit l'encombrement s'accroît au centre de la vie,

Et vous êtes poussés vers la périphérie,

Vers les dépotoirs, les autoroutes, les orties ;

Vous n'existez plus qu'à l'état de débris ou de fumée.

Cependant vous marchez,

Donnant la main à vos enfants hallucinés

Sous le ciel vaste, et vous n'avancez pas ;

Vous piétinez sans fin devant le mur de l'étendue

Où les boîtes, les mots cassés, les maisons vous rejoignent,

Vous repoussent un peu plus loin dans cette lumière

Qui a de plus en plus de peine à vous rêver.

Avant de disparaître,

Vous vous retournez pour sourire à votre femme attardée,

Mais elle est prise aussi dans un remous de solitude,

Et ses traits flous sont ceux d'une vieille photographie.

Elle ne répond pas, lourde et navrante avec le poids du jour sur ses paupières,

Avec ce poids vivant qui bouge dans sa chair et qui

l'encombre,
Et le dernier billet du mois plié dans son corsage.
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Hauteurs de belleville -


Ayant suivi ce long retroussement d'averses,
Espérions-nous quelque chose comme un sommet
Au détour des rues qui montaient
En lentes spirales de vent, de paroles et de pluie ?
Déjà les pauvres maisons semblaient détachées de la vie ;
Elles flottaient contre le ciel, tenant encore à la colline
Par ces couloirs, ces impasses obliques, ces jardinets
Où nous allions la tête un peu courbée, sous les nuages
En troupeaux de gros animaux très doux qui descendaient
Mollement se rouler dans l'herbe au pied des palissades
Et chercher en soufflant la tiédeur de nos genoux.
Nos doigts, nos bouches s'approchaient sans réduire

l'espace
Entre nous déployé comme l'aire d'un vieux naufrage
Après l'inventaire du vent qui s'était radouci,
Touchait encore des volets, des mousses, des rouages
Et des copeaux de ciel au fond des ateliers rompus ;
Frôlait dans l'escalier où s'était embusquée la nuit
L'ourlet déchiré d'une robe, un cœur sans cicatrice.
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Terre des livres -

Longtemps après l'arrachement des dernières fusées,
Dans les coins abrités des ruines de nos maisons
Pour veiller les milliards de morts les livres resteront
Tout seuls sur la planète.
Mais les yeux des milliards de mots qui lisaient dans les

nôtres,
Cherchant à voir encore,
Feront-ils de leurs cils un souffle de forêt
Sur la terre à nouveau muette ?
Autant demander si la mer se souviendra du battement de

nos jambes ; le vent,
D'Ulysse entrant nu dans le cercle des jeunes filles. 0 belle au bois dormant,

La lumière aura fui comme s'abaisse une paupière.
Et le soleil étant son casque
Verra choir une larme entre ses pieds qui ne bougent

plus.
Nul n'entendra le bâton aveugle du poète
Toucher le rebord de la pierre au seuil déserté.
Lui qui dans l'imparfait déjà heurte et nous a précédés
Quand nous étions encore à jouer sous vos yeux,
Incrédules étoiles.
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Videos de Jacques Réda (14) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques Réda
Jacques Réda Quel avenir pour la cavalerie ?
Rencontre animée par Alexandre Prieux
La poésie serait-elle une guerre ? le vers, le corps d'élite de la langue ? En retraçant l'histoire de notre prosodie, Jacques Réda dévoile les processus de transformation du français, aussi inéluctables que ceux de la physique. Où les poètes sont les exécutants plus ou moins conscients d'un mouvement naturel. du Roman d'Alexandre à Armen Lubin, en passant par Delille, Hugo, Rimbaud, Claudel, Apollinaire, Cendrars et Dadelsen, Jacques Réda promène son oeil expert sur des oeuvres emblématiques, et parfois méconnues, de notre littérature. Inspirée et alerte, sa plume sait malaxer comme nulle autre la glaise des poèmes pour y dénicher les filons les plus précieux. À la fois leçon de lecture et d'écriture, et essai aux résonances métaphysiques, Quel avenir pour la cavalerie ? constitue la « Lettre à un jeune poète » de Jacques Réda, et le sommet de sa réflexion poétique.

À lire – Jacques Réda, Quel avenir pour la cavalerie ? – Une histoire naturelle du vers français, Buchet/Chastel, 2019.
Le jeudi 28 novembre 2019 à 19h
+ Lire la suite
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